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Dans la prison cellulaire d'Amsterdam ouverte le 1er octobre 1850, jusqu'au 1er mars 1854, on n'a eu à regretter que 3 décès sur 1,878 prisonniers qui ont été écroués pendant cet intervalle de temps.

Dans le grand-duché de Bade, la mortalité de la prison cellulaire de Bruchsal, occupée depuis le 10 octobre 1848, n'a offert qu'une moyenne annuelle de 1,88 sur 100 détenus.

A notre porte, en Belgique, où 1,129 cellules sont déjà construites dans les diverses prisons, les résultats sont également satisfaisants.

Enfin, le pénitencier de Philadelphie, dont le régime amélioré a servi de modèle aux diverses prisons cellulaires établies en Europe, n'a compté, en 1852, qu'un décès sur 142 détenus, et d'après le rapport du médecin qui lui donne ses soins, il y avait lieu de croire que la mortalité ne serait pas plus considérable en 1853.

Ainsi, l'expérience faite dans tous les pays où le régime de l'isolement a été adopté démontre que sous le rapport sanitaire, comme sous tous les autres, ce régime est bien supérieur à celui des prisons où les détenus vivent en commun.

S'agit-il d'une atténuation dans les facultés de l'esprit? Ici encore, la comparaison est toute à l'avantage du système cellulaire.

Comme nous l'avons également dit plus haut (1),

Dans la prison d'Amsterdam.

Prison

de Bade.

Prisons de Belgique.

Pénitencier de Philadelphie.

Aliénations.

mentales.

(1) 1 vol., pag. 340 et 341.

il fut constaté, en 1847, que les aliénations mentales étaient, dans nos maisons centrales, de plus de 13 sur 1,000 pour les hommes, et de 36 sur 1,000 pour les femmes. Il paraît que depuis lors ce nombre serait beaucoup diminué, puisque, d'après les documents qui nous ont été communiqués par M. le ministre de l'intérieur, il y aurait eu dans l'année 1851, sur une population de 18,800 détenus, 63 cas d'aliénation seulement, et que, d'après le dernier rapport du même ministre pour l'année 1852, le nombre de ces cas, sur une population de 19,240 condamnés des deux sexes, aurait été de 50, dont 16 se seraient manifestés par des symptômes antérieurs à la détention. Ce serait un peu plus de 2 et demi pour 1,000, proportion qui se rapprocherait beaucoup de celle qui est constatée dans la population libre, où, eu égard à cette population, le nombre des aliénés n'est que de 2 par 1,000.

Dans aucune des maisons cellulaires départementales que nous avons visitées, on ne nous a signalé des cas d'altération sensible dans les facultés intellectuelles.

En 1847, notre honorable confrère M. le docteur Lelut, chargé en chef de la section des aliénés à l'hospice de la Salpétrière, reçut mission de visiter les prisons cellulaires alors en exercice; il porta dans ses visites l'esprit investigateur que nul dans sa profession ne possède à un plus haut degré que lui, et son rapport fut satisfaisant de tous points.

A la maison d'éducation correctionnelle de la Roquette, à Paris, les cas d'aliénation sont infiniment

rares, si même ils se sont jamais réellement présentés.

Il en est de même dans les pays étrangers qui ont adopté le système cellulaire.

A la prison de Philadelphie, on avait observé, il y a quelque temps, les symptômes de cette affection chez plusieurs détenus; mais, à la suite d'une enquête minutieuse faite à ce sujet, le comité des inspecteurs a constaté qu'en ce qui concernait le plus grand nombre, elle avait une origine antérieure à la condamnation.

On a comparé chez nos voisins le chiffre des aliénés de la prison cellulaire de Pentonville avec celui des autres prisons d'Angleterre et du pays de Galles, pendant la période de 1843 à 1847. Dans la première de ces prisons, il a été de 1,65 sur 1,000, tandis qu'il a été dans les autres de 6,3 sur 1,000. Tous les rapports des commissaires de l'inspection, publiés depuis lors, ont donné des résultats semblables.

-

Enfin en Hollande, dans le grand-duché de Bade, en Belgique, la même proportion s'est fait remarquer.

S'agit-il de suicides?

Il faut considérer que leur nombre dans la population libre est déjà considérable; il est même avéré que ce nombre se maintient presque toujours au même chiffre, espèce de tribut que la faiblesse de l'esprit paie annuellement à la mort. En 1850, il a été de 3,596; en 1851, de 3,598; en 1852, de 3,674. Les femmes entrent dans ces nombres pour un peu plus du quart.

Comparaison faite en Angleterre

entre

la prison de Pentonville et les autres prisons.

Autres pays.

Suicides.

Suicides dans la prison Mazas.

Il ne serait donc pas surprenant qu'au sein de nos prisons, quelques cas de ce genre figurassent dans les états de la mortalité; mais ils se produisent au même degré dans les prisons soumises aux divers régimes, et c'est presque toujours avant la condamnation.

Les adversaires du régime de l'isolement tirent un grand argument de la fréquence des suicides dans la prison Mazas, à Paris, où, du 19 mars 1850 au 1er juin 1852, on en aurait compté 12.

Il faut d'abord reconnaître que cette prison, qui a été construite pour 1,200 détenus, se trouve, par l'exagération même de ce nombre, dans de trèsmauvaises conditions; la surveillance des détenus y est nécessairement insuffisante, et on ne saurait espérer que, livrés à eux-mêmes, privés de visites souvent renouvelées et des consolations que leur situation comporte, ils ne soient pas plus facilement accessibles à l'abattement, et par suite au désespoir. Le régime cellulaire n'est régénérateur qu'autant qu'il est fortifié par tous les moyens dont le concours est indispensable pour lui faire produire tous ses effets.

Et toutefois, nous voyons dans les rapports d'une commission nommée pour examiner les conditions physiques et morales de la prison Mazas, que ce nombre de 12 suicides en deux ans et deux mois sur une population flottante de 12,542 détenus, ou 1 suicide sur 1,050 détenus, n'a rien d'exceptionnellement alarmant, et qu'il se rapproche beaucoup du même nombre constaté, soit dans la ville, soit dans les autres prisons de Paris.

Dans la ville, en effet, en défalquant de la population totale les enfants au-dessous de 10 ans, que n'atteignent pas encore la lassitude et le dégoût de la vie; en défalquant aussi les femmes, puisque la prison Mazas ne renferme que des hommes, on trouve que sur cette population, ainsi réduite, la proportion des suicides est de 1 sur 1,291 habitants.

Dans les prisons de Paris, et notamment dans celle du dépôt des condamnés, qui passe pour la mieux construite des prisons de la Seine, et qui, sous le rapport de la salubrité, ne le cède à aucune autre, il y a eu en six ans, de 1838 à 1843, sur une population de 7,696 détenus, 5 suicides, c'est-à-dire 1 sur 1,539; mais dans la première de ces années, en 1838, y avait 1 suicide sur 775 détenus, et en 1848, il y en avait eu également 1 sur 770.

il

Enfin, dans la prison de l'ancienne Force, il y avait eu en 1843, avant qu'elle fût remplacée par la prison cellulaire actuelle, 1 suicide sur 1,210 détenus, ce qui ne s'éloigne pas de beaucoup du chiffre constaté à Mazas.

Ainsi la situation de cette dernière prison, nonobstant les imperfections qui ont été signalées, n'est pas, sous le rapport du nombre des suicides, trèsdifférente de celle des prisons qui sont sous le régime

en commun.

Mais ce qu'il y a de concluant, et ce qu'affirme notre honorable confrère M. Lelut, auteur du dernier rapport, c'est que dans trois voyages successifs qu'il a fait, de 1844 à 1848, pour visiter les prisons cellulaires, un seul cas de suicide lui fut signalé; ce

Suicides dans la capitale.

Suicides dans le dépôt des condamnés.

Suicides

dans l'ancienne

Force.

Suicides dans les prisons cellulaires.

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