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de ce jour où le Saint-Père, ses cardinaux et tout le clergé de France firent des prières dans le sanctuaire de Notre-Dame pour la prospérité de notre règne. Nous avons résolu de déposer lesdits drapeaux dans l'église de Notre-Dame, métropole de notre bonne ville de Paris. Nous avons ordonné en conséquence qu'ils vous soient adressés, pour la garde en être confiée à votre Chapitre métropolitain. Notre intention est que tous les ans audit jour un office solennel soit chanté dans ladite métropole, en mémoire des braves morts pour la patrie dans cette grande journée, lequel office sera suivi d'actions de grâces pour la victoire qu'il a plu au Dieu des armées de nous accorder. Cette lettre n'étant pas à une autre fin, nous prions Dieu qu'il vous ait, mon cousin, en sa sainte et digne garde.

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De son camp impérial d'Austerlitz, Napoléon décréta, entr'autres dispositions : « Les veuves des généraux morts à la » bataille d'Austerlitz jouiront d'une pension de six mille francs >> leur vie durant; les veuves des colonels et des majors, d'une pen»sion de deux mille quatre cents francs; les veuves des capitaines, » d'une pension de douze cents francs; les veuves des lieutenans et » sous-lieutenans d'une pension de huit cents francs; les veuves des >> soldats, d'une pension de deux cents francs. - Napoléon, etc. » Nous adoptons tous les enfans des généraux, officiers et soldats >> français morts à la bataille d'Austerlitz. Ils seront tous entretenus » et élevés à nos frais, les garçons dans notre palais impérial de » Rambouillet, et les filles dans notre palais impérial de Saint» Germain. Les garçons seront ensuite placés et les filles mariées » par nous. Indépendamment de leurs noms de baptême et de >> famille, ils auront le droit d'y joindre celui de Napoléon. »

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Dans un ordre du jour daté de Schoenbrunn, 4 nivose an 14, on lit :

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» Arrivé au premier bataillon du quatrième régiment de ligne, » qui avait été entamé à la bataille d'Austerlitz, et y avait perdu » son Aigle, l'empereur lui dit : Soldats, qu'avez-vous fait de » l'Aigle que je vous avais donnée? Vous aviez juré qu'elle vous » servirait de point de ralliement, et que vous la défendriez au péril » de votre vie; comment avez-vous tenu votre promesse ? Le major a » répondu que, le porte-drapeau ayant été tué dans une charge au >> moment de la plus forte mêlée, personne ne s'en était aperçu au » milieu de la fumée; que cependant la division avait fait un » mouvement à droite; que le bataillon avait appuyé ce mouve»ment, et que ce n'était que longtemps après que l'on s'était

» aperçu de la perte de son Aigle; que la preuve qu'il avait été » réuni, et qu'il n'avait point été rompu, c'est qu'un moment après » il avait culbuté deux bataillons russes et pris deux drapeaux, dont > il faisait hommage à l'empereur, espérant que cela mériterait qu'il » leur rendit une autre Aigle. L'empereur a été un peu incertain; » puis il a dit : Officiers et soldats, jurez-vous qu'aucun de vous ne » s'est aperçu de la perte de son Aigle, et que si vous vous en » étiez aperçu vous vous seriez précipités pour la reprendre, ou » vous auriez péri sur le champ de bataille? car un soldat qui a » perdu son drapeau a tout perdu. Au même moment mille bras se » sont élevés: Nous le jurons! et nous jurons aussi de défendre » l'Aigle que vous nous donnerez avec la même intrépidité que nous » avons mise à prendre les deux drapeaux que nous vous présentons. » En ce cas, a dit en souriant l'empereur, je vous rendrai donc votre » Aigle.»

Les succès combinés de toutes les armées françaises avaient fait que l'armée d'Italie, commandée par le général Masséna, était devenue le huitième corps de la grande armée, qui occupait tous les états des couronnes d'Allemagne et d'Autriche; et pendant que la paix se négociait la guerre était suspendue. La trahison la ralluma sur un point: Naples avait ouvert ses ports aux Anglais pour favoriser leurs projets hostiles. « Le général Saint-Cyr marcha à grandes » journées sur Naples pour punir la trahison de la reine, et préci» piter du trône cette femme criminelle, qui avec tant d'impudeur a » violé tout ce qui est sacré parmi les hommes. On a voulu intercéder » pour elle auprès de l'empereur; il a répondu : Les hostilités dus» sent-elles recommencer, et la nation soutenir une guerre de trente » ans, une si atroce perfidie ne peut être pardonnée. La reine de » Naples a cessé de régner; ce dernier crime a rempli sa destinée. » Qu'elle aille à Londres augmenter le nombre des intrigans, et » former un comité d'encre sympathique avec Drake, Spencer» Smith, Taylor, Wickam ; elle pourra y appeler, si elle le juge » convenable, le baron d'Armfeld, MM. de Fersen, d'Antraigues, » et le moine Morus.» (Trente. septième bulletin.)

Cependant un tel ennemi ne pouvait empêcher la paix; elle fut en effet signée le 6 nivose; et le même jour parurent les trois proclamations qui suivent :

A L'ARMÉE D'ITALIE.

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De mon camp impérial de Schonbrunn, le 6 nivose an 14.

Soldats, depuis dix ans j'ai tout fait pour sauver le roi de Naples; il a tout fait pour se perdre.

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Après la bataille de Dégo, de Mondovi, de Lodi, il ne

pouvait m'opposer qu'une faible résistance; je me fiai aux paroles de ce prince, et fus généreux envers lui.

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Lorsque la seconde coalition fut dissoute à Marengo, le roi de Naples, qui le premier avait commencé cette injuste guerre, abandonné à Lunéville par ses alliés, resta seul et sans défense. Il m'implora ; je lui pardonnai une seconde fois.

» Il y a peu de mois vous étiez aux portes de Naples. J'avais d'assez légitimes raisons et de suspecter la trahison qui se méditait, et de venger les outrages qui m'avaient été faits. Je fus encore généreux je reconnus la neutralité de Naples; je vous ordonnai d'évacuer ce royaume; et pour la troisième fois la maison de Naples fut raffermie et sauvée.

>> Pardonnerons-nous une quatrième fois ? Nous fieronsnous une quatrième fois à une cour sans foi, sans honneur. sans raison? Non! non! la dynastie de Naples a cessé de régner; son existence est incompatible avec le repos de l'Europe et l'honneur de ma couronne.

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Soldats, marchez, précipitez dans les flots, si tant est qu'ils vous attendent, ces débiles bataillons des tyrans des mers! Montrez au monde de quelle manière nous punissons les parjures! Ne tardez pas à m'apprendre que l'Italie tout entière est soumise à mes lois ou à celles de mes alliés; que le plus beau pays de la terre est affranchi du joug des hommes les plus perfides; que la sainteté des traités est vengée, et que les mânes de mes braves soldats égorgés dans les ports de Sicile, à leur retour d'Egypte, après avoir échappé aux périls des naufrages, des déserts, et de cent combats, sont enfin apaisés !

» Soldats, mon frère (Joseph) marchera à votre tête. Il connaît mes projets; il est le dépositaire de mon autorité: il a toute ma confiance; environnez-le de toute la vôtre.

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Signé NAPOLÉON. »

A LA GRANDE ARMÉE. - Schonbrunn, 6 nivose an 14.

« Soldats, la paix entre moi et l'empereur d'Autriche est signée. Vous avez dans cette arrière-saison fait deux campagnes; vous avez rempli tout ce que j'attendais de vous. Je vais partir pour me rendre dans ma capitale. J'ai accordé de l'avancement et des récompenses à ceux qui se sont le plus distingués ; je vous tiendrai tout ce que je vous ai promis. Vous avez vu votre empereur partager avec vous vos périls et vos fatigues; je veux aussi que vous veniez le voir entouré de la grandeur et de la splendeur qui appartiennent au souverain du premier peuple de l'univers. Je donnerai une grande fête aux

premiers jours de mai à Paris; vous y serez tous; et après nous irons où nous appelleront le bonheur de notre patrie et les intérêts de notre gloire.

» Soldats, pendant ces trois mois qui vous seront nécessaires pour retourner en France, soyez le modèle de toutes les armées ce ne sont plus des preuves de courage et d'intrépi dité que vous êtes appelés à donner, mais d'une sévère discipline. Que mes alliés n'aient pas à se plaindre de votre passage; et en arrivant sur ce territoire sacré, comportez-vous comme des enfans au milieu de leur famille : mon peuple se comportera avec vous comme il le doit envers ses héros et ses défenseurs.

» Soldats, l'idée que je vous verrai tous avant six mois rangés autour de mon palais sourit à mon cœur, et j'éprouve d'avance les plus tendres émotions. Nous célébrerons la mémoire de ceux qui dans ces deux campagnes sont morts au champ d'honneur, et le monde nous verra tous prêts à imiter leur exemple, et à faire encore plus que nous n'avons fait, s'il le faut, contre ceux qui voudraient attaquer notre honneur, ou qui se laisseraient séduire par l'or corrupteur des éternels ennemis du continent! Signé Napoléon. »

A LA VILLE DE VIENNE.

Schonbrunn, 6 nivose an 14.

« Habitans de la ville de Vienne, j'ai signé la paix avec l'empereur d'Autriche. Prêt à partir pour ma capitale, je veux que vous sachiez l'estime que je vous porte, et le contentement que j'ai de votre bonne conduite pendant le temps que vous avez été sous ma loi. Je vous ai donné un exemple inouï jusqu'à présent dans l'histoire des nations. Dix mille hommes de votre garde nationale sont restés armés, ont gardé vos portes ; votre arsenal tout entier est demeuré en votre pouvoir; et pendant ce temps-là je courais les chances les plus hasardeuses de guerre. Je me suis confié en vos sentimens d'honneur, de bonne foi, de loyauté : vous avez justifié ma confiance.

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» Habitans de Vienne, je sais que vous avez tous blâmé la guerre que des ministres vendus à l'Angleterre ont suscitée sur le continent. Votre souverain est éclairé sur les menées de ces ministres corrompus; il est livré tout entier aux grandes qualités qui le distinguent, et désormais j'espère, pour vous et pour le continent, des jours plus heureux.

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Habitans de Vienne, je me suis peu montré parmi vous ; non par dédain ou par un vain argueil, mais je n'ai pas voulu distraire en vous aucun des sentimens que vous deviez au prince avec qui j'étais dans l'intention de faire une prompte

paix. En vous quittant recevez, comme un présent qui vous prouve mon estime, votre arsenal intact, que les lois de la guerre ont rendu ma propriété; servez-vous-en toujours pour le maintien de l'ordre. Tous les maux que vous avez soufferts, attribuez-les aux malheurs inséparables de la guerre ; et tous les ménagemens que mon armée a apportés dans vos contrées vous les devez à l'estime que vous avez méritée.

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Signé NAPOLÉON. »

Le traité de paix, conclu par M. Ch.-M. Talleyrand Périgord pour l'empereur des Français, et MM. le prince Jean de Lichtenstein et le comte de Gyulay pour l'empereur d'Allemagne, fut signé le 5 nivose an 14 par les plénipotentiaires, réunis à Presbourg, et ratifié le (27 décembre 1805) par l'empereur Napoléon, à Schœnbrun. Il avait pour bases principales :

10. L'empereur d'Allemagne reconnaît les dispositions faites par l'empereur des Français relativement aux principautés de Lucques et de Piombino.

2°. L'empereur d'Allemagne renonce à la partie des états de la République de Venise à lui cédée par les traités de CampoFormio et de Lunéville, laquelle sera réunie au royaume d'Italie.

» 3°. L'empereur d'Allemagne reconnaît l'empereur des Français comme roi d'Italie, et s'engage à reconnaître le successeur que l'empereur des Français, conformément à sa déclaration, se sera donné comme roi d'Italie.

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4°. Les électeurs de Bavière et de Wurtemberg prennent le titre de roi ; ils jouissent de la plénitude de la souveraineté et de tous les droits qui en dérivent; et l'empereur d'Allemagne les reconnaît en cette qualité.

5°. L'empereur d'Allemagne renonce aux principautés, seigneuries, domaines et territoires ci-après désignés...... (et donnés au roi de Bavière, au roi de Wurtemberg, à l'électeur de Bade).

» 6°. L'empereur des Francais garantit l'intégrité de l'empire d'Autriche dans l'état où il sera en conséquence du présent traité.

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7°. Les hautes parties contractantes reconnaissent l'indépendance de la république Helvétique, régie par l'acte de médiation, de même que l'indépendance de la république

Batave.

» 8°. Les prisonniers de guerre seront restitués dans quarante jours à dater de l'échange des ratifications du présent traité. »

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