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Tandis que la colonne que l'ennemi avait si imprudem ment jelée sur la droite, cherchait à gagner la Narew pour arriver à Tykoczyn, point de rendez-vous, Tykoczyn était occupé par le maréchal Davoust. qui y prit 200 voitures de bagages et une grande quantité de traînards qu'on ramassa de tous côtés.

Toutes les colonnes Russes sont coupées, errantes à l'aventure dans un désordre difficile à imaginer. Le général russe a fait la faute de cantonner son armée, ayant sur ses flancs l'armée française, séparée il est vrai par la Narew, mais ayant un pont sur cette rivière. Si la saison élait plus belle, on pourrait prédire que l'armée russe ne se retirerait pas et serait perdue sans bataille; mais dans une saison où il fait nuit à quatre heures et où il ne fait jour qu'à huit, l'ennemi qu'on poursuit, a toutes les chances pour se sauver, sur-tout dans un pays difficile et coupé de bois. Dailleurs les chemins sont couverts de quatre pieds de boue et le dégel continue. L'artillerie ne peut faire plus de deux lieues dans un jour. Il est donc à prévoir que l'ennemi se retirera de la position fâcheuse où il se trouve: mais il perdra toute son artillerie, toutes ses voitures, tous ses bagages.

Voici quelle était le 25 au soir la position de l'armée française.

La gauche, composée des corps du maréchal prince de Ponte-Corvo et des maréchaux Ney et Bessières, marchant de Biézun sur la route de Grodno (1).

Le maréchal Soult arrivant à Ciechanow.
Le maréchal Augereau marchant sur Golymin.
Le maréchal Davoust entre Golymin et Pultusk.
Le maréchal Lannes à Pultusk.

(1) Grodno est une ville de la Pologne russe, assez grande et irrégulièrement bâtie, près le Viemen, la plus grande de la Lithuanie après Wilna, et aujourd'hui le chef-lieu du gouvernement russe de son nom, à 36 lieues de Wilna, 55 de Warsovie, 170 de Pétersbourg. Il y a une citadelle, un palais et un collège. Les diètes s'y tenaient tous les six ans; et elle fut la résidence du dernier roi de Pologne, à qui Catherine II donna ordre de s'y rendre en 1794.

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Dans ces deux jours nous avons fait quinze à seize cents prisonniers, pris vingt-cinq à trente pièces de canon, trois drapeaux et un étendard.

Le temps est extraordinaire ici, il fait plus chaud qu'au mois d'octobre à Paris; mais il pleut, et dans un pays où il n'y a pas de chaussées, on est constamment dans la boue.

QUARANTE-SIXIÈME BULLETIN DE LA GRANDE-ARMÉE. Golymin, le 28 décembre 1806.

Le maréchal Ney, chargé de manoeuvrer pour détacher le lieutenant-général prussien Lestocq de l'Wrka, déborder et menacer ses communications, et pour le couper des Russes, a dirigé ces mouvemens avec son habileté et son intrépidité ordinaires. Le 23, la division Marchand se rendit à Gurzno. Le 24, l'ennemi a été poursuivi jusqu'à Kunsbrock. Le 25, l'arrière-garde de l'ennemi a été entamée. Le 26, l'ennemi s'etant concentré à Soldau et Mlawa, le maréchal Ney résolut de marcher à lui et de l'attaquer. Les Prussiens occupaient Soldau avec 6000 hommes d'infanterie et un millier d'hommes de cavalerie; ils comptaient, protégés par les marais et les obstacles qui environnent cette ville, être à l'abri de toute attaque. Tous ces obstacles ont été surmontés par les 69° et 76°. L'ennemi s'est défendu dans toutes les rues, et a été repoussé partout à coups de bayonnettes. Le général Lestocq voyant le petit nombre de troupes qui l'avaient attaqué, voulut reprendre la ville. Il fit quatre attaques successives pendant la nuit, dont aucune ne réussit. Il se retira à Neidenbourg (1). Six pièces de canon, quelques drapeaux, un assez bon nombre de prisonniers ont été le résultat du combat de Soldau. Le maréchal Ney se loue du général Wonderveidt qui a été blessé. Il fait une mention parti

(1) Neidenbourg, ville de Prusse, département allemand, avec un château situé sur une montagne, dans le cercle de Hockerland, et le principale ville de la Galindie.

culière du colonel Brun, du 69o, qui s'est fait remarquer par sa bonne conduite. Le même jour, le 59° a été poussé sur Lauterburg.

Pendant le combat de Soldau, le général Marchand, avec sa division poussait l'ennemi de Mlawa, où il eut un très-brillant combat.

Le maréchal Bessières, avec le second corps de la réserve de cavalerie, avait occupé Biezun dès le 19. L'ennemi, reconnaissant l'importance de cette position, et sentant que la gauche de l'armée française voulait séparer les Prussiens des Russes, tenta de reprendre ce poste; ce qui donna lieu au combat de Biezun. Le 23 à huit heures, il déboucha par plusieurs routes. Le maréchal Bessières avait placé les deux seules compagnies d'infanterie qu'il avait, près du pont. Voyant l'ennemi venir en très-grande force, il donna ordre au général Grouchy de déboucher avec sa division. L'ennemi était déjà maître du village de Karmidjen, et y avait jeté un bataillon d'infanterie

Chargé par la division Grouchy, la ligne ennemie fut rompue. La cavalerie ennemie et son infanterie, fortes de 6000 hommes, ont été enfoncées et jetées dans les marais; 500 prisonniers, cinq pièces de canon, deux étendards sont le résultat de cette charge. Le maréchal Bessières se loue beaucoup du général Grouchy, du général Rouget et de son chef d'état-major le général Roussel. Le chef d'escadron Renié, du 6 régiment de dragons s'est distingué. M. Launay, capitaine de la compagnie d'élite du même régiment a été tué.

M. Bourrau aide-de-camp du maréchal Bessières, a été blessé. Notre perte est du reste peu considérable. Nous avons eu huit hommes tués et une vingtaine de blessés. Les deux étendards ont été pris par le dragon Plet, du 6 régiment de dragons, et par le fourrier Jenffroy, du 3 régiment.

S. M., désirant que le prince Jérôme eût occasion de s'instruire, l'a fait appeler de Silésie. Ce prince a pris part à tous les combats qui ont eu lieu, et s'est trouvé souvent aux avant-postes.

S. M. a été satisfaite de la conduite de l'artillerie, pour l'intelligence et l'intrépidité qu'elle a montrées devant l'ennemi, soit dans la construction des ponts, soit pour faire. marcher l'artillerie au milieu des mauvais chemins.

Le général Marulaz commandant la cavalerie légère du 3 corps, le colonel Excelmans du 1er de chasseurs et le général Petit ont fait preuve d'intelligence et de bra

voure.

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S. M. a recommandé que dans les relations officielles des différentes affaires, on fit connaître un grand nombre de traits qui méritent de passer à la postérité; car c'est pour elle et pour vivre éternellement dans sa mémoire, que le soldat français affronte tous les dangers et toutes les fatigues.

QUARANTE-SEPTIEME BULLETIN DE LA GRANDE-ARMÉE. Pultusk, le 50 décembre 1806.

*

Le combat de Czarnowo, celui de Nasielsk, celui de Kursomb, le combat de cavalerie de Lopaczyn ont été suivis par les combats de Golymin et de Pultusk; et la retraite entière et précipitée des armées russes a terminé l'année et la campagne.

Combat de Pullusk.

Le maréchal Lannes ne put arriver vis-à-vis Pultusk que le 26 au matin. Tout le corps de Benigsen s'y etait réuni dans la nuit. Les division russes qui avaient été battues à Nasielsk, poursuivies par la 3e division du corps du maréchal Davoust, entrèrent dans le camp de Puitusk à deux heures après minuit. A dix heures, le maréchal Lannes attaqua, ayant la division Suchet en première ligne, la division Gazan en seconde ligne, la division Gudin du troisième corps d'armée commandée par le géneral Daultanne, sur sa gauche. Le combat devint vif. Apres differens évènemens, l'ennemi fut culbuté. Le 17e régiment d'infanterie légère et le 34, se couvrirent de gloire. Les

généraux Vedel et Claparede ont été blessés. Le général Treillard, commandant la cavalerie légère du corps d'armée; le général Boussard, commandant une brigade de la division de dragons Beker; le colonel Barthelmy, du 15° régiment de dragons, ont été blessés par la mitraille. L'aidede-camp Voisin, du maréchal Lannes, et l'aide-decamp Curial, du général Suchet, ont été tués l'un et l'autre avec gloire. Le maréchal Lannes a été touché d'une balle. Le 5 corps d'armée a montré dans celte circonstance ce que peuvent des braves, et l'immense supériorité de l'infanterie française sur celle des autres nations. Le maréchal Lannes, quoique malade depuis dix jours, avait voulu suivre son corps d'armée. Le 85 régiment a soutenu plusieurs charges de cavalerie ennemie avec sang-froid et succès. L'ennemi, dans la nuit, a battu en retraite et a gagné Ostrolenka.

Combat de Golymin.

Pendant que le corps de Benigsen était à Pultusk, et y était battu, celui de Buxhowden se réunissait à Golymin, à midi. La division Panin de ce corps qui avait été attaquée la veille par le grand-duc de Berg, une autre division qui avait été battue à Nasielsk, arrivaient par différens chemins au camp de Golymin.

Le maréchal Davoust qui poursuivait l'ennemi depuis Nasielsk, l'atteignit, le chargea, et lui enleva un bois près du camp de Golymin.

Dans le même temps, le maréchal Augereau arrivant de Golaczima, prenait l'ennemi en flanc. Le général de brigade Lapisse, avec le 16° d'infanterie légère, enlevait à la bayonnette un village qui servait de point d'appui à l'ennemi. La division Heudelet se déployait et marchait à lui. A trois heures après-midi, le feu était des plus chauds. Le grand-duc de Berg fit exécuter avec le plus grand succès plusieurs charges dans lesquelles la division de dragons Klein se distingua. Cependant la nuit arrivant trop tôt, le combat continua jusqu'à onze heures du soir. L'ennemi fit sa retraite en désordre laissant son artillerie, ses bagages, presque

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