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de ses adhérens.

nait le 20 juiù avec la honte et la pâle et livide frayeur du châtiment.

"

Vues hostiles On se demandera sans doute pourquoi, après ce lâche abandon, les troupes se virent encore entraînées à combattre? c'est que la frénésie et l'égoïsme monstrueux de certains chefs continuèrent de les exalter: tant on abuse des beaux noms de liberté, de patrie, d'indépendance, pour mettre en délire un peuple brave!

De quel droit, dira-t-on, ces chefs s'avisaient-ils de faire la loi à la nation entière ? parce qu'ils voulaient, pour pallier leur infamie, tenter d'y associer leurs concitoyens. Voilà dans quel dessein ils proclamèrent la calomniense assertion que la majorité de la France pensait comme eux, tandis que cette majorité les désavouait, les répudiáit même comme Français ; tandis que l'armée elle-même, qui doit être essentiellement passive et obéissante, s'indignant bientôt de servir sous leurs ordres et verser son sang inutilement, s'éloignait des étendards levés au nom de la patrie contre, la patrie même. Et cependant ces hommes forcenés eurent l'impudence de dire que revenir sur ses pas, que revenir à la paix

de

de 1814, c'était signer le testament de l'armée, lorsque c'étaient eux seuls qui, trop jaloux de la vie, trop égoïstes pour signer le leur, trop sanguinaires pour abjurer une coupable révolte, voulaient se faire un rempart des infortunés et crédules soldats qu'ils fanatisaient et condamnaient à être égorgés pour eux.

Revenons à la fuite de Napoléon. Ce guerrier exterminateur qui se disait l'homme des destinées, n'avait jamais pu se tenir d'à-plomb à la hauteur de celles où les hasards, les crimes et le torrent de la révolution l'avaient élevé. Il avait été l'homme de la victoire, tant que de brillantes armées lui avaient cueilli des lauriers ; mais il n'avait pas su être l'homme de l'adversité, dès que les chances des combats lui avaient été funestes. Le sang-froid et les Définition da talens qui caractérisent le génie du véritable titre de grand grand homme, lui avaient toujours été inconnus. Moreau (16), ce modeste et célèbre capitaine de nos annales modernes, conquérait l'estime du soldat, et conservait la confiance de la nation, même après une défaite ou dans une retraite : c'est qu'il était grand par lui-même, qu'il aimait sa patrie, et

homme.

qu'il affectionnait le soldat. Mais Buonaparte ne fut exhaussé et grandi que par les événemens: il ne chercha, au milieu des vagues qui battaient violemment le vaisseau de l'Etat, qu'à saisir malgré nous le gouvernail pour nous briser contre les écueils, et par un mépris systématique des hommes, il ne fut jamais avare du sang de ses soldats, immolés souvent à son impéritie et à ses calculs barbares.

Arrêté et déçu enfin dans ses calculs, et reculant devant les malheurs qu'il avait de nouveau provoqués contre la France, Napoléon, après les désastres de MontSaint-Jean, reconnut que l'orage grossi sur sa tête allait éclater et le livrer au peuple outragé, s'il s'obstinait à retenir les rênes du gouvernement et à voler encore au Abdication du combat. Il abdiqua donc, le 22 juin, le pouvoir que, trois mois auparavant, rebelle heureux, il avait une seconde fois usurpé.

22 juin.

Il avait vu l'impossibilité d'arracher de nouvelles armées à la France, frémissante d'indignation; car, sous le nom de bataillons actifs de gardes nationales, il avait épuisé ses ressources de conscription, et, Corps francs sous les dénominations de corps francs et

et fédérés.

de fédérés, il avait armé des bandes composées en général de jeunes gens exilés de leurs familles ou échappés de leurs colléges, d'ouvriers ruinés et de vagabonds, qui, par le désordre, le pillage et l'assassinat, avaient dévasté les départemens, et ne méritaient pas le nom de militaires français.

Enfin il avait entendu le mécontentement même de plusieurs de ses principaux affidés, et il s'était hâté d'abandonner le champ de bataille, faisant par-là à-la-fois son procès et sa condamnation.

Comment a-t-il pu se trouver des flatteurs assez déhontés pour établir, dans ces circonstances flétrissantes pour Buonaparte, un parallèle entre lui et ces Romains à juste titre si renommés, les Trajan, les Titus et les Marc-Aurèle ?

clauses de l'ab

Certes, ce n'était pas grandeur d'ame, Des termes et mais grandeur d'audace, que de colorer dication du 22 cette seconde abdication du vernis des sen- juin. timens les plus héroïques pour le salut et l'indépendance de la France, et d'oser proclamer son successeur dans la personne du jeune Napoléon.

Examinons attentivement ces deux points.

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Buonaparte voulait bien enfin reconnaître que c'était à lui personnellement qu'on faisait la guerre, et pour qu'elle cessât, il annonçait pompeusement que sa vie poli tique était terminée. Mais aussitôt il transférait de lui-même le commandement à son fils. Cela n'impliquait-il pas contradiction, puisqu'il avait été exclu à jamais, avec sa descendance et sa famille, de tout pouvoir en France? Il le savait parfaitement; mais il était bien aise, dans ses sinistres pensers, de mettre son fils en avant, pour laisser une pomme de discorde dans le conseil et dans les têtes de ses adhérens, et tirer ainsi vengeance de son abdication. Dans le préambule de cet acte, il s'était au surplus, d'une manière étrange, rendu authentiquement à l'opinion publique, en disant que la réunion de tous les efforts et de toutes les volontés en sa faveur n'existait point. Il se retirait dès-lors bien convaincu que, puisqu'il n'avait pu se relever lui-même, d'autres ne viendraient pas davantage à bout d'empêcher l'écroulement de l'édifice.

D'ailleurs, il n'aurait pu être admis à transiger, dans le cas où cela eût été possible, qu'en se replaçant sans restriction,

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