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éditeurs responsables de ses actes de sévérité, périrent au milieu de ces luttes sanglantes. L'un d'eux, Garcilaso de la Vega, fut assassiné à Soria, avec vingt autres chevaliers. Le second, Alvar Nuñez de Osorio, était celui que le roi affectionnait le plus. Alphonse XI voulant le créer comte, avait renouvelé, pour lui, le cérémonial, tout symbolique, suivi autrefois par les rois goths (*). Le mot de comte (comes), on se le rappelle, signifiait, dans l'origine, camarade ou compagnon. Pour indiquer d'une manière sensible que quelqu'un devenait le compagnon du roi, on avait pensé que rien n'était mieux que de servir à manger, au roi et à son comte, dans le même vase. Voici, suivant la chronique d'Alphonse XI, comment la cérémonie se passa le roi et Alvar Nuñez de Osorio s'assirent sur une estrade; et, devant eux, on plaça une coupe remplie de vin, où trempaient trois tranches de pain. Le roi dit alors: Mange, comte. Le comte répondit: Mange roi. Tous deux répétèrent trois fois les mêmes paroles, et ensuite ils se partagèrent ces tranches de pain, les mangèrent, et, à l'instant, toutes les personnes présentes crièrent: Vive le comte! vive le comte ! Evad el conde! A partir de ce moment, Alvar Nuñez de Osorio eut un pennon, une chaudière, une maison, et un train de comte.

L'élévation de don Alvar et la faveur d'Alphonse avaient excité l'envie des seigneurs espagnols. Don Alvar avait d'ailleurs été, ainsi que Garcilaso, le ministre des sévérités du roi. Il avait amassé contre lui tant de haines, que la ville de Valladolid s'étant révoltée, les rebelles prirent pour prétexte l'orgueil et la cruauté de don Alvar de Osorio. Le roi, pour ôter tout motif à la révolte, éloigna don Alvar de sa personne. Celui-ci, irrité de cette disgrâce, se retira dans son château de Belber, et songea à faire alliance avec don Juan Manuel. Il pouvait devenir un ennemi très-dangereux. Mais un

(*) Voyez f° 119.

seigneur de ses ennemis, don Kamir Florez de Guzman, le tua par trahison, avant qu'il eût mis ses projets à exécution.

Les violences de don Juan Manuel n'empêchèrent pas le mariage de don Alphonse avec l'infante de Portugal de se conclure; et bientôt l'alliance du roi de Castille fut aussi recherchée par le souverain de l'Aragon, qui lui fit demander la main de l'infante dona Leonor.

Il faut se rappeler que don Jayme II, surnommé le Juste, avait épousé Blanche, fille de Charles de Naples. Il en avait eu cinq fils et autant d'infantes. Les fils étaient Jayme, Alphonse, Juan, Pedro et Ramon Berenguer. Les filles furent Maria, Constance, Isabelle, Blanche et Violante.

Jayme, l'aîné des fils de don Jayme II, avait été fiancé, dès l'année 1309, à l'infante doña Leonor de Castille. Dix ans plus tard, on voulut réaliser cette union. L'Église bénit les époux; mais, le jour même de son mariage, don Jayme protesta, en disant qu'il n'avait pas été libre, qu'il avait été forcé par son père; et, à l'instant même, il abandonna sa femme. Il fit ensuite, dans les cortès réunies à Tarragone, en décembre 1319, une renonciation publique à tous ses droits au trône, en déclarant qu'il était engagé dans les ordres sacrés. Il prit, en effet, l'habit de Saint-Jean de Jérusalem, et bientôt il passa dans l'ordre de Saint-Georges de Montesa, qui venait d'être fondé. Sa conduite remplit tout le monde d'étonnement, car son intempérance et ses débauches démontrèrent qu'on ne la pouvait pas attribuer à un sentiment de vertu ou de piété. Au moyen de cette renonciation, Alphonse, le second fils du roi, se trouvait l'héritier présomptif de la couronne. Il fut reconnu en cette qualité par les cortès réunies à Tarragone en 1319, et par celles de Saragosse, tenues le 15 septembre 1320.

Son troisième fils, don Juan, fut archevêque de Tolède. Quelques contestations qu'il eut avec don Juan Manuel et avec Alphonse XI le déterminèrent

à quitter ce siége pour passer à celui de Tarragone. Il fut aussi nommé patriarche d'Alexandrie.

Le quatrième, don Pedro, fut comte de Ribagorce. C'était un homme d'une grande piété. Après la mort de sa femme, sœur du comte de Foix, il partagea ses biens entre les enfants qu'il avait eus d'elle, et se retira à Valence, chez les moines mendiants de l'ordre de Saint-François.

Le dernier, Ramon Berenguer, eut le comté de Prades.

Pendant le règne de don Jayme, l'Aragon ne fut troublé par aucune dissension intestine, et, quand des contestations s'élevèrent entre le roi et ses sujets, don Jayme fut le premier à les soumettre à ce tribunal suprême, qui était une garantie contre les empiétements du pouvoir démocratique aussi bien que contre les abus de l'autorité royale. Il s'en rapporta au Justicia d'Aragon, et regardant que la véritable force des rois repose dans le respect de la légalité, il exécuta toujours avec bonne foi les décisions des tribunaux, et mérita par sa conduite le surnom de Juste qui lui fut confirmé par la postérité. Son règne ne fut pas non plus sans quelque illustration guerrière. Les luttes qu'il eut à soutenir pour prendre possession des îles de Corse et de Sardaigne, que le pape lui avait données, ajoutèrent des pages glorieuses à l'histoire militaire des Aragonais et des Catalans. Ce prince mourut à Barcelone le 2 novembre 1327 (*). Son successeur fut Alphonse IV, qui avait épousé en premières noces doña Thérèse Entença. L'infante était morte des suites d'une couche, quinze jours avant que son mari montât sur le trône; elle lui laissait plusieurs enfants : don Pedro, qui fut son successeur; don Jayme, Comte d'Urgel; Constance, qui fut mariée au roi de Majorque; et Isabelle, qui mourut peu de temps après sa mère. Il y avait une année qu'Al

(*) Ferreras indique le 31 octobre. Les auteurs contemporains disent qu'il mourut le lendemain de la Toussaint; Ferreras aura lu la veille.

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phonse d'Aragon était veuf, lorsqu'il fit demander en mariage doña Leonor, infante de Castille, la sœur du roi Alphonse XI, la même que son frère aîné, don Jayme, avait répudiée lorsqu'il sortait de recevoir la bénédiction nuptiale. Le roi de Castille consentit volontiers à cette union, car, elle privait don Juan Manuel de quelques secours qu'il tirait de l'Aragon et elle le mettait dans l'impossibilité de continuer à troubler le royaume. Le mariage fut célébré avec grande pompe le 6 février 1329.

une

L'année suivante, Alphonse XI put tourner ses armes contre les Maures de Grenade. Depuis déjà quatre années Ismaïl-ben-Ferag ne régnait plus; un assassinat avait mis fin à sa domination en même temps qu'à sa vie. Un de ses cousins, Mohammed - ben-Ismail, fils du gouverneur d'Algéciraz, avait, dans ses excursions sur les terres des chrétiens, enlevé une jeune captive d'une admirable beauté. Le roi Ismail-ben-Ferag ne l'eut pas plutôt vue, qu'il s'en éprit, qu'il s'en empara, et qu'il la fit enfermer dans son harem. Mohammed-ben-Ismaïl n'attendit que trois jours pour tirer vengeance de cet acte de tyrannie. Le 26 regeb de l'année 725 (8 juillet 1325), accompagné de quelques conjurés, il se jeta sur le roi son cousin, qui sortait de l'Alhambra, il le poignarda ainsi qu'un de ses vizirs qui voulait le défendre, et il prit la fuíte avant que les gardes et les eunuques eussent même pensé à se mettre en défense. Les blessures d'Ismail-ben-Ferag étaient mortelles; il succomba peu d'instants après les avoir reçues, et aussitôt on proclama pour émir son fils Mohammed, qui n'était encore âgé que de dix années. Ce jeune prince, disent les historiens arabes consultés par Condé, était libéral; il était grand chasseur, maniait les armes avec adresse, aimait les chevaux et se plaisait à étudier leurs généalogies; il était courageux et payait de sa personne. Un jour, en poursuivant des chrétiens dans les environs de Baena, il jeta sa zagaie à l'un des fuvards et lui traversa le corps. Ce

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pendant le blessé continuait à fuir de toute la vitesse de son cheval, emportant dans sa blessure la zagaie qui était garnie d'or et de pierres précieuses. Plusieurs musulmans s'étaient attachés à sa poursuite pour la lui enlever. Laissez ! laissez! dit le jeune roi; si ce malheureux ne doit pas mourir de sa blessure, il faut au moins qu'il ait de quoi la faire soigner. En 1329, quand Alphonse XI recommença la guerre, Mohammed-ben-Ismail était déjà âgé de quatorze ans. Dans cette campagne, les armes chrétiennes furent heureuses, et don Alphonse prit la ville de Teba. Après cette conquête, il se retira à Séville, où vint le trouver une ambassade du roi de Grenade, qui se reconnaissait son vassal et qui s'engageait à lui payer le même tribut que Ben-Alhamar avait payé à saint Ferdinand. Le roi accepta cette soumission, et une trêve de quelques années fut conclue.

Plusieurs événements qui se passèrent à peu près à cette époque vinrent affermir la puissance d'Alphonse plus encore que les avantages qu'il avait remportés sur les musulmans. Le plus dangereux adversaire de son père et de son aieul, don Alphonse de la Cerda, las d'avoir lutté si longtemps contre la mauvaise fortune, vint spontanément trouver le roi à Burguillos. Il se mit à sa merci, lui baisa la main, et renonça, par un acte authentique, à tous les droits ou à toutes les prétentions qu'il avait au trône. Le roi, de son côté, l'accueillit avec bonté et lui donna des domaines, afin qu'il pût vivre d'une manière conforme à sa naissance (*). L'Alava fit aussi offrir par ses députés la seigneurie à don Alphonse, et le

(*) Alonzo de la Cerda eut deux fils. L'aîné, Luis de la Cerda, comte de Clermont, fut nommé par le pape roi des îles Canaries; le second, don Juan de la Cerda, que les historiens français appellent Charles d'Espagne, reçut du roi de France le comté d'Angoulême, et fut nommé connétable de France en remplacement du comte d'Eu, décapité en 1350. Il mourut assassiné par les ordres du roi de Navarre Charles le Mauvais.

roi s'étant rendu dans le champ d'Arriaga, où les gentilshommes et les cultivateurs de l'Alava étaient dans l'usage de tenir leurs assemblées, ils lui prêtèrent serment comme à leur seigneur.

Quoique ce soit anticiper de deux années sur la série des événements, la similitude des faits doít engager à parler ici du serment que les Basques réunis sous le chêne de Guernica, prê tèrent au roi Alphonse XI. On se rappelle qu'après la mort de don Juan le Contrefait, sa mère, doña Maria Diaz de Haro, avait, soit de bon gré, soit de force, vendu au roi de Castille la seigneurie de la Biscaye. Mais don Juan Nuñez de Lara ne regardait pas cette vente comme le privant des droits qu'il prétendait avoir lui-même sur ce pays. Cependant le roi eut recours aux armes; il força don Juan Nuñez de Lara à lui demander merci et reçut le serment des Basques.

Pendant que le roi de Castille s'occupait ainsi à assurer la tranquillité de ses Etats, le roi de Grenade ne restait pas oisif. Il mettait à profit la trêve qui avait été consentie avec le roi de Castille pour faire des invasions dans la partie du royaume de Murcie qui appartenait à l'Aragon; puis, avant que le terme des trêves fût expiré, sentant bien qu'il ne serait pas assez puissant pour résister à l'ascendant des chrétiens, il passa en Afrique afin de réclamér l'assistance d'Abu'l-Hasan (*), prince de la race des Beni-Merines. Celui-ci promit de lui envoyer 7,000 cavaliers sous les ordres de son propre fils Abu - Melech (**). Au commencement de l'année 1333, les Africains vinrent en effet débarquer à Algéciraz; et à peine à terre, ils se mirent en marche pour aller assiéger Gibraltar. Depuis plusieurs années cette ville

(*) La chronique d'Alphonse VI, écrite par Villazan, le nomme Albo-Hazen; celle de Lopez de Ayala le nomme Abulhacen, Mariana et Ferreras l'appellent Abohacem. (**) Suivant Ferreras, Abul-Melic; suivant la chronique et suivant Mariana, Abome. lique.

était au pouvoir des chrétiens. La défense en était alors confiée à Vasco Perez de Meyra. Ce capitaine avait reçu des fonds pour munir Gibraltar d'armes et de vivres; mais il avait gardé l'argent, et il avait laissé les arsenaux et les magasins vides; lorsque les Maures se présentèrent devant la ville, il se trouva pris au dépourvu. Il résista néanmoins pendant quelque temps, et le roi don Alphonse fit des préparatifs pour aller à son secours; mais il ne put pas venir bien promptement. A cette époque les troubles de la Castille étaient bien loin d'être apaisés; don Juan Nuñez de Lara n'avait pas encore renoncé à ses prétentions. Cependant le roi rassembla une armée; il marcha en grande hâte pour faire lever le siége; mais lorsqu'il arriva à Xérès de la Frontera, il apprit, par un messager que lui envoyait Jofre Tenorio son amiral, que la ville s'était rendue, et que Vasco Perez de Meyra, craignant sans doute le châtiment de sa faute, était passé en Afrique. Don Alphonse fut très-chagrin de cette perte, et, sans hésiter, il se détermina à faire à son tour le siége de Gibraltar pour l'enlever à ses nouveaux possesseurs. Il pressait vivement les attaques lorsque le roi de Grenade vint camper près de lui et le contraignit à la retraite. Les auteurs arabes et les chroniqueurs chrétiens ne rapportent pas ce fait de la même manière. Suivant les Arabes, Mohammed-ben-Ismaïl força le camp des chrétiens et se jeta dans la ville, en sorte que les attaques ne pouvant plus obtenir de succès, Alphonse XI fut obligé de convenir avec Abu-Melech et avec le roi de Grenade d'une trêve de quatre années. Mohammed-ben-Ismail, fier de l'avantage qu'il avait obtenu, et vain comme le sont les jeunes gens, railla les officiers africains, en leur disant qu'il était heureux pour eux qu'il fût venu les délivrer. Les Africains furent vivement blessés de ces plaisanteries, et quelques-uns d'entre eux, pour s'en venger, assassinèrent Mohammed ben-Ismaïl, le mercredi 13 dulhagia 733 (25 août 1333).

Suivant la chronique d'Alphonse, et suivant presque tous les auteurs chrétiens qui l'ont suivie, la levée du siége aurait été le résultat de négociations. Les seigneurs espagnols auraient eux-mêmes engagé le roi à laisser une entreprise que les circons tances où se trouvait la Castille ne permettaient pas de mener à bonne fin. En effet, le pays était agité par don Juan Nuñez de Lara. Don Juan Manuel, après avoir reçu de l'argent pour faire la guerre aux Maures de Grenade, avait au contraire employé ces ressources pour ravager les domaines du roi de Castille. Don Juan de Haro avait également reçu la solde de ses gens de guerre et les employait à commettre des ravages en Castille. C'étaient des crimes qu'avant tout il fallait punir; car, pour obtenir contre les ennemis de l'extérieur des avanta-ges profitables, il faut être tranquille chez soi. On accueillit donc la proposition d'une trêve faite par les Maures. Les rois de Grenade et de Castille firent assaut de courtoisie; its mangerent à la même table et se donnèrent mutuellement de riches présents. La paix contráriait les vues d'Abu-Tebe et d'Abraham, fils du général Osmin; ils prétendirent que le roi traitait trop favorablement les ennemis de l'islamisme. Ils dirent qu'il voulait se faire chrétien, et, pour preuve, ils alléguérent qu'il portait une veste qui lui avait été donnée par don Alphonse de Castille, et se précipitant dans sa tente avec quelques complices, ils le poignardèrent le 25 août 1333.

Les Maures de Grenade lui donnèrent pour successeur son frère appelé Yuzuf-Abu'l-Hegiag (*). Ce prince se montra scrupuleux observateur de la trêve qui avait été conclue, et don Alphonse put s'occuper uniquement à réduire les rebelles qui troublaient la tranquillité de ses États. Don Juan Alphonse de Haro ayant été surpris dans la ville d'Agonzillo, expia par sá mort sa trahison et ses crimes.

Don Alphonse contraignit aussi don (*) Mariana le nomme Jose Bulagix.

Juan Manuel et don Juan Nuñez de Lara à demander des arrangements qui leur furent accordés. Ces troubles ne furent pas plutôt apaisés qu'une guerre étrangère vint succéder à ces discordes intestines, La Navarre, on se le rappelle, avait été réunie à la couronne de France. Jeanne, unique héritière du roi de Navarre, don Henri, avait épousé Philippe le Bel. Elle était morte le 4 avril 1305, laissant la couronne de Navarre à son fils Louis Hutin. En 1314, au décès de son père, ce prince avait réuni sur sa tête les deux couronnes de France et de Navarre. Mais cette réunion ne dura pas longtemps; Louis Hutin mourut à Vincennes le 5 juin 1316, ne laissant qu'une fille de son mariage avec Marguerite de Bourgogne. On appliqua donc, lors de sa mort, cette maxime de notre droit que les lis ne filent pas. La couronne de France fut déférée à son frère Philippe le Long. Mais le principe de la loi salique ne pouvait s'appliquer à la couronne de Navarre, qui avait été apportée par les femmes; elle pouvait tomber en quenouille, et l'on reconnut Jeanne, fille de Louis Hutin, reine de Na

varre.

Philippe le Long, et ensuite Charles le Bel, ses oncles, administrèrent ce royaume pendant qu'elle était mineure. A la mort de Charles le Bel, les deux filles de ce roi, et une fille de Philippe le Long, disputèrent à Jeanne le titre de reine de Navarre; mais les cortès s'étant réunies, proclamèrent pour reine la fille de Louis Hutin, Jeanne, qui était mariée à Philippe, comte d'Évreux. A partir de ce moment, le royaume commença à être gouverné en son nom; et Jeanne, ainsi que son mari, furent couronnés, à Pampelune, le 5 mars 1329. Six ans plus tard, dans le courant de l'année 1335, don Enrique de Salis, qui gouvernait la Navarre en qualité de vice-roi, parce que

Jeanne et Philippe d'Évreux étaient dans leurs États de France, fit publier un manifeste par lequel il se plaignait de dégâts que les Castillans auraient commis sur la frontière de la Navarre.

Dès qu'Alphonse XI eut connaissance de cet acte, il fit écrire au vice-roi de ne pas commettre d'hostilités, car son intention était de lui donner toutes satisfactions. Mais don Enrique de Salis ne tint nul compte de cette promesse, et il entra en Castille à la tête d'une armée. Don Alphonse envoya, pour le combattre, Martin Fernandez de Porto-Carrero, qui atteignit l'armée navarraise, lui livra bataille, et la mit en déroute. Après la victoire de Tudèle, les Castillans se retirèrent, donnant à leurs ennemis un grand exemple de modération, qu'au reste ils ne suivirent pas. Le comte de Foix rassembla les fugitifs de Tudèle. Il y joignit ses propres troupes, et vint attaquer Logroño. A son approche, le commandant de la place, Ruy Diaz de Gaona, passa l'Ebre et marcha audevant de lui. Mais sa troupe était trop faible pour résister aux forces des Navarrais. Elle fut repoussée en désordre. Alors Ruy Diaz, pour protéger la retraite de la garnison, et pour qu'elle eût le temps de regagner la ville, se plaça à la tête du pont; et là, aidé de trois soldats seulement, il arrêta l'armée ennemie, et permit aux Castillans de se réfugier à l'abri des remparts. Cet acte de dévouement lui coûta la vie. Il tomba en combattant, et son corps fut jeté dans l'Ebre. Quant aux trois soldats qui l'accompagnaient, ou bien ils s'exposèrent moins que lui, ou bien ils furent plus heureux, car ils purent rentrer sains et saufs dans la ville. La résistance de la garnison rebuta les Navarrais; et l'intervention de l'archevêque de Reims, que le roi de France avait envoyé auprès d'Alphonse XI, comme ambassadeur, pour lui demander son alliance, ne tarda pas à rétablir la bonne harmonie entre la Navarre et la Castille.

SUITE DU RÈGNE D'ALPHONSE XI. DON JUAN NUNEZ DE LARA EST ASSIÉGÉ ET PRIS DANS LERMA. — GUERRE DE PORTUGAL.— MORT D'ABU - MELECH. REVOLTE ΣΤ SUPPLICE DU MAÎTRE D'ALCANTARA. DÉFAITE DE LA FLOTTE DE CASTILLE. MORT D'ALPHONSE IV D'ARAGON. -SON FILS DON PEDRO IV LUI SUCcède.—abu'l

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