ces malheureux mourroient de faim; on leur fit donner des vivres. Quelques perfonnes ayant demandé ce qu'on feroit de ces déferteurs; doucement, mellieurs, déferteurs, dit M. de la Fayette, les feuls déferteurs font ceux qui n'ont point abandonné leurs drapeaux ! bref, ils s'en rollèrent gaiement das la milice parifienne, & chaque jour nous met à même de voir combien Podieux projet de faire égorger des citoyens par des citoyens, étoit abfurde & peu réfléchi. On vouloit donc nous punir d'aimer notre roi. Ariftocrates! vous tremblez en ce moment; & vous ofez infolemment nous menacer en trompant, il y a deux jours, votre roi, votre patrie & vos fères infenfés, craignez leur jufte vengeance, ou fongez à respecter les droits inprefcriptibles faints de l'indulgente humanité !

DÉTAIL S.

Du Lundi 20 Juillet.

'ORAGE des révolutions vient-il à gronder dans un état, alors le caractère national dif.. paroît, & le peuple le plus aimable & le plus doux, n'eft bien-tôt que le plus féroce & le plus barbare; mais au moindre rayon qui promet le calme, il redevient lui-même. Auffi, malgré que les vifages annonçaffent encore la vive agitation de l'ame, la journée du 20 juillet.

C

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要

ne nous a donné dans la capitale que des fçenes de patriotisme & de fentiment. Le comité de la ville reçut le matin un billet de M. le due de Liancourt, préfident de l'aflemblée nationale, pour l'inftruire de la marche du feur Dufrefne de St. Léon, chargé des lettres du roi & de l'affemblée nationale pour M. Necker, & depuis ce moment on croit toujours voir arriver cet autre Sully, qui fut comme l'ami de Henri, fur le point d'être la victime des aristocrates, mais qui n'en fera auffi comme lui que le plus aimé de fon roi & plus cher à la nation.

Dans la même journée, les dames du marché faint Paul vinrent complimenter les membres du comité de la ville; cette députation fut très-bien accueillie; les dames du marché en préfentant des bouquets, prononcerent le compliment fuivant.

« L'amour d'un peuple qui adore fon roi,vous conduit pour la confommation du plus grand de tous les ouvrages, qui eft la réunion réelle des trois ordres, & le divin zèle qui vous aime, nous fait efpérer la fin de nos misères, en nous .faifant dire d'avance que votre augufte aflemblée repréfente à l'humanité du meilleur des rois, la protection du plus grand des princes, & que vous êtes tous des Necker; M. Moreau dé S. Merry président de l'affemblée générale des électeurs répondit à ce compliment en vrai patriote. Cette fcène brillante fut terminée par

des couplets, dont le refrein étoit vive le roi, vive la nation, vive le tiers-état,

Cette journée devoit être toute entière pour le fentiment. Parmi les différentes perfonnes que les milices bourgeoifes amenèrent à MM. les électeurs, fe trouva une jeune fille habillée en garçon. Le traveftiffement avoit éveillé le foupçon, & l'on parloit déjà de lui faire un mauvais parti. C'est une rufe, difoit-on, des Polignac, des Thierri, des Vermond, il faut en faire un exemple. Cependant on questionoit cette fille, qui, avec l'air de l'embarras répondit avec l'ingénuité de l'innocence, on luf demanda pourquoi elle ne portoit point l'habit de fon fexe. Ho! MM., dit-elle fondant en larmes, fans doute je fuis coupable,mais par donnez-moi d'avoir pris l'habit de garçon. Pai, crú pouvoir avec cet habit gagner davantage, & procurer plus d'aifance à mon père & ma mère qui font dans la plus grande indigence. Ces mots que des fanglots laifloient à peine échapper, attendriroent l'affemblée, on alla dans la rue de la mortellerie, qu'elle avoit indiquée pour celle de fa demcure; les renfeignemens fe trouvèrent conformes à fes dépofitions, l'on fit fur le champ une quête qui lui fut remife, & le détachement qui l'avoit amenée comme une victime de la haine publique, la reconduifit comme un modèle de la piété filiale, ainfi dans les mêmes moments l'on puniffoit le crime, & l'on récompenfoit la vertu.

Français je vous reconnois à de pareils traits, vous êtes naturellement bons & fenfibles. il faut donc croire que fans l'excès de l'oppreffion des miniftres perfides, fans la dureté des bar bares ariftocrates on ne vous verro't paint aujourd'hui ne refpirer que le fang & le carnage, & comme accoutu nés au fpect.cle horrible de ces nires tragédies, dont le dénouement doit à jamais faire trembler le mauvais citoyen, le monftre enfin qui feroit allez audacieux pour tenter de ramener les jours affreux de l'idée ariftocratique.

Du Mardi, 23 Juillet.

Lg calme de la journée du lundi 20 juillet,

ne laiffoit rien imaginé de fâcheux pour la journée fuivante; on avoit annoncée la reprise des fpectacles, au profit des foldats & ouvriers qui avoient fi généreufement défendus les citoyens, avec le dévouement patriotique que leur donne de fi grands droits à notre reconnoiffance, & leur allure les applaudiffeinens de tous les fiècles; ils font les premiers nobles de leurs familles, comme les aristocrates modernes feront les derniers nobles des leurs! peuton, en effet, encore appeller nobles, des êtres

auffi vils, auffi bas flatteurs, que l'etoient les chefs cruels de cette factions fcélérate, qui vouloit fe baigner dans le fang des citoyens ? Montres, vous voulicz affera.ir & confolider le trône du defpotique; mais vous ne nous verrez qu'entourer l'autel de la fainte liberté ;

ne nous verrez agir qu'au nom de la patrie, de la juftice & de l'humanité, & vous pardonner vos atrocités! cependant les efprits n'étoient pas tellement tranquilles, que le plus leger propos ne pût encore caufer des alarmes, exciter la fermentation, & mêler le trouble à la fureur; en effet, il fe répand un bruit que l'abbaye de Monmartre recéle des armes, de la poudre, & que de cette éminence, on a le projet de bombarder la capitale;c'étoit plus qu'il n'en fal'oit dans un moment de révolution auffi terrible, pour faire courir en foule à la prife de ces chaftes Cénobîtes.

Prifen cù la vertu, volontaire viime,

Guit & fe répent quoiqu'exempte de crime.

Madame l'Abeffe fit dire qu'elle ne demandoit pas mieux que l'on fit la plus exa&te recherchedans le couvent, qu'elle alloit donner toutes les clefs. Quelques électeurs, M. le curé de Saint Euftache, & quelques autres particuliers y entrè ent; ils ne trouvèrent aucunes armes, ni rien qui laifiât foupçonner la trahifon; il en fut dreffé procès-verbal, & cette émeute n'eut aucune fuite fâcheufe. Il eft à préfumer

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