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qu'ils se tuèrent en combattant les uns contre les autres (*).

Un nommé Bebricius de Calagurris se dévoua également aux mânes de Sertorius (**).

L'horreur et le mépris que Perpenna inspirait s'auginentèrent encore lorsqu'on apprit que, dans son testament, Sertorius l'avait institué pour héritier, et que c'était à lui que le commandement de l'armée était déféré. Il est vrai que l'assassin ne jouit pas longtemps du prix de son crime. Aitaqué, battu et fait prisonnier par Pompée, il crut racheter sa vie en livrant à ce proconsul la correspondance que Sertorius avait entretenue avec plusicurs membres du sénat de Rome.

(*) Voici leur épitaphe :

Hic multæ quæ se manibus
Q. Sertorii turmæ et terræ
Mortalium omnium parenti
Devovere, dum, eo sublato,
Superesse tæderet, et fortiter
Pugnando invicem cecidere,
Morte ad præsens optatà jacent.
Valete posteri.

Ici reposent maintenant, frappés d'une mort qu'ils ont désirée, les guerriers nombreux qui se sont dévoués aux månes de Quintus Sertorius et à la terre mère commune des mortels, parce qu'il leur était insupportable de survivre au chef qui leur était enlevé; ils sont tombés en combattant avec courage les uns contre les autres. Adieu à nos descendants.

(**) Voici son épitaphe:

DIIS MANIBUS Q. SERTORII
ME BEBRICIUS CALAGURRITANUS
DEVOVI, ARBITRATUS

RELIGIONEM ESSE, EO SUBLATO
QUI OMNIA CUM DIIS IMMORTALIBUS
COMMUNIA HABEBAT,

ME INCOLUMEN RETINERE ANIMAM.
VALE LECTOR QUI HEC LEGIS,

ET MEO DISCE EXEMPLO
FIDEM SERVARE.

7PSA FIDES ETIAM MORTUIS PLACET
CORPORE HUMANO EXUTIS.

Moi, Bebricius de Calagurris, je me suis dévoué aux mânes de Quintus Sertorius, pensant qu'il y avait impiété à conserver la vie après la perte de celui qui avait tout commun avec les dieux immortels. Adieu lecteur; apprends par mon exemple à garder la fidélité à tes amitiés. La foi est agréable même à ceux qui ont dépouillé leur enveloppe humaine.

Pompée méprisa cette lâcheté nouvelle. Il jeta au feu, sans les lire, les lettres qui lui étaient remises, et il fit décapiter le traître. Ceux des conjurés dont Pompée ne fit pas justice périrent tous promptement d'une manière misérable. Un seul survécut, mais ce fut pour vieillir dans la misère au fond d'un village, où il était pour tout le monde un objet d'exécration et de mépris.

Au reste, l'assassinat de Sertorius et l'exécution de Perpenna ne mirent pas fin à la guerre. Les débris du parti de Sertorius luttèrent encore pendant deux années. Les Romains furent obligés de faire le siége de plusieurs villes. Il en est un surtout qui est resté célèbre par la constance et par le malheur des assiégés. Les habitants de Calagurris, réduits à la plus affreuse famine, furent contraints à se nourrir de cadavres; et, pour se ménager pendant plus longtemps cette horrible ressource, ils salèrent les corps de ceux qui mouraient en combattant; aussi leurs souffrances passèrent-elles en proverbe à Rome. Pour exprimer les angoisses du besoin, on disait une faim calagurritaine. Malgré cette résistance désespérée, la ville fut prise et les habitants passés au fil de l'épée. Le sort de Calagurris jeta l'épouvante dans l'âme de ceux qui auraient encore pu tenter de se défendre; et la guerre de Sertorius fut terminée.

Pompée ne voulut pas quitter l'Espagne sans y avoir réparé en partie les désastres causés par cette lutte terrible. On dit qu'il fit embellir Pampelune, et qu'il lui donna le nom de Pompeiopo lis, c'est-à-dire, ville de Pompée (*). Ce fait et cette étymologie du nom que porte aujourd'hui la capitale de la Ñavarre sont révoqués en doute par beaucoup d'auteurs.

Ce qui est plus certain, c'est qu'il fit élever, dans les Pyrénées, des trophées pour perpétuer le souvenir de ses

(*) Strabon, livre I, dit que l'ancien nom de Pampelune était Jruni. Ir-un en basque signifie la ville bonne. C'est encore le nom d'une ville qui existe aujourd'hui sur la frontière de la Biscaye.

victoires. Ensuite il se rendit à Rome, où il se fit accorder, ainsi qu'à Métellus, les honneurs du triomphe.

Guerre de César contre Pompée, puis contre ses fils. - L'Espagne passe entre les mains d'Octave. De l'ère espagnole ou de sofar: des deux guerres de Cantabrie. De nouvelles guerres viendront bientôt ensanglanter la Péninsule ibérique. Mais, cette fois, la lutte ne s'élèvera plus entre Rome et l'Espagne. On ne comhattra plus pour savoir si cette dernière restera libre, ou bien si elle sera asservie; ce seront les Romains qui se déchireront entre eux; on verra marcher aigle contre aigle, et légion contre légion. Ce sera le sort de la république, la destinée du monde qui se décidera sur les bords de l'Ebre et du Bétis. Ces événements se rapportent donc bien plus à l'histoire de Rome qu'à celle dont nous nous occupons spécialement; ils ne sont qu'un accessoire de notre sujet; aussi nous n'en parlerons que d'une manière excessivement succincte.

César, qui devait jouer le plus grand rôle dans ces sanglantes dissensions, vint pour la première fois en Espagne comme questeur de l'armée d'Anthistius Tuberon, préteur de l'Espagne ultérieure. On dit qu'ayant trouvé à Cadix, dans le temple d'Hercule, la statue d'Alexandre, il versa des larmes. Il avait alors trente et un ans, et il pleurait en songeant qu'à son âge Alexandre avait déjà conquis toute P'Asie, tandis que lui, il n'avait encore pu rien faire pour rendre son nom célèbre. Il retourna à Rome pour revenir, une année plus tard, en qualité de préteur de l'Espagne ultérieure. Il trouva le pays assez tranquille, et seulement troublé de temps en temps par les incursions qu'y faisaient les habitants du mont Herminius. César leur fit la guerre, les contraignit à venir habiter dans la plaine, et, quand le temps de son gouvernement fut expiré, il revint à Rome, où les honneurs du triomphe l'attendaient. Il obtint aussi le consulat. Il avait pour collègue Calpurnius Bibulus; mais il

contraignit bientôt celui-ci à quitter la place; et, en s'unissant à Crassus et å Pompée, il forma le premier triumvirat. Les triumvirs se firent donner le gouvernement des provinces les plus importantes de la république. Pompée eut l'Espagne et l'Afrique en partage; César, chargé du commandement des Gaules, acheva de soumettre ce pays, et porta ses conquêtes jusque dans la Grande-Bretagne. Sa gloire et son ambition étaient devenues menaçantes pour Pompée, qui obtint contre lui un décret du sénat. On ordonnait au vainqueur des Gaules de quitter sa province et le commandement de son armée, sous peine d'être déclaré ennemi de la patrie.

Marc-Antoine, qui était alors tribun du peuple, protesta contre ce décret; mais, pour se soustraire aux violences auxquelles cette protestation l'avait exposé, il fut obligé de fuir déguisé en esclave. Il alla rejoindre César, qui représentait le parti démocratique. Čelui-ci, sous le prétexte de venger les droits du magistrat populaire contre les attaques des patriciens, franchit le Rubicon, qui formait la limite de son gouvernement, et marcha rapidement sur Rome. Ni Pompée, ni les consuls Métellus et Cornélius Lentulus n'avaient une seule légion à lui opposer. Ils furent donc forcés de prendre la fuite. Ils se retirèrent d'abord à l'extrémité de l'Italie, d'où ils passèrent en Macédoine, pour s'y défendre avec les légions d'Orient.

Cependant César, après avoir affermi dans Rome la domination de son parti, après s'être assuré de la possession de l'Italie entière, voulut enlever encore l'Espagne à son rival. Il se mit en route à la tête de son armée; avant de passer les Pyrénées, il crut important de s'emparer de Marseille, qui avait refusé de lui ouvrir ses portes. Mais, comme le siége durait plus longtemps qu'il ne l'avait espéré, il laissa devant cette ville une portion de son armée, pour se rendre, avec le reste, dans la péninsule Ibérique.

Pompée, prévoyant bien que César ne tarderait pas à attaquer ce pays,

avait envoyé des instructions à ses lieutenants. Voici comment le commandement était réparti entre eux : Afranius, avec trois légions, occupait l'Espagne citérieure; Pétreius, avec deux légions, était stationné dans la Lusitanie. Varron n'en avait qu'une pour défendre le pays qui se trouve entre le fleuve Anas et la Méditerranée. Pompée avait recommandé à Pétreius et Afranius de réunir leurs forces pour empêcher le passage des Pyrénées, tandis que Varron protégerait les frontières maritimes. Trois légions de César, commandées par Caius Fabius, un de ses lieutenants, forcèrent les défilés des Pyrénées que défendaient les Pompéiens; tandis que lui-même, avec une autre partie de son armée, alla débarquer à Emporium. Par des manoeuvres habiles, par des marches savantes, il eut bientôt vaincu les lieutenants de Pompée. On prétendit aussi qu'il ne devait pas cette prompte victoire seulement à la force de ses armes, et que Varron lui avait vendu sa province. Quoi qu'il en soit, l'Espagne tout entière ne tarda pas à se déclarer en sa faveur. Il en confia le commandement à Cassius et à Lépide, ensuite il revint rapidement à Rome, où il avait été nommé dictateur. De là, il passa en Épire, détruisit l'armée de son rival à la célèbre journée de Pharsale. Le chef du parti des patriciens, ce Pompée que ses contemporains avaient honoré du nom de grand, prit honteusement la fuite; et en débarquant en Égypte, où il allait chercher un refuge, il tomba sous le fer des assassins que Ptolémée avait envoyés au devant de lui. Après sa mort, ses fils Cnéius et Sextus vinrent porter la guerre en Espagne. Ils étaient à la tête d'une puissante armée, et avaient dans ce pays de nombreux partisans; aussi beaucoup de villes se déclarèrent-elles pour eux. Bientôt ils se virent maîtres de presque toute la Péninsule.

Pendant ce temps, César, forcé de rester à Rome pour y assurer sa puissance, se contenta d'envoyer à ses lieutenants quelques secours, afin qu'ils pussent se défendre contre les Pom

péiens. Enfin il passa lui-même en Espagne. Après plusieurs engagements partiels, on livra, près de la ville de Munda, une bataille générale. La victoire fut disputée avec tant d'acharnement, que César, voyant les siens faiblir, saisit un bouclier et se jeta à pied dans la mêlée. Aussi répétait - il qu'il avait souvent combattu pour l'honneur et pour la gloire, mais qu'à Munda il avait combattu pour sa vie.

Cnéius Pompée, fuyant devant le vainqueur, voulut gagner par mer l'Es pagne citérieure; mais une blessure qu'il avait reçue à l'épaule s'étant envenimée, il ne put supporter le roulis du bâtiment, qui lui causait de violentes douleurs. Il fallut qu'on le descendît à terre. Ses soldats le transportaient dans une litière, cherchant partout un endroit pour le cacher, car ils étaient vivement poursuivis. Enfin ils se retirèrent dans une caverne, où ils ne tarderent pas à être découverts et attaqués. Cnéius Pompée fut tué, et l'on porta sa tête à César. Quant à Sextus, son frère, il fut assez heureux pour se réfugier dans les montagnes de l'Espagne citérieure. Toute la Péninsule était au pouvoir du vainqueur, et beaucoup de villes, non contentes de se ranger sous sa domination, abandonnèrent leur nom pour y substituer le sien. Ainsi Attubi s'appela Claritas Julia; Evora, Liberalitas Julia; Iliturgi, Forum Julium. César était au comble du pouvoir. Il avait été déclaré dictateur perpétuel. On parlait même de lui donner le nom de roi; mais il ne jouit que cinq mois d'une puissance qu'il avait eu tant de peine à acquérir, et il tomba sous le fer des assassins.

Dès l'instant où César avait quitté l'Espagne, Sextus Pompée était sorti de ses montagnes pour lever de nouveau l'étendard. Il avait rallumé la guerre dans la Celtibérie, et remporté de grands avantages sur Asinius Pollion, à qui César en avait confié le commandement. Après la mort du dictateur, le sénat fit offrir à Sextus la restitution de ses biens et le commandement de la flotte, s'il voulait cesser

la guerre. Celui-ci eut la sagesse de préférer une paix avantageuse aux chances d'une lutte dont les résultats paraissaient incertains, et l'Espagne fut encore une fois pacifiée.

Cependant un nouveau triumvirat s'était formé. Octave, l'héritier et le neveu de César, Marc-Antoine et Lépide, s'étaient partagé les provinces romaines. Lépide avait eu l'Espagne avec la Gaule narbonnaise. Le reste de la Gaule avait été attribué à MarcAntoine. L'Italie, la Sardaigne, la Sicile et l'Afrique, étaient échues à Octave. Quant aux provinces de l'Orient, les triumvirs ne les partagèrent pas, parce qu'elles étaient occupées par Brutus et par les autres assassins de César. Bientôt Lépide ayant été nommé consul, fut obligé de quitter l'administration de l'Espagne. Cette province passa entre les mains d'Octave, qui la fit gouverner par le propréteur Cnéius Domitius Calvinus. Celui-ci ayant apaisé quelques troubles qui s'étaient élevés dans le pays et l'ayant rangé presqu'en entier (*) sous la domination d'Octave, un décret déclara que désormais l'Espagne serait tributaire de Rome; qu'elle payerait chaque année une somme déterminée, æra singulorum annorum. Cet acte servit de point de départ à un nouveau système de chronologie. On commença à compter ce qu'on appelle l'ère d'Espagne ou de César-Auguste. Elle a commencé en l'année 704 après la fondation de Rome, trente-huit ans avant la naissance du Christ, qui par conséquent a eu lieu en l'an 39 de l'ère espagnole ou 753 de Rome. Cette manière de compter les années a été usitée en Aragon jusqu'à l'année 1358 de l'ère chrétienne; en Castille jusqu'à 1383, et en Portugal jusqu'à 1415.

Les Maures d'Espagne n'ayant pas de mot qui correspondit précisément au mot ère, avaient appelé les années de l'ère d'Espagne les années de so

(*) Les Romains n'avaient pas encore pénétré chez les Astures, et n'avaient dompté ni les Vascons ni les Cantabres.

phar (*), c'est-à-dire les années de cuivre, parce que le mot sophar repond précisément au latin æs, dont le mot ère est dérivé.

Le décret d'Octave fut bientôt suivi d'une disposition nouvelle qui changea la division territoriale du pays et separa l'Espagne en trois provinces: la Bétique, la Lusitanie et la Tarraconaise. Octave laissa au sénat le gouvernement de la Bétique, considérée comine la plus soumise et la plus tranquille des trois provinces. Elle fut appelée Sénatoriale. Les deux autres, regardées comme plus guerrières et plus turbulentes, furent des provinces impériales; car César avait reçu le titre d'empereur, et au nom de César qu'il avait pris comme successeur de son oncle, le sénat avait ajouté le surnom d'Auguste. César-Auguste concentra toutes les forces militaires de l'Espagne dans les deux provinces qu'il s'était attribuées. Il se montra prudent en agissant de cette manière; car deux peuples de la Tarraconaise qui n'avaient pas encore été subjugués commencèrent à faire des incursions dans le pays soumis à la domination romaine. L'empereur se disposait en ce moment à passer dans les îles Bri

(*) C'est à l'obligeance du savant M. Reynaud, employé de la bibliothèque royale, que je dois cette explication, et je saisis avec empressement une occasion de rendre hommage à l'inépuisable complaisance des employés de ce magnifique établissement. Je ne parle pas du zèle avec lequel ils remplissent leurs fonctions: tout le monde a pu le mettre à l'épreuve; mais ils vont plus loin encore, et jamais on ne s'est adressé en vain à eux pour obtenir un renseignement que leur science et leur érudition leur permettent toujours de donner. C'est ainsi que j'ai été guidé par M. Alp. de Longperrier dans le choix des médailles dont la gravure est jointe à cet ouvrage. Il m'a donné l'interprétation des légendes arabes inscrites sur les pièces d'Hesham et de Suleiman. M. Reynaud a bien voulu me fournir entière la légende de la monnaie mozzarabe iné lite d'Alphonse VIII, dout quelques mots se trouvent effacés sur la médaille de la bibliothèque royale.

tanniques pour en achever la conquête. Il changea de dessein. Après avoir fait ouvrir le temple de Janus, qui, pour la troisième fois depuis la fondation de Rome, avait été fermé lors de sa victoire sur Marc-Antoine, il rassembla une armée puissante, et réunit aussi une flotte sur la mer Cantabrique pour empêcher que les ennemis ne pussent recevoir de secours par mer. Les Cantabres, en voyant les forces dont disposaient les Romains, se gardèrent bien de descendre dans les plaines pour y livrer une bataille. La guerre d'embuscades, d'escarmouches, de surprises, où la connaissance des localités, la force et la valeur de chaque individu entrent pour beaucoup dans le succès, pouvait seule leur être avantageuse; mais eux montagnards, qui attaquaient sans ensemble ou se retiraient sans ordre, ne devaient pas songer à livrer de grandes batailles, où la victoire dépend autant de la discipline et de la tactique des combattants que de leur courage et de leur impetuosité. Cependant, après beaucoup de tentatives inutiles pour les amener à un combat général, les Romains, en feignant de fuir, parvinrent à les attirer en plaine auprès de la ville de Vellica. Au premier choc, les Cantabres furent mis en deroute. Ils se retirèrent en fuyant; mais comme ils ne pouvaient se diriger du côté de la mer, où ils eussent rencontré d'autres Romains, ils se jetèrent dans le pays des Astures, et se réfugièrent sur une hauteur que les Romains appelaient le mont Vindius. Elle était très-escarpée; aussi les Romains n'essayèrent-ils pas de l'escalader. Ileût été imprudent de vouloir lutter à la fois contre la difficulté des lieux et contre des gens qui se battaient en désespérés; mais ils entourèrent la montagne entière d'un retranchement qui n'avait pas moins de quinze mitles (*) de développement. Privée ainsi de toute communication avec le reste du pays, l'armée des Cantabres et des Astures se vit bientôt réduite à la plus horrible famine; mais préférant mourir

(*) 20 kilomètres.

6 Livraison. (ESPAGNE.)

plutôt que de se rendre, ils se tuèrent entre eux. Beaucoup, dit-on, eurent recours au poison pour se procurer la mort. Enfin les Romains firent vingttrois mille prisonniers. Ils eurent la cruauté de soumettre quelques-uns des captifs à d'horribles supplices; mais ceux-ci les endurèrent en chantant. On vendit comme esclaves ceux qui furent considérés comme les plus dangereux, c'est-à-dire les plus braves. Enfin on essaya d'en incorporer un certain nombre dans les légions. Il restait encore à vaincre les Astures, dont une partie s'était jetée dans la Lusitanie, tandis que les autres n'avaient pas quitté le sol de leur patrie. Octave divisa ses forces en deux armées. L'une, sous le commandement de Carisius, alla combattre dans la Lusitanie. Les Astures vinrent d'euxmêmes à sa rencontre pour lui livrer bataille. La lutte dura deux jours entiers; enfin le lieutenant d'Octave resta vainqueur. Celui-ci, de son côté, prit Lancia, principale place forte des Astures et leur centre d'action; en sorte qu'ils ne tardèrent pas à succomber entièrement.

Dès que la tranquillité eut été rétablie, César-Auguste s'occupa de la rendre durable en élevant des forteresses, en fondant des villes qui pussent tenir les populations en respect. Il fonda au pays des Astures une ville qu'il fit habiter par deux légions, et qui en reçut le nom de Legio septima gemina. Sur la frontière qui séparait la Bétique de la Lusitanie, le long du fleuve Anas, il éleva une ville destinée à servir de retraite aux vétérans de son armée. Aussi reçut-elle le nom de Augusta - Emerita (*). Un peu plus bas, en suivant le cours du même fleuve, il fonda Pax-Augusta, aujourd'hui Badajoz. La ville de Bracara, du pays des Gallaïques, reçut beaucoup de vétérans au nombre de ses habitants, et prit le surnom d'Augusta. Enfin, dans la vallée de l'Ebre, Šalduba fut agrandie, et changea son

(*) Emeriti, vétérans; c'est aujourd'bui Mérida.

G

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