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»judice de la France, pendant le cours de la » guerre (1).

» Ce n'est pas un des moindres pour eux que » celui de l'établissement du paquet boot, qui » remplit le Portugal d'un grand nombre de » marchandises exemptes de droits d'entrée, et » dont le débit se faisant par conséquent à meil» leur marché, empêche absolument celui des » marchands de France; mais il faut travailler » avec beaucoup de circonspection et de secret. >> Il est donc d'une extrême importance d'abolir, » s'il est possible, cet établissement sous pré>> texte de la communication fréquente que les » affaires de la guerre et de l'alliance deman>> daient entre les deux cours.

» Il est nécessaire aussi que le sieur abbé de >> Mornay s'informe de l'état où est le Portugal » avec la Hollande, pour la fourniture des sels » de Setubal qu'il devait livrer à la compagnie » hollandaise des Indes, et dont les Hollandais » ont eu l'art de faire durer l'exécution pendant

(1) Préjudice : le mot n'est pas exact. On fait préjudice à un individu ou à une nation, en lui ôtant un droit juste et bien fondé; mais non en l'accordant exclusivement à une autre nation. Les faveurs sont libres entre les états ; et sont le signe d'une union plus étroite, qu'ils sont maîtres de nourrir par des bienfaits, ou de restreindre, d'éteindre même, en les supprimant, sans qu'on puisse envisager cette suppression comme une lésion ou un tort.

» un grand nombre d'années, au-delà du terme » où elle devait finir, en sorte que l'obligation » des Portugais n'est pas encore cessée.

» Enfin, l'intention de sa majesté est que le » sieur abbé de Mornay lui rende un compte » exact de tout ce qui regardera le commerce du » Portugal. La nouvelle découverte des mines >> d'or que cette couronne a fait ouvrir au Brésil, » les avantages qu'elle en retire présentement; >> ceux qu'elle peut en espérer dans la suite; et >> les oppositions qu'elle y trouve de la part des » habitans du pays.

» Sa majesté veut aussi que le sieur abbé de » Mornay l'informe exactement, soit par ses let>> tres, soit par des mémoires particuliers, de » l'état présent du gouvernement de ce royaume, » de ses forces de terre et de mer, du nombre de » troupes que le roi de Portugal a sur pied, de » celui de ses vaisseaux, de ses projets, soit pour » les augmenter soit pour les réduire, de ses re» venus; enfin, de tout ce qui peut donner une » connaissance juste et parfaite de l'état présent » de ce royaume, et de l'utilité des mesures que » sa majesté pourrait prendre avec le roi de >> Portugal, etc. etc. >>

Ces instructions indiquent le degré de surveillance que les états modernes se sont permis d'exercer les uns sur les autres, et avec quelle attention ils observent tout ce qui peut

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intéresser les affaires de l'état. Il ne serait peutêtre pas hors de hors de propos d'examiner le degré d'étendue que doit comporter cette surveillance très susceptible de dégénérer en une inquiète influence. Peut-être que le repos des peuples et des rois exigerait que les regards des ambassadeurs se portassent moins sur les objets qui ne les regardent pas.

Concurremment à ces instructions, et, ainsi que cela se pratique à l'égard des ambassadeurs et ministres, il fut remis à l'abbé de Mornay, un mémoire sur le cérémonial observé à l'égard des ambassadeurs français en Portugal; car le cérémonial n'est pas le même partout à l'égard des puissances du premier rang, et la complaisance, la courtoisie et le hasard v introduisent ly Ꭹ souvent des modifications que le protocole diplomatique recueille avec soin et jalousie. Le cérémonial, quoique assez insignifiant dans l'analyse philosophique, ne l'est pas, quand on songe que la dignité qu'on y porte agit beaucoup sur l'esprit des peuples, et que l'oubli ou le refus d'observer ces graves riens, seraient regardés comme un outrage public, qu'il faut prévenir par une sevère observance des formes. Toute profession relevée a des usages consacrés qui ont beaucoup moins d'inconvéniens que la confusion absolue des rangs, et la familiarité dans les relations publiques.

1714. Négociations

sujet de la

nitus.

La fin du règne de Louis xiv fut livrée à des disputes théologiques, qui ne mériteraient que avec Rome au le silence, si elles n'avaient donné naissance à bulle unigedes factions intestines, et à des négociations nombreuses avec la cour de Rome. La doctrine touchant la grace, contenue dans les écrits de Jansenius, évêque d'Ypres, mort en 1638, avait été condamnée en général, par le pape Urbain vin en 1642, et par les décrets d'Innocent x, du 3r de mai 1653, et d'Alexandre VII, du 16 d'octobre 1656. Ce dernier, à la demande du roi, soumit le clergé de France par une bulle du 15 de février 1665, à adhérer aux bulles dont on vient de parler, et à condamner sous peine de censure, de peines canoniques, et même de peines corporelles, les ecclésiastiques qui refuseraient de condamner les cinq propositions principales contenues dans les écrits de Jansenius. Le roi ordonna que la formule prescrite par le pape, serait acceptée sous trois mois, par le clergé du royaume sans exception, avec saisie à l'égard des évêques refusans, de leurs revenus et de suspension de leurs fonctions, et que les ecclésiastiques subalternes seraient privés de leurs bénéfices.

Les ouvrages de Quesnel, oratorien, intitulés: Abrégé de la morale de l'Evangile, et le Nouveau Testament en français avec des réflexions morales, qui parurent en 1693, 1695 et

1699, ayant été recommandés à la lecture des personnes pieuses par quelques évêques, rallumèrent les dissensions au sujet de la doctrine de Jansenius, dont les jésuites étaient les chauds contradicteurs; et, soutenus par le roi, qui était tout dévoué sur ce point aux suggestions du père le Tellier, son confesseur, ils se montrèrent non moins ardens à poursuivre la condamnation des ouvrages de Quesnel. Le pape Clément xi donna, le 8 de septembre 1713, une bulle commençant par ces mots : Unigenitus Dei filius, etc.; laquelle bulle contenait la condamnation de cent une propositions, extraites des ouvrages de Quesnel.

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Cette constitution fut présentée le 1oo de février 1714, par l'ordre du roi, à l'assemblée du clergé de France, présidée par le cardinal de Noailles. Quarante évêques, à la tête desquels était le cardinal de Rohan, évêque de Strasbourg, acceptèrent la bulle purement et simplement; mais sept autres, le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, l'archevêque de Tours, les évêques de Verdun, de Châlons, de Sens, de Boulogne, de Saint-Malo et de Bayonne, déclarèrent qu'ils ne pouvaient adhérer à la bulle, avant que le sens de plusieurs maximes qu'elle contenait, fut éclairci par le pape lui-même.

Le roi, par édit du 14 de février 1714, ordonna l'acceptation et l'observation de la bulle

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