Page images
PDF
EPUB

occasionner, et le propriétaire de la maison est civilement responsable aussi des faits de son concierge (Paris, 4 ch., 1861, Gaz. des Trib., 10 janv. 1861).

1202. A plus forte raison, lorsque le propriétaire a connaissance de la nouvelle adresse de ses anciens locataires, et qu'il donne des ordres à son concierge de ne pas l'indiquer, cette malveillance du propriétaire le rend passible de dommages-intérêts envers son ancien locataire (Trib. de la Seine, 5 ch., 19 nov. 1852 (1), Gaz. des Trib., 20 nov. 1852)..

1203. Le concierge étant le préposé du propriétaire, ce dernier répond, aux termes de l'article 1384 du Code civil, des fautes par lui commises dans l'exercice de ses fonctions au préjudice des tiers et spécialement des locataires. En conséquence, le propriétaire est responsable du vol commis au préjudice d'un de ses locataires, alors qu'il est établi qu'aucune surveillance n'était, au moment du délit, exercée dans la loge par le concierge et sa femme, qui tous deux étaient absents et ne s'étaient point fait remplacer (Trib. Lyon, 8 mai 1885, Gaz. des Trib., 27 mai 1885).

Jugé toutefois que s'il entre dans les fonctions du concierge, de surveiller la maison où il est employé, la mesure de cette surveillance varie suivant les usages des lieux et les circonstances de la cause; que lorsqu'un vol est commis dans une maison, le concierge ne peut être considéré comme en faute et le propriétaire déclaré responsable par cela seul que le concierge se serait absenté pendant quelque temps de sa loge, s'il n'est pas établi que le vol ait coïncidé avec l'absence du concierge, ni même que la présence du concierge l'eût empêché (Lyon, 21 janvier 1887, Sirey, 87.2.104 et Dalloz, 87.1.87; Trib. de la Seine, 18 mars 1896, Gaz. du Palais, 6-7 déc.).

1204. La responsabilité du propriétaire n'est pas limitée aux actes préjudiciables aux locataires de la maison à la surveillance de laquelle le concierge est préposé; elle s'étend à tous les faits qui peuvent léser des tiers pourvu que le fait ait été commis dans l'exercice des fonctions du concierge. Ainsi le propriétaire doit être déclaré civilement responsable des condamnations pronon

(1) Dans l'espèce, le propriétaire fut condamné à 300 fr. de dommages et intérêts envers le locataire.

cées contre son concierge pour diffamation envers le propriétaire d'une maison voisine, la dite diffamation commise dans l'exercice de ses fonctions alors que le concierge faisait visiter pour le louer un appartement de la maison confié à sa charge (Paris, 16 juin 1896, Sirey, 96.2.208).

1205. Il a été jugé que lorsqu'un concierge a consenti une location à la charge de passer un bail avec son propriétaire, cet acte est nul s'il n'est pas ratifié par ce dernier; mais comme le concierge a causé un préjudice en n'exécutant pas son engagement, le propriétaire responsable, des faits de son préposé, peut être condamné à des dommages-intérêts (Trib. de la Seine, 5 ch., 17 nov. 1860 (1), Mon, des Trib., 1861, p. 24).

Mais cette décision ne nous paraît pas exacte, car en consentant un bail le concierge n'est pas dans l'exercice de ses fonctions puisqu'il ne saurait être considéré comme mandataire du propriétaire, celui-ci n'est donc pas responsable du dommage qu'a pu causer le concierge en signant un bail qu'il n'avait pas le droit de signer, la personne qui a subi le préjudice ne peut s'en prendre qu'au concierge et surtout à elle-même car c'est elle qui a été imprudente en traitant avec le concierge.

1206. Si les concierges ont un mandat tacite du propriétaire pour consentir les locations verbales qui se font à Paris au trimes

(1) Voici les faits qui ont donné lieu à cette décision M. Julien, gantier, s'adressa au concierge de la maison, rue de Louvois, no 2, pour louer une boutique et dépendances. Celui-ci lui consentit de suite un bail de neuf années, à régulariser avec le gérant qui était momentanément absent. A son re; tour celui-ci s'empressa de signifier au sieur Julien qu'il était prêt à ratifier la location consentie par le concierge, mais à la condition de ne pas exercer la profession de gantier et culottier, à raison de l'interdiction stipulée au profit de ce dernier à l'égard des autres locataires de la maison.

Pour le propriétaire, on soutenait devant le tribunal que le concierge n'avait aucunement le droit de faire une location sans la ratification du propriétaire, que le sieur Julien avait eu connaissance des prohibitions dont il a été parlé plus haut, et on concluait à la nullité du bail.

Pour le locataire, on répondait que la location avait été ratifiée par le propriétaire et que les conditions par lui imposées étaient toutes nouvelles, qu'il avait dû restituer les six mois de loyers d'avance payés par le locataire; subsidiairement, qu'un préjudice avait été causé à ce dernier par la non-exécution des conventions, et que le propriétaire élant responsable de son concierge, il y avait lieu de le condamner à la restitution des loyers payés, et à une indemnité de 4.000 fr.

Le tribunal, adoptant ces conclusions subsidiaires, a condamné le propriétaire en 500 fr. de dommages-intérêts et aux dépens.

tre, il n'est pas admissible qu'ils aient un mandat tacite de consentir des baux de trois, six ou neuf années.

Le locataire qui aurait obtenu d'un concierge un bail d'une semblable durée, ne peut être admis, en l'absence d'un commencement de preuve par écrit, à prouver par témoins, ni le mandat qui aurait été donné par le propriétaire, ni le consentement que ce dernier aurait donné ensuite en ratifiant le prétendu bail (Trib. de la Seine, 6o ch., 14 nov. 1885).

1207. Le concierge qui est congédié par le propriétaire ne peut se réfugier chez un locataire de la maison, sous prétexte que ce locataire lui a sous-loué partie de son logement (Ordonn. rendue sur référé par M. le président du Trib. de la Seine, le 23 avril 1862, Gaz. des Trib., 24 avril 1862).

1208. Dans le cas de déménagement furtif du locataire, le concierge doit en informer le propriétaire, afin que ce dernier soit à même de remplir, en temps utile, les formalités nécessaires pour conserver son privilège sur les meubles qui garnissent les lieux loués, et qu'il puisse, en outre, faire constater, dans les délais. prescrits, ce déménagement furtif, pour ne point demeurer garant des contributions dont ce locataire pourrait être redevable.

Quant aux autres obligations du concierge, elles sont plus ou moins étendues, selon l'importance des maisons et le quartier où elles sont situées. Ainsi, le premier soin d'une personne qui se propose de louer un appartement, doit être de s'informer des habitudes de la maison, principalement en ce qui touche le balayage ou le frottage plus ou moins fréquent des escaliers, en un mot, l'entretien de la propreté dans la maison.

1209. Il est d'usage à Paris, lorsque le locataire reçoit du bois à brûler, que le concierge en prélève une bûche par chaque voie. Mais nous ferons observer que cet usage n'établit aucun droit en faveur du concierge, et que le locataire peut se refuser à lui accorder cette bûche; c'est, au reste, un moyen pour le locataire de punir le concierge qui ne remplit point exactement ses devoirs.

Il en est de même pour les étrennes (1): le locataire peut, s'il

(1) Les étrennes que l'on est dans l'usage de donner aux concierges s'élèvent généralement à 2 0/0 du loyer; mais les locataires ne sont pas obligés de donner des étrennes et s'ils s'abstiennent les concierges n'en sont pas moins tenus de toutes les obligations énumérées ci-dessus.

le veut, ne pas les donner; mais malheur à vous, locataires qui ne donnez ni bùches ni étrennes! S'il vient une visite, le concierge indiquera mal l'escalier qui conduit à votre appartement; si vous avez à sortir de chez vous, il vous faudra longtemps implorer la faveur du cordon, etc.

1210. Le propriétaire peut être condamné comme civilement responsable du vol commis par son concierge (Trib. civ. de la Seine, 6 ch., 16 fév. 1872, Gaz. des Trib., 9 nov. 1872).

1211. Le principal locataire d'une maison est responsable, envers son sous-locataire, des faits du concierge, lors même que ce dernier a été placé dans la maison par le propriétaire (Trib. de la Seine, 4 mars 1863, Gaz. des Trib., 2 avril, et Droit, 3 avril 1863).

CHAPITRE XI

Du bail ou location des appartements meublés

1212. Le louage d'une maison ou d'un appartement meublé forme tout à la fois le bail de l'immeuble et des meubles qui le garnissent; mais ce n'est là qu'un seul et même contrat.

En général, la location des appartements meublés est soumise aux principes qui régissent les baux à loyer, et qui ont été développés dans les chapitres précédents.

Mais nous ne parlons ici que des véritables locations de maisons, d'appartements ou de chambres meublées, locations dans lesquelles le locataire a seul la clef et l'exclusive jouissance de son appartement ou de sa chambre; quant au contrat qui se forme entre un hôtelier, un logeur en garni ou un aubergiste et un voyageur et en vertu duquel le logement est fourni au voyageur, contrat qui est désigné sous le nom de contrat d'hôtellerie, nous en traiterons dans le chapitre de ce livre consacré aux hôteliers, aubergistes et logeurs et nous verrons qu'il diffère essentiellement du contrat de location.

SECTION [re

De la durée et du prix de la location des appartements
meublés.

1213. La durée de cette espèce de bail est soumise à une règle spéciale.

En effet, l'article 1758 (1) du Code civil est ainsi conçu :

« Le bail d'un appartement meublé est censé fait à l'année, quand il a été fait à tant par an; au mois, quand il a été fait à tant par mois; au jour, s'il a été fait à tant par jour.

[ocr errors]

Si rien ne constate que le bail soit à tant par an, par mois ou par jour, la location est censée faite suivant l'usage des lieux. » Cet article prévoit deux cas différents : 1o celui où les parties ont déterminé la durée de la location en la fixant à l'année, au mois ou au jour; 20 celui où la durée n'ayant pas été déterminée, on doit s'en rapporter à l'usage des lieux.

Si donc la location a été faite à tant par an, par mois ou par jour, le bail est censé fait ou pour un an ou pour un mois ou pour un jour. C'est l'application du premier cas prévu par notre article qui veut que le bail ait pour limites naturelles celles indiquées par le prix (2). Un congé n'est pas nécessaire pour faire cesser la location d'un appartement meublé dont la durée a été déterminée par les parties; cette location cesse par l'expiration du temps pour lequel elle a été consentie. Mais doit-il en être autrement lorsque l'usage des lieux exige un congé donné dans un certain délai ? Nous le pensons pas. En effet, aux termes de notre article, ce n'est que

ne

(1) Cet article, qui se trouve au titre du Louage, ch. 2, et qui fait partie de la section 2 de ce chapitre, intitulé: Des règles particulières aux baux à loyer, c'est la seule disposition du Code civil dans laquelle il soit fait mention du louage des appartements meublés. On a pensé avec raison que ce contrat, étant rangé dans la classe des baux à loyer, devait naturellement en suivre les règles, et qu'il était par conséquent inutile de faire de ce bail une section séparée.

(2) Ce point important résulte de la discussion à laquelle l'article 1758 a donné lieu au Conseil d'Etat (Locré, t. 14, p. 332; Fenet, t. 14, p. 238). MM. Berlier et Tronchet établissent très positivement que l'usage des lieux ne pourrait être invoqué que dans le cas du dernier alinéa de l'article 1758 et jamais dans la première hypothèse qu'il embrasse (Troplong, u° 603; Duvergier, t. 4, n° 37; Aubry et Rau, d'après Zachariæ, t. 3, p. 359, note 11).

« PreviousContinue »