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une commandite de 500.000 francs pour le début de l'entreprise. Bien organisée, celle-ci grandira sûrement.

L'indivision des forêts en garantit la conservation et l'esprit de suite dans la gestion ; et l'indivision avec le département entraînant la soumission au régime forestier, éviterait à la Société tous soins de surveillance et d'administration. Les établissements publics propriétaires de forêts n'ont pour ainsi dire d'autre soin à prendre que d'en encaisser les revenus. La tâche de la Société serait donc extrêmement simplifiée et, dès le premier travail effectué, assurée; c'est là une garantie de premier ordre pour les capitaux à engager dans les reboisements.

La durée de 35 ans à partir du versement des capitaux est nécessaire et suffisante pour que les forêts créées prennent une grande valeur et fournissent déjà des revenus importants. Et si la Société a été constituée par actions tout simplement, ses actions auront une valeur croissant au fur et à mesure du développement des bois. Transmissibles à un moment quelconque, elles n'obligeront pas forcément les souscripteurs à laisser longtemps leurs capitaux immobilisés.

Les subventions allouées par l'État viendront, dès le moment de l'exécution des travaux, alléger la charge de la Société et du département. Et ici l'Etat, qui élargit et transforme le canal latéral à la Loire, qui projette un canal du Rhône à la Loire, dont la dépense est évaluée 120 millions, l'État a ici un intérêt majeur et grandissant à l'approvisionnement en eau, que la création de bonnes forêts peut fournir.

Le point le plus délicat de l'entreprise semble résider dans l'acquisition des terrains à boiser. Cette affaire exige une habileté commerciale qu'une société peut avoir, tandis qu'elle fait défaut à l'État et probablement au département. A ce sujet même une étude préalable est nécessaire pour montrer sur quels points et dans quelles conditions il est possible d'acquérir tout d'abord des terrains suffisants à une entreprise sérieuse, soit quelques milliers d'hectares.

Il n'est pas sans intérêt de remarquer que l'action d'une telle société, débutant sur un point donné, dans la vallée du Dorlay par exemple, et sur un périmètre déterminé, pourrait se répéter et s'étendre sans limites de temps ni de surface; elle pourrait s'exercer aussi bien en d'autres départements, car chacune des forêts créées aurait sa comptabilité et ses propriétaires. Les montagnes du Centre de la France, aujourd'hui pénétrées par les chemins de fer, offrent un champ presque illimité à de belles et fructueuses entreprises de reboisement.

CH. BROILLIARD.

1. - V. Le Traitement des bois en France, pp. 613 et s.

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VALEUR DES COUPES DE TAILLIS SOUS FUTAIE A DIVERS AGES 1

On ne saurait trop revenir sur la question de l'allongement de la révolution dans les taillis. Elle a été traitée déjà bien des fois et notamment dans le Bulletin. Aussi est-il regrettable que le nombre des abonnés soit si peu considérable, car il y a réellement beaucoup à faire pour complèter l'éducation de la plupart des propriétaires de bois.

Les particuliers persistent à vendre leurs coupes à 22 ans et les résultats sont là pour montrer leur erreur.

Quand un conseil municipal demande une coupe extraordinaire ou une coupe par anticipation, il ne manque pas d'ajouter des réflexions qu'il pose en axiome, il est tout étonné que les agents forestiers ne partagent pas ses idées : « Tout le monde sait que les taillis commencent à dépérir à vingt-cinq ans, que les bois ne peuvent plus gagner à rester sur pied, qu'ils perdent au contraire de leur valeur. »

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Les taillis qui ne peuvent plus rien gagner sont rares, il faut qu'ils soient dans des conditions de terrains bien exceptionnelles, on en trouverait difficilement trois ou quatre dans la Haute-Saône. J'ai sous les yeux délibération du mois de septembre dernier où il est dit : « Il est bien connu et constaté qu'après 26 ans le bois est arrivé à son maximum de valeur. » Que répondre à cela ? Et précisément ces coupes se trouvent en sol excellent, voisines du quart en réserve qui, exploité de 30 à 35 ans, a été vendu de 800 à 1.200 fr. l'hectare. Le service forestier seul aura beau émettre un avis défavorable à ces demandes, ces communes croiront toujours que de parti pris on ne veut pas leur donner raison.

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Dans la Haute-Saône, qui possède 642 forêts communales, plus de 500 sont exploitées de 24 à 26 ans et seulement 98 de 29 à 31 ans.

Pour modifier quelque chose le service forestier est complètement désarmé, il ne peut procéder que par insinuation auprès des communes, afin d'obtenir un vote conforme à ses propositions.- La tâche serait plus facile si le conseil général de la Haute-Saône, suivant la voie qui a été tracée par les assemblées départementales voisines, appuyait de son au

1. Ces données sont extraites d'un travail de M. F. Cardot, inspecteur-adjoint des Forêts à Vesoul. (V. Bulletin de la Société forestière de Franche-Comté, décembre 1897).

torité les justes observations et les efforts qu'ont faits jusqu'ici l'Administration et notre Société forestière.

Les conditions économiques ont changé. Qu'est-ce qui donnait autrefois de la valeur aux jeunes taillis? Tout le monde le sait et M. Galmiche ent parlait encore dernièrement à Vesoul, au congrès de la Société forestière : c'étaient les prix élevés de la charbonnette et de l'écorce.

CHARBON. Si l'on recherche dans les anciens documents où sont consignés les prix de vente des diverses unités de marchandises, on cons tate que bien souvent la différence entre la valeur sur pied du rondin et celle de la charbonnette était très faible, généralement 1 fr., c'est-à-dire si le rondin valait 5 fr., la charbonnette valait 4 franes.

que

Je retrouve dans une statistique de 1850 que les prix de la charbonnette avaient été auparavant de :

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Les nombreuses industries qui l'utilisaient, les hauts-fourneaux, les verreries, les forges, tréfileries, tuileries, briqueteries, fours à chaux et à plâtre se faisaient concurrence et défendaient avec acharnement les affectations qui leur avaient été concédées dans les forêts domaniales. - En 1832, un inspecteur des forêts à Gray constatait que dans son arrondissement il existait dix-huit hauts-fourneaux, six fours d'affinage, un martinet, qui employaient plus de 300.000 stères de bois de chauffage, trentedeux tuileries ou fours à chaux, cinq à plâtre utilisant 300.000 fagots. Mais le remplacement du bois et du charbon parla houille et le gaz dans les usines les plus importantes a coupé court à cette consommation et a été du reste la cause de la disparition de la plupart des petites industries de la Haute-Saône.

Pendant quelque temps, on a bien continué à vendre du charbon dans les grandes villes, on en expédiait à Paris, mais le bon marché de la houille, joint à l'augmentation des droits d'octroi qui a motivé tant de protestations, y compris celle de la Société insérée dans le Bulletin nu

méro 3 de 1895, ont fait peu à peu diminuer et presque disparaître ces débouchés, du moins pour notre région. On peut dire que maintenant la consommation se fait sur place1.

Comment utiliser tous ces brins de faibles dimensions? Ils forment une masse considérable. Rien que dans notre département, les forêts communales donnent plus de 300.000 stères de charbonnette. Les bois d'affouage sont utilisés dans les villages, soit dans les cheminées, soit dans des poêles à larges foyers. Mais dans les coupes vendues, la transformation en charbon est générale; c'est donc d'après le prix de vente du charbon qu'il faut estimer le menu bois sur pied. Le calcul peut se faire de la manière suivante :

Le détaillant qui vend son charbon o fr. 40 le double décalitre (à Vesoul) l'achète 3 fr. 75 le sac. Ce sac, dit de Paris, pèse généralement 55 kilos, et quatre sacs font un peu plus d'un mètre cube. Il faut environ trois stères de bois non écorcé pour produire cette quantité; si le bois est écorcé il rend un peu plus. Le mètre cube de charbon est donc vendu 3,75 X 4= 15 francs.

De là, il faut déduire :

Octroi (le droit est à Vesoul de 1 fr. les 100 kil.). 4 sacs à 0,55

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Il reste 15-11 fr. 10- 3 fr. go, qui, divisés par 3, donnent 1 fr. 30 pour le prix du stère sur pied en forêt.

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Ce prix doit être encore diminué si l'on prend comme point de départ la valeur du charbon destiné à Paris. Il se paie 11 fr. 50 les quatre sacs. Il y a donc à déduire, d'après le tableaux ci-dessus, 11 fr. 10 2 fr. 20= 8 fr. 95. Le prix de trois stères revient ainsi à 2 fr. 55, soit o fr. 85 le stère sur pied en forêt.

A ces prix dérisoires il faut renoncer à produire de la charbonnette et l'on ne peut plus songer qu'au rondin de 4 ou 5 fr. le stère sur pied. ÉCORCES. Depuis quelques années, la valeur des écorces a bien. changé. Celles de taillis, que l'on vendait autrefois 90 fr. sur pied (125 fr. nets sur wagon), valent 30 et 40 fr., celles des surtaillis vendues autrefois 50 à 60 fr. ne trouvent plus preneurs.

1.

Paris consomme 100.000 tonnes de charbon de bois et 1.400.000 tonnes de charbon de terre.

La concurrence des jus de tanin et les nouveaux procédés employés, qui réduisent dans d'énormes proportions la durée du tannage, ont motivé cette baisse de prix. A ce point de vue l'exploitation des taillis à 20 ou 22 ans avait sa raison d'être. Les analyses d'écorces ont montré qu'à 18 ans la teneur en tanin était la plus considérable et que, pour une surface donnée, la plus grande valeur atteinte par l'écorce est vers 22 ans, parce qu'à ce moment la valeur absolue, représentée à la fois par la quantité et la qualité, atteint son maximum. Mais en présence de cette baisse, y a-t-il grand intérêt à produire de l'écorce et même à écorcer? La légère reprise qui s'est produite cette année paraît due aux demandes de l'Allemagne (voir le Quebracho, Revue des eaux et forêts du 15 octobre); mais il serait illusoire de compter encore sur de hauts prix. On doit se restreindre aux coupes où le chêne est en assez grande proportion, où la quantité d'écorce dépasse 10.000 kilos et en général ne considérer ce produit que comme un accessoire.

Quel est donc le moyen d'amortir autant que possible les effets produits par ces nouvelles conditions économiques? Il faut produire des bois plus

gros.

On a cherché à obtenir ce résultat de différentes manières, soit en pratiquant des éclaircies à mi-révolution, soit en usant de procé lės inapplicables aux forêts. Il y aurait un moyen théorique que semblent préconiser, depuis quelque temps, certaines personnes qui se figurent que les arbres poussent en forêt comme des salades dans un jardin et qu'on doit les cultiver de même; ce serait de mettre de l'engrais. Buffon l'a essayé jadis et a reconnu bien vite que, pour s'en tirer, il faudrait vendre le bois au poids de l'argent, ce qui n'est pas possible, malheureusement pour les propriétaires de forêts. Avec des raisonnements et des chiffres savamment présentés, on arrive à prouver ce que l'on veut; ainsi, il n'ya. pas longtemps, on a pu voir qu'en utilisant des rejets de taillis comme fourrage, on pouvait faire rapporter à une forêt 1.000 fr. et plus par hectare et par an; c'est trop beau!

Lorentz et Parade (Culture des bois, 6e édition, p. 361) exposent déjà qu'on fera bien de fixer la révolution des taillis sous futaie à un âge variant de 30 à 40 ans, si l'on veut avoir des réserves à fût suffisamment long.

La question de l'avilissement du prix de la charbonnette n'avait pas encore été agitée; elle est venue peser lourdement sur la situation; elle a produit l'urgence des mesures propres à la modifier.

M. Broilliard semble avoir donné la véritable solution, qu'il a du reste exposée dans ses ouvrages sur le Traitement des bois en France (1881

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