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Des ministres du pape faisaient, pour le même objet,2 le même voyage, et dans des intentions bien moins sind. cères. Leurs personnes étaient seules une première infraction au traité qu'ils allaient implorer le directoire avait exigé qu'on ne lui adressât pas des ecclésiastiques pour négociateurs. Ceux-là se masquèrent en laïques : l'abbé devint le comte Petracchi, et ne réussit qu'à se faire renvoyer sans succès, dans une négociation commencée par la dérogeance à une promesse imposée, mais faite, et qui n'aurait été conduite par un tel diplomate et son compagnon Vangelisti qu'avec l'astuce, compagne ordinaire de leur.

métier.

Le 10, Buonaparte quitta Pistoie, et se mit en marche pour rejoindre la colonne qui déja était aux portes de Livourne: « Une frégate anglaise en sortait, dit-il, et fut canonnée; mais il n'était plus temps. Quelques heures avant notre arrivée, plus de quarante bâtimens anglais chargés étaient sortis de Livourne.

« Je fis arrêter le chevalier Spannochi, gouverneur de la ville pour le grand duc, qui avait favorisé le départ des Anglais, qui avait essayé de soulever le peuple, en lui représentant notre petit nombre, et qui avait laissé prendre, peu d'heures avant, deux bâtimens français par une frégate anglaise, sous le feu des batteries: je l'ai fait conduire à Florence par ses propres soldats : le grand duc l'a fait mettre en prison, et le fera punir sévèrement. Cet officier est connu dans Livourne par sa haine contre les Français: il a commandé une frégate napolitaine contre nous : il est vendu à l'Angleterre. Vous trouverez ci-joint copie de ma lettre et de la réponse du grand duc à ce sujet.

« Vous trouverez ci-joint l'ordre que j'ai donné au consul de la république, qui m'a paru un homme probe, et sur qui l'on peut compter. Il a fait aussitôt mettre les scellés sur les magasins anglais; et il espère que cette capture vaudra sept ou huit millions à la république.

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« L'épouvante à Livourne n'a été que momentanée : la bonne conduite de nos troupes a parfaitement rassuré les ha bitans. J'y ai laissé une bonne garnison, et le général Vaubois pour y commander, avec l'instruction ci-jointe.

« Je suis parti le lendemain ; j'ai passé à Florence avec Berthier et une partie de mon état-major: nous avons été parfaitement accueillis; le grand duc nous a donné un grand diner, que j'ai cru devoir accepter. L'on m'a assuré qu'on avait toujours à Florence désapprouvé la conduite des Livournais.

« Le ministre de la république près la cour de Florence m'a personnellement secondé dans ces différentes opérations. Le grand duc, quoique sollicité de tous cótés de s'en aller, n'a point prêté l'oreille à ses ennemis et aux nótres; il est resté ferme dans sa capitale, environné de nos troupes, mais se reposant sur la loyauté française. Cette conduite lui a mérité une part dans mon estime.

"I a république de Lucques m'a fourni, de gré à gré, six mille fusils, dont l'armée a grand besoin, la campagne ayant considérablement détérioré nós armes. »

Buonaparte, général en chef de l'armée d'Italie, à son allesse royale le grand duc de Toscane.

Au quartier-général de Livourne, le 11 messidor, an 4.

« ALTESSE ROYALE,

« Une heure avant que nous entrions dans Livourne, une frégate anglaise a enlevé deux bâtimens français, valant cinq cent mille livres. I e gouverneur les a laissé enlever sous le feu de ses batteries; ce qui est contraire à l'intention de votre altesse et à la neutralité du port de Livourne. Je porte plainte à votre altesse royale contre ce gouverneur, qui, par toutes ses démarches, montre une haine prononcée contre

les Français : il a cherché hier, au moment de notre arrivée, à ameuter le peuple contre nous; il n'est sorte de mauvais traitement qu'il n'ait fait essuyer à notre avant-garde. J'aurais été autorisé, sans doute, à le faire juger par une commission militaire; mais, par respect pour votre alsesse royale, intimement persuadé de l'esprit de justice qui caractérise toutes vos actions, j'ai préféré de l'envoyer à Florence, convaincu qu'elle donnera les ordres pour le faire punir sévèrement.

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Je dois en même temps faire mes remerciemens à son altesse royale de la bonté qu'elle a eue de préposer le général Strasoldo pour faire procurer à l'armée ce qui lui était nécessaire. Il s'est acquitté des ordres de votre altesse royale avec autant de zèle que de succès. »

Copie de la lettre du grand duc de Toscane, au général Buonaparte.

"

« GÉNÉRAL,

Le général Spannochi, arrêté par votre ordre, a été transporté ici : il est de ma délicatesse que je le retienne en arrestation, jusqu'à ce que les motifs de cette arrestation (que je présume être justes) me soient connus, afin de vous donner, ainsi qu'à la république française et à toute l'Europe, le plus grand témoignage de cette équité conforme aux lois de mon pays, auxquelles je me suis toujours fait un devoir d'être soumis moi-même.

"

Je charge de cette lettre le marquis Manfredini, mon majordôme, à qui je vous prie de dire en quoi le susdit Spannochi s'est rendu coupable. Vous pouvez, en outre, avoir toute confiance en lui pour tous les objets qui peuvent intéresser le repos de mes sujets.

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Je desire vivement recevoir un écrit de votre main qui, dans les circonstances présentes, puisse me tranquilliser com

plètement, et assurer en même temps le repos de toute la Toscane.

Je suis, avec uue parfaite estime.

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Ordre donné par le général Buonaparte au consul de la 2) république française à Livourne, le 10 messidor, an 4.

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« Le consul de la république française à I ivourne fera mettre le scellé sur tous les magasins appartenans aux Anglais, à l'empereur, à l'impératrice de Russie, et généralement à tous les princes ou sujets des états avec lesquels nous sommes en guerre, et en fera l'inventaire.

"

Il fera toutes les démarches, prendra toutes les mesures, ét emploiera tous les moyens nécessaires pour découvrir les marchandises qui pourraient avoir été déposées chez les différens négocians de Livourne, et s'en mettra en pos

session. »

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Eu exécution de l'ordre du général, dont copie est cidessus, le consul de la république française invite tous les habitans de la ville de Livourne et des environs, de quelque nation et qualité qu'ils soient, qui pourraient posséder, à titre de dépôt ou autrement, des effets, marchandises, argent, bijoux, chevaux, meubles, etc. appartenans aux susdits sujets de la Grande-Bretagne, de l'Empire, de la Russie, ou autres ennemis de la république, à remettre, dans la journée de demain 12 messidor (30 juin vieux style), au consul lui-même, un état détaillé et une déclaration au vrai des effets et sommes d'argent qui appartiennent aux susdits états ennemis de la république.

"

Ceux qui auront contracté avec les ennemis de la république, de quelque manière et dans quelque forme que ce puisse être, doivent également en faire leur déclaration au consul de la république; ce qui servira simplement pour en faire l'examen,

« Le consul invite particulièrement les Français à lui indiquer les effets cachés, déposés, ou aliénés par ventes simulées, ou de toute autre manière; aucun motif pour les retenir ne sera admissible, parce qu'il est prouvé que les citoyens français ont été, en différens temps, dépouillés ou lésés par les mesures sourdes des ennemis de la république dans le port de Livourne, et que même la force et la violence ont été employées. C'est donc le droit le plus légitime de la représaille que la république française exerce, et une restitution de ses propriétés, également juste, qu'elle réclame aujourd'hui, conformément au droit de toutes les

nations.

Aussitôt les déclarations faites, on prendra des mesures pour constater leur exactitude, et assurer le séquestre desdits effets.

«< Ceux qui négligeraient de faire les déclarations, ou qui les feraient incomplètes, s'exposeraient à des recherches sévères et à des conséquences fâcheuses, qu'ils doivent prévenir pour leur propre intérêt.

"

L'intention du général en chef est que toutes les propriétés ennemies soient remises dans les mains de la république, comme prises faites en mer: en conséquence, et par cette considération, toutes recherches, tous jugemens, toutes condamnations, sont attribués à la jurisdiction consulaire.

"

« A Livourne, le 11 messidor, l'an 4 de la république française (le 29 juin 1796). »

Tandis que Buonaparte dînait chez le grand duc à Florence, un courier vint au dessert lui apporter la nouvelle de la prise du château de Milan. Si ce jeune souverain avait la satisfaction de sauver ses états par sa bonne conduite, il faut convenir qu'il en devait coûter à son amour propre et à sa sensibilité de fêter dans son palais un général dont la famille était comptée parmi ses sujets, et qui venait de rompre toutes les liaisons commerciales de ses amis

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