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également l'ordre du 1oг. août, supplémentaire à celui du 22 juillet :

En vertu de l'article 23 du titre 8 du Code des délits et des peines, du 21 brumaire an 5, a ordonné ce qui suit:

Les sieurs Terrey - Jol, Cousineau, Pélicier, Fournier, Thierry, Marie et Guyonnet, seront punis de trois mois de prison.

La même punition sera infligée à tout militaire qui sera trouvé dorénavant en contravention à l'ordre du 22 juillet dernier, et la détention sera prolongée en proportion du temps que les contrevenans seront restés en désobéissance.

Le gouverneur se réserve en outre de signaler à S. Exc. le ministre de la guerre ceux des militaires en contravention à l'ordre du 22 juillet dernier, que la récidive ou d'autres circonstances aggravantes mettroient dans le cas d'une punition plus sévère; il provoquera leur destitution et leur radiation absolue des contrôles de l'armée.

Le sieur Pélicier, sergent-major dénommé ci-dessus, étant en outre accusé de propos séditieux, sera traduit pour ce fait, par-devant le conseil de guerre permanent de la division.

Le gouverneur de la première division militaire, etc.
Comle MAISON,

AU RÉDACTEUR.

Monsieur, vous ne savez peut-être pas bien dans votre capitale toutes les menées des ennemis de l'ordre et du repos. Le bonheur de voir le Roi, et le soin de lui témoigner votre dévouement vous empêchent peutêtre de suivre leurs sourdes intrigues et leurs petits complots. Ce gens-là ne sont ni honteux ni abattus. Ils osent même rêver des espérances; ils font plus, ils ne craignent pas de les manifester. Ils trompent encore les habitans des campagnes par des bruits assez mal imaginés, et par des contes passablement absurdes. Mais comme il est écrit qu'un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire, les misérables inventeurs de ces impostures mal tissues ne laissent pas que de faire des dupes. Il ne s'agit que d'être un peu effronté pour en imposer à des gens qui ne sont pas bien fins, et même à ceux qui croient l'être. L'année dernière on ne parloit à nos paysans que du rétablissement prochain des dîmes, de la restitution des biens nationaux, et des projets perfides des nobles et des prêtres. Cette année on répète bien encore par-ci par-là ces moyens déjà un peu usés; mais on y en ajoute d'autres pour tenir le peuple en haleine, et ne pas lui laisser perdre l'habitude d'être trompé. On lui parle du retour de Buonaparte qui a

débarqué en vingt endroits différens. On fait sortir de dessous terre des milliers d'hommes qui accourent autour de l'échappé de SainteHélène. On fait révolter Paris, partir le Ror. Ailleurs, on parle de réactions terribles et de vengeances sanglantes, tandis que de grands coupables se promènent en liberté, et jouissent tranquillement de leur fortune. Dans nos cantons, on s'est avisé d'une autre gentillesse. C'est nous qui avons fait revenir les alliés, et moi, en particulier, j'ai écrit à l'empereur de Russie pour qu'il nous envoyât deux cents mille hommes. Cette noirceur atroce de ma part a déjà été punie par quelques menaces, et peut-être même l'expierai je d'une autre manière. J'ai dans ma paroisse un homme qui fait le prophète. L'année dernière il n'a cessé de prédire le retour du bon M. Buonaparte, et il espère n'être pas moins heureux cette année. Sa confiance ne seroit que ridicule, s'il ne parvenoit à persuader des gens aussi bien intentionnés ou aussi habiles que lui. Nous avons dans nos cantons une espèce d'illuminés, du moins on les appelle ainsi, qui font une estime singulière du feu empereur, détestent le Roi et les prêtres, ne se marient point à l'église, et ne font point baptiser leurs enfans. En revanche ils lisent couramment dans l'Apocalypse, et y voient clairement le retour de Buonaparte. Ces genslà mériteroient bien qu'on les surveillât; mais nos autorités dorment un peu. Elles paroissent croire qu'il faut surtout contenir et réprimer les royalistes, et laissent le champ libre aux fourberies et aux méchancetés du parti contraire. Un tel état de choses donne souvent envie d'aller prêcher la foi dans des pays plus tranquilles, et à des peuples moins pervertis (1). J'ai l'honneur d'être....

M..., Curé de V...., diocèse d'A.

AVIS.

M. Le Clere vient de terminer l'impression du Tractatus de Religione, 1 vol. in 12 de 480 pages, composé pour le séminaire catholique d'Irlande, par M. Delahogue, ancien professeur de Sorbonne. Ce Traité, quoique court, est rédigé d'une manière très-claire, et fenferme beaucoup de questions qui ne se trouvent dans aucun autre Traité de la religion, entr'autres la réfutation des objections des incrédules modernes contre les livres saints, et particulièrement des géologues contre le déluge; et de Gibbon, sur les martyrs et la propagation de la religion chrétienne On le suivra cette année dans le séminaire de SaintSulpice à Paris, et on ne doute pas que beaucoup de séminaires ne l'adoptent aussi pour leur usage. Il a même déjà été reçu des demandes à ce sujet. On compte aussi imprimer de suite le Traité de l'Eglise, du même auteur, sur la seconde édition, qui s'achève eu ce moment en Irlande.

Le prix de ce volume sera de 3 fr. broché, et 4 fr. franc de port.

(1) Cet ecclésiastique doit s'adresser, pour les renseignemens qu'il nous demande, à MM. les grands-vicaires de Paris. On parle françois dans le pays qu'il a en vue.

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EXPOSÉ de la conduite politique de M. le lieutenantgénéral Carnot, depuis le 1a. juillet 1814 (1).

UN grand écrivain, qui occupe un rang distingué dans l'Etat, disoit dernièrement dans une occasion importante Il y a des gens qui se croient punis, parce qu'ils ne sont pas récompensés du mal qu'ils ont fait. Ceci s'applique aujourd'hui à beaucoup d'hommes de la révolution, à ceux entr'autres qui crient à la persécution, parce qu'on leur ôte les moyens de núire, et qui se plaignent que tout est perdu, parce qu'ils ont perdu le crédit dont ils abusoient. Ces gens-là se sont si fort accoutumés au pouvoir qu'ils regardent comme une injustice d'en être dépouillés, et leurs services révolutionnaires leur paroissent des titres honorables et sacrés. M. Carnot habite tranquillement, depuis trois mois, une campagne où il s'est retiré. Il n'y a pas été inquiété un seul instant, et il jette les hauts cris, comme s'il étoit en butte à la plus sévère inquisition. Il se plaint d'être outragé, calomnié. Il parle avec amertume de ses ennemis, avec mépris des journalistes qui ont répondu à ses écrits. M. Carnot est aussi un peu trop chatouilleux. Il devroit bien au moins nous permettre ce qu'il s'est permis l'année dernière envers le Roi. On sait tout ce que son Mémoire contenoit d'offensant pour S. M. Ce n'étoit que reproches contre son gouvernement, et cependant on laissa M. Carnot tranquille. Nous ne lai demanderions que de n'être pas plus exigeant qu'un auguste monarque, de montrer l'indulgence qui convient à un homme qui se pique d'un grand caractère, et de

(1) Brochure in-8°.

Tome V. L'Ami de la R. et du R. No. 121. S

daigner ne pas être choqué de traits un peu moins vifs que ceux qu'il a lancés contre son Prince. Nous serons contens si son excellence consent à montrer pour nous autant de clémence que le Roi en a eu pour lui. Nous allons dans cette confiance juger son nouveau Mémoire avec moins de rigueur qu'il n'en a mis à juger les actes et l'esprit du gouvernement de Louis XVIII.

Et d'abord on se demande qui obligeoit M. Carnot à écrire? Nous consentions à l'oublier. Quel ennemi de lui-même lui a conseillé d'occuper encore le public de lui, et d'essayer son apologie? L'autorité le laissoit en repos. Pourquoi vient-il encore la harceler? Mais la morgue et l'opiniâtreté révolutionnaire ont cela de remarquable, qu'elles ne savent pas plus se calmer que se repentir, et qu'elles sont aussi effrontées pour excuser le crime qu'audacieuses pour le commettre. Dès les premières lignes l'auteur se montre content du témoignage de sa conscience. Il a besoin de conserver l'estime dont le public, toujours impassible, l'a honoré au milieu des persécutions de tout genre qu'il a déjà éprouvées. Il n'a cessé de consacrer toutes ses pensées et tous ses vœux au bonheur de sa patrie. Les mêmes pensées reviennent plusieurs fois dans cette brochure. M. Carnot y est toujours satisfait de lui-même; il s'honore, il se carresse, il vante son caractère, son désintéressement, son patriotisme, tandis qu'il foule ses ennemis sous ses pieds. Estce l'indignation de la vertu outragée, ou bien l'arrogance d'un homme qui brave et ses remords et l'opinion? Est-ce un juste sentiment d'honneur, ou bien un orgueil ridicule? C'est sur quoi la conduite antérieure de ce révolutionnaire ne laisse aucun doute. Un membre du comité de salut public qui se contente du témoignage de sa conscience, un juge de Louis XVI qui parle de conserver l'estime dont le public l'a honoré, c'est sans doute un trait admirable d'une modestie toute nouvelle. Ne seroit-il pas permis de confondre cette jactance d'un homme couvert de sang, et prétendant aux hon

mes,

neurs de la vertu? N'e seroit-il pas permis de lui rappeler, puisqu'il l'oublie, les crimes auxquels il a attaché son nom, et l'horreur qu'inspirent les actes auxquels il a participé? I a siégé familièrement avec Robespierre, Couthon, Saint-Just, Barrère et Jambon. Il a siégé dans ce comité d'où sont partis tant de décrets atroces, tant d'ordres effroyables; et quand on lui en parle, il répond froidement que la convention l'a jugé innocent que la multitude des affaires dont il étoit chargé ne lui permettoit pas de discuter quelques signatures de foret que, s'il avoit refusé sa signature aux actes de ses collègues, ils lui auroient refusé les leurs. Quel odieux sang froid! Ainsi, parce qu'il étoit occupé, il falloit qu'il signât de confiance des arrêts de mort! parce qu'il avoit besoin de ses collègues pour quelques actes, il falloit qu'il approuvât leurs mesures monstrueuses! La création de tribunaux révolutionuaires, la mise en jugement d'une centaine de victimes chaque jour, le décret sur les suspects, celui qui ordonuoit de ne plus faire de prisonniers, tant d'autres propositions épouvantables émanées du comité, ne sont plus que des signatures de formes (1) Le sang couloit de toutes parts, mais M. Carnot n'avoit pas le temps de discuter si quel

(1) Entr'autres signatures de formes, j'en ai sous les yeux une où M. Carnot signe le premier une instruction adressée par le comité à la commission populaire d'Orange. Cette instruction est ainsi conçue: «Les membres de la commission établie à Orange sont nommés pour juger les ennemis de la révolution. Les ennemis de la révolution sont Lous ceux qui, par quelque moyen que ce soit, et de quelques dehors qu'ils se soient couverts, ont cherché à contrarier la marche de la révolution, et à empêcher l'affermissement de la république. La peine due à ce crime est la mort. La preuve requise pour la condamnation sont tous les renseignemens, de quelque nature qu'ils soient, qui peuvent convaincre un homme raisonnable et ami de la liberté, etc. Signé, Carnot, Couthon, Barrère, Billaud-Varennes ». M. Carnot est ici en première ligne. Loin de suivre ses illustres collègues, c'est lui qui paroît les diriger et leur donner l'impulsion. Robespierre ne paroît même pas dans cette instruction, dont le fond paroîtra sans doute fort libéral, et digne d'un homme qui idolâtre sa patrie, titre que M. Carnot aime à se donner.

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