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que sous un seul caractère, comme un acte de la nature la plus hostile. Le délit de transport frauduleux de dépêches au service de l'ennemi étant donc plus grand que celui de transport de contrebande en quelques circonstances, il devient absolument nécessaire autant que juste de recourir à quelque autre châtiment que celui infligé aux cas de contrebande. La confiscation de l'article nuisible, qui constitue la peine de la contrebande quand le vaisseau et la cargaison n'appartiennent pas à la même personne, serait ridicule appliquée aux dépêches. Il n'y aurait aucun fret dépendant de leur transport, et alors cette peine ne pourrait par la nature des choses être appliquée. Il faut donc confisquer le bâtiment qui les porte 1. >>

Mais porter les dépêches d'un ambassadeur ou autre ministre public de l'ennemi résidant dans un pays neutre est une exception au raisonnement sur lequel est fondée la règle générale ci-dessus. « Ce sont les dépêches de personnes qui sont, d'une manière particulière, l'objet de la protection spéciale du droit des gens, et résidant dans le pays neutre à l'effet de conserver les relations d'amitié entre cet État et leur gouvernement. Sur ce point s'élève une distinction très-importante à l'égard du droit de fournir le transport. Le pays neutre a le droit de conserver ses relations avec l'ennemi, et vous n'êtes pas libre de conclure que toute communication entre eux participe, en quelque sorte, de la nature d'hostilité contre vous. Les limites assignées aux opérations de la guerre contre les ambassadeurs, par les publicistes, sont que le belligérant peut exercer son droit de guerre contre eux partout où le caractère d'hostilité existe. Il peut arrêter l'ambassadeur de son ennemi à son passage. Mais une fois arrivé dans le les fonctions de sa charge,

pays neutre, et lorsqu'il a pris

et a été admis dans son caractère représentatif, le ministre

1 ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. VI. p. 440. The Atalanta,

devient une sorte d'homme intermédiaire, ayant droit à des priviléges particuliers, comme mis à part pour la conservation des relations d'amitié et de paix, pour maintenir ce à quoi toutes les nations sont en quelque sorte intéressées. Si l'on arguait qu'il conserve son caractère national sans mélange, et que même sa résidence est considérée comme une résidence dans son propre pays, on répond que c'est une fiction de la loi inventée pour sa plus grande protection, et, comme telle, cette fiction ne doit pas être étendue au delà du principe dont elle émane. On l'a établie comme un privilége, et l'on ne peut s'en servir au désavantage du ministre qui en jouit. Pourrait-on dire que, d'après ce principe, ce dernier est assujetti à tous les droits de la guerre dans le pays neutre? Assurément, non. Il est là pour entretenir les relations de paix et d'amitié, dans les intérêts de son pays d'abord, mais en même temps pour le progrès et la garantie des intérêts qu'a aussi le pays neutre dans la continuation de ces relations. Il faut considérer aussi dans cette question ce qui est dû à la convenance de l'État neutre; car ses intérêts peuvent exiger que les rapports de correspondance avec le pays de l'ennemi ne soient pas tout à fait interdits. On pourrait croire que cela va presque à déclarer que l'ambassadeur de l'ennemi ne résidera pas dans le territoire neutre, si on le déclare privé des seuls moyens de communiquer avec son pays. Car dans quel but résiderait-il dans ce territoire, sans l'opportunité d'une semblable communication? C'est aller trop loin que de dire que toutes les affaires de deux État seront conduites par le ministre de l'État neutre résidant dans le pays de l'ennemi. La pratique des nations a accordé aux États neutres le privilége de recevoir des ministres des puissances belligérantes, et celui d'une négociation immédiate avec elles 1.>»

1 Sir W. Scott, ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. VI, p. 461. La Caroline.

Peine pour

de la con

En général, quand le navire et la cargaison n'appar- $ 26. tiennent pas à la même personne, les articles de contre- le transport bande seuls sont confisqués, et l'on refuse à celui qui a trebande. fait le transport le fret auquel il a droit pour les articles non coupables qui sont condamnés comme propriété de l'ennemi. Mais quand le navire et les articles non coupables de la cargaison appartiennent à la même personne, le transport de contrebande, avec des circonstances frauduleuses ou de faux papiers et une fausse destination, entraînent la confiscation du navire et celle de la cargaison. On a soutenu également que le même effet résulte pour le transport d'articles de contrebande dans un vaisseau dont le propriétaire est forcé, par obligation expresse des traités subsistant entre son pays et le pays de celui qui a fait la capture, de s'abstenir de conduire de pareils articles à l'ennemi. En pareil cas on dit que le vaisseau se dépouille de sa neutralité, et est exposé à être traité à la fois comme un vaisseau ennemi et comme un violateur des traités solennels du pays auquel il appartient 1.

La règle générale relative aux articles de contrebande est, comme l'expose sir W. Scott, que les articles doivent être pris in delicto, pendant l'exécution réelle du voyage au port ennemi. «D'après le sens actuel du droit des gens, on ne peut pas, en général, prendre les produits au retour du voyage. Du moment où le vaisseau quitte le port pour une destination hostile, le délit est complet, et il n'est pas nécessaire d'attendre que les biens s'efforcent véritablement d'entrer dans le port ennemi; mais en outre, si les biens ne sont pas pris in delicto et pendant l'accomplissement réel du voyage, on n'y attache généralement

1 ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. 1, p. 91. The Ringende Jacob. Page 444. The Sarah Christina. Page 288. The Mercurius. Vol. III, p. 217. The Franklin. Vol. IV, p. 69. The Edward. Vol. VI, p. 125. The Ranger. Vol. III, p. 295. The Neutralitet.

Pour savoir jusqu'à quel point le propriétaire du vaisseau est responsable des actes du maître en cas de contrebande. voyez WHEATON'S Reports, vol II, appendix, note 1, p. 37 et 38.

pas de peine aujourd'hui. 1» Mais ce savant magistrat applique une règle différente à d'autres cas de contrebande transportée d'Europe aux Indes orientales, avec de faux papiers et une fausse destination, dans le but de cacher l'objet véritable de l'expédition. La cargaison de retour, produit de la cargaison d'exportation, prise au retour du voyage, fut déclarée susceptible de condamnation 2. Quoique la politique générale du gouvernement américain, dans ses relations diplomatiques, ait cherché à limiter le catalogue des objets de contrebande, en les bornant strictement aux munitions de guerre, et en excluant tous les articles d'usage général, il se présenta, pendant la dernière guerre entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, un cas remarquable dans lequel la cour suprême de cette dernière puissance paraît avoir été disposée à adopter tous les principes de sir W. Scott relatifs aux provisions de bouche devenant contrebande en de certaines circonstances. Mais comme ce n'était pas le cas d'une cargaison de propriété neutre supposée susceptible de capture et de confiscation comme contrebande de guerre, mais le cas d'une cargaison de propriété ennemie allant ravitailler les forces navales et militaires de l'ennemi, et clairement susceptible de condamnation, la question était de savoir si le maître neutre avait droit à son fret comme dans les autres cas de transport d'articles innocents, propriété de l'ennemi; et il n'était pas essentiel, pour décider ce cas, de déterminer en quelles circonstances des articles ancipitis usus peuvent devenir contrebande. Sur cette question

1 ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. III, p, 168. The Ionina, 2 Ibid., vol. II, p. 343. La Rosalie et Betty. Vol. III, p. 122. The Nancy. Il est permis de douter de la justesse de ces dernières décisions, car pour soutenir la peine, il faut qu'en principe il y ait délit au moment de la saisie. Soumettre la propriété à confiscation, tandis que l'offense ne continue plus, serait l'étendre indéfiniment, nonseulement au yoyage de retour, mais à toutes les cargaisons futures dų vaisseau, qui ne serait jamais ainsi purifié de la contagion communiquée par les articles de contrebande.

devant la cour, il semble qu'il n'y aurait pas eu de différence d'opinion parmi les juges américains dans le cas d'une guerre ordinaire; tous étant d'accord sur le principe, qu'un neutre conduisant des approvisionnements aux forces navales ou militaires de l'ennemi s'expose, d'après l'interprétation la plus indulgente du droit international, à la perte du fret. Mais le cas était celui d'un vaisseau suédois capturé par un croiseur américain, pendant l'acte d'un transport d'une cargaison de propriété anglaise, consistant en orge et avoine, pour l'approvisionnement des armées alliées dans la péninsule espagnole; les États-Unis étant en guerre avec la Grande-Bretagne, mais en paix avec la Suède, et toutes les autres puissances alliées contre la France, Dans ces circonstances, la majorité des juges fut d'avis que le voyage était illégal, et que le sujet neutre qui avait fait le transport n'avait pas droit à son fret sur la cargaison condamnée comme propriété ennemie.

Il fut exposé, dans le jugement de la cour, que les cours de prises anglaises avaient jugé solennellement qu'être engagé dans le service de transport de l'ennemi, conduire des militaires à son service, ou transmettre des dépêches, sont des actes d'hostilités qui assujettissent la propriété à confiscation. Dans les cas ci-dessus on ne pensait pas que le fait du voyage pour un port neutre changeât le caractèré de la transaction. On soutenait que le principe de ces décisions était qu'on devait regarder l'inculpé comme s'étant mis au service de l'État ennemi, comme l'assistant en détournant de lui les rigueurs de la guerre, et en favorisant ses projets offensifs. Or on ne pouvait distinguer, en principe, ces cas de celui soumis à la cour. Ici c'était une cargaison de provisions exportée du pays de l'ennemi dans le but avoué d'approvisionner l'armée ennemie. Sans cette destination, on n'aurait pas laissé du tout exporter la cargaison. C'était en vain qu'on soutenait que l'effet

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