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>> commencemens, ses instances ne causassent à » son altesse royale quelque embarras; mais qu'après s'être ainsi livré à son amitié, il avait » été frappé, au-delà de tout ce qu'on pouvait » dire, non-seulement de n'avoir point reçu de » son altesse royale l'assistance qu'il pouvait en » attendre; mais d'avoir vu la rébellion s'intro>> duire dans ses états par la France, et y être >> secrètement favorisée sous des dehors de bien>>veillance aussi trompeurs qu'insultans; que » cette impression qui durait encore dans ce » monarque, était le principal obstacle à l'union >> que son altesse royale avait proposée; im» pression d'autant mieux fondée, que, pour » rendre le roi de la Grande-Bretagne odieux à » ses sujets, la France avait répandu le bruit » qu'il voulait recommencer la guerre; et que » lorsque ce prince, pour détruire ce bruit in>> jurieux et faux, s'était avancé jusqu'à faire » donner un projet d'alliance tout dressé, on >> ne lui avait donné aucune réponse. »

L'abbé Dubois s'attacha à prouver que le régent n'avait fait aucune démarche, même depuis le retour du prétendant en France, qui n'eût marqué de la confiance et de la considération pour sa majesté britannique...... Il disait à l'égard du projet du traité d'alliance que le roi de la Grande-Bretagne avait fait dresser « que le duc d'Orléans avait été très dili

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» gent à y répondre, puisque le jour même que >> M. Duiwen-Worden l'avait remis à M. de Châ» teauneuf, celui-ci l'avait envoyé à son altesse

>>

royale, et avait reçu, quatre jours après, les » ordres qu'il avait toujours été prét de déclarer.'» Alors lord Stanhope lui répliqua brusquement, « que M. de Châteauneuf n'avait donc qu'à signer le traité, conformément à ce projet ; » mais l'abbé Dubois lui fit sentir qu'il n'avait jamais été demandé, ni pratiqué, qu'on signât un projet sans avoir conféré sur les difficultés que l'on y trouvait, afin de convenir des changemens avec les parties intéressées ; que les Anglais eux-mêmes, faisaient naître des difficultés avant l'examen du projet, puisqu'ils demandaient, comme préliminaire, que son altesse royale engageât le chevalier de Saint-Georges à se retirer derrière les Alpes ; qu'en pareil cas, on en avait usé en Angleterre avec plus d'égards pour les bienséances, et que le protecteur Cromwel, quoique très fier, et fort recherché par l'Espagne, s'était contenté de la parole de Louis XIV, touchant l'éloignement de Charles 11 et du duc d'Yorck, et n'avait pas refusé de siguer le 3 de novembre 1655, le traité de Westminster, avec le sieur de Bordeaux, ministre de sa majesté très chrétienne, avant que ces princes fussent sortis de France;

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« Que si l'on prétendait qu'en dernier lieu,

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» et avant la signature du traité d'Utrecht, on >> aurait, préliminairement à tout, fait sortir du » royaume le chevalier de Saint-Georges, on » n'était pas complétement informé des faits; » qu'on ignorait sans doute que cette condition, » et quelques autres avaient été stipulées au>> paravant, dans un traité secret signé par lord Bolingbrocke, lequel devait être brûlé après » la sortie du chevalier de Saint-Georges et la » signature du traité d'Utrecht; ce qui avait été » exécuté, et dont on pouvait encore fournir » des preuves; mais que son altesse royale, pour » donner pleine satisfaction à sa majesté britannique, offrait d'engager le chevalier de SaintGeorges à sortir d'Avignon, et à passer en » Italie, dans l'intervalle de la signature du » traité à celui de sa ratification; ce qui était >> l'équivalent de ce que les ministres de la Grande

>>

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Bretagne demandaient, puisque les traités » n'ont aucune force ni effet, qu'après qu'ils » ont été ratifiés, etc. »

Ces explications rapprochèrent les deux négociateurs, et lord Stanhope engagea l'abbé Dubois à aller à Hanovre, où se trouvait Georges 1er, avec lequel il pourrait traiter directement. L'abbé Dubois s'y rendit dans le plus grand mystère. Georges per l'accueillit fort bien, et les fondemens de la triple alliance ne tardèrent pas à être posés. L'abbé Dubois retourna à la Haye,

pour se concerter avec les ministres de Hollande et d'Angleterre, et régularisa le traité de la triple alliance, qui fut signé dans cette ville, le 4 de janvier 1717.

Par l'article II, la France s'obligeait à engager le prétendant, se disant roi de la GrandeBretagne, depuis la mort de Jacques II, à sortir de la ville d'Avignon, et à aller faire son séjour au-delà des Alpes, immédiatement après la signature du présent traité.

Les deux rois et les états-généraux (art. III) se promettaient réciproquement de refuser tout asile et retraite, aux sujets rebelles de l'un d'entre

eux.

Pour ôter tout soupçon de faire un nouveau port à Dunkerque, le roi promettait (art. IV) de détruire le port de Mardick, et de n'en jamais creuser à deux lieues de Dunkerque et de Mardick, ni d'élever des écluses. On conservait toutefois un canal de décharge des eaux, et pour le commerce.

On garantissait (art. V et suiv.) le traité d'Utrecht, ainsi que la succession à la couronne de la Grande-Bretagne, dans la ligue protestante, et à celle de France suivant le même traité. On stipulait la quantité de vaisseaux et de troupes qui devait être fournie à celle des puissances troublée dans ses possessions, ou attaquée audehors, etc.

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1717. Considéra.

triple alliance.

Les plénipotentiaires français furent l'abbé Dubois, et Castagnère, marquis de Châteauneuf (1), ambassadeur du roi près les ProvincesUnies; lord Cadogan pour l'Angleterre, et le baron de Reede et Heinsius, pour les états-généraux.

Le traité de la triple alliance fut en général tions sur la désapprouvé du public. On disait tout haut, que le régent sacrifiait à ses vues personnelles, la gloire et l'avantage de la nation ; que l'expulsion de France d'un prince malheureux, et qui n'était point à craindre pour l'Angleterre, était un acte de complaisance servile; que la démolition de Mardick était une atteinte portée à l'honneur du roi; que la position agitée et incertaine de la Grande-Bretagne, sous l'autorité de la maison d'Hanovre, ne la mettait point dans le cas d'imposer de pareilles conditions. D'autres pourtant, moins âpres dans la critique, voyaient, dans l'alliance de la Grande-Bretagne, le gage d'une

(1) M. de Châteauneuf, né à Chambéry en Savoie, avait été naturalisé français. En 1689, il fut nommé ambassadeur près la Porte, et refusa une ceinture de diamans que lui offraient les chrétiens de la Terre-Sainte, en remerciment de ses bons offices. Il passa en 1703 à l'ambassade de Portugal, et en 1713 à celle de Hollande, qu'il conserva jusqu'en 1718; il obtint alors, comme retraite, la place de prevôt des marchands de Paris.

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