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BELGIQUE

QUESTIONS ÉCONOMIQUES

ET SOCIALES

Le Port d'Anvers et ses extensions maritimes, par Paul SEGERS (Revue Générale, Bruxelles, mai 1904). On sait de quelle importance est pour la Belgique le port d'Anvers, d'où sont sortis, dans la seule année 1902, plus de 5.000 navires d'un tonnage total de 8.334.150 tonnes. Ce port a su jusqu'ici rester à la hauteur de ses besoins, bien que durant la décade de 1890 à 1899 son tonnage se soit accru de 51 0/0. Mais pendant ce temps celui de Rotterdam augmentait de 116 0 0.

La question de la navigabilité de l'Escaut et la capacité du port sont les deux grands facteurs du problème que pose l'extension croissante d'Anvers. Les dimensions de plus en plus considérables des navires, dont certains atteignent aujourd'hui une longueur de 220 mètres et un creux de 15 mètres, obligent les ports à des largeurs et des profondeurs proportionnées. Au nord et au sud d'Anvers, de nouveaux bassins se construisent, qui permettront un accès facile aux plus puissants batiments; mais les trois courbes qu'affecte l'Escaut vers son embouchure facilitent

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A cet inconvénient, deux projets ont été proposés comme remèdes : l'un, approuvé par le conseil communal d'Anvers le 20 décembre 1897, rectifie en partie une des courbes, rendant la navigation plus facile et l'ensablement moins aisé; l'autre, dit de la grande coupure, supprime absolument les trois coudes périlleux en créant au fleuve un lit artificiel de quatorze kilomètres de longueur. Le bras de l'Escaut désaffecté deviendrait un vaste bassin dindustrie, et le fleuve serait beaucoup plus accessible, ne présentant plus qu'une grande courbe concave rebelle à l'encombrement.

M. Paul Segers, député d'Anvers, examine avec compétence les inconvénients et les avantages des deux projets; mais, malgré son désir d'en parler impartialement, il est visible que ses plus fortes sympathies vont au second, plus hardi, mais susceptible davantage, en cas de réussite, d'amener une heureuse transformation du premier port de la Belgique.

CRITIQUE

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ITALIE

Dictionnaire des écrivains du monde latin (Cronacle della civilta EllenoLatina, mai). A son retour de l'Amérique saxonne, où il était allé bravement défendre le génie et le droit des peuples latins, chez la race qui leur a fait le plus de mal et travaille avec le plus de ténacité à leur ruine, M. de Gubernatis a eu une grande joie : il a assisté à Rome à la réconciliation à la fois officielle et populaire de la France et de l'Italie. Il voudrait que l'amitié des deux plus grands peuples latins stimulat les autres à former de proche en proche l'union de toute la famille latine.

On sait tous les services que M. de Gubernatis a rendus et rend chaque jour à cette idée, dont il s'est fait, cela soit dit sans ironie aucune, une véritable

religion. Il n'a pu réussir, naturellement, à y convertir tous les Latins euxmêmes c'est devenu une mode chez quelques esprits de crier à la fin des peuples latins comme le fut un moment en France la mode de crier : Finis Galliæ. Mais M. de Gubernatis connait trop l'histoire des peuples qui constituent cette race historique et psychique, qu'on appelle la race latine, pour s'émouvoir quand on lui objecte Tiasurmontable supériorité des races germanique et anglo-saxonne; et lorsque, pour soutenir cette thèse, on va jusqu'à dire que les peuples latins sont incapables de conceptions philosophiques. et même d'aucune forte idée, M. de Gubernatis serait plus capable qu'aucun autre de réfuter par les faits ce paradoxe puéril qui véritablement en fait trop bon marché et se prète trop aisément aux faciles déclamations.

Cette réfutation, il va d'ailleurs la tenter il se propose, en effet, de dresser l'inventaire de toutes les œuvres latines ou qui intéressent la latinité. Il va reprendre en l'élargissant son Dictionnaire international des écrivains du jour, transformé en Dictionnaire des écrivains du monde latin. Il comprendra, outre cette espèce de Thesaurus Latinorum, non seulement tous les écrivains de race latine, mais aussi tous les écrivains qui, n'appartenant pas à la race, se sont pourtant occupés d'elle.

Et dans ce numéro des Cronacle della civilla Elleno-Latina il fait un appel, qui sera entendu, à tous ceux qui pourront et voudront bien lui fournir les documents biographiques et bibliographiques sur les écrivains susceptibles d'entrer dans le cadre de son

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M. Felipe Trigo, dont nous avons, en son temps, analysé à cette même place

un

très remarquable roman, Sed de amar (Soif d'aimer), obéit à son tour à cette sorte d'obsession. Et il se présente aujourd'hui, non pas avec un roman, mais avec un volume d'enquêtes sociologiques, el Socialismo individualista.

Le socialisme n'est pas une théorie : il est une inéluctable nécessité; tous les courants de la vie moderne s'orientent vers le socialisme: tout mouvement, toute action, toute loi, toute conquête, toute répression, toute injustice, toute ingratitude, toute iniquité, toute nouveauté, en augmentant l'anarchie de la société actuelle, préparent le socialisme. L'impulsion sociale est latente à la fois dans la corruption et la désagrégation de la morale caduque et des vieilles mœurs, c'est-à-dire dans les forces négatives et destructives, comme dans les affirmations nouvelles et positives de la mécanique, de l'économie et de la biologie. L'avenement du so

cialisme ne dépend pas de la volonté humaine.

Dans les conditions actuelles de la vie des peuples, tout absorbés par des luttes intérieures et extérieures, le socialisme est une impossibilité il n'est pas, il devient; il impose à l'humanité la transformation des nationalités, de l'individu par l'éducation, de la criminalité et des maladies, de l'amour et des passions, transformation qui, correspond à celles de la propriété, de l'héritage, du travail et des hiérarchies, de la femme, considérée comme être social, et de la famille. Quand toutes ces transformations seront accomplies, le socialisme sera réalisé, ou plutôt, puisqu'on ne peut supposer aucun temps d'arrêt dans le processus de l'humanité, l'humanité sera décidément entrée dans l'évolution socialiste, c'està-dire qu'elle sera en marche vers une nouvelle évolution que nous ne pouvons déterminer à l'avance, à peine même concevoir.

"

M. Trigo se défend d'être un théoricien qui cherche dans les faits la confirmation d'une doctrine préconçue il s'efforce d'être un observateur qui essaie de déterminer par l'étude des faits le dynamisme d'une force. Le socialisme conciliera tous les intérêts de la communauté avec la liberté naturelle de l'individu; il sera une synthèse réalisée par l'anthropologie avec la thèse de l'économie et l'antithèse du droit. Dans l'ordre du progrès le socialisme viendra, après le capital, en augmentation d'une unité comme, dans l'ordre des nombres, le chiffre 4 se forme de 3 avec l'augmentation d'une unité. » — Telle est la philosophie de l'auteur. Il ne croit point que le socialisme puisse se réaliser par décret ni par coups d'Etat, mais, au contraire, scientifiquement, par l'extension progressive à toute l'espèce d'un perfectionnement d'abord réalisé, soit par l'individu, soit par un groupe régional. Il suffira, dit-il, que la majorité d'une région veuille telle innovation, pour qu'elle puisse l'essayer, et, si l'essai est heureux, l'innovation se répandra de proche en proche à toute. la région et de celle-ci aux autres : ainsi, les innovations auront perdu leur caractère violent et révolutionnaire pour se réduire aux tranquilles transformations que produit aujourd'hui chaque découverte industrielle. » Tels sont l'esprit et la méthode du socialisme ir

dividualiste de M. Trigo. On n'arrivera, selon lui, à l'avènement de ce socialisme que lorsque, à l'intransigeance presque fanatique des partis ouvriers socialistes, se substituera la création

CRITIQUE

d'autres partis socialistes, démocrati– ques, gouvernementaux.

La conception de M. Trigo se rapproche assez, comme on voit, du socialisme-réformisme de chez nous.

ESPAGNE

Le Poème du Cid (Lectura, mai). M. Ramon Ménendez Pidal nous révèle l'œuvre d'un homme, qu'il y a tout intérêt à faire connaitre en France, dans l'espérance qu'il y trouve des imitateurs. M. Archer Huntington est un riche Nord-Américain de New-York: il s'est passionné pour l'ancienne littérature espagnole, et s'est, parait-il, composé des livres rares et précieux de cette littérature, des exemplaires presque introuvables (et quelques-uns uniques) des éditions premières de ses grands écrivains et de ses œuvres les plus populaires,-une bibliothèque incomparable. Mais, au lieu de s'en réserver la jouissance, cet amateur singulier a entrepris de vulgariser par la reproduction photo-typographique non seulement tous les livres rares et précieux, tous les exemplaires introuvables de sa collection, mais aussi ceux qui peuvent se rencontrer encore dans les collections publiques ou privées. Il est bien inutile de faire ressortir tous les services que rend ainsi

l'initiative de M. Huntington à la littérature qu'il affectionne.

Il s'est surtout attaché au cycle du Cid. Une de ses œuvres les plus importantes est consacrée au Poème du Cid, reproduit d'après l'unique manuscrit de Madrid, traduction et notes. L'œuvre comporte trois volumes qui ont paru successivement en 1897, 1902, 1903.

A ce propos, M. Ménendez Pidal fait l'historique de cet « unique manuscrit » reproduit par M. Huntington. Il est la propriété d'un particulier, M. Pidal, qui se considère moins comme propriétaire que comme dépositaire.

M. Huntington n'est pas seulement » un éditeur. C'est un critique qui a revu avec une minutieuse attention le texte du poème et l'a fait suivre d'un commentaire grammatical, paléographique, métrique, etc., et, ce qui

en

est peut-être la partie la plus neuve, et non la moins intéressante, d'une étude très attentive et très patiente sur la géographie du poème et tous les sites que la légende rattache à la. personnalité du Cid."

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