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Villars, le comte de Vintimille du Luc, ambassadeur de France en Suisse, et Saint-Contest, maître de requêtes. Ceux de l'empereur et l'Empire furent le prince Eugène, et les comtes de Gois et de Seilern.

Les nouveaux plénipotentiaires étaient chargés de régler les prétentions des parties contractantes, de manière que le prince Eugène et le maréchal de Villars n'eussent plus qu'à signer quand ils arriveraient.

Le traité de Bade ne diffère qu'en très peu de points de celui de Rastadt, et la plupart des articles sont matériellement les mêmes. Il n'y eut de légères modifications, que par rapport aux intérêts de quelques princes de l'Empire et de l'Italie. Il s'éleva toutefois une difficulté sur les titres. Les impériaux donnaient dans le traité le titre d'altissimus au prince Eugène, et le réfusaient au maréchal de Villars qui le réclamait en qualité de duc et pair. On en référa par un courrier au prince Eugène, qui y consentit.

Le nouveau traité de paix générale et définitive entre la France, l'empereur et l'Empire étant arrêté, le prince Eugène et le maréchal de Villars se rendirent à Bade, et le șignèrent le 7 de septembre 1714..

Les traités de Rastadt et de Bade firent la clôture de cette guerre terrible allumée en Europe par la mort de Charles II, dont les funérailles

1714. Considéra

tions sur les tadt et de Ba

traités de Ras.

de.

furent suivies de tant d'autres qu'on pourrait dire de lui, ce qu'on a déjà dit d'un autre prince, qu'il eût été à désirer qu'il ne fût jamais né, ou qu'il ne fût jamais mort.

Indépendamment des motifs généraux qui mettaient obstacle à la paix entre l'empereur et la France, tels que la renonciation à la monarchie espagnole par le premier, après y avoir régné sous le nom de Charles I, et l'espoir long-temps soutenu par des victoires, d'humilier, et de démembrer même la France; la négociation du traité de Rastadt offrit un obstacle secret de la part du ministre Torci, qui, dit-on, ne s'efforça pas de la seconder, blessé de ce que la correspondance du maréchal de Villars ne passait pas par ses mains, et était adressée au ministre de la guerre, Voisin, supérieur naturel du maréchal. Quoi qu'il en soit de cette circonstance imaginée peut-être par les ennemis de M. de Torci, et que son caractère semble même repousser, le maréchal de Villars montra de son côté, un grand zèle pour la paix; zèle estimable, puisqu'il lui sacrifiait l'espoir des. succès militaires et le sentiment de sa rivalité avec le prince Eugène (1).

(1) On frappa à Nuremberg, à l'occasion de la paix, une médaille, sur laquelle, d'un côté, on voyoit les tètes de ces deux généraux face à face, avec ces légendes: Olim duo ful

« Le maréchal de Villars, dit le maréchal de » Richelieu dans ses mémoires, était capable des plus grands plans. Il avait dans le caractère

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je ne sais quoi d'audacieux, mêlé à la grandeur » et à l'élévation. Il regardait de sang-froid les plus grandes entreprises, quelque dangereuses » qu'elles fussent. »>

Ce portrait indique assez quel ton le maréchal de Villars devait porter dans les négociations; car le caractère des guerriers bouillans se dissimule peu, même dans les circonstances qui demandent le plus de flegme (1).

Envoi de M. de Mornay

en Portugal;

tions.

La cour de Lisbonne, sous le règne de don Pedro II, après avoir d'abord reconnu Philippe v pour roi d'Espagne, et avoir contracté même ses une alliance avec lui, s'était jetée depuis dans le parti des ennemis de la maison de Bourbon, et avait accédé en 1703, à la grande alliance contre la France. Elle avait cédé autant aux instigations de la cour de Vienne et de Londres, qu'à des vues ambitieuses, se flattant qu'elle pourrait avoir sa part des dépouilles de l'Espagne, et craignant peut-être encore, que l'union de la

mina belli; et au revers: Nunc instrumenta quietis ; de l'autre côté il y avait une table, deux épées entourées d'oliviers, un casque pour écritoire, et un génie tenant une plume.

(1) Le maréchal de Villars devint ministre d'état en 1715. Il mourut à Turin en 1734, à la suite des fatigues de la campagne d'Italie, âgé de quatre-vingt-quatre ans.

instruc

France et de l'Espagne ne devînt fatale à son indépendance. La paix d'Utrecht ayant rétabli la position de l'Espagne et du Portugal sur l'ancien pied, la cour de Versailles ne vit point de difficulté à renouer avec ce dernier état, ses anciennes relations d'amitié.

Louis XIV nomma pour son ambassadeur près de Jean v, l'abbé de Mornay, et peut-être voulut-il par ce choix, plaire au roi Jean v, qui était livré à une extrême dévotion, et plus occupé de diriger sa chapelle, que d'administrer son royaume.

L'abbé de Mornay reçut ses instructions le 22 de mai 1714. C'est dans ces sortes de pièces qu'on peut pénétrer le véritable esprit de la politique d'un cabinet. De plus, celles-ci sont sorties de la plume de Torci, ministre digne d'une grande estime; et l'on doit les apprécier comme un de ces morceaux historiques et diplomatiques qui font à-la-fois connaître les choses et les personnes.

<< La maison de Bragance, qui règne aujour» d'hui sur le Portugal, disent les instructions, » s'étant maintenue sur le trône, principale»ment par les secours qu'elle reçut du roi, et

qui la soutinrent contre les efforts de l'Espa» gne, il était de l'intérêt de cette maison de » ménager un si puissant protecteur; et la na» tion portugaise naturellement opposée à l'espagnole; suivait sans peine une maxime dont

>>

» elle ne pouvait s'écarter qu'en se perdant, et » en donnant à ses ennemis les moyens de triom» pher d'elle.

» Ainsi l'union entre la France et le Portugal » a subsisté aussi long-temps que les Portugais » ont eu besoin de l'assistance du roi, pour » éviter d'être subjugués par les Espagnols; mais » comme la reconnaissance est une vertu rare, » et que les bienfaits reçus sont facilement ou

bliés, ceux du roi envers le Portugal, ne pu>> rent empêcher cette couronne de faire la paix >> avec l'Espagne, sans la participation dé sa » majesté.

» La guerre entre ces deux couronnes, étant >> finie en 1668, les Portugais profitèrent de la >> situation de leur pays, pour jouir du repos, >> sans prendre aucune part dans les guerres qui » agitèrent depuis le reste de l'Europe; contens » d'être oubliés des autres nations, et s'infor>> mant à peine de ce qui se passait entre elles.

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>> Cette heureuse tranquillité convenait par» faitement à des peuples présomptueux, aussi remplis de bonne opinion d'eux-mêmes que » de mépris pour les étrangers, paresseux, sans » forces, et réservant, pour ainsi dire, leur cou» rage pour la défense de leur pays; pleins de » valeur quand ils sont attaqués, mais inférieurs » aux autres hommes, quand il faut entrepren» dre, et sortir du Portugal. Ils trouvaient en

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