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(7) Buonaparte ne put cependant s'empêcher de maintenir jusqu'à plus de 1300 décorations de la Légion d'honneur, accordées sous la restauration.

( 8 ) Indépendamment des conquêtes qu'on promit à l'armée, on lui fit accroire que l'ex-empereur s'était ménagé de puissans alliés, et que l'archiduchesse Marie-Louise et le jeune Napoléon allaient revenir en France.

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(9) Lors du congrès de Prague, en 1813, on proposa à Buonaparte de se replier sur le Rhin, pour préserver la France d'une invasion: il répondit à cette ouverture par un mouvement de son naturel emporté et incorrigible. Il avait les mains croisées derrière le dos et la tête inclinée il releva tout-à-coup sa tête, et lançant violemment ses deux mains en avant, comme pour dire Le sort en est jeté, il se mit à marcher à grands pas, sortit brusquement des jardins du palais Marcolini où il venait d'avoir l'entretien, et donna sur-le-champ des ordres pour la reprise des hostilités. Ainsi cet homme, ne sachant que s'agiter et remuer les peuples, confiait tout au hasard, qui était sa divinité. Il ne voyait dans les hommes que des quantités à dépenser.

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(10) Qui ne sait d'ailleurs que les rubriques de Buonaparte pouvaient faire remplir des registres de signatures, dès qu'aucune mesure n'était prise pour en constater l'identité. Il me suffira, pour le prouver, de dévoiler une méprisable su

percherie que des témoins oculaires m'ont affirmé avoir vu mettre en pratique en 1804, lorsqu'il s'agissait de voter sur le titre d'Empereur. Des émissaires furent envoyés dans toutes les écoles publiques et les pensions particulières, pour faire signer l'acceptation sur des registres ad hoc, à tous les élèves qui savaient écrire. On ne les instruisit même pas du véritable but pour lequel ils donnaient leurs noms; on leur fit croire que cette opération devait servir à former des listes pour l'admission, soit au Prytanée, soit dans la marine, soit dans d'autres écoles spéciales. Ainsi, des jeunes gens qui n'étaient point aptes aux actes de l'état civil, des enfans signèrent pour leurs pères. Cela n'empêcha pas que dans la même ville, dans le même village, ou à dix lieues comme à cent lieues plus loin, les pères, les frères de ces enfans ne fussent invités à signer sur d'autres registres, en sorte que le même nom se répéta jusqu'à six, sept et huit fois. Cela faisait nombre: c'était tout ce qu'il fallait.

( II ) On a même pù remarquer que, dans le protocole de ses premiers décrets, il fit suivre son titre d'empereur de ces trois signes, etc., etc., etc. comme pour faire souvenir de ses titres passés : Roi d'Italie, Protecteur de la Confédération du Rhin, Médiateur de la Confédération suisse.

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(12) Ainsi le Code civil, fruit des travaux des hommes d'Etat, avait été nommé le Code Napoléon

(13) Des chants et des sacrifices religieux, des panégyriques adulateurs, furent commandés impérieusement pour célébrer les violences et les succès sanguinaires de cet homme qui, dans son vertige, se disait le dieu de la guerre. Les ministres du culte catholique furent de plus obligés de recevoir un Catéchisme dont l'un des dogmes était l'amour de Napoléon, de sa famille, et l'obéissance aveugle à ses volontés (7. leçon ). Avec cette doctrine, la jeunesse perdait peu-àpeu toute idée de morale, tout principe de goût pour les sciences et les arts, et tout amour pour ses parens et la patrie, parce qu'elle n'avait devant les yeux qu'une soumission passive à un maître absolu, que la conscription, que la licence des camps, que des guerres lointaines.

(14) Il avait, par l'effroi de ses armes, forcé des princes à subir son arrogante domination; et ce fut pour arrêter la fureur du vainqueur et sauver l'Autriche, que l'archiduchesse Marie-Louise se dévoua, s'offrit en sacrifice, en donnant sa main au tyran du monde.

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(15) On sait par quels manéges hypocrites ́et abominables se consomma le crime de l'enlèvement de la famille royale d'Espagne et du pape Pie VII. Je suis allé à Rome pendant l'absence de ce vénérable Pontife, et je me rappellerai toujours qu'au premier mouvement de surprise et d'admiration que j'avais éprouvé à la vue

des chefs-d'œuvre de la basilique de Saint-Pierre et du palais du Vatican, succédèrent aussitôt dans mon ame une profonde rêverie et le recueillement de la douleur, en songeant que je marchais sur le parvis où l'auguste Chef de l'Eglise avait imprimé ses pas, et d'où la persécution la plus sacrilége l'avait arraché.

(16) Les talens illustres et le beau caractère de Moreau excitèrent la haine de Buonaparte, qui le fit impliquer dans le procès abominable de Georges et de Pichegru. Il eût voulu le faire périr avec eux; mais il craignit un mouvement populaire, et il le condamna à un bannissement perpétuel. Pourquoi la faux de la mort nous at-elle, en 1813, enlevé dans Moreau le plus vertueux des généraux et le véritable ami de son pays.

(17) On eut, à la tribune, l'indécence de donner l'épithète de fou et d'insensé à l'un des membres de la Chambre des représentans (M. de Malleville fils), qui s'était montré le plus sage de ses collègues, en voulant dessiller leurs yeux et en partageant avec franchise l'opinion publique.

(18) Lorsque des améliorations réelles sont aperçues, rien de plus juste qu'après les avoir mûrement délibérées elles soient mises en circulation et viennent modifier le pacte constitutionnel; mais en cela même il convient, comme l'a exprimé le Roi lui-même, qu'on se rapproche le plus possible des formes précédemment en usage,

et que sur-tout l'on ne touche point aux bases sacramentelles du contrat.

(19) On rapporte qu'un personnage de la plus haute distinction, écrivant d'Angleterre à un auguste prince de sa famille pour lui annoncer cette capture, a dit : La fable vient de se réaliser : la Chimère est au pouvoir de Bellerophon, et cette fois elle ne lui échappera plus. On sait que la Chimère était un monstre effroyable qui vomissait des fables. Buonaparte tenta trois fois, dans un frêle esquif, de regagner le port; mais se voyant également surveillé avec rigueur du côté de terre, il se rendit avec toutes les personnes de sa suite au vaisseau anglais le Bellerophon; il passa le 6 août à bord du Northumberland, qui fit voile pour Sainte-Hélène, petite île située dans l'OcéanAtlantique, à plus de 2000 lieues de l'Europe.

( 20 ) C'est le 10 juillet 1815 que LL. MM. les Empereurs de Russie et d'Autriche et le Roi de Prusse sont arrivés à Paris.

FIN.

A ORLÉANS, de l'Imprimerie de GUYOT ainé, rue des Trois-Maries, N.0 19.

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