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Flandre et du Hainaut, régna de l'an 1067 à 1070. Son gouvernement maintint une police si ferme, que le vol fut presque entièrement inconnu dans ses États. Aussi, disent les chroniqueurs, les maisons demeuraientouvertes pendant la nuit, et les instruments aratoires restaient dans les champs, sans que personne eût à craindre pour ses propriétés.

La mort de Baudouin de Mons plongea le pays dans la guerre civile. Il avait laissé la Flandre sous la couronne à son fils aîné Arnould, dont il confia la tutelle à Robert le Frison, et le Hainaut à son fils cadet Baudouin, sous la tutelle de sa mère Richilde. Mais cette femme ambitieuse ne se conforma point à cette espèce de pacte de famille que Baudouin VI avait fait jurer aux vassaux des deux comtés. Forte de l'appui du roi de France Philippe I, dont elle s'était assurée à force d'argent, elle s'empara de la Flandre impériale, et fit mettre à mort plusieurs seigneurs qui tenaient pour Robert le Frison. Celui-ci, secondé par les épées de la Hollande et de la Frise, et soutenu par presque toute la Flandre flamingante, essaya de terminer sa querelle et de maintenir ses droits par la force des armes. Philippe I était accouru au secours de Richilde, et la fameuse bataille du Mont-Cassel se

livra

au mois de février 1071. Elle dura deux jours. Le premier, Robert et Richilde furent pris; le second, le jeune Arnould fut tué. Les deux prisonniers ayant été échangés et l'héritier de Baudouin VI étant mort, le roi de France se retira, consentit à laisser Robert s'emparer de la couronne du jeune comte, et reçut de lui le serment d'hommage comme vassal du royaume. Dès lors Richilde n'aspira qu'à se venger. Elle vendit à l'évêque de Liége, Théoduin, la suzeraineté du Hainaut; et cette vente fut ratifiée par l'empereur Henri IV en 1071. L'année suivante, la guerre éclata de nouveau. La comtesse de Hainaut mar cha contre Robert avec presque toute la chevalerie de la basse Lorraine, et lui

livra bataille près de Broqueroy. Mais elle essuya une défaite si complète, que l'endroit où la rencontre eut lieu porte encore aujourd'hui, en souvenir de cet événement, le nom de MortesHaies. Robert le Frison put, dès lors, s'asseoir en paix sur le trône des comtes de Flandre, auquel enfin son neveu Baudouin renonça en l'an 1085. Il ne fut pas plus l'ami du clergé que plusieurs de ses prédécesseurs ne l'avaient été. Il s'arrogea même, en dépit des défenses papales, un droit de dépouille sur le mobilier des ecclé siastiques qui venaient à mourir. En 1085, il associa son fils Robert II à l'administration du comté, et partit pour la terre sainte, où il passa six ans, et d'où il ne revint que pour mourir en l'an 1093 au château de Winendale, près de Thourout, qui fut longtemps la résidence des comtes de Flandre.

Le mouvement des croisades commença à précipiter sur l'Asie la chevalerie chrétienne, presque au moment où Robert II prit en main les rênes du comté. Le concile de Clermont décida la première croisade. Parmi les chevaliers belges qui y prirent part, Robert II ne fut pas un des moins distingués à côté de ces autres Belges Baudouin II, comte de Hainaut, et Godefroid de Bouillon, duc de la basse Lorraine, qu'accompagnaient ses deux freres Baudouin et Eustache. Un grand nombre de nobles flamands et wallons les suivirent. Leurs exploits, la prise de Nicée et de Jérusalem, appartiennent à l'histoire universelle. Qu'il nous suffise done d'indiquer ici que Robert fut, dans cette expédition, nommé l'épée et la lance des chevaliers, et que ses compagnons voulurent lui donner la couronne du royaume de Jérusalem, qui fut placée sur la tête de Godefroi de Bouillon. Son épée, heureuse dans les guerres saintes, ne le fut pas moins dans celles qu'il eut à soutenir contre les empereurs Henri IV et Henri V, au sujet de la Flandre impériale et des îles de Zélande. Il périt, en 1112, sur le champ de bataille, dans une expédi❤ tion à laquelle il prit part avec le roi

de France contre le roi d'Angleterre Henri, qui avait refusé de continuer au comte de Flandre la somine annuelle de trois cents mares, que Guillaume le Conquérant s'était engagé à payer à Baudouin V et à ses successeurs. Il conserva dans notre histoire le surnom de Robert de Jérusalem. Baudouin IV avait commencé à chercher des alliances dans les maisons les plus puissantes de l'Allemagne; et son mariage avec Ogive de Luxembourg lui avait ménagé de ce côté de solides appuis. Robert II continua ce système en épousant Clémence, comtesse de Bourgogne, sœur du pape Calixte II. De ses deux sœurs Adele et Gertrude, la première devint la femme de Kanut, roi de Danemark; la seconde celle d'Henri III, comte de Louvain, et plus tard de Thierry, comte d'Alsace.

Pendant le temps que Robert de Jérusalem avait passé dans la terre sainte, la noblesse flamande, forte de l'absence du comte, s'était livrée à des violences et à des oppressions de toute nature. Les routes étaient devenues peu sûres, le commerce était presque anéanti, et la justice restait muette devant tous ces désordres. Baudouin VII trouva donc, à son avénement au pouvoir, une rude tâche à remplir; et il la remplit si bien, que plusieurs historiens expliquent par la fermeté dont il fit preuve pendant son règne, le surnom de Baudouin à la Hache qui lui fût donné. On lui attribue l'honneur d'avoir le premier opposé avec énergie le frein des lois à la tyrannie des nobles, et on lui doit le renouvellement de la loi connue sous le nom de Paix du pays, et jurée à Audenarde par Baudouin V, en l'an 1030. « Cette loi, dit l'annaliste Meyer, contenait, outre d'autres dispositions, la consécration du talion pour comprimer les excès de la populace, les meurtres et les brigandages. Ainsi il rétablit bientôt l'ordre et la justice. Selon le chroniqueur Hériman de Tournai, il parcourait régulièrement ses États pour y rendrejustice en tous lieux. On raconte meme (et la tradition populaire a consacré ce fait) qu'à Bruges il fit jeter dans

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une chaudière d'eau bouillante un chevalier, armé de toutes pièces, qui avait dépouillé une pauvre femme; et qu'il fit pendre dans son château de Winendale plusieurs nobles qui avaient détroussé des marchands sur la voie publique. Il mourut en 1119, des suites d'une blessure qu'il avait reçue à la tête, dans une guerre où il suivit, en sa qualité de vassal de France, le roi Louis le Gros, contre le roi d'Angleterre et le duc de Normandie. Et en lui s'éteignit la race flamande de la descendance légitime masculine de Baudouin I.

LA FLANDRE JUSQU'AU RÈGNE DE BAUDOUIN DE FLANDRE ET DE HAINAUT (1120-1191).

Maintenant nous allons voir la Flandre placée sous des princes étrangers, dont la plupart, n'ayant su se concilier l'affection du peuple, nous donnent ainsi la clef des troubles intérieurs et des soulèvements qui remplissent, sous leurs règnes, les pages de notre his

toire.

Ce fut d'abord Charles, issu d'Adèle, fille de Robert le Frison, et de Kanut, roi de Danemark. Ce prince avait été désigné par Baudouin VII lui-même comme son successeur au comté; mais ce riche héritage lui fut vivement disputé par Guillaume, vicomte d'Ypres, tils illegitime de Philippe, second fils de Robert le Frison. Le prétendant forma une ligue dans laquelle entrèrent Clémence, veuve de Robert II, remariée à Godefroi le Barbu, duc de la Basse Lorraine, le comte de Hainaut, et plusieurs des grands vassaux flamands. Mais il fut complétement défait par Charles de Danemark, qui déclara déchus de leurs fiefs les vassaux dont les épées s'étaient montrées dans les rangs de ses ennemis, et enleva à la duchesse Clémence quatre des douze seigneuries qui lui avaient été assignées pour douaire en Flandre. Cette victoire obtenue sur son adversaire, le comte trouva d'autres adversaires à combattre, c'est-à-dire les nobles à refréner, que Baudouin, son prédécesavait réussi à soumettre, mais non pas à dompter. Elevé depuis son

seur,

enfance à la cour de Baudouin à la Haché, il continua l'œuvre de cet homme énergique; il fit jurer l'observation de la Paix du Pays, et exerça une justice sévère, particulièreinent sur les grands du comté, dont il réprima par tous les moyens les brigandages et les guerres privées. Son amour de la justice et sa piété lui méritèrent les surnoms de Bon et de Juste que lui donnent les chroniques, et causèrent aussi la mort déplorable qui couronna sa vie. Voici quel est le motif qui donna lieu au sacrilege assassinat dont il périt victime. Pendant l'hiver extraordinairement rigoureux qui régna de l'année 1125 à 1126, une grande famine, produite par la disette, désola la Flandre. Le comte, après avoir épuisé ses propres trésors, força tous les accapareurs de grains à vendre le blé au peuple à un prix fixé par lui, et il enleva même à plusieurs riches bourgeois les céréales qu'ils tenaient dans leurs greniers. Ce fut la cause ou le prétexte d'une conspiration à la tête de laquelle se placèrent les membres de la famille Van der Straeten, et surtout l'un d'eux, Bertulphe, prévôt de Saint-Donat, à Bruges, et chancelier de Flandre. Le 2 mars 1126, ils exécutèrent leur projet. Malgré les avis qu'on lui avait donnés de toutes parts, Charles s'était rendu de bonne heure à l'église de SaintDonat, et disait ses prières vis-à-vis de l'autel, dans une galerie élevée qui communiquait avec le château. Pendant qu'il était ainsi en oraison, Bouchard, neveu de Bertulphe, s'approcha de lui, et lui fendit la tête d'un coup d'épée. A peine le malheureux comte fut-il tombé, que les conjurés accoururent, mutilèrent le cadavre, le précipitèrent dans la nef, et mirent à mort les domestiques qui avaient accompagné leur maître à l'église. Puis ils se répandirent dans la ville, semant partout la consternation et la terreur, et attaquant avec leurs partisans les demeures de leurs adversaires. La relation de ce crime, nous la trouvons dans un récit que nous en a laissé un témoin oculaire, Gualbert de Bruges.

Après ce forfait, qui plaça Charles le Bon au rang des martyrs et des saints qu'honore l'Église, les conjurés se retirèrent dans la citadelle de Bruges, le Bourg, où ils se trouvèrent bientôt assiégés par une armée accourue de tous les points de la Flandre, à la voix de Gervais Van Praet, chambellan du comte. La comtesse de Hollande, et le roi de France Louis le Gros, se joignirent aux assiégeants pour punir les coupables. Le Bourg pris d'assaut, les assiégés se retirèrent dans l'église d'abord, d'où ils furent refoulés dans la tour, du haut de laquelle la plupart furent jetés, après qu'on fut parvenu à leur enlever cette dernière position. Le prévôt fut attaché au gibet, et les maisons de ses complices furent rasées, et destinées à servir de places publiques à perpétuité. En mémoire de ce meurtre, on répéta tous les ans publiquement, dans l'église de Bruges, jusqu'à la fin du siècle passé, l'anathème fulminé con tre les meurtriers.

Cette fois, les prétendants se présentèrent en plus grand nombre pour recueillir l'héritage du beau comté de Flandre. L'histoire cite : le comte de Hainaut et Guillaume de Loo, tous deux descendants directs, l'un de Baudouin de Mons, l'autre de Robert le Frison; Guillaume de Normandie, fils de Robert, surnommé Courte-Cuisse; Arnould le Danois, neveu de Charles le Bon; Guillaume, vicomte d'Ypres ; la comtesse de Hollande, pour son fils Thierry VI; enfin, Etienne, comte de Blois, comme héritier de Mathilde, femme de Guillaume le Conquérant et fille de Baudouin V de Flandre. Thierry d'Alsace fut regardé par les Flamands comme l'héritier légitime du comte, en vertu du droit féodal. Mais Louis le Gros assembla les barons de Flandre à Arras, et parvint à leur faire accepter pour souverain Guillaume de Normandie, qui ne tarda pas à se faire reconnaître à Arras et à Lille. Les villes de Bruges et de Gand s'opposèrent d'abord à ce choix. Elles finirent par se soumettre, avec une grande répu

gnance, il est vrai, à cet étranger, que le roi leur imposa par la force des armes. Le pays souffrit considérablement dans la lutte de ces divers prétendants, dont quelques-uns essayèrent de s'y établir l'épée à la main. Guillaume Commença par courtiser la faveur des villes en leur accordant quelques priviléges, dont le plus remarquable est la charte de commune qu'il donna à la ville de Saint-Omer. Mais il ne tarda pas à enfreindre le serment qu'il leur avait fait de maintenir les franchises et les libertés du pays. Aussi, des troubles nouveaux éclatèrent bientôt. D'un côté, Arnould le Danois, Guillaume d'Ypres et Étienne de Blois continuaient d'agiter le pays avec des armées étrangères. De l'autre côté, Guillaume le Normand voulut tenter de se remettre en possession de la Normandie, dont son père Robert avait été dépouillé par Henri I, roi d'Angleterre. Tout cela nécessitait de grandes dépenses. Le comte ne put y subvenir qu'au moyen de taxes énormes dont il frappa le peuple. Il trouva un autre moyen dans la vénalité des charges. Enfin, pour se concilier les nobles, il ferma les yeux sur les exactions qu'ils exerçaient sur le pays avec une incroyable rapacité. Cet état de choses devint bientôt intolérable, et les villes s'insurgèrent l'une après l'autre, tandis que le prétendant Thierry d'Alsace acCourut au secours des mécontents avec une armée de cinq mille Allemands, et fut proclame à Bruges comte de Flandre. Louis le Gros essaya en vain de s'interposer, et l'évêque de Tournai d'effrayer les esprits en frappant le pays d'interdit. Les villes persistèrent à maintenir la déchéance de Guillaume le Normand, qui résolut de les soumettre par la force. Il fut tué sous les murs d'Alost, par un coup de flèche lancée par un arbalétrier de cette ville; et Thierry d'Alsace fut enfin unanimement reconnu par la Flandre tout entière et par le roi de France, auquel il prêta le serment de vasselage en 1132.

Ce prince trouva à remédier à beaucoup de difficultés, dont il parvint à

triompher par sa fermeté et par son énergie. Il élargit les immunités et les priviléges des villes, s'appliqua à s'attacher les grands, et fortifia cette constitution du pays, qui se maintint pendant six siècles à travers tous les orages politiques. Il se distingua par son zèle pour le clergé. Aussi le nombre des monastères et des abbayes s'accrut considérablement sous son règne. Il entreprit quatre voyages en Palestine, en 1138, en 1148, en 1157 et en 1163. Il épousa en premières noces Marguerite de Clermont, veuve de Charles le Bon; et ce mariage le fit excommnunier par le pape Honorius, car Charles le Bon avait été son cousin germain. Marguerite étant morte en 1130, il s'unit en Syrie à Sibylle d'Anjou, à laquelle les écrivains qui se sont occupés de l'histoire littéraire de Belgique attribuent l'introduction des cours d'amour et de l'art du gai savoir en Flandre. Outre les guerres saintes auxquelles Thierry d'Alsace prit part, il en eut plusieurs autres à soutenir, dont il sortit avec avantage. Ainsi, de retour d'une de ses croisades, il trouva la Flandre agitée par Baudouin de Hainaut, qui n'avait pas renoncé à ses prétentions au comté, et auquel s'étaient réunis le comte de Namur et l'évêque de Liége. Il battit complétement les alliés, et termina cette lutte en donnant sa fille Marguerite en mariage à Baudouin. Il ne fut pas moins heureux dans la querelle qu'il eut avec Florent, comte de Hollande, au sujet des exactions commises par ce dernier envers les marchands flamands. Florent fut battu sur mer, pris en 1165, et conduit prisonnier à Bruges, où il signa, trois années plus tard, un traité de paix et de commerce extrêmement favorable à la Flandre. Ajoutons encore que Thierry tira, en 1137 et en 1140, son épée dans la guerre que les seigneurs de Grimberghe firent au duc de Brabant, encore mineur; qu'il eut une rude lutte à soutenir, en 1140, contre Étienne de Blois, roi d'Angleterre, et contre Hugues, comte de Saint-Pol; et qu'il fournit, en 1148, un grand nombre de navires à la flotte

de deux cents voiles que la Flandre, le Brabant et l'Angleterre envoyèrent au secours d'Alphonse, roi de Portugal, contre les Maures. C'est ainsi que Thierry, après avoir consolidé par sa sagesse les institutions du comté, le fit respecter aussi par la force de son bras.

Son fils aîné Baudouin étant mort, Thierry laissa, en 1168, le comté à son fils Philippe, qu'il avait associé au pouvoir dès l'an 1157.

Le règne de Philippe d'Alsace (1169-1191) est d'une haute importance dans l'histoire constitutionnelle de Flandre. Il raffermit la paix publique; il continua l'organisation des villes et des châtellenies du pays, commencées par son père; il maintint les keures ou chartes des villes et en donna un grand nombre de nouvelles; enfin, il jeta les fondements de la plupart des droits des villes et des districts du comté. Mais, s'il mérita ainsi le titre de premier législateur de la Flandre, il ne s'appliqua pas avec moins d'ardeur à étendre au dehors le commerce flamand, surtout du côté de l'Allemagne.

Son zèle pour les guerres saintes l'entraîna, en Palestine, sur les champs de bataille où son père avait acquis tant de gloire. En 1177, il partit avec la fleur de la chevalerie flamande pour F'Italie, où il fit hommage à l'empereur Frédéric I pour le comté d'Alost, qui avait passé sous la souveraineté immédiate de la Flandre par la mort de Thierry d'Alost, neveu de Philippe. Arrivé en Palestine, il eut avec les Templiers de violents démêlés, à la suite desquels il quitta Jérusalem, pour assister le prince d'Antioche dans l'attaque d'une forteresse sarrasine. Plus tard il retourna dans la ville sainte et fit son pèlerinage au mont Sinaï. A son retour, il fut assailli par un grand nombre d'infidèles, qu'il parvint à repousser avec énergie. Luimême, disent les chroniqueurs, tua de sa main un Sarrasin d'une stature gigantesque, et lui prit ses armes, qui, assure-t-on, furent depuis celles de Flandre, savoir, un champ d'or au lion

de sable. Quand il fut revenu en Flandre, il se trouva mêlé aux grands débats que fit naître en France la question de la tutelle de Philippe-Auguste, dont le père, Louis VII, mourut en 1179. Philippe d'Alsace, qui avait été parrain d'épée de son jeune suzerain, fut chargé de sa tutelle et de la régence du royaume par Louis, au grand mécontentement de la reine mère, de son frère l'archevêque de Reims, et de leurs parents, le comte de Champagne et autres. Ce mécontentement s'accrut encore lorsqu'on apprit que le roi allait épouser Isabelle, fille du comte de Hainaut et nièce du comte de Flandre. Dans le contrat de ce mariage, négocié avec Louis VII, le comte Philippe assigna à sa nièce toutes les parties méridionales de son comté, qui formèrent plus tard l'Artois, et il obtint de son côté, pour le cas où sa femme viendrait à mourir sans postérité, la concession du comté de Vermandois, qu'il ne possédait qu'au nom de la comtesse. Ce mariage, et l'empire que Philippe d'Alsace exerçait sur l'esprit du roi, donnèrent lieu aux plus terribles querelles. Les grands du royaume étaient divisés en trois partis celui de la reine mère, celui du régent, et celui du duc de Normandie, qui était aussi roi d'Angleterre. La première explosion eut lieu à propos des villes et des châteaux compris dans le douaire de la reine mère, qui, selon les coutumes de France, devaient lui être remis après la mort de Louis VII. Le comte de Flandre ayant refusé de les lui rendre, le prétexte d'une rupture se trouva posé tout d'abord. La reine mère et ses frères, les comtes de Champagne, quittèrent tout à coup la cour et se réfugièrent en Normandie, où ils demandèrent du secours au roi Henri II d'Angleterre, contre l'oppression du comte de Flandre. Ce prince les accucillit avec grande joie, dans l'espoir de trouver une occasion de conquérir à son profit la faveur et l'autorité dont Philippe d'Alsace jouissait à la cour de France. En effet, les fugitifs se rapprochèrent bientôt de Philippe

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