Page images
PDF
EPUB

laissé violer l'honneur de son pavillon, et qui sacrifie à nos ennemis les intérêts de Votre Majesté et ceux de toute l'Europe.

» Le Portugal s'est mis en état de guerre avec la France. Quelles que fussent envers lui les dispositions bienveillantes de Votre Majesté, la guerre contre le Portugal est devenue pour elle un rigoureux, mais nécessaire devoir. L'intérêt du continent, d'où les Anglais doivent être exclus, force Votre Majesté à la déclarer. De plus longs délais n'aboutiraient qu'à mettre Lisbonne entre les mains de l'Angleterre.

>> J'ai donc l'honneur de proposer à Votre Majesté de remettre à la légation de Portugal des passe-ports pour quitter la France, et de regarder comme entièrement rompues des liaisons de paix que le Portugal a voulu rompre.

» Si cette guerre devait conduire le Portugal à subir le sort de tant d'états tombés victimes de l'amitié de l'Angleterre, Votre Majesté, qui ne recherche point de pareils succès, regrettera sans doute que l'intérêt du continent l'ait rendue nécessaire. Ses vues, qui se sont constamment élevées avec sa puissance, lui montrent plutôt dans la un fléau guerre l'humanité, qu'une nouvelle perspective de gloire, et tous les souhaits de Votre Majesté seraient de n'avoir plus à se vouer qu'à la prospérité de son Empire.

pour

» Je suis avec un profond respect, Sire, etc.

» Fontainebleau, le 21 octobre 1807. Signé CHAMPAGNY. »

Second RAPPORT fait à l'empereur par le ministre des relations exté

[ocr errors]

rieures.

Sire, j'ai l'honneur de remettre sous les yeux de Votre Majesté le rapport qui accompagnait la proposition que je lui avais faite, et qu'elle avait approuvée, de renvoyer la légation portugaise, et de regarder comme rompus tous les liens de paix qui unissaient le Portugal à la France. L'événement a prouvé, Sire, combien était fondée l'opinion que je présentais à Votre Majesté des dispositions du Portugal; combien étaient nécessaires les mesures actives et prévoyantes que Votre Majesté a prises à cette époque, et qui ont été si bien secondées par la rapidité de la marche de ses troupes. En vain la cour de Lisbonne, pour tromper la vigilance de Votre Majesté, a déclaré la guerre à l'Angleterre vingt jours après que votre ministre eut quitté le Portugal, et lorsque son ambassadeur était revenu dans ses foyers; il était évident que cette mesure était concertée avec les Anglais. En vain elle ordonnait le séquestre de leurs marchandises, décret auquel elle n'a même donné aucune apparence d'exécution, lorsque les marchandises anglaises de quel que valeur et les Anglais avaient été mis à l'abri de toute mesure

dirigée contre eux; sa mauvaise foi n'en était que plus évidente. Elle l'a poussée au point de faire partir un ambassadeur extraordinaire ( qui, il est vrai, n'a pas passé les frontières du Portugal) au moment même où, convaincue que Votre Majesté n'avait pu être trompée, elle concertait sa fuite avec le ministre anglais et le commandant de l'escadre anglaise; et, peu d'instans avant de recevoir la nouvelle de cet événement inattendu, un courrier portugais apportait en Italie à Votre Majesté de nouvelles protestations de l'attachement du Portugal à la cause commune; il annonçait le retour de M. de Lima, qui n'a pas quitté Lisbonne, et l'arrivée de l'ambassadeur extraordinaire, M. de Marialva, probablement dupe, comme le courrier, de la mauvaise foi de sa cour. Ce malheureux courrier, arrivé en Italie, après l'épuisement de toutes ses ressources, y a appris avec désespoir qu'il n'avait plus de gouvernement.

>>

Le but de ces vils artifices était évident.

» Le Portugal, fidèle à la cause de l'Angleterre, lui demandait des secours, et voulait du gagner temps pour les attendre. Mais les secours de l'Angleterre ont toujours été funestes à ses alliés ; ils n'ont servi au prince régent qu'à protéger sa fuite et à assurer la perte de ses états.

» Le prince régent de Portugal est parti le 29 novembre, sur cette escadre qu'on armait, disait-on, tantôt pour faire la guerre à l'Angleterre, tantôt pour transporter au Brésil le prince de Beyra, fils du prince régent, envoyé dans cette colonie afin de l'empêcher de se donner aux Anglais. La maison de Bragance tout entière s'est donnée aux Anglais avec tout ce qu'elle a pu emporter, et le Brésil ne sera plus qu'une colonie anglaise. Le Portugal est enfin délivré du joug de l'Angleterre ; Votre Majesté l'occupe par ses troupes. Il a été laissé sans défense du côté de la mer, et une partie des canons de ses côtes a été enclouée. Aussi l'Angleterre les menace actuellement; elle bleque ses ports; elle veut dévaster ses rivages. L'Espagne a eu des craintes pour Cadix; elle en a pour Ceuta : c'est vers cette partie du monde que les Anglais paraissent vouloir, diriger leurs expéditions secrètes. Ils ont débarqué beaucoup de troupes à Gibraltar; ils ont rappelé de ce côté celles qui avaient été chassées du Levant, et une partie de celles qu'ils avaient accumulées en Sicile. Leurs croisières sur les côtes d'Espagne deviennent plus vigilantes; ils semblent vouloir se venger sur ce royaume des revers qu'ils ont éprouvés dans ses colonies. Toute la presqu'ile mérite donc de fixer particulièrement l'attention de Votre Majesté. J'ai cru devoir lui exposer cet état de choses; sa sagesse lui dictera les mesures qu'il peut exiger.

»Je suis avec un profond respect, Sire, etc.

[ocr errors]

Paris, le 2 janvier 1808. Signé CHAMPAGNY. »

[ocr errors]

RAPPORT fait à l'empereur par le ministre de la guerre.

Sire, Votre Majesté m'a ordonné de former le premier et le deuxième corps d'observation de la Gironde. Le premier de ces corps, que commande le général Junot, a conquis le Portugal(1). La tête du deuxième est déjà à portée de suivre le premier si les circonstances l'exigent.

» Votre Majesté, dont la prévoyance n'est jamais en défaut, a voulu que le corps d'observation de l'Océan, qu'elle a confié à M. le maréchal Moncey, fût en troisième ligne.

"

La nécessité de fermer les ports du continent à notre irréconciliable ennemi, et d'avoir sur tous les points d'attaque des moyens considérables, afin de profiter des circonstances heureuses qui se présenteraient pour porter la guerre au sein de l'Angleterre, de l'Irlande et des Indes, peut rendre nécessaire la levée de la conscription de 1809.

» Le parti qui domine à Londres a proclamé le principe de la guerre perpétuelle, et l'expédition de Copenhague a révélé ses intentions criminelles. Quoique l'indignation de toute l'Europe se soit soulevée contre l'Angleterre, quoique dans aucune époque la France n'ait eu des armées aussi nombreuses, ce n'est point assez encore; il faut que l'influence anglaise puisse être attaquée partout où elle existe, jusqu'au moment où l'aspect de tant de dangers portera l'Angleterre à éloigner de ses conseils les oligarques qui les dirigent, et à confier l'administration à des hommes sages, et capables de concilier l'amour et l'intérêt de la patrie avec l'intérêt et l'amour du genre hu

main.

» Une politique vulgaire aurait pu déterminer Votre Majesté à désarmer; mais cette politique serait un fléau pour la France; elle rendrait imparfaits les grands résultats que vous avez préparés. Oui, Sire, Votre Majesté, loin de diminuer ses armées, doit les accroître jusqu'à ce que l'Angleterre ait reconnu l'indépendance de toutes les puissances, et rendu aux mers cette tranquillité que Votre Majesté a assurée au continent. Sans doute Votre Majesté doit souffrir d'exiger de ses peuples de nouveaux sacrifices, de leur imposer de nouvelles obligations; mais elle doit aussi se rendre à ce cri de tous les Français point de repos jusqu'à ce que les mers soient affranchies, et qu'une paix équitable ait rétabli la France

(1) Le général Junot avait été nommé gouverneur général du Portugal.

dans le plus juste, le plus utile, et le plus nécessaire de ses droits!

"

» Je suis avec un profond respect, Sire, etc.

[ocr errors]

Paris, le 6 janvier 1808. Signé CLARKE. »

Lecture faite de ces pièces, il est présenté un projet de senatusconsulte portant que quatre-vingt mille hommes de la conscription de 1809 sont mis à la disposition du gouvernement, et qu'ils seront pris parmi les jeunes gens nés du 1er janvier 1789 au 1er janvier 1790.

MOTIFS; exposés par M. le conseiller d'état Regnault ( de Saint-Jeand'Angely).

[ocr errors]

Monseigneur, sénateurs, lorsque votre sagesse appela sous les drapeaux les conscrits de 1808, vos vœux se dirigeaient vers la paix, que d'éclatantes victoires avaient préparée.

» Vous voulûtes assurer des moyens nouveaux de vaincre et de pacifier

» Le succès a passé votre espoir.

» Le feu de la guerre s'est éteint sur le continent; une paix durable a été jurée entre les deux plus grands souverains du monde, et l'Europe a respiré.

» Mais il est un gouvernement dont le repos de l'Europe est le désespoir, dont la paix est l'effroi, dont la discorde est le besoin, dont la guerre est l'espérance.

[ocr errors]

L'Angleterre a répondu à l'offre d'une médiation généreuse, offerte par l'empereur de Russie, en portant le fer et la flamme chez son plus ancien allié; en professant plus solennellement le mépris des droits des nations; en proclamant plus inhumainement le principe d'une guerre éternelle.

L'indignation de tous les souverains a répondu aux manifestes injurieux; aux déclarations astucieuses, aux actes barbares du cabinet de Saint-James.

» Les pressentimens que les orateurs de S. M. vous faisaient il y a un an à cette tribune sont réalisés.

[ocr errors]

C'est, disions-nous, c'est du sein du continent, que l'Angleterre a voulu embraser, que désormais une guerre ter»rible lui sera faite. (Voyez plus haut, page 335.)

[ocr errors]

» C'est en lui appliquant, sur tous les rivages européens, » les principes qu'elle a appliqués sur toutes les mers, qu'on » la ramenera aux principes du droit des gens et des nations » civilisées.

» C'est en exilant ses vaisseaux de toutes les côtes où nous » aurons des soldats et des alliés, que le ministère anglais sera puni du refus coupable de donner la paix au monde. »

» Art. 1er. La principauté de Guastalla ayant été, avec l'autorisation de S. M. l'empereur et roi, cédée au royaume d'Italie, il sera acquis, du produit de cette cession, et en remplacement, des biens dans le territoire de l'Empire français.

» 2. Ces biens seront possédés par S. A. I. la princesse Pauline, le prince Borghèse son époux, et les descendans nés de leur mariage, de mâle en måle, quant à l'hérédité et à la réversibilité, quittes de toutes charges, de la même manière que devait l'être ladite principauté, et aux mêmes charges et conditions, conformément à l'acte du 30 mars dernier.

» 3. Dans le cas où S. M. viendrait à autoriser l'échange ou l'aliénation des biens composant la dotation des duchés relevant de l'Empire français, érigés par les actes du même jour 30 mars dernier, ou de la dotation de tous nouveaux duchés ou autres titres que S. M. pourra ériger à l'avenir, il sera acquis des biens en remplacement sur le territoire de l'Empire français avec le prix des aliénations.

[ocr errors]

4. Les biens pris en échange ou acquis seront possédés, quant à l'hérédité et à la réversibilité, quittes de toutes charges, conformément aux actes de création desdits duchés ou autres titres, et aux charges et conditions y énoncées.

pourra

pour

» 5. Quand S. M. le jugera convenable, soit pour récompenser de grands services, soit pour exciter une noble émulation, soit pour concourir à l'éclat du trône, elle autoriser un chef de famille à substituer ses biens libres former la dotation d'un titre héréditaire que S. M. érigerait en sa faveur, réversible à son fils aîné, né ou à naître, et à ses descendans en ligue directe de mâle en mâle, par ordre de primogéniture.

» 6. Les propriétés ainsi possédées sur le territoire français, conformément aux articles précédens, n'auront et ne conféreront aucun droit ou privilége relativement aux autres sujets français de S. M. et à leurs propriétés.

>>7. Les actes par lesquels S. M. autoriserait un chef de famille à substituer ses biens libres, ainsi qu'il est dit à l'article précédent, ou permettrait le remplacement en France des dotations des duchés relevant de l'Empire, ou autres titres que S. M. érigerait à l'avenir, seront donnés en communication au Sénat, et transcrits sur ses registres.

» 8. Il sera pourvu par des réglemens d'administration publique à l'exécution du présent senatus-consúlte, et notamment en ce qui touche la jouissance et conservation tant des propriétés réversibles à la couronne que des propriétés substi– tuées en vertu de l'article 5. >>

« PreviousContinue »