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1845), l'exploitation d'un théâtre (D. 6 janv. 1864), des mines à ciel ouvert et des carrières (L. 21 avril 1810, art. 81; 9 mai 1866; 27 juill. 1880), des débits de boissons (L. 17 juill. 1880, art. 2), la publication d'un journal et le colportage (L. 29 juill. 1881, art. 5 et 18), la fabrication des armes (L. 14 août 1885), le commerce de brocanteur (L. 15 fév. 1898), les professions ambulantes (L. 16 juill. 1912, art. 1), etc. Les compagnies d'assurances sur la vie ne peuvent fonctionner qu'après leur enregistrement au ministère du commerce (L. 17 mars 1905, art. 2).

Pour diverses professions, des conditions de capacité sont exigées (médecins L. 30 nov. 1892; pharmaciens L. 21 germ. An x1, 25 juin 1908).

En outre la pratique et la jurisprudence admettent que le Gouvernement fasse des règlements pour l'exercice de professions qui touchent à la salubrité et à l'ordre publics (eaux minérales: 0. 18 juin 1823, dont la légalité a été reconnue (1); mise en circulation des voitures automobiles: D. 10 mars 1899 et 10 sept. 1901).

Enfin les maires puisent dans les art. 91 et s. L. 5 avril 1884 le pouvoir de faire des règlements sur les professions qui ont quelque rapport avec la sûreté, la tranquillité et la salubrité publiques. Mais ces règlements sont tenus de respecter la liberté du travail, du commerce et de l'industrie, et cette réserve est sanctionnée à la fois par le pourvoi en annulation porté devant le Conseil d'Etat et par l'exception d'illégalité opposée devant les tribunaux judiciaires aux poursuites à fin de peines.

(') C. d'Etat, 5 fév. 1875, S., 76. 2. 308.

CHAPITRE XXXIX

DU DROIT DE PROPRIÉTÉ

581. La propriété est définie par le Code civil, art. 544: « le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements >> (1).

Pour le moment encore, elle est considérée comme la conséquence et la garantie à la fois de la liberté individuelle en général, et de la liberté du travail en particulier. Elle découle de la liberté individuelle, car lle est le produit de l'action humaine appliquée aux choses, et cette action ne serait pas pleinement libre si elle ne restait pas maîtresse des œuvres qu'elle a produites, et sur lesquelles d'ailleurs elle ne cesse de s'appliquer; il y aurait contradiction à admettre que l'action individuelle peut librement s'appliquer aux choses, et que cependant elle n'a pas la libre disposition et emploi des effets qu'elle a produits. Même on ne saurait fixer le point et le moment où elle cesserait d'être libre; et ainsi, lorsqu'elle s'applique à des choses non déjà entreprises par une autre activité, sa liberté doit être complète, c'est-à-dire que le droit de propriété doit être absolu.

Elle garantit la liberté individuelle. Elle lui donne

(1) Cpr. la définition donnée par la Déclaration de 1793, art. 16: Le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de ouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit le son travail et de son industrie » ; et celie donnée par la Déclaration de l'An 1, art. 5: « La propriété est le droit de jouir et de lisposer de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie ».

la certitude du lendemain, lui procure la sécurité et même le loisir sans lesquels aucune existence n'est profitable ni mème possible. Elle lui ouvre un nouveau champ de développement. Elle lui donne des moyens d'influence sur la société économique, des moyens de s'accroître, de se diversifier, de s'enrichir; car elle met à sa disposition des instruments nouveaux, plus variés, plus puissants; et en même temps offrant une garantie palpable aux autres activités, elle les encourage à collaborer. Pour toutes ces raisons, elle protège l'individu contre les attaques, soit des autres individus, soit des autorités publiques.

582. Elle découle spécialement de la liberté du travail. Si l'action individuelle en général mérite d'être libre, et si cette liberté mène à la propriété individuelle, tout cela est vrai particulièrement du travail.

De même, elle garantit la liberté du travail comme la liberté en général. Elle réalise les conditions matérielles sans lesquelles il serait vain de déclarer le travail libre. Les avantages qu'elle procure stimulent l'activité du travailleur et la récompensent selon ses

vœux.

Enfin, et bien que ceci ne se relie pas étroitement à l'idée de liberté, la propriété donne à l'individu les moyens et de conserver et perfectionner sa personne et de remplir ses devoirs envers la société et les autres hommes.

583. La propriété figure, tout de suite après la liberté, dans la déclaration de 1789, art. 2, parmi les droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Elle est, d'après l'art. 17, un droit inviolable et sacré; nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique légalement constatée l'exige évidemment et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ».

Elle est encore parmi les droits naturels et imprescriptibles de l'homme de la Déclaration de 1793, art. 1-2, garantis par l'art. 122 C. 1793; parmi les droits de l'homme en société de la Déclaration de l'An III,

art. 1er; la C. An III, art. 358, « garantit l'inviolabilité de toutes les propriétés, ou la juste indemnité de celles dont la nécessité publique, légalement constatée, exigerait le sacrifice »; parmi les bases que se donne la C. 1848, dont l'art. 11 déclare : « Toutes les propriétés sont inviolables. Néanmoins l'Etat peut exiger le sacrifice d'une propriété pour cause d'utilité publique légalement constatée, et moyennant une juste et préalable indemnité ». Quant à l'inviolabilité de la propriété proclamée par les Chartes de 1814 (art. 9) et de 1830 (art. 8) et par l'Acte additionnel (art. 63), elle concerne les biens nationaux.

Le sens de ces diverses formules n'est pas que l'Etat doive procurer à tous ses membres des propriétés, mais seulement que les lois ne peuvent ni empêcher un individu quelconque d'accéder à toutes les formes de la propriété, ni gêner le libre emploi et la libre disposition de ses biens.

584. Les formes de la propriété se sont multipliées avec le temps et la civilisation. A côté des formes antiques, qui ont pour objet des choses matérielles, mobilières ou immobilières, se sont placées la propriété des fonds de commerce, celle des marques de fabrique et des brevets d'invention, la propriété littéraire et artistique, et ces formes nouvelles se diversifient à leur tour, trouvant des objets nouveaux.

Il en résulte que la notion de la propriété est, dans une certaine mesure, variable.

Sans doute elle comporte dans tous les cas la distinction des trois éléments traditionnels: usus, fructus, abusus, et un droit auquel manquerait un de ces éléments ne pourrait être classé dans la catégorie de la propriété. Mais le contenu de ces éléments n'est pas identique dans tous les cas; ainsi l'abusus, la faculté de disposer à son gré, de détruire, est complet pour la propriété mobilière, elle ne l'est pas pour la propriété d'un fonds de terre. La perpétuité est en général un des attributs de la propriété; non seu

lement elle cesse pour les choses dont la consommation est l'unique emploi, mais la loi limite la durée de certaines propriétés : la propriété industrielle est limitée à quinze ans (L. 5 juill. 1844, art. 1); celle des dessins et modèles déposés dure cinquante ans (L. 14 juill. 1909, art. 7); la propriété littéraire dure pendant la vie de l'auteur et pendant cinquante ans après sa mort, s'il a laissé des ayants cause (1).

585. La définition donnée par le C. c. annonce les restrictions résultant des lois et règlements. Elles se groupent en deux catégories.

Les unes ont trait, comme le dit le C. c., art. 544, à l'usage des biens. Entre elles, une nouvelle distinction est concevable d'un côté, certains usages de certaines choses sont prohibés pour des raisons de police (bon ordre, sûreté, salubrité); d'un autre côté, des charges sont imposées à différents biens, non les charges générales constituées par les impôts, mais des charges spéciales, comme celles que supportent les immeubles riverains du domaine public.

La distinction est importante, car de simples règlements administratifs, pourvu qu'ils soient fondés sur une raison de police et que d'ailleurs ils ne violent aucune liberté, suffisent pour interdire tel ou tel usage de tel ou tel bien; les charges ne peuvent être établies sur la propriété privée que par une loi.

Les autres consistent dans la perte de son bien imposée au propriétaire par la puissance publique. La plus connue consiste dans l'expropriation pour cause d'utilité publique, mentionnée par le C. c., art. 545, après beaucoup de textes. Il y en a d'autres, comme les réquisitions militaires, comme les destructions exigées pour des raisons de police. Ces mesures si graves sont soigneusement réglées par des lois, auxquelles l'Administration ne peut ni suppléer, ni ajouter.

(1) L. 19 juill. 1793; D. 1er germ. An xiii, 5 fév. 1810, art. 39, 40; L. 3 août 1844 D. 28 mars 1852; L. 14 juill. 1866, 9 fév. 1895.

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