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Là, peut-être un homme vertueux expie ses vertus auprès d'un coupable protégé, qui respire l'impunité et l'espoir de là, il est possible que les gémissemens de l'innocence. ne soient entendus que du ciel, complice de l'oppression, et que le scélérat, qui se joue des lois comme de la vertu, vienne de nouveau désoler la société.

Mais, puisque ce vice affreux a le contrepoids de la liberté individuelle et de la responsabilité, n'en parlons que pour rappeller les abus qui ont épuisé la patience et exigé les remèdes.

Le despotisme a tourmenté l'humanité dans tous les sens; et quoiqu'il ait toujours été proscrit par la nature qu'il opprime, par la raison qu'il outrage, et l'équité qu'il révolte, nous savons, par son histoire et nos malheurs, qu'il a toujours été croissant jusqu'au moment marqué par cet adage ancien:

« Patiendo muita veniunt

quæ nequeas pati ».

C'est l'époque où nous nous trouvons. Le despotisme est donc essentiellement le vice de la puissance. Il est en meme temps cause et effet. Il s'est établi par l'excès de la confiance, ou par le crime de l'usurpation. Pour protéger les premiers excès, il en a fallu d'autres; la multiplicité et l'impunité des crimes du despotisme ont fait le droit des despotes. Ainsi est on graduellement parvenn à l'infini de l'arbitraire, et à prendre pour les principes de l'autorité les usurpations du des potisme. A la cour, les rois et leurs courtisaus, les princes et leurs complaisans, le vice

et

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Événement du 30 juin 1789), entre 7&8 HEURES DU SOI.

Onze Soldate aur Gardes Francaisée, prisonni omniene dans l'Abbaye st Germain, pour faut d'insubordination, ayant fait annoncer au Balave Red qað la cânsede leur détention était le retus qu'de avaient fait à Versulks de tourner leurs armos contre lese Citoyene, une toule d'Ouvriers conduits d'honnêtes Particulere, se porta sur le champ à la Prison de libbage. les portes furent entêncées, et tous les Prisonnière délivrés.

par

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et même la vertu, sont despotes. Dans l'état, tes. le clergé et les parlemens, les intendans et les commandans militaires, les uns et les autres tyrans des provinces, qui retracent les préteurs dont parle le paysan du Danube; enfin, tous les corps où il y a une espèce d'hiérarchie, et jusqu'aux sociétés littéraires, ont fractionné le despotisme, pour en exercer la part qu'ils ont pu s'approprier; de sorte que la France étoit devenue l'anarchie de l'aristocratie, sous l'égide d'un roi moins despote peut-être que ses sujets,

J'entends tous les jours des spéculateurs qui disent que nous regretterons l'ancien ordre de choses. J'avoue que je croirois plus aux lamentations et à l'enthousiasme, si je n'observois pas ceux qui se lamentent et ceux qui s'exaltent. Quand on a déduit les hommes qui ont des intérêts de corps ou des intérêts personnels, ceux qui ont des préjugés de naissance ou d'état, ceux même qui ont de la droiture et se croient impartiaux, mais qui sont asservis à des préjugés d'éducation, de routine, etc. les autorités deviennent rares, et il est peut-être plus difficile qu'on ne croit de s'assurer soi-même que l'on est réellement impartial.

Qu'étoit ce donc que l'ancien ordre de choses que nous regretterons peut-être ? Le désordre des mœurs, des loix et de l'administration. Eh! quel désordre que celui où il n'y avoit plus de balance inviolable entre le vice et la vertu, le crime et la loi ! Quel frein restoit-il aux passions? Etoit - ce la religion? La raison a enlevé aux prêtres leurs talismans; la déraison en a fait une cari

B

cature; le libertinage l'a rejettée et calomniée, et ses ministres l'ont avilie. Seroient-ce les mœurs? Eh! nous n'en avons plus ! Il n'y a point de nation plus immorale. Les mœurs n'existent qu'en proportion des loix; et lorsqu'elles sont méprisées au point que le crédit et l'intrigue peuvent tout, il ne faut phis chercher de moeurs. Le malheur est qu'il faille une régénération pour les recouvrer.

Quelle étoit la bonne cause qui ne se perdoit pas dans nos tribunaux, lorsqu'on pou

voit faire mouvoir certains ressorts? et combien n'étoit-il pas difficile d'obtenir une justice irrécusable, lorsque les coupables étoient étayés? On sait tout cela; et quoique je pusse citer quelques faits frappans, j'abrège; je ne ferois que prouver une vérité persuadée.

Mais quels regrets pourroit-on jamais accorder au passé, lorqu'on pensera que la religion n'avoit plus de ressort; qu'elle n'étoit plus liée à la morale publique; que les loix n'avoient plus d'action que sur la classe qui n'a point d'appui, qu'elles punissent et ne protègent pas; qu'il n'y avoit point d'esprit public; que nous n'avions que des hommes en place, et point de citoyens? Quand on fera attention qu'un immense revenu n'avoit servi qu'à préparer une dette incommensurable; que les fleuves d'or qui auroient dù vivifier fe plus riche et le plus beau des empires, filtroient par des canaux souterrains, dans des gouffres sans fond qui dévoroient l'état. Le prince s'imposoit des réformes et des privations, et l'on dissipoit, avec scandale, autour de lui. La saine morale regrettera-t-elle les temps où le clergé supérieur, après avoir

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