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MM. les généraux Berthezene, Poitevin, Lepic, etc., ont également des titres à l'estime de l'armée et à la reconnaissance de la patrie.

M. le comte Daru occupe le premier rang parmi les hommes de lettres qui ont pris naissance dans cette ville; je ne sais s'il existe dans notre histoire littéraire un autre exemple d'un homme qui ait réuni au même degré les talens qui constituent le grand administrateur, et ceux qui font le bon poëte. Sa traduction en vers français des OEuvres d'Horace est en même temps la meilleure, la plus fidèle et la seule complète que nous ayons dans notre langue.

Goudouli a trouvé un rival pour la poésie languedocienne dans la personne de M. Auguste Tandon, dont les fables sont ici en grande réputation. L'étendue de ses connaissances, la bonté de son caractère et l'aménité de ses mœurs ajoutent beaucoup à l'estime dont il jouit parmi ses concitoyens. Il y a néanmoins des amateurs qui préferent au naturel gracieux qui distingue ses poésies patoises, la verve originale d'un ancien curé de village, nommé Fabre, célèbre dans tout le Midi, par son fameux sermon de M. Sistre.

Montpellier est aussi la patrie d'un jeune auteur connu à Paris, par une foule de jolis vaudevilles, où l'on trouve un gaieté franche, une malice spirituelle et une grande finesse d'observation. M. Merle, dans plusieurs de ses pièces, et, particulièrement dans son Ci-devant Jeune Homme (dont un de ses compatriotes lui a, dit-on, fourni le modèle), a prouvé qu'il aurait pu prétendre à des succès dramatiques d'une plus haute importance, s'il ne se fût amusé trop long-temps à l'entrée de la carrière que son talent lui avait ouverte.

Le barreau de Montpellier, qui a vu briller plusieurs avocats, compte encore aujourd'hui des hommes d'un très-grand mérite, M. Rech, considéré généralement comme la meilleure tête à conseil, et la plume la plus habile de la contrée, M. Caisergues, pour la plaidoirie; l'action est la partie de l'orateur qui le distingue essen tiellement ;

M. George Fabre, bâtonnier de l'ordre, connu par la pureté de ses sentimens et par la force de sa dialectique, T. III,

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et M Caplat, qui jouit de la réputation d'un excellent jurisconsulte.

Je n'ai rien à dire de la magistrature actuelle.

Je terminerai cette espèce de bilan des réputations de Montpellier, par cette singuliere remarque, que cette ville seule a fourni aux divers gouvernemens qui se sont succédés en France depuis trente ans, neuf ministres à porte

feuille ;

M. de Saint-Priest, ministre de la maison du roi en 1789, aujourd'hui pair de France;

M. Lajard, ministre de la guerre ;

M. Mourgues, ministre de l'intérieur;

M. de Graves, ministre de la guerre ; ces trois derniers pendant la session de l'assemblée législative;

M. de Joly, ministre de la justice, à l'époque fameuse du 10 août, où il se comporta avec autant de loyauté que de courage; long-temps persécuté, aujourd'hui avocat au conseil ;

M. Benezech, ministre du directoire, et dont l'administration habile parvint à rétablir l'ordre dans les subsistances, à la chute des assignats; (1)

M. Cambacérès, ministre de la justice, à l'époque du 18 brumaire, où il devint second consul;

M. Chaptal, ministre de l'intérieur, sous le consulat et l'empire, et dont le ministère fut si brillant pour les arts et les manufactures. L'exposition des produits nationaux dont il introduisit l'usage est une grande pensée dont on s'est contenté d'entrevoir les avantages;

M. Daru, ministre de l'administration de la guerre sous l'empire. Ila déployé dans ces hautes fonctions des talens supérieurs, une probité sévère, une justice impartiale dont il faut lui savoir gré d'avoir laissé le modèle.

Je puis ajouter à cette liste M. Mejan, né dans la même ville, et qui fut pendant huit ans, secrétaire d'état du royaume d'Italie. Avant cette époque, il s'était acquis l'estime de ses compatriotes, dans la place de secrétaire général de la préfecture de Paris, qu'il avait rempli avec beau

(1) M. Benezech est mort sans laisser la moindre fortune à ses deux filles, elles avaient obtenu, en 1802 une pension de goo francs, qui leur a été retirée

coup de distinction. Appelé à Milan à de plus hautes fonctions, M. le comte Mejan s'y est montré digue du prince qui les lui avait confiées, en faisant respecter en lui le caractère français, qu'il honore par les vertus les plus solides et les qualités les plus brillantes.

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La députation du Cantal à la chambre des députés est devenue incomplète par la démission récente de M. Tournemine.

D'après la loi sur les élections, notre collége électoral devrait être convoqué en même temps que ceux des départemens de la deuxième série, pour pourvoir au remplace ment de ce député; mais je crains que cette convocation ne soit ajournée à l'année prochaine. On prétextera sans doute que, d'ici au mois de septembre, il n'est pas possible de faire tout le travail préparatoire, lorsqu'aux termes de la loi des élections, il devrait être dès long-temps ter

miné.

Toutefois, je vous donne l'assurance que, si cette assemblée avait lieu cette année, le Cantal donnerait une nouvelle preuve de son amour pour la liberté, et de son attachement aux principes constitutionnels.

Je crois devoir vous donner avis de cette démission (qui date du 19 ou du 20 juillet); elle est dès long-temps parvenue au ministère; je ne sais pour quelle raison on la tient secrète.

Veuillez la faire connaître au public par la voie de la Minerve. Un électeur du Cantal.

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L'importance des événemens qui se passent dans le Nouveau-Monde, est maintenant trop généralement sentie pour qu'il soit nécessaire de nous excuser d'en entretenir si souvent nos lecteurs. Dans ce moment d'ailleurs ces événemens se succèdent avec une telle rapidité, que, si nous en détournions quelque temps notre attention, bientôt il nous serait impossible d'en retrouver la trace et d'en suivre le mouvement. Aujourd'hui nous allons commencer par rendre compte d'un fait particulier que nous trouvons dans un journal anglais.

Deux ans après l'établissement de la république des Provinces-Unies de la Plata, dont Buenos-Ayres est la capitale, un jeune homme, nommé Don Alvear, qui avait pris une part active à l'insurrection, en fut choisi pour directeur-suprême. Bientôt sa patrie crut avoir à se plaindre de son administration, et il fut obligé de s'éloigner. En quittant le territoire de la république, il ne voulut pas du moins quitter l'hémisphère dans lequel il avait pris naissance, et il se rendit à Rio-Janeiro. Là il fut promplement environné des ennemis de la liberté de l'Amérique qui espéroient pouvoir tirer parti de tous les ressentimens qu'ils lui supposoient.. Plus grand dans son malheur. que Coriolan, Don Alvear refusa constamment de prendre part à l'exécution des projets auxquels on Voulait l'associer. Dès lors les ennemis de sa patrie devinrent aussi les siens Instruit qu'il était dans l'intention de se rendre à Monte-Video, sans doute dans l'espérance de rentrer en grâce près de la république dont il ne serait plus séparé que par le cours de la Plata, l'ambassadeur d'Espagne demanda au ministère portugais d'empêcher

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son départ. Celui-ci répondit qu'il ne voulait pas tromper la confiance d'un étranger qui était venu se placer sous sa protection, et Don Alvear reçut les passeports qui lui étaient nécessaires. Voyant que ses démarches près du gouvernement portugais étaient vaines, et informé que celui qui en était l'objet devait partir à bord d'un bâtiment de commerce français, nommé La Céleste, l'ambassadeur s'adressa au consul de France, et celui-ci, à sa sollicitation, fit venir le capitaine, et à force de menaces en obtint la promesse qu'il ne recevrait pas Don Alvear à bord. De retour sur son bâtiment, le capitaine sentit bientôt l'irrégularité des ordres qu'on lui avait donnés, et l'indignité de l'engagement qu'on lui avait surpris. Quand Alvear se présenta, il l'accueillit avec empressement, mit à la voile at le conduisit à Monte-Video. Tels sont du moins les faits que raconte le Morning-Chronicle.

Malgré ce témoignage, je ne croirai jamais que le seul agent diplomatique que la France ait dans ce moment à Rio-Janeiro, ait pu méconnaître tous ses devoirs au point de prendre une part active à des querelles qui nous sont étrangères, qu'il ait pu manquer à la dignité de son caractère et à celle de la nation qu'il représente, en consentant à devenir l'instrument des ressentimens d'un ministre espagnol. Quoique Don Alvear eût été obligé de s'éloigner de sa patrie, c'était un de ses anciens magistrats qu'on voulait poursuivre, et la cause des persécutions dirigées contre lui l'aurait trop fortement recommandé à l'intérêt de ses concitoyens pour qu'ils ne ressentissent pas son injure. Si le capitaine de la Céleste eût mis à exécution les ordres qu'on assure lui avoir été donnés par le consul de France, il est vraisemblable que le directeur suprême Puyredon'aurait diminué quelque chose de la bienveillance qu'il a constamment montrée aux compatriotes de son père, né français; bienveillance d'un si grand prix dans un moment où toutes les nations commerçantes se disputent le marché de Buenos-Ayres. Ce marché, où près de trois millions d'habitans répandus dans les Provinces-Unies de la Plata achètent les produits de l'industrie européenne, va prendre un accroissement rapide; aujourd'hui que la république a triomphe de ses ennemis, que tous les germes que la nature a jetés d'une main prodigue sur son territoire, et dont le développement avait été arrêté

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