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L'Empereur donna ordre au prince de Ponte-Corvo de battre en retraite, et de favoriser les opérations offensives de l'ennemi, en l'attirant sur le bas de la Vistule. Il ordonna en même temps la levée de ses quartiers d'hiver.

Le 5 corps, commandé par le général Savary, le maréchal Lannes étant malade, se trouva réuni le 31 janvier à Brok, devant tenir en échec le corps du général Essen, cantonné sur le Haut-Bug.

Le 3o corps se trouva à Mysiniez ;

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L'Empereur partit de Warsovie, et arriva le 31 au soir à Willenberg. Le grand-duc s'y était rendu depuis deux jours, et y avait réuni toute sa cavalerie.

Le prince de Ponte-Corvo avait successivement évacué Osterrode, Tobau, et s'était jetté sur Strassburg.

Le maréchal Lefebvre avait réuni le 10° corps à Thorn, pour la défense de la gauche de la Vistule et de cette ville.

Le 1er février on se mit en marche. On rencontra, à Passenheim, l'avant-garde ennemie qui prenait l'offensive, et se dirigeait déjà sur Willenberg. Le grand-duc, avec plusieurs colonnes de cavalerie, la fit charger, et entra de vive force dans la ville.

Le corps du maréchal Davoust se porta à Ortelsburg (2).

Le 2, le grand-duc de Berg se porta à Allenstein (3), avec le corps du maréchal Soult.

Le corps du maréchal Davoust marcha sur Whastruburg.

Les corps des maréchaux Augereau et Ney arrivèrent dans la journée du 3 à Allenstein.

(1) Gilgenburg, petite ville de la Prusse orientale, département de la Lithuanie, à 90 m. de Thorn, 38 lieues de Konigsberg.

(2) Ortelsburg, château fort de Prusse, frontière de Pologne, dans la Galindie, cercle d'Hockland, à go m. d'Heilsperg.

(3) Allenstein, bourg de Prusse, à 28 m, de Guttstadt, go d'Elbing.

Le

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Le 3 au matin, l'armée ennemie, qui avait rétrogradé en toute hate, se voyant tournée par son flanc gauche et jetée sur cette Vistule qu'elle s'était tant vantée de vouloir passer, parut rangée en bataille, la gauche appuyée au village de Moudtken, le centre à Joukowo, couvrant la grande route de Liebstadt.

Combat de Bergfried.

L'Empereur se porta au village de Getkendorf, et plaça en bataille le corps du maréchal Ney sur la gauche, le corps du maréchal Augereau au centre, et le corps du maréchal Soult à la droite, la garde impériale en réserve. Il ordonna au maréchal Soult de se porter sur le, chemin de Gustadt, et de s'emparer du pont de Bergfried, pour déboucher sur les derrières de l'ennemi avec tout son corps d'armée, manoeuvre qui donnait à cette bataille un caractère décisif. Vaincu, l'ennemi était perdu sans ressource.

Le maréchal Soult envoya le général Guyot, avec sa cavalerie légère, s'emparer de Gustadt, où il prit une grande partie du bagage de l'ennemi, et fit, successivement 1600 prisonniers russes. Gustadt était son centre de dépôts. Mais au même moment le maréchal Soult se portait sur le pont de Bergfried avec les divisions Leval et Legrand. L'ennemi, qui sentait que cette position importante protégeait la retraite de son flanc gauche, défendait ce pont avec douze de ses meilleurs bataillons. A trois heures après midi, la canonnade s'engagea. Le 4° régiment de ligue et le 24° d'infanterie légère eurent la gloire d'aborder les premiers l'ennemi. Ils soutinrent leur vieille réputation. Ces deux régimens seuls et un bataillon du 28° en réserve suffirent pour débusquer l'ennemi, passèrent au pas de charge le pont, enfoncèrent les douze bataillons russes, prirent quatre pièces de canon, et couvrirent le champ de bataille de morts et de blessés. Le 46° et le 55°, qui formaient la seconde brigade, étaient derrière, impatiens de se déployer; mais déjà l'ennemi en déroute, abandonnait, épouvanté, toutes ses belles positions; heureux présage pour la journée du lendemain.

Dans le même temps, le maréchal Ney s'emparait d'un bois où l'ennemi avait appuyé sa droite; la division SaintHilaire s'emparait du village du centre; et le grand-duc de Berg, avec une division de dragons placée par escadrons au centre, passait le bois et balayait la plaine, afin d'éclaircir le devant de notre position, Dans ces petites attaques partielles, l'ennemi fut repoussé, et perdit une centaine de prisonniers. La nuit surprit ainsi les deux armées en présence.

Le temps est superbe pour la saison, il y a trois pieds de neige, le thermomètre est à deux ou trois degrés de froid.

:

A la pointe du jour du 4, le général de cavalerie légère Lasalle battit la plaine avec ses hussards. Une ligne de cosaques et de cavalerie ennemie vint sur-le-champ se placer devant lui. Le grand-duc de Berg forma en ligne sa cavalerie, et marcha pour reconnaître l'ennemi. La canonnade s'engagea mais bientôt on acquit la certitude que l'ennemi avait profité de la nuit pour battre en retraite, et n'avait laissé qu'une arrière-garde de la droite, de la gauche et du centre. On marcha à elle, et elle fut menée battant pendant six lieues. La cavalerie ennemie fut culbutée plusieurs fois; mais les difficultés d'un terrein montueux et inégal s'opposèrent aux efforts de la cavalerie. Avant la fin du jour, l'avant-garde française vint coucher à Deppen. L'Empereur coucha à Schlett.

Le 5, à la pointe du jour, toute l'armée française fut en mouvement. A Deppen, l'Empereur reçut le rapport qu'une colonne ennemie n'avait pas encore passé l'Alle, et se trouvait ainsi débordée par notre gauche, tandis que l'armée russe rétrogradait toujours sur les routes d'Arensdorf et de Landsberg (1). Sa Majesté donna l'ordre au grand-duc de Berg et aux maréchaux Soult et Davoust de poursuivre l'ennemi dans cette direction. Elle fit passer l'Alle au corps du maréchal Ney, avec la division de cavalerie légère du général Lasalle et une division de dragons, et lui donna l'ordre d'attaquer le corps ennemi qui se trouvait coupe.

(4) Landsberg, ville de Prusse sur la Stein, dans le cercle de Nantangen.

Combat de Waterdorf.

Le grand-duc de Berg, arrivé sur la hauteur de Waterdorf, se trouva en présence de 8 à 9,000 hommes de cavalerie. Plusieurs charges successives eurent lieu, et l'ennemi fit sa retraite.

Combat de Deppen.

Pendant ce temps, le maréchal Ney se canonnait et était aux prises avec le corps ennemi qui était coupé. L'ennemi voulut un moment essayer de forcer le passage, mais il vint trouver la mort au milieu de nos bayonnettes. Culbuté au pas de charge et mis dans une déroute complette, il abandonna canons, drapeaux et bagages. Les autres, divisions de ce corps voyant le sort de leur avant-garde, battirent en retraite. A la nuit nous avions déjà fait plusieurs milliers de prisonniers et pris 16 pièces de canon.

Cependant, par ces mouvemens, la plus grande partie des communications de l'armée russe ont été coupées. Ses dépôts de Gustadt et de Liebstadt et une partie de ses magasins de l'Alle avaient été enlevés par notre cavalerie légère.

Notre perte a été peu considérable dans tous ces petits combats; elle se monte à So ou 100 morts, et à 3 ou 400 blessés. Le général Gardanne, aide-de-camp de l'Empereur et gouverneur des pages, a eu une forte contusion à la poitrine. Le colonel du 4o régiment de dragons a été grièvement blessé. Le général de brigade, Latour-Maubourg, a été blessé d'une balle dans le bras. L'adjudant-commandant, Lauberdiere, chargé du détail des hussards, a été blessé dans une charge. Le colonel du 4o régiment de ligne a été blessé.

CINQUANTE-SEPTIEME BULLETIN DE LA GRANDE-ARMÉE. A Preussich-Eylan, le 7 février 1807.

Le 6 au matin, l'armée se mit en marche pour suivre l'ennemi: le grand-duc de Berg avec le corps du maréchal

Soult sur Landsberg, le corps du maréchal Davoust sur Heilsberg (1), et celui du maréchal Ney sur Worenditt, pour empêcher le corps coupé à Deppen de s'élever.

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Combat de Hoff.

Arrivé à Glaudau, le grand-duc de Berg rencontra l'arrière-garde ennemie, et la fit charger entre Glaudau et Hoff. L'ennemi déploya plusieurs lignes de cavalerie, qui paraissaient soutenir cette arrière-garde, composée de douze bataillons, ayant le front sur les hauteurs de Landsberg. Le grand-duc de Berg fit ses dispositions. Après différentes attaques sur la droite et sur la gauche de l'ennemi, appuyées à un mamelon et à un bois, les dragons et les cuirassiers de la division du général d'Hautpoul firent une brillante charge, culbutèrent et mirent en pièces deux régimens d'infanterie russe. Les colonels, les drapeaux, les canons et la plupart des officiers el soldats furent pris. L'armée ennemie se mit en mouvement pour soutenir son arrière-garde. Le maréchal Soult était arrivé: le maréchal Augereau prit position sur la gauche, et le village de Hoff fut occupé. L'ennemi sentit l'importance de cette position, et fit marcher dix bataillons pour le reprendre. Le grandduc de Berg fit exécuter une seconde charge par les cuirassiers, qui les prirent en flanc et les écharpèrent. Ces manoeuvres sont de beaux faits d'armes, et font le plus grand honneur à ces intrépides cuirassiers. Cette journée mérite une relation particulière; une partie des deux armées passa la nuit du 6 au 7 en présence. L'ennemi fila pendant la nuit." A la pointe du jour, l'avant-garde française se mit en marche, et rencontra l'arrière-garde ennemie entre le bois et la petite ville d'Eylan. Plusieurs régimens de chasseurs à pied ennemis qui la défendaient furent chargés et en partie pris. On ne tarda pas à arriver à Eylan et à reconnaître que l'ennemi était en position derrière cette ville.

(1) Heilsberg, petite ville de Prusse, departement allemand sur l'Alle, à 80 m. d'Elbing, 70 de Koenigsberg. Elle a un beau château, où résidait l'évêque de Warmie, qui était en mème-temps président de Ja Prusse polonaise, avant qu'elle passât sous la domination prussienue en 1773,

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