Page images
PDF
EPUB

Charges

de la ville

de Paris.

Dommages

de la guerre.

Dommages de l'insurrection

du 18 mars.

Dommages

pôt énorme qu'a dû payer la ville de Paris, il est juste aussi de reconnaitre que cet impôt n'a pas frappé seulement la capitale de la France; qu'en tant que ville, Paris a dû en supporter une partie, à l'exemple d'autres communes qui, à ce point de n'avaient pas été davantage épargnées. En conséquence, et quelles que fussent les sympathies pour la grande cité qui, par une résistance héroïque de cinq mois, avait honoré le pays, il a jugé qu'un arrangement devait intervenir, et c'est à ce sentiment qu'il s'est efforcé de rallier le Conseil municipal.

vue,

Avant de fixer la part proportionnelle du sacrifice qui pourrait être assigné au Trésor, le Gouvernement a dû se rendre compte des charges de toute nature que nos derniers malheurs ont léguées à la ville de Paris. L'Assemblée nationale les connaît et, pour les lui rappeler, il suffira d'en mettre sous ses yeux l'indication som

maire.

Sans parler des dommages directs résultant de la guerre, et qui pour le département de la Seine seront réparés, comme pour les autres parties du territoire, dans la mesure et suivant les moyens déterminés par la loi du 6 septembre 1871, il est d'autres désastres plus tristes et plus ruineux encore en face desquels la ville se trouve, et qu'elle ne peut cependant laisser sans réparation. L'insurrection du 18 mars à elle seule lui a infligé, sous ce rapport, une perte de 70 millions dans l'intérieur de Paris. A l'extérieur ou dans ceux de ses arrondissements qui avoisinent la zone suburbaine, les dommages résultant du second siége peuvent être évalués à du second siege. 26 millions. L'État a déjà contribué à les réparer pour 6 millions. Il ne croit pas pouvoir aller plus loin; c'est désormais à la ville à faire le surplus, de même qu'elle est seule tenue d'indemniser ceux de ses habitants dont les propriétés mobilières ou immobilières ont été atteintes ou détruites sous le règne de la Commune. Enfin, un compte spécial des dépenses de guerre dont l'État entend décliner la responsabilité ajoute 10 millions environ (10,294,730 fr.) aux charges municipales. Ces divers éléments réunis donnent un total de 100 millions, ou de 302 millions si l'on y rattache les 202 millions de l'impôt de guerre, frais de change compris.

Dépenses

de guerre.

Part à la charge de l'État

dans

la contribution

de 200 millions.

Quelle était, dès lors, la part que l'État pouvait consentir à porter à son compte sur la contribution de guerre dont nous avons essayé de définir le véritable caractère, et qui a contraint la ville de Paris à emprunter 210 millions à la Banque de France? Le Gouvernement, Messieurs, y a sérieusement réfléchi, et après avoir examiné sous tous ses aspects celte question délicate, il vous soumet une combinaison qui mettrait les deux tiers de la somme (140 millions) à la charge du Trésor et laisserait le tiers restant (70 millions) à la charge de la ville, mais à la condition que celle-ci pourvoirait au payement des 20 millions applicables au second siége, qu'elle renoncerait à toute répétition vis-à-vis de l'État en ce qui concerne les 10,294,730 francs classés comme dépenses de guerre, et qu'enfin elle s'obligerait à acquitter en quinze annuités les 70 millions qui représentent l'évaluation des dommages particuliers causés par la Commune.

L'État donnerait ainsi satisfaction au sentiment de justice qui doit le déterminer à accepter sa part légitime dans la contribution de guerre imposée par l'armistice; il laisserait dans les conditions communes au reste de la France les dédommage

ments accordés pour les dégâts de la guerre étrangère; il prendrait sa part dans la réparation de destructions résultant de l'attaque de Paris par l'armée française; il ne participerait en rien directement au soulagement des maux causés par la guerre civile, mais il veillerait à ce que ce soulagement émanât, dans une mesure restreinte, mais équitable, de la ville elle-même.

Mais, dans les circonstances actuelles, l'État ne saurait songer à payer immédiatement cette somme de 140 millions. Le projet de loi la répartit en vingt-six annuitės, portant intérêt à 5 p. o/o. Ce serait donc un crédit de 9,738,400 francs qu'il y aurait lieu d'inscrire au budget de l'État de 1872 à 1897 inclusivement.

Moyennant cette allocation, la ville s'engagerait à acquitter directement les autres chefs de dépense, tels qu'ils viennent d'être énumérés.

Les 70 millions d'indemnités destinés aux particuliers victimes de la Commune seraient payés en quinze annuités égales, sans intérêt, ou à des époques plus rapprochées, si les ayants droit préféraient supporter un escompte de 6 p. o/o.

Quant à l'autre catégorie qui peut se prévaloir des déclarations faites à son égard par le Gouvernement en septembre 1871, il est juste de lui appliquer un traitement plus favorable, car les dommages sur lesquels se fondent ses réclamations sont le résultat direct et nécessaire des opérations d'attaque dirigées par l'armée de la France, et l'on conçoit dès lors que la réparation des dommages comporte, dans les deux cas, un traitement différent.

A l'égard de cette classe d'indemnitaires, le projet de loi stipule la réserve des intérêts ou le partage des frais d'escompte entre eux et la ville, si l'ayant droit préfère recevoir immédiatement le montant total de son indemnité.

Quant aux réclamations, elles seraient jugées sans appel, l'une par une commission départementale, l'autre par une commission chargée déjà de la répartition de l'a-compte de 6 millions. (Loi du 6 septembre 1871 et arrêté ministériel du 29 novembre suivant.) Ces deux commissions, on le sait, fonctionnent sous la présidence du préfet de la Seine.

Pour faire face à ces charges extraordinaires, la ville de Paris, Messieurs, sera obligée de recourir à des mesures également extraordinaires.

Son octroi ne pourrait supporter de nouvelles aggravations; un emprunt, après ceux qu'elle a émis déjà, ajouterait encore à son passif et n'allégerait le présent qu'aux dépens de l'avenir. La prudence commande de faire appel à d'autres moyens. D'accord avec le préfet de la Seine, le Conseil municipal de Paris demande l'autorisation d'établir sur le revenu cadastral des propriétés bàties et des chantiers imposés à la contribution foncière, sans aucune exception, une taxe au marc le franc qui courrait du jour de la promulgation de la loi. Cette taxe serait perçue pendant quinze ans l'Administration la calculerait de manière qu'elle produisît un rendement annuel de 5 millions. D'après les évaluations déjà faites, il y a lieu de penser qu'y compris les frais de rôle et de perception elle représenterait 1 fr. 18 cent., qualité qui se partagerait également entre le propriétaire et le locataire, soit pour chacun d'eux 59 centimes par 100 francs.

Enfin, le projet de loi autorise la ville de Paris à conclure avec des sociétés de

Mode

de payement

des diverses indemnités.

Taxe

sur le revenu cadastral

des proprietés

bâties.

Opérations d'escompte.

crédit telles conventions qu'elle jugera avantageuses aux indemnitaires, mais il limite le taux de l'escompte et en fixe le maximum à 6 p. o/o. Les premières opérations se feront à l'aide des fonds de trésorerie et des ressources de la dette flottante municipale.

Telles sont, Messieurs, les principales dispositions du projet de loi que nous avons l'honneur de vous soumettre. Il donne satisfaction, dans la mesure du possible et du juste, aux réclamations du Conseil municipal, et, en alléguant la situation financière de la ville de Paris, il lui permettra de soulager sans plus de retard des infortunes auxquelles sont acquises déjà toutes les sympathies de l'Assemblée nationale.

PROJET DE LOI.

ART. 1. Une somme de 140 millions est accordée, sur les fonds du Trésor, à la ville de Paris pour l'indemniser en partie de la contribution de guerre de 200 millions stipulée dans l'article 11 de la convention du 28 janvier 1871.

Cette allocation sera payable en vingt-six annuités égales comprenant l'amortissement et l'intérêt à 5 p. o/o.

Une première annuité de 9,738,400 francs est inscrite au budget du ministère de l'intérieur (exercice 1872).

ART. 2. Moyennant cette allocation, la ville de Paris prendra à sa charge :

1° Le solde, fixé à 20 millions, des indemnités restant dues pour la réparation des dommages matériels causés à l'intérieur ou à l'entour de Paris par le fait des opérations militaires du second siége;

2o Le payement des indemnités affectées à la réparation des dommages matériels soufferts par les propriétés mobilières ou immobilières de Paris et résultant de l'insurrection du 18 mars.

ART. 3. Le payement de ces deux ordres d'indemnités aura lieu ainsi qu'il suit : Pour la première catégorie, en quinze annuités égales, avec intérêt à 5 p. oo, ou en une seule échéance, sans intérêt, moyennant un escompte également supporté par la ville et l'indemnitaire;

Pour la seconde catégorie, en quinze annuités égales, mais sans intérêt, ou en une seule échéance, moyennant un escompte à la charge exclusive de l'indemnitaire.

ART. 4. Pour faciliter ces opérations, la ville de Paris pourra conclure avec des sociétés de crédit des traités d'escompte au taux maximum de 6 p. o/o, non compris un droit de commission de 2 p. o/o une fois payé. Elle pourra également les commencer, s'il y a lieu, à l'aide des fonds de trésorerie et des ressources de sa dette flottante.

ART. 5. Est autorisé pour une durée de quinze ans, aux conditions réglées par la délibération du Conseil municipal de Paris en date du 19 juillet 1872, l'établis

sement d'une taxe municipale sur le revenu cadastral des propriétés bâties et des chantiers imposés à la contribution foncière.

La perception de cette taxe courra du jour de la promulgation de la présente loi.

ART. 6. La ville de Paris s'obligera à renoncer à toute répétition contre l'État pour le remboursement des dépenses de guerre.

N° 13.

RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DU BUDGET DE 1873 CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI

PRÉCÉDENT,

Par M. ALFRED ANDRÉ, membre de l'Assemblée nationale (déposé à la séance du 25 mars 1873).

Messieurs, le Gouvernement et l'Assemblée nationale, associant leurs patriotiques efforts dans une action commune, ont incessamment poursuivi depuis deux années leur œuvre de réparation politique et financière.

Pour me borner à des faits qui sont encore présents à tous les esprits, il me suffira de rappeler comment l'Assemblée, par une série de lois et de décisions diverses, s'est efforcée déjà d'atténuer la trace profonde et trop visible encore de nos revers. Il y avait à relever des ruines, à panser des blessures; il fallait constater les sacrifices, mesurer la proportion des besoins et l'opportunité des réparations à con

sentir.

Pénétrée des difficultés de sa tâche, l'Assemblée nationale n'a pas cru possible de procéder par une grande mesure d'ensemble. Elle a préféré faire de chaque question l'objet d'une étude spéciale et procéder par solutions successives.

Et d'abord, par une loi votée le 6 septembre 1871, elle a décidé qu'un dédommagement serait accordé aux victimes de la guerre. Elle a mis, pour cet objet, à la disposition du Ministre de l'intérieur une première allocation de 100 millions.

En même temps, par l'allocation d'un à-compte de 6 millions, elle engageait la question de l'indemnité à accorder aux victimes des opérations militaires du second siége de Paris.

Se préoccupant ensuite des impôts prélevés par les autorités allemandes, elle en ordonnait la restitution, conformément à l'article 5 de la loi du 6 septembre 1871 (53).

Quelques jours après, une loi nouvelle abrogeait les divers décrets rendus pendant la guerre relatifs aux gardes nationales mobilisées et mettait à la charge de l'Etat toutes les dépenses imposées aux départements et aux communes par la créa

tion de ces forces armées.

Ces réparations, déjà considérables, n'étaient malheureusement pas les seules dont la nécessité s'imposât à la sollicitude du Gouvernement et de l'Assemblée.

Rappel

des précédents.

Réclamations

de la ville de Paris:

303 millions.

Les décisions législatives que je viens de rappeler brièvement ne s'appliquaient en aucune manière à la situation toute spéciale faite à la ville de Paris par les événements de la guerre. D'un commun accord, cette situation était toujours restée

réservée.

Dans le rapport, en date du 27 mars 1872, présenté à l'Assemblée nationale par la Commission du budget sur la situation financière de la France, l'honorable rapporteur, M. de la Bouillerie, évaluant dans un rapide résumé l'ensemble des charges auxquelles l'avenir aurait à faire face, n'avait garde d'oublier le remboursement probable de 200 millions payés à titre de contribution de guerre par la ville de Paris, pas plus qu'il n'omettait l'éventualité des remboursements à faire à la province. S'il ne parlait pas alors de la réparation, soit directe, soit indirecte, des dommages causés à Paris à divers titres, et surtout à l'occasion de la guerre civile, suite de l'insurrection du 18 mars, c'est qu'il y avait là entre la ville et l'État une suite de questions qui devaient comporter et de difficiles appréciations de fait et de laborieuses discussions de principe.

En attendant, la ville de Paris voyait par ces prolongations de délais s'aggraver de jour en jour ses souffrances; elle sollicitait par tous les moyens le Gouvernement et l'Assemblée d'y apporter, si c'est possible, un remède prompt et efficace.

Tels sont les justes motifs qui ont amené le Gouvernement, dans la séance du 2 août dernier, à déposer sur le bureau de l'Assemblée un projet de loi portant: 1° Remboursement en vingt-six annuités, à la ville de Paris, d'une partie de la contribution de guerre imposée par la convention du 28 janvier 1871;

2° Approbation de mesures proposées par le Conseil municipal pour la réparation de certaines catégories de dommages matériels causés aux propriétés mobilières ou immobilières de Paris.

C'est ce projet dont votre Commission du budget vient vous rendre compte aujourd'hui.

Le Gouvernement commence par rappeler et analyser les faits. Il explique quels sont les principes qu'il a eu en vue de faire prévaloir; il indique comment il envisage l'étendue et la mesure de sa responsabilité, suivant les origines diverses des dommages qu'il parait utile d'indemniser.

Avant d'entrer dans l'appréciation des divers articles de ce projet, votre Commission du budget a dù se livrer elle-même à l'examen approfondi des titres et chefs divers de réclamation sur lesquels se fondaient les demandes de la ville de Paris. Ces réclamations, ainsi qu'elle les établit, se composent :

[blocks in formation]
« PreviousContinue »