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demnité représentative du pacage supprimé, malgré les reconnaissances émanées du débiteur.

ARRÊT.

LA COUR: Statuant sur le premier moyen : Attendu que, pour rejcter la preuve offerte par la commune, l'arrêt attaqué se fonde, d'une part, sur ce que celle-ci n'articulait aucun fait précis de nature à établir l'exercice du droit d'usage qu'elle réclamait, et, d'autre part, sur ce que les faits d'usage invoqués, accomplis en dehors des formalités prescrites par le Code forestier, ne constituaient que des faits délictueux, lesquels n'avaient jamais eu lieu publiquement, au su du propriétaire; Attendu que le premier de ces motifs est une pure appréciation des faits qui rentrait dans le domaine souverain du juge du fond, et que le second, d'ailleurs surabondant, est conforme aux principes de la matière ;

Sur le deuxième moyen dans ses deux branches : - Attendu qu'en admettant que la reconnaissance de droits d'usage par quelques-uns des copropriétaires d'une forêt indivise pût être opposée aux autres copropriétaires, il n'en saurait être ainsi lorsque la forêt a été partagée: Attendu qu'il est constaté en fait par l'arrêt attaqué que les reconnaissances dont se prévalait la commune émanaient seulement de Layet et Brunet de Lassalle et qu'elles limitaient les droits d'usage ainsi reconnus; d'où suit qu'en jugeant que ces reconnaissances ne pouvaient être opposées aux frères Paul et consorts pour les parties de la forêt qu'ils possèdent, ni grever les portions possédées par Layet et Brunet de Lassalle de droits d'usage plus étendus que ceux reconnus, l'arrêt attaqué n'a aucunemeut violé les articles 1222 et 2249, et a fait à la cause une juste application de l'article 1155 du Code Napoléon;

Sur le troisième moyen: Attendu qu'il est déclaré par l'arrêt attaqué que l'intention commune des parties dans la transaction de 1728 fut que tous les droits concédés sur le défens de la Chapelle ne s'exerceraient à l'avenir sur Pellen que dans le cas où le défens de la Chapelle et ses dépendances seraient insuffisants pour la satisfaction des besoins des habitants, et que cette interprétation de l'acte est confirmée par l'exécution qu'il a reçue; - Attendu que ces appréciations sont souveraines et ne peuvent être contrôlées par la Cour de cassation;

Sur le quatrième moyen: Attendu que, pour décider que le droit à l'indemnité réclamée par la commune, en vertu de l'article 78 du Code forestier, était prescrit nonobstant les reconnaissances de Layet et de Brunet de Lassalle, l'arrêt se fonde sur ces reconnaissances émanées de Layet et de Lassalle, lesquelles ne font aucune mention soit du droit de pâturage des moutous et des chèvres, aboli par le Code forestier, soit de l'indemnité qui aurait pu en tenir lieu;-Attendu que ce motif, fondé sur l'interprétation souveraine des actes privés, justifie la décision et ne viole aucune loi;-REJETTE. Du 11 mai 1870. C. cass. (ch. req.).· MM. Bonjean, prés.; d'Oms, rapp.; Connelly, av. gén.; c. conf., Bosviel, av.

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No 44.COUR DE CASSATION (Ch. crim.).-9 février 1871.

Pêche, temps prohibé, excuse, durée, publications, omission.

Les publications prescrites par l'article 3 du décret du 25 janvier 1868, pour rappeler, huit jours à l'avance, dans les communes, les dates du commencement et de la fin de chaque période d'interdiction de la pêche, n'ont pour objet qu'une mesure d'ordre et de précaution, et ont d'ail

leurs été ordonnées en dehors de la mission réglementaire confiée au gouvernement par la loi du 31 mai 1865 sur la pèche (1);

Dès lors, l'omission de ces publications serait à tort considérée comme relevant les habitants de l'obligation de respecter l'interdiction de pèche pendant les périodes fixées en exécution de cette loi par le décret de 1868 (2).

Première espèce. (Veuve Haure et Degeilh.) — ARRÊT.

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LA COUR: Vu les articles 4, 5 et 7 de la loi du 31 mai 1865; également l'article 3 du décret du 25 janvier 1868;

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Attendu que l'article 4 dispose qu'à partir du 1er janvier 1866, des décrets rendus sur la proposition des ministres de la marine et de l'agriculture, du commerce et des travaux publics, règleront d'une manière uniforme pour la pêche fluviale et la pêche maritime, dans les fleuves, rivières, canaux affluant à la mer, les époques pendant lesquelles la pêche des diverses espèces de poissons sera interdite; Que l'article 5 interdit dans chaque département de mettre en vente, de vendre, d'acheter, de transporter, de colporter, d'exporter et d'importer les diverses espèces de poissons pendant le temps où la pêche en est prohibée; Et qu'aux termes de l'article 7, infraction aux dispositions de l'article 5 est punie des peines portées par l'article 27 de la loi du 15 avril 1829 ; — Attendu qu'en exécution de l'article 4, le décret réglementaire du 25 janvier 1868 décide par son article 4 que, du 24 octobre au 31 janvier, est interdite la pêche du saumon, de la truite et de l'ombre-chevalier;

Attendu que de l'arrêt attaqué il résulte, en fait, que le 27 septembre 1870, lorsque la pêche du saumon était légalement interdite, la veuve Haure, marchaude de poisson, a vendu à Degeilh, maître d'hôtel, sur la place du marché de Pau, une moitié de saumon, et que cependant l'arrêt attaqué a relaxé les prévenus par l'unique motif que, pendant la semaine précédant l'époque d'interdiction de la pèche, il n'avait point été procédé aux publications prescrites par le décret précité ; Mais attendu que, pour remplir le vœu du législateur, le décret n'a eu qu'à déterminer les époques pendant lesquelles la pêche serait interdite; que sa mission réglementaire n'allait point au delà; et que les publications exigées par son article 3 n'ont pour objet qu'une mesure d'ordre et de précaution, destinée simplement, comme le dit le décret lui-même, à rappeler au public le commencement et la fin de chaque période d'interdiction,

Attendu qu'en soumettant à une réglementation générale et uniforme la pêche fluviale et maritime dans les fleuves, rivières, canaux affluant à la iner, la loi de 1865 a voulu supprimer les inconvénients auxquels avaient donné lieu, sous l'ancienne législation, soit la différence de régime dans ces sortes de cours d'eau entre la pêche maritime et la pêche fluviale, soit la variété des époques pendant lesquelles la pêche était interdite par les préfets dans les divers départements; que si le système de la Cour de Pau était admis, les inconvénients auxquels la loi actuelle a eu l'intention d'obvier se reproduiraient évidemment et qu'ils prendraient même un caractère encore plus marqué, puisque dorénavant la police serait exposée à changer cha-. que année, non plus seulement, comme autrefois, de département à déparment, mais, en outre, de commune à commune, selon que l'autorité admi

(1 et 2) Cette décision est conforme à l'opinion exprimée par M. Em. Martin, Code nouveau de la pêche fluviale, sur l'article 3 du décret du 25 janvier 1868, no 744. Une circulaire du ministre des travaux publics, du 1er février 1868 (rappelee eod. loc., n°743), caracterise, comme le présent arrêt, les publications dont l'arrêt attaque avait exagere l'importance: « Cette prescription, dit le ministre, a paru utile pour prévenir, autant que possible, les contraventious. »

nistrative ferait ou ne ferait pas les publications prescrites par le décret de 1868;-D'où la conséquence que (par l'arrêt attaqué, du 19 janvier 1871) la Cour de Pau, en relaxant les prévenus, a faussement interprété ce décret et formellement violé, par suite, les articles 4, 5 et 7 de la loi du 31 mai 1865; CASSE.

Du 9 février 1871.-C. cass. (ch. crim., section siégeant à Pau).-MM. de Carniéres, f. f. prés.; Guillemard, rapp.; Bédarrides, av. gén., c. conf.

Deuxième espéce. Buesgas.)

Du même jour, arrêt semblable, cassant un second arrêt de la même Cour.

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Chasse, louveterie, arrêté préfectoral, délai, terrain d'autrui.

Lorsqu'un arrêté préfectoral ordonnant une battue n'a point déterminé le délar dans lequel elle devait être faite, l'administration est présumée s'être reposée sur l'officier de louveterie du soin d'apprécier l'opportunité de la battue suivant les besoins de l'agriculture, les demandes des intéressés et les convenances des habitants.

L'officier de louveterie qui poursuivrait l'animal blessé au delà des limites fixées par l'arrêté préfectoral ordonnant la battue ne commet pas le delit de chasse sur le terrain d'autrui, alors qu'il n'est pas sorti de la circonscription territoriale qui lui est assignée par son acte de nomination. Ici n'est point applicable la legislation sur la police de la chasse, et notamment les principes empruntés à l'article 14 de la loi du 3 mai 1844, lesquels ne sauraient régir les droits et les devoirs des offi ciers de louveterie, qui sont réglés par des dispositions spéciales (1): (Arr. 19 pluv. an V.)

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LA COUR: Attendu que, par son arrêté du 6 août 1869, le préfet de la Nièvre a prescrit que cinq batines auraient licu pour la destruction des sangliers dans les communes de Montembert et de la Nocle; Attendu qu'en exécution de cet arrêté, une première battue a été effectuée sans résultat, et que le lieutenant de louveterie Millot en a organisé une seconde le 12 decembre dernier; - Que, dans cette nouvelle battue, deux sangliers ont été mis à mort; qu'un troisième, déjà blessé, s'est réfugié dans un bois situé sur le territoire de la commune de Fours et appartenant au marquis de Pommereu ; que fe lieutenant de louveterie et son piqueur ont poursuivi f'animal blessé jusque dans l'intérieur de ce bois; qu'il s'agit d'apprécier ce fait ; Sur la prétendue péremption de l'arrêté préfectoral: Attendu que si l'arrêté du 6 août ne mentionne pas le délai dans lequel devaient avoir lieu les battues, il ne s'ensuit pas qu'il fût tombé en péremption le 12 décembre; Attendu qu'aucune disposition législative ou réglementaire relative à la lou

(1) La Cour de Rouen s'est prononcée en ce sens, par arrêt du 11 août 1863, rapporté au Journal de droit criminel, année 1863, no 7698. Il a été d'ailleurs formellement reconnu, dans les motifs de la loi du 3 mai 1844, qu'il n'était point dérogé aux lois et règlements sur la louveterie: M. Berriat Saint-Prix, Législation de la chasse et de la louveterie, p. 254 et 286. - Voir en ce qui concerne le droit de suite, sur le terrain d'autrui, de l'animal blessé, la note de M. Carette, jointe a Cass., 38 août 1868 (S., 1869, I, 189. – P., 1869, 444), et les autorités qui y sont 'citées.

veterie n'impose à l'administration l'obligation d'impartir un délai pour l'exécution des battues à peine d'illégalité desdites battues;-Que, sans prétendre interpréter l'arrêté, il y a lieu d'admettre qu'à défaut de fixation d'un délai, l'administration départementale se repose sur l'officier de louveterie du soin d'apprécier l'opportunité des battues suivant les besoins de l'agriculture, les demandes des intéressés et les convenances des habitants; Que l'arrêté du 6 août, n'ayant pas été rapporté, n'avait par conséquent pas cessé d'exister au 12 décembre;

En ce qui touche la poursuite, par l'officier de louveterie et son domestique, d'un sanglier dans le bois du marquis de Pommereu, situé sur le territoire de Fours; :- Attendu que les termes de l'arrêté ne sauraient, d'après la nature des choses, être entendus dans un sens restrictif que relativement aux lieux où devaient s'organiser les chasses; Attendu que l'institution de la louveterie se propose la destruction des animaux nuisibles; qu'elle deviendrait sans objet si un animal levé ne pouvait être poursuivi sur un territoire voisin, quoique compris dans les limites de la circonscription du louvelier; - Qu'il est plus rationnel d'admettre avec le premier juge qu'un animal de cette espèce peut, surtout quand il est blessé, être poursuivi jusqu'à ce qu'il soit mis à mort, sur un terrain situé en dehors du lieu où il a été lancé, même en dehors d'une commune dénommée à l'arrêté préfectoral, quand, pour accomplir sa mission, l'officier de louveterie ne sort pas de la circonscription territoriale qui lui est assignée par son acte de nomination ; — Attendu que la législation sur la police de la chasse n'est pas applicable à l'espèce, et que les principes empruntés notamment à l'article 11 de la loi du 3 mai 1844 ne sauraient régir les droits et les devoirs des officiers de louveterie, qui sont réglés par des dispositions spéciales, lesquelles ont été respectées ; Attendu, en effet, que l'arrêlé du Directoire exécutif du 19 pluviôse an V a pourvu au moyen de prévenir les chasses voluptuaires exécutées sous les apparences d'un intérêt public; qu'à cette fin, il a exigé le concours de l'administration forestière pour l'organisation et l'exécution des battues ordonnées par l'administration; Attendu que toutes les formalités légales d'usage ont été accomplies au cas particulier, et que dès lors les prévenus ne sauraient être considérés comme coupables d'un délit de chasse sur le terrain d'autrui; CONFIRME, etc.

Du 24 mars 1870. C. Bourges (ch. corr.)

No 46. COUR DE CHAMBÉRY (Ch. corr.).

5 janvier 1871.

Pêche, délit, prescription, point de départ, cumul des peines.

Le délit de pêche se prescrit par un mois du jour de la clôture du procès-verbal, quand le prévenu est désigné au procès-verbal. Le jour de la clôture du procès-verbal ne compte pas dans le délai.

La peine pour un délit de pêche se cumule avec celle pour délit de droit

commun.

(Charvin.) — ARRÊT.

LA COUR - Attendu que l'article 62 de la loi du 15 avril 1829, sur la pêche fluviale dispose que « lorsque les prévenus ont été désignés dans les procès-verbaux, les actions en réparation des délits de pêche se prescrivent par un mois à compter du jour où les délits ont été constatés », et que, d'après la jurisprudence en cette matière, comme en matière forestière, le jour de la constatation et celui de la clôture des procès-verbaux ne sont pas comptés;

Attendu que le garde-pêche n'a dressé que le 6 octobre, le procès-verbal dans lequel il a constaté à cette date contre les trois prévenus les faits de pêche, qui avaient été commis le 3, en sa présence;

Attendu que le mandat de comparution du 2 novembre, premier acte de poursuite à la connaissance de ces prévenus, leur a été notifié le 3, par conséquent avant l'expiration du délai d'un mois à partir du 6 octobre, jour de la constatation du délit ; - Qu'ainsi le moyen tiré de la prescription mensuelle de l'action publique doit être écarté ;

Attendu que la preuve de la culpabilité des trois prévenus résulte des procès-verbaux du garde, corroborés par son témoignage oral et formel, et par les dépositions des témoins Louis Laravone et Marie Carlion; - Qu'en effet Chantagnat, l'un des prévenus, a fait un aveu indirect en répondant au maire qui le questionnait et lui disait que Devigne avait insulté le garde: «Oh! si Devigne a insulté Druet, c'est que celui-ci en aura dit autant; » Et que le même Chantagnat a avoué d'une manière encore plus explicite en deinandant à Carlion: Comment sais-tu que j'ai été à la pêche? Oui, j'y ai été ; je n'ai vu personne, et je ne sais pas si je suis pris; »Attendu que les prétendus alibi, invoqués par les prévenus Chantagnat et Charvin, à l'effet d'établir qu'ils avaient passé la nuit du 2 au 3 octobre à boire dans la commune de Vallières, dont ils ne seraient pas sortis, et par le prévenu Devigne, à l'effet d'établir qu'il aurait couché cette nuit-là à Marlioz, où il faisait de la contrebande, ne sont ni assez précis ni assez clairs pour détruire la foi due au procès-verbal du garde et à l'assertion des témoins; que la preuve de ces alibi, qui incombait à la défense, n'est pas suffisante, et que d'ailleurs les moyens échappatoires et suspects des prévenus, délinquants d'habitude ou repris de justice pour délits de pêche, ne sauraient être accueillis qu'avec une extrême réserve; qu'ils ne sont pas de nature à ébranler la conviction du juge et à renverser les charges positives qui résultent des débats; Attendu que l'appel du ministère public remet tout en question à l'égard de Devigne; Attendu qu'il est constant par les débats, qu'au moment de la surprise des trois prévenus en flagrant délit de pêche, Devigne a traité le garde Druet de « charogne, cochon, banqueroutier », criant en outre à Charvin : « Donne-lui seulement sur la tête un coup de trident; — Attendu qu'il faut reconnaître que l'article 365 du Code d'instruction criminelle lui a été mal à propos appliqué par les premiers juges, et réformer en conséquence sur ce point seulement; Attendu que le principe de non-cumul des peines, édicté par cet article n'est pas applicable aux infractions matérielles prévues par des lois spéciales, telles que la loi sur la pêche du 15 avril 1829, infractions réglées soit avant, soit après la publication du Code pénal, pour une législation exceptionnelle dont l'esprit et le but invariables excluent virtuellement le droit cominun; Attendu en effet que cette loi de 1829, aussi bien que le Code forestier, a voulu proportionner l'amende de chaque infraction à la gravité et a l'importance du dommage causé par chacune d'elles; - De sorte qu'il faut, en cas de concours de deux délits de pêche, ou, comine dans l'espèce, d'un délit de pêche avec un délit commun d'outrages, appliquer deux peines distinctes;

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Par ces motifs, reçoit les appels, réguliers en la forme, des prévenus Charvin et Chantagnat, et de M. le procureur général contre Devigne; - Dit que l'action publique n'est pas prescrite; maintient la culpabilité prononcée contre les trois prévenus par le jugement déféré du Tribunal d'Annecy du 6 décembre 1870; Ordonne que ce jugement sera exécuté à cet égard ainsi que pour le règlement des dépens et la contrainte par corps; Le confirme également en ce qui touche les pénalités et l'application de la loi au regard de Charvin et Chantagnat; Réformant toutefois quant à la peine et à la loi appliquée à Pierre Devigne.

Du 5 janvier 1871. Cour de Chambéry.

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M. Klecker, prés.

DÉCEMBRE 1871.

T. V.-7

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