Page images
PDF
EPUB

» La réunion de ces résultats si nombreux et si importans, rassurant à jamais ceux pour qui le présent n'est rien lorsqu'il ne garantit pas l'avenir, consolide dans ses bases, fortifie dans toutes ses parties, perfectionne dans ses proportions et embellit dans ses ornemens l'immense édifice social au sommet duquel s'élève le trône resplendissant du plus grand des mo

narques.

»Du haut de tant de gloire, du milieu de tant de trophées, puisse Votre Majesté impériale et royale, Sire, agréer, avec sa bienveillance ordinaire pour le Sénat, l'hommage de notre gratitude, de notre fidélité, de notre affection et de notre respect! >>

XIV.

SESSION DE 1808.

DISCOURS de l'empereur en ouvrant la session (1), le 25 octobre 1808.

Messieurs les députés des départemens au Corps législatif, les Codes qui fixent les principes de la propriété et de la liberte civile, qui sont l'objet de vos travaux, obtiennent l'opinion de l'Europe. Mes peuples en éprouvent déjà les plus salutaires

effets.

» Les dernières lois ont posé les bases de notre système de finance: c'est un monument de la puissance et de la grandeur de la France. Nous pourrons désormais subvenir aux dépenses que nécessiterait même une coalition générale de l'Europe par nos seules recettes annuelles. Nous ne serons jamais contraints d'avoir recours aux mesures désastreuses du papier monnaie, des emprunts et des arriérés.

» J'ai fait cette année plus de mille lieues dans l'intérieur de mon Empire. Le système de travaux que j'ai arrêté pour l'amélioration du territoire se poursuit avec activité.

» La vue de cette grande famille française, naguère déchirée par les opinions et les haines intestines, aujourd'hui prospère, , tranquille et unie, a sensiblement ému mon âme. J'ai senti que pour être heureux il me fallait d'abord l'assurance que la France fût heureuse.

» Le traité de paix de Presbourg, celui de Tilsit, l'attaque

(1) Convoquée par un décret daté de Saint-Cloud le 14 septembre.

de Copenhague, l'attentat de l'Angleterre contre toutes les nations maritimes, les différentes révolutions de Constantinople, les affaires de Portugal et d'Espagne ont diversement influé sur les affaires du monde.

» La Russie et le Danemarck se sont unis à moi contre l'Angleterre.

» Les Etats-Unis d'Amérique ont préféré renoncer au commerce et à la mer, plutôt que d'en reconnaître l'esclavage.

Une partie de mon armée marche contre celles que l'Angleterre a formées ou débarquées dans les Espagnes. C'est un bienfait particulier de cette Providence qui a constamment protégé nos armes, que les passions aient assez aveuglé les conseils anglais pour qu'ils renoncent à la protection des mers, et présentent enfin leur armée sur le continent.

» Je

pars dans peu de jours pour me mettre moi-même à la tête de mon armée, et, avec l'aide de Dieu, couronner dans Madrid le roi d'Espagne, et planter mes aigles sur les forts de Lisbonne.

» Je ne puis que me louer des sentimens des princes de la Confédération du Rhin.

» La Suisse sent tous les jours davantage les bienfaits de l'acte de médiation.

» Les peuples d'Italie ne me donnent que des sujets de

contentement.

D

L'empereur de Russie et moi nous nous sommes vus à Erfurth. Notre première pensée a été une pensée de paix. Nous avons même résolu de faire quelques sacrifices pour faire jouir plus tôt, s'il se peut, les cent millions d'hommes que nous représentons de tous les bienfaits du commerce maritime. Nous sommes d'accord et invariablement unis pour la paix comme pour la guerre.

>> Messieurs les députés des départemens au Corps législatif, j'ai ordonné à mes ministres des finances et du trésor public de mettre sous vos yeux les comptes des recettes et des dépenses de cette année. Vous y verrez avec satisfaction que je n'ai besoin de hausser le tarif d'aucune imposition. Mes peuples n'éprouveront aucune nouvelle charge.

» Les orateurs de mon Conseil d'état vous présenteront différens projets de loi, et entre autres tous ceux relatifs au Code

criminel.

» Je compte constamment sur toute votre assistance. »

ADRESSE du Corps législatif à l'empereur, présentéc par M. le comte de Fontanes, président (1), à la tête d'une députation de vingt-cinq membres, le 27 octobre 1808.

Sire, le Corps législatif vient porter au pied de Votre Majesté l'adresse de remercîment que vote avec lui tout le peuple français.

» Les sentimens paternels contenus dans le discours que vous avez prononcé du haut du trône ont répandu partout l'amour et la reconnaissance.

» Le premier des capitafnes voit donc quelque chose de plus héroïque et de plus élevé que la victoire! Sire, nous le tenons de votre propre bouche, il est une autorité plus puissante et plus durable que celle des armes; c'est l'autorité qui se fonde sur de bonnes lois et sur des institutions nationales. Les Codes que dicta votre sagesse pénètrent plus loin que VOS conquêtes, et règnent sans effort sur vingt nations diverses dont vous êtes le bienfaiteur.

» Le Corps législatif doit surtout célébrer ces triomphes paisibles, qui ne sont jamais suivis que des bénédictions du genre humain.

» La législation et les finances, c'est là que se renferment nos devoirs, et c'est de vous que nous avons reçu ce double bienfait.

» Il vous fut donné de retrouver l'ordre social sous les débris d'un vaste Empire, et de rétablir la fortune de l'Etat au milieu des ravages de la guerre.

» Vous avez créé, comme tout le reste, les vrais élémens du système des finances. Ce système, le plus propre aux grandes monarchies, est simple et fixe comme le principe qui les gouverne. Il n'est point soutenu par ces moyens artificiels qui ont toute l'inconstance de l'opinion et des événemens; il est impérissable comme les richesses de notre sol.

n

Si quelquefois des circonstances difficiles nécessitent des taxes nouvelles, ces taxes, toujours proportionnées aux besoins, n'en excèdent pas la durée: l'avenir n'est pas dévoré d'avance. On ne verra plus, après des années de gloire, l'Etat succomber sous le poids de la dette publique, et la banqueroute,

(1) Un décret avait continué la présidence de Fontanes, quoiqu'il fût déjà grand maitre de l'Université.

suivie des révolutions, entr'ouvrir un abîme où se perdent les trônes et la société tout entière.

>> Ces malheurs sont loin de nous. Les recettes couvrent les dépenses. Les charges actuelles ne seront point augmentées, et vous en donnez l'assurance au moment où d'autres états épuisent toutes leurs ressources. Quand vous immolez votre propre bonheur, celui du peuple occupe seul toute votre âme. Elle s'est émue à l'aspect de la grande famille (c'est ainsi que vous nommez la France), et, quoique sûr de tous les dévouemens, vous offrez la paix à la tête d'un million de guerriers invincibles.

» C'est dans ce généreux dessein que vous avez vu l'empereur de Russie. Jadis, quand des souverains aussi puissans se rapprochaient des bouts de l'Europe, tous les états voisins étaient en alarmes ; des présages sinistres et menaçans accompagnaient ces grandes entrevues. Epoque vraiment mémorable! les deux premiers monarques du monde réunissent leurs étendards non pour l'envahir, mais pour le pacifier!

» Votre Majesté, Sire, a prononcé le mot de sacrifices; et, nous osons le dire à Votre Majesté même, ce mot achève tous vos triomphes. Certes la nation ne veut pas plus que vous de ces sacrifices qui blesseraient sa gloire et la vôtre; mais il n'était qu'un seul moyen d'augmenter votre grandeur, c'était d'en modérer l'usage. Vous nous avez montré le spectacle de la force qui dompte tout, et vous nous réservez un spectacle plus extraordinaire, celui de la force qui se dompte elle-même.

» Un peuple ennemi prétend, il est vrai, retarder pour vous cette dernière gloire. Il est descendu sur le continent à la voix de la discorde et des factions. Déjà vous avez pris vos armes pour marcher à sa rencontre ; déjà vous abandonnez la France, qui depuis tant d'années vous a vu si peu de jours : vous partez; et je ne sais quelle crainte, inspirée par l'amour et tempérée par l'espérance, a troublé toutes les âmes! Nous savons bien pourtant que partout où vous êtes vous transportez avec vous la fortune et la victoire. La patrie vous accompagne de ses regrets et de ses vœux; elle vous recommande à ses braves enfans, qui forment vos légions fidèles: ces vœux seront exaucés.

n

Tous vos soldats lui jurent, sur leurs épées, de veiller autour d'une tête si chère et si glorieuse, où reposent tant de destinées! Sire, vous reviendrez bientôt triomphant; la main qui vous conduit de merveille en merveille au sommet des grandeurs humaines n'abandonnera ni la France ni l'Europe, qui si longtemps encore ont besoin de vous! »

[ocr errors]

RÉPONSE de l'empereur.

« Monsieur le président, et messieurs les députés des départemens au Corps législatif, mon devoir et mes inclinations me portent à me réunir à mes soldats ; je vais me ranger au milieu d'eux. Nous nous sommes mutuellement nécessaires. Je reviendrai bientôt dans ma capitale. Je reconnais, dans les sollicitudes et les sentimens que vous m'avez exprimés, l'amour que vous avez pour ma personne. Je vous en remercie. »

EXPOSÉ DE LA SITUAT.ON DE L'EMPIRE, lu devant le Corps législatif par le ministre de l'intérieur M. Cretet.

Séance du 2 novembre 1808.

Messieurs, vous avez terminé votre précédente session en laissant l'Empire heureux, et son chef comblé de gloire. Une année s'est écoulée, et une multitude de circonstances nouvelles ont ajouté à la fortune de notre patrie, et accru ses espérances en l'avenir.

Tout ce dont j'ai à vous entretenir est connu de vous, messieurs; je n'ai pas à vous instruire, mais à retracer à votre mémoire les principaux événemens qui ont rempli l'intervalle de vos deux sessions, et à rappeler à vos cœurs tout ce que la France doit de plus à la sagesse et à la valeur de son souverain.

» Je vous parlerai du premier des besoins des nations, la justice; de l'instruction publique, des sciences et des arts; des branches nombreuses de l'administration intérieure ; des cultes, des finances, et de nos principaux rapports avec les peuples du

continent.

» Ce récit nous ramenera sur cette guerre impitoyable et sans terme que nous soutenons contre un seul peuple. La gloire de notre nation le blesse, sa force l'alarme, l'indépendance de son commerce et de son industrie l'inquiète. Tout est encore soumis au sort des armes ; mais les jours de justice ne sont pas éloignés.

MINISTÈRE DE LA JUSTICE.

» Le maintien des grands états est fondé sur la conservation de la propriété ; elle est le lien réciproque entre les individus et leur gouvernement; la propriété est réglée et garantie par les lois civiles: aussi le peuple qui a les meilleures lois civiles estil celui pour lequel on peut présager le plus de bonheur. Loin d'avoir rien à envier à cet égard depuis que nous vivons sous le régime du Code Napoléon, nous voyons, et non sans un orgueil légitime, des peuples nombreux adopter ce Code, et

« PreviousContinue »