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provisoire existât, qu'il fût formé par l'autorité supérieure existante, par le Sénat. N'étant point formé par cette autorité, il aurait fallu qu'il le fût par la nation : et jusqu'à cette formation, dans quel chaos n'aurions - nous pas été? L'auteur des Réflexions devait bien faire celle-ci.

Pourquoi le Sénat se serait-il dissous? Le regardât-on irréfragablement comme complice de Bonaparte (et j'ai dit qu'aucun Français ne pouvait l'être, et que tous avaient été comprimés), il ne devait pas encore se dissoudre ; car il ne devait pas laisser la France sans pouvoir législatif, sans autorité constituée politique.

Mais le pouvoir n'est ainsi législatif que par ses bases de constitution. Cela est vrai; mais il était désigné par le pouvoir dominant pour faire la constitution.

Pour qu'il se fût dissous, suivant le désir de beaucoup de personnes, il aurait fallu qu'il eût la conscience de sa complicité avec Bonaparte.

Ne l'ayant pas, se croyant seulement reprochable de faiblesse, et même de pusillanimité pour n'avoir jamais osé arrêter Bonaparte dans

ses projets insensés, forcenés, il n'était pas obligé de se dissoudre.

Il faut une force supérieure de caractère pour consentir à quitter une autorité que l'on tient légalement, et que l'on croit pouvoir

conserver.

Ha, dira-t-on, osé complimenter Bonaparte après ses équipées d'Espagne, de Moskow, de Dresde, etc. Je réponds: Quand Bonaparte revenait après avoir perdu toute l'armée, le Sénat sentait qu'il fallait la recomposer pour ne pas laisser la France sans force, exposée aux invasions. Alors, il entourait encore Bonaparte d'autant de considération qu'il le pouvait, afin de parvenir à la recomposition de l'armée, et d'éviter la combustion générale. J'ai dit plus haut qu'il aurait dû le déclarer déchu; mais j'ai demandé aussi qui est-ce qui aurait appuyé la déchéance, s'il l'avait prononcée ?

Il faut que celui qui lit ait le sentiment de ce qu'il lit pour y croire; comme il faut que celui qui écrit ait le sentiment de ce qu'il écrit pour en pénétrer ses lecteurs. J'ai écrit avec sincérité ce que je pensais, ce que je sentais puissé-je être lu avec la même sincérité, ayec le même sentiment!

Ce qu'il nous importe sur-tout en ce moment, c'est d'oublier le passé pour ne voir que l'avenir; c'est de nous conduire avec une noblesse digne de la générosité des princes, qui n'ont profité de leur victoire que pour nous rendre à nousmêmes; c'est enfin de ne voir que l'intérêt de la patrie, et de faire taire le nôtre.

FIN.

Chez PIERRE BLANCHARD, libraire, Palais-Royal.

TRAITÉ

COMME IL LE MÉRITE.

Timeo Danaos et dona ferentes.

PARIS,

CHEZ LES LIBRAIRES ASSOCIÉS.

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