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tugal; il avait fait l'autre comte de toute la Galice; mais ces honneurs n'avaient pas suffi à l'ambition de ses gendres. Ils avaient formé une alliance pour s'emparer du trône après la mort du roi. Ce traité ne fut pas tenu assez secret; Alphonse eut des preuves de la haine qu'ils portaient à Zaïda, et de leur coalition pour dépouiller l'infant Sancho de la couronne (*). Il avait donc conçu contre eux un juste ressentiment. Le comte Raymond était mort peu de temps avant le désastre d'Uclez, laissant un fils en bas âge. Cet enfant, appelé AlphonseRaymondez, se trouvait, par la perte du jeune Sancho, le seul descendant mâle du roi Alphonse le Brave. Suivant l'ordre naturel des successions, il devait être un jour son héritier; mais le roi reportait sur lui une partie du ressentiment que le comte Raymond avait merité. Il le faisait donc élever loin de la cour, au fond de la Galice, et il résolut de donner un nouveau mari à sa fille. Ses vues se tournèrent du côté de don Alphonse Ier, qui, depuis 1104, était monté sur le trône d'Aragon. Les nobles castillans furent blessés du choix qu'il faisait d'un prince étranger. Ils le considérèrent comme injurieux pour eux puisqu'il exprimait dans leur opinion que le roi ne trouvait aucun d'eux digne de s'asseoir sur le trône. Cependant comme ils n'osaient pas adresser eux-mêmes leur réclamation à Alphonse, ils lui firent parler par son médecin. Le roi fut vivement irrité de leurs prétentions. Il défendit à leur interprète de se représenter jamais devant lui, et il donna la main de sa fille à don Alphonse d'Aragon, quoiqu'ils fussent cousins issus de germain (**).

(*) Le texte de ce traité se trouve dans d'Achery, Spicilegium veterum scriptorum, t. III, p. 418.

(**) C'est par erreur que M. Viardot, dans son Histoire des Arabes, dit qu'ils n'étaient parents qu'au septième degré; c'est au sixième qu'il faut dire d'Urraca à son père Alphonse, il y a un degré ; à Ferdinand son aïeul 2; à Sancho le Grand son bisaïeul, 3; 17 Livraison. (ESPAGNE.)

Lors du départ de son fils pour la désastreuse campagne d'Uclez, Alphonse était déjà malade; le chagrin augmenta encore ses souffrances. Cependant il montait tous les jours à cheval par l'ordre de ses médecins qui essayaient, par cet exercice, de rappeler la chaleur dans son corps accoutumé à la fatigue. Enfin, vers la fin de juin, il se sentit encore plus faible; il vit bien que le moment était venu pour lui de s'occuper uniquement des intérêts de l'autre vie. Il avait alors, dit Mariana, soixante et dix-neuf ans, et il mourut le 1er juillet 1109.

Alphonse avait mérité que ses contemporains lui déférassent le surnom de Brave. Sa libéralité l'avait fait appeler aussi Alphonse à la Main trouée. Il était sans jactance dans la bonne fortune, et jamais il ne se laissa abattre par l'adversité. Il joignait aux qualités du vaillant capitaine les talents de l'homme d'État. Il avait surtout le talent si rare de se faire aimer; aussi la nouvelle de sa mort fut-elle accueillie dans tous ses États par un deuil général, comme si le peuple eût compris que des jours de trouble et de discorde allaient succéder aux temps de gloire et de prospérité.

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et de dissensions intestines. C'est l'his-
toire de toutes les époques où le pou-
voir tombe entre les mains d'une fem-
me trop faible pour en supporter le
fardeau, trop orgueilleuse pour recon-
naître son insuffisance. Urraca voulait
bien qu'Alphonse fût le mari de la
reine de Castille; mais elle voulait
aussi rester seule maîtresse dans les
États que son père lui avait laissés.
Elle prétendait y exercer seule l'auto-
rité souveraine, et ne souffrait pas
même qu'Alphonse y prît le nom de
roi. Peut-être n'est-il pas juste de lui
imputer à elle seule tous les torts que
lui donne l'histoire. Beaucoup de no-
bles castillans se trouvaient humiliés
d'obéir à un prince aragonais, et par
leurs paroles aussi bien que par leurs
actions ils fomentaient l'orgueil d'Ur-
raca et l'encourageaient à oublier
qu'elle était épouse, pour se rappeler
seulement qu'elle était souveraine. Al-
phonse le Batailleur, de son côté, n'é-
tait pas de caractère à se soumettre aux
caprices d'une femme présomptueu-
se, imprudente, volontaire. Il portait
aussi une couronne, et ne voulait être
nulle part l'inférieur de celle qu'il avait
reçue pour compagne. Il ne pouvait
tolérer l'orgueil de tous ces nobles
qui entouraient sa femme, et qui
Soufflaient la discorde dans son mé-
nage et dans l'État. Les choses en
vinrent au point qu'il fit arrêter la
reine et la lit enfermer dans le châ-
à
teau de Castellar; mais la reine,
l'aide des seigneurs de son parti, par-
vint à s'échapper. Elle courut se met-
guerre
tre à la tête de ses sujets, et la
éclata entre l'Aragon et la Castille.
Alphonse le Batailleur avait pris des
précautions pour s'assurer de la pos-
session d'un grand nombre de villes
dans les États de sa femme. Il en avait
remis le commandement à des hommes
qui lui étaient dévoués, à des Arago-
nais ou à des Castillans qui avaient em-
brassé son parti; car parmi les Castil-
lans eux-mêmes il en était qui aimaient
mieux encore obéir à un prince ara-
gonais qu'aux favoris d'une femme
débauchée. Soit à tort, soit à raison,
Urraca était accusée d'entretenir des

liaisons coupables avec plusieurs sei-
gneurs les comtes don Gonçalez de
Lara et don Gomez de Candespina pas-
saient surtout pour être les plus avan
cés dans ses bonnes grâces.Ôn raconte
même que de ses amours avec ce der
nier elle eut un fils appelé Fernando,
à qui sa naissance illégitime fit donner
le surnom de Hurtado, le dérobé. C'est
de lui, dit-on, que la célèbre famille
des Hurtados a tiré son origine. Quant
au peuple, il supporte tous les maux en
fantés par les folies des rois; mais il
n'est pas de loi, pas d'ordonnance capa-
bles de l'empêcher de flageller le vice:
aussi, dans ses épigrammes, dans ses
chansons, il racontait les amours de la
reine et stigmatisait sa vie infâme.

Alphonse profita de cette disposi-
tion des esprits pour s'emparer d'une
partie de la Castille. Les gouver
neurs de quelques places les lui don-
nèrent, d'autres les lui vendirent. Mais
au milieu de toutes ces trahisons, de
tous ces manques de foi, on aime à
rencontrer un acte de loyauté; on se
plaît à le redire: Peranzulez (*), noble
castillan, avait, avant ces dissensions,
reçu du roi d'Aragon le gouvernement
de plusieurs places de la Castille et il
lui avait prêté foi et hommage comme
à son seigneur. Quand la guerre éclata,
Peranzulez se trouva fort embarrassé;
car il lui sembla qu'il manquerait à la
justice s'il remettait au roi des cités quí
appartenaient à doña Urraca; et d'un
autre côté, il avait prêté serment de
fidélité au roi. Voici comment il s'y
prit pour mettre d'accord son serment
et l'équité. Il remit les places à des
garnisons castillanes, et alla livrer sa
personne à Alphonse le Batailleur pour
recevoir le châtiment que ce prince lui
imposerait. Dans le premier moment
de la colère, Alphonse voulait le faire
mettre à mort; mais les seigneurs
aragonais chargés de le juger décide
rent qu'il avait rendu à chacun ce qui
lui appartenait à la reine, les villes
dont elle était la souveraine naturelle
au roi, le vassal qui n'avait pas rempli

(*) Zurita, Anales de la Corona de Ara gou, le nomme Pero Anzurez.

ses engagements. Ils déclarèrent donc qu'il avait fait noblement son devoir, et bientôt Alphonse lui-même, lorsque sa colère fut calmée, ne put s'empêcher d'accorder à la loyauté de Peranzulez les éloges qu'elle méritait.

Les Almoravides n'eurent pas plutôt connaissance des querelles qui` divisaient les chrétiens, qu'ils concurent l'espérance de reconquérir tout ce qu'Alphonse le Brave leur avait enlevé. His ravagèrent les environs de Tolede et vinrent même mettre le siége devant cette ville. Le guerrier chargé de la défendre était un vieux compagnon du Cid : c'était Alvar Fañez de Minaya. Il ne se borna pas à repousser les assauts; le septième jour après que les ennemis eurent investi la place, il fit une sortie, pénétra dans leur camp, incendia toutes les machines qu'ils avaient préparées pour battre les murailles, et il leur fit éprouver de si grandes pertes, qu'ils abandonnèrent le siege. Ils allerent attaquer Madrid, espérant qu'ils en auraient plus facilement raison. Ils en ruinèrent les murailles; mais ils ne purent parvenir à s'en rendre maîtres. Ils se retirèrent, emportant néanmoins un riche butin, et emmenant un grand nombre de prisonniers. L'audace des Almoravides et la facilité avec laquelle ils avaient ravagé le pays, étaient dues en grande partie aux dissensions qui déchiraient la Castille. Cependant, la crainte de livrer ainsi les chrétiens aux attaques des musulmans ne fut pas suffisante pour rétablir la paix entre Alphonse et doña Urraca. La reine, désespérée de voir un si grand nombre des principales villes de ses États entre les mains des Aragonais, rassembla une armée dont elle donna le commandement aux comtes don Pedro Gonçalez de Lara et Gomez de Candespina. Ils marchèrent au-devant d'Alphonse, et le rencontrèrent dans un lieu appelé le champ de l'Epine. Le comte de Lara, qui conduisait la première ligne des Castillans, ne put soutenir le choc des ennemis. Il fut mis en fuite. Le comte Gomez fit de vains efforts pour rappeler la victoire, il fut tué en com

battant. Un chevalier de la maison d'Olea, qui portait sa bannière, ayant eu son cheval tué et les deux mains coupées, saisit sa bannière entre ses bras afin de ne pas la laisser abattre, et il fallut le tuer pour la renverser. Alphonse profita de l'avantage qu'i! venait d'obtenir pour pénétrer au cœur des États de doña Urraca. Il prit beaucoup de villes, et alla même assiéger Astorga. Mais il ne put s'en rendre maître. Il gagna aussi plusieurs batailles contre l'armée de la reine et contre les Portugais que cette princesse avait appelés à son secours; puis, après tous ces succès, il fut à son tour assiégé dans Carrion. Cependant, avec l'aide du grand nombre de partisans qu'il avait parmi les sujets même d'Urraca, il parvint à sortir d'embarras.

Le pape Pascal II, touché de l'état où se trouvaient les affaires d'Espagne, envoya un légat pour rétablir, si cela était possible, la bonne harmonie entre les deux époux. En 1114, un concile fut réuni dans la ville de Palencia, et l'on y décida que le degré de parenté qui existait entre Alphonse et Urraca etait un obstacle à la validité du mariage. Toutes les prétentions du roi sur les États de sa femme furent détruites par cette décision; aussi se laissa-t-il reprendre une partie des villes qu'il y avait occupées. Néanmoins, ce divorce ne fut pas suffisant pour ramener la paix dans les royaumes de doña Urraca. Déjà en 1112, les Galiciens, mécontents de son administration, avaient proclamé roi de Galice, Alphonse, ce jeune fils qu'elle avait eu de son mariage avec le comte Raymond. En 1116, plusieurs villes de Léon, de l'Estrémadure, de la Castille, et Tolède même, suivirent cet exemple. Le royaume resta ainsi partagé pendant trois années entre la reine et son fils: mais chaque jour la conduite d'Urraca excitait davantage l'indignation populaire. A Ségovie, les habitants se soulevèrent et se saisirent du comte don Pedro Gonçalez de Lara, son favori, et le renfermèrent dans le château de Mansilla. Urraca,

furieuse de cet outrage, se retira dans la ville de Léon où elle ne tarda pas à être assiégée par les partisans de son fils. Forcée de se renfermer dans la

citadelle, elle y fut si vivement pressée, qu'elle fut obligée de se rendre, et que le reste d'autorité qu'elle exerçait encore lui fut enlevé. On ne sait pas au juste la date de sa mort. Mais on pense qu'elle survécut de dix-sept années à son père, ce qui reporterait l'époque de son décès en 1126. Quelques auteurs disent qu'elle mourut dans le château de Saldaña, des suites d'une couche. La chronique d'Alphonse VII raconte qu'elle avait osé porter une main sacrílége sur le trésor de l'église de Saint-Isidore de Léon, et que, par un juste châtiment de Dieu, elle expira sur le seuil de l'église, ayant encore un pied dans le lieu saint, l'autre dehors (*).

PRISE DE TUDÈLE PAR ALPHONSE LE BATAIL-
LEUR. SIEGE DE SARAGOSSE. BATAILLE

DE CUTANDA. -PRISE DE SARAGOSSE.
LÉGENDE DE NOTRE-DAME DEL PORTILLO.
EXPÉDI-
-ORIGINE DES ALMOHADES.-
TION D'ALPHONSE LE BATAILLEUR AU COEUR
DE L'ANDALOUSIE. CESSION DE ROTA-
EL-YEHUD FAITE AUX CHRÉTIENS. -BA-
TAILLE DE FRAGA. MORT D'ALPHONSE
LE BATAILLEUR.

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Le concile de Palencia, en déclarant la nullité du mariage d'Alphonse le Batailleur, détruisit toutes les préten tions que ce prince pouvait élever sur les royaumes de Castille et de Léon. Il tourna donc ses armes vers les États des rois arabes de Tudèle et de Saragosse. Il lui vint de France de nombreux auxiliaires. Gaston de Béarn, Centulle de Bigorre, Rotron du Perche, le comte de Comminge et bien d'autres seigneurs, qui regardaient cette entreprise comme une guerre sainte, se joignirent à lui. Alphonse commença par s'emparer de quelques villes voisines, Borja, Almudebar. Il y mit de bonnes garnisons pour qu'elles cou

(*) Pour peindre sa mort, la chronique d'Alphonse se sert d'une expression dont notre langue n'ose pas rendre la triviale énergie: rebentò, elle creva.

russent le pays; puis, quand il eut ainsi ruiné les environs et affamé Saragosse, il vint, dans le courant de l'année 1116, mettre le siége devant cette cité.

Les Maures de Tudèle comprirent bien que Saragosse une fois entre les mains des chrétiens, leur ville située sur l'Ebre, 14 lieues plus haut, se trouverait privée de toute communication avec les autres États musulmans de l'Espagne, et ne tarderait pas à succomber. Défendre Saragosse, c'était se défendre eux-mêmes. Ils firent donc tout ce qui était en leur pouvoir pour secourir Abd-el-Melech surnommé Amad-Dawlah, qui en était alors le souverain. Ils ne cessèrent de harceler les assiégeants. Rotron, comte du Perche, ayant été chargé de mettre un terme à ces attaques continuelles, alla se placer en embuscade dans les environs du Tudèle. Il détacha ensuite quelques cavaliers avec ordre de courir la campagne afin d'attirer à eux les mahometans de la ville. En effet, la garnison voyant un si petit nombre de fourrageurs, sortit pour leur donner la chasse. Les chrétiens, afin de l'attirer plus loin, se retirèrent avec précipitation. Abusée par cette fuite simulée, elle se laissa entraîner à les poursuivre. Mais le comte Rotron ne la vit pas plutôt éloignée, qu'il sortit de son embuscade, courut s'emparer des portes de Tudèle, faisant main basse sur tous ceux qui essayèrent de se défendre, en sorte qu'à leur retour, les musulmans trouvèrent les portes fermées et les remparts occupés par les troupes d'Alphonse. Le roi de Saragosse, Amad - Dawlah, vivement pressé par les chrétiens, réclama le pelle que le royaume de Saragosse et les secours des Almoravides. On se rapautres petites souverainetés de l'Espagne orientale étaient les seuls dont Yousef-ben-Taschfyn ne se fût pas emparé. Temin, qui administrait l'Àndalousie, l'Algarbe et le royaume de Valence pour Aly-ben-Youssouf son frère, ne voulut pas laisser échapper cette occasion d'étendre sa domina

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tion. Il envoya au secours de la place une armée de Lamtounes sous le commandement d'Abd-allah-ben - Mezdeli (*), qui fit lever le siége. Ce général reprit aussi Almudebar et plusieurs villes voisines. Mais Tudèle et d'autres positions importantes restèrent au pouvoir d'Alphonse.

Les Almoravides n'étaient pas venus à Saragosse seulement pour délivrer cette ville de l'attaque des chrétiens, mais bien pour s'y établir en maîtres. Amad-Dawlah ne tarda pas à deviner leurs projets, et craignant que Ben-Mezdeli ne le fit arrêter et ne l'envoyât mourir en Afrique, il s'évada et courut se réfugier dans la plus inaccessible de ses forteresses, dans Rotha-al-Yehud, cette ancienne place d'armes d'Hafsoun, située, comme on se le rappelle, au pied des Pyrénées, sur des rochers escarpés, entourés de presque tous les côtés par un torrent (**). Quelques auteurs pensent qu'il reprit le gouvernement de Saragosse après la retraite des Almoravides. Zurita dit au contraire, et cette opinion nous paraît préférable, que ceux-ci restèrent maîtres de la ville jusqu'au moment où les chrétiens vinrent la leur enlever.

Alphonse, pour avoir échoué une première fois dans son entreprise, n'avait pas renoncé à l'espoir de s'emparer de cette capitale de l'Aragon. Il commença par reprendre Almudebar, et vint, en 1118, mettre de nouveau le siége devant la ville.

Saragosse était une ville d'une trop haute importance pour que les Almoravides voulussent la laisser tomber sans la secourir. Temin, frère d'Aly, vint lui-même à la tête d'une armée de Lamtounes. Il avait établi son camp à quatre lieues au sud de Saragosse, près du château de Maria sur les bords de la Guerba. Mais il ne crut pas ses troupes assez nombreuses pour attaquer le camp des Aragonais. Il se

(*) Ferreras l'appelle Amazaldi.

(**) Condé, Historia de la dominacion de los Arabes en España, deuxième partie, ch. 50.

retira donc sans rien entreprendre; il espérait d'ailleurs que la mauvaise saison forcerait bientôt Alphonse à se retirer. Il se contenta d'envoyer son neveu, le propre fils d'Aly, à la tête d'un gros corps de troupes, pour qu'il se jetât dans la ville et qu'il y introduisit des vivres. Mais Alphonse, instruit de sa marche, s'avança au-devant de lui et le rencontra à quatorze lieues de Saragosse dans les environs de Cutanda. Il l'attaqua avec tant d'impétuosité, que les Almoravides ne purent soutenir son choc. Ils furent culbutés; le plus grand nombre d'entre eux resta sur le champ de bataille, et leur général, le fils d'Aly, fut retrouvé parmi les morts. Apres cette victoire, Alphonse revint continuer le siége. II considéra même la prise de la place comme tellement assurée, qu'il nomma d'avance don Pedro de Librana évêque de Saragosse.

Les musulmans, en apprenant la défaite de Temin, perdirent tout espoir d'être secourus. Aussi ne tardèrent-ils pas à capituler; ils rendirent la ville aux chrétiens le mercredi 3 ramadan, 512 de l'hégire (18 décembre 1118). Un des premiers soins du vainqueur fut de purifier et de rendre aux chrétiens le temple de NotreDame-del-Pilar. Déjà nous avons raconté la fondation de cet édifice. Mais s'il faut ajouter foi aux récits des auteurs aragonais, Notre-Dame-del-Pilar n'est pas la seule église de Saragosse qui peut se glorifier d'une origine miraculeuse. Il faut y joindre encore Notre-Dame-del-Portillo. Voici comment le père Murillo rapporte cette légende (*): « Le roi Alonzo ayant

arraché aux Maures la ville de Sara« gosse, qui était restée quatre cents « ans en leur possession, les infidèles << tentèrent de la reconquérir par sur« prise. Une nuit, à l'aide de pics, ils percèrent le rempart, et déjà ils « s'étaient ouvert un passage (un pora tillo) et ils commençaient à entrer, lorsque les gardes, réveillés par le bruit, aperçurent une vive clarté.

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(*) Excelencias de Saragoza, fo 253.

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