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liberté ne peut être compromise. Les lumières du 19. siècle ne rétrograderont pas, et les mœurs des temps féodaux sont à jamais léguées aux romans de la chevalerie. N'héritons de ces temps que les graces de l'urbanité française, qui nous ont donné le renom du peuple le plus policé. Nos manières semblent avoir pris un air de rudesse qui leur est étranger, et qui doit disparaître avec nos orages politiques.

solde.

Relativement à l'armée, il eût été rigou- Armée. Demireusement juste, dans l'état de délabrement des finances, causé par les folles et gigantesques entreprises de Buonaparte, d'effectuer un licenciement considérable, en liquidant les retraites selon les réglemens; et cela, par la même raison qu'on avait dû se résoudre à appliquer de grandes mesures d'économie aux autres branches des administrations du royaume. Eh bien! on fit une exception de faveur pour l'armée; on conserva tous les cadres en fixant la moitié de leur traitement aux officiers de tout grade mis en non-activité provisoire. Buonaparte avait-il donné une telle preuve d'attachement aux soldats français ? non, assurément. Il les gardait tant qu'ils pouvaient faire

Ordre de la Légion d'hon

neur.

leur service et lui être nécessaires, et il ne permit jamais à aucun d'aller avec une demi-solde jouir de quelque repos dans ses foyers.

Mais le souffle de la malveillance, qui empoisonne tout, osa insinuer aux soldats qu'ils étaient regardés comme des vaincus et des rebelles, eux dont la gloire avait tiré des larmes d'admiration des descendans d'Henri IV, eux que le Roi avait pour la plupart rappelés de la captivité et des déserts de la Sibérie, où ils languissaient par la cruelle extravagance d'un homme impitoyable, eux enfin que le Roi portait dans son cœur, en leur départissant l'amour d'un père à ses enfans.

que

La malveillance se permit encore de dire les croix de la Légion d'honneur étaient trop indistinctement prodiguées (7), et que les pensions étaient supprimées. Oubliaiton que l'institution de la Légion d'honneur était pour toutes les classes de l'Etat ? Quelle présomption ou quelle jalousie de vouloir approprier spécialement à Parmée cette récompense ! Tous les courages, toutes les vertus, tous les beaux faits, n'existent-ils que dans la carrière des armes? Quant aux

pensions, elles étaient confirmées par le gouvernement à tous ceux qui en avaient obtenu. On ne disposait que pour l'avenir, en les réduisant ou en les supprimant : on ne commettait donc aucune injustice.

complot.

Mais ces raisons palpables, victorieuses, Exécution du on les dénaturait; on ébranlait les esprits par les plus odieuses suggestions; on paralysait le zèle bien intentionné, et des embûches perfides vinrent jusqu'à circonvenir les conseils mêmes du Souverain. On vit un maréchal, protestant de sa fidélité, courir à l'heure du danger se jeter aux pieds du Roi pour lui offrir de sauver l'Etat, en obtenir de l'argent et des troupes, et de là aller arborer l'étendard de la trahison. D'autres hommes, non moins indignes de leur rang, écartèrent tout-à-coup le rideau derrière lequel ils avaient tenu leurs conciliabules sacrilèges, et montrèrent à découvert leur front hideux. Laissons à l'opinion publique, aux lois et au burin de l'histoire, à révéler tous les noms de ces conspirateurs, dont les manoeuvres ourdies dans le cabinet mystérieux et profanateur de Porto-Ferrajo, préparèrent et firent éclater le mouvement de l'insurrection. Ce fut ainsi qu'au signal

convenu, Buonaparte se reposant sur le succès le plus criminel, rompit le traité qui lui avait donné la vie, quitta furtivement l'île d'Elbe le 26 février dans la nuit, et débarqua Apparition de Buonaparte sur le 1er mars à Cannes, en Provence, avec

les côtes de

1.

France une poignée de soldats. Le 6, l'un des complices placés sur son passage lui ouvrit les portes de Grenoble, et bientôt les grands fauteurs de l'imposture, électrisant et trompant l'armée par des prestiges et des mensonges (8), la firent se précipiter au-devant de l'homine qui avait joué à Dresde ( 9 ) et voulait jouer encore le salut de la France.

La famille royale s'éloigne de Paris.

Que pouvait opposer à ce débordement soudain, à ce crime imprévu, la royale famille des Bourbons? une armée levée dans toutes les gardes nationales de France. Mais cette organisation en butte à la malveillance, et qui exigeait du temps, fut presque impraticable. Le génie du mal, échappé d'un rocher de la Méditerranée, et tenant d'une main le glaive et de l'autre la torche des furies révolutionnaires, s'était avancé dans sa course rapide jusque vers la capitale. Le Roi, avec sa cour fidèle, dut chercher un refuge sur le sol étranger. Mais ce bon monarque, dans la sollicitude de son ame navrée

des douleurs de la nation, choisit la ville la plus rapprochée des confins du royaume, pour que sa voix paternelle pût encore se faire entendre des Français ses enfans, et les soutenir dans l'adversité. Louis XVIII fixa sa résidence à Gand. Ce fut là l'asyle de la patrie, le foyer de l'honneur et l'abri de la vertu.

Toutefois, dans le Midi, à l'Ouest, et dans les lieux sur lesquels le génie du mal n'avait pu d'abord planer, des populations entières coururent aux armes, et voulurent combattre pour la sainte cause de la dynastie des Bourbons.

On vit l'auguste fille de Louis XVI, cette princesse que ses hautes vertus et sa résignation dans l'infortune des temps nous ont rendue si chère et si précieuse, paraître en héroïne à la tête des habitans de Bordeaux, pendant que la vaillance de son illustre époux le duc d'Angoulême ralliait dans Marseille au panache d'Henri IV les défenseurs du trône légitime, et arrêtait par des prodiges de valeur les foudres du tyran.

Mais Bordeaux et Marseille vinrent à tomber aussi dans les fers de Buonaparte, et les

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