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280 LES FINANCES SOUS LA RESTAURATION. [1825. invétérées; de là, la justice et le droit moralement satisfaits; de là, enfin les immenses résultats qui découlèrent de cette juste et nationale mesure, aujourd'hui si bien jugée.

Nous nous étions demandé, à la fin du dernier règne, si M. de Villèle pourrait, secondé par le Roi qui montait sur le trône, reprendre ses grands projets financiers une fois avortés, et si, confiant dans le courage qu'inspirent toujours les nobles causes, il réussirait enfin à accomplir la conversion des rentes, et à réaliser l'indemnité des émigrés. Nous n'avions point trop présumé de l'habile persévérance de cet illustre ministre.

Si jamais, en effet, combinaison savante et féconde fut en même temps conçue, entreprise et réalisée, ne fut-ce point celle qui, satisfaisant, sans bourse délier, à une réparation légitime, dégrevant les contribuables et émancipant le crédit de l'État, donnait à la prospérité de la France l'essor et la puissance qu'elle a su depuis si merveilleusement développer?

C'est ainsi que ces deux grandes opérations financières sont restées, dans la tradition de l'histoire, irrévocablement attachées au nom de M. de Villèle.

Colbert n'aurait pas mieux fait.

CHAPITRE DIX-NEUVIEME.

LES FINANCES SOUS LA RESTAURATION.

(1825.)

SOMMAIRE. Situation de M. de Villèle auprès du Roi. Influence déterminée du parti sacerdotal. La loi du sacrilége. M. de Bonald et M. Royer-Collard. Conséquences de cette loi. M. de Villèle présente à la Chambre des députés la loi des comptes de 1823. Les marchés d'Ouvrard. Discussion ardente sur ces comptes. Rapport de la commission. Historique de l'expédition d'Espagne en 1823. M. Sicard. Conditions des marchés d'Ouvrard. Dilapidation des deniers publics. Discussion générale. M. de La Bourdonnaye. Ses griefs. Situation de l'armée à Bayonne. Entrée en campagne. Mission du baron Joinville. Ses instructions contradictoires. Accusation contre M. de Villèle. Lettre de M. de Villèle au duc d'Angoulême. Justification du ministre. Explications de M. de Villèle. Les bons du Trésor. Le déficit présumé du Trésor. Résumé de M. de Villèle. Conseil des ministres. Proposition du duc d'Angoulême. Refus de M. de Villèle. Le général Foy. Il rétablit tous les détails de l'expédition. Il conclut au rejet de ces comptes. M. de Villèle y insiste. MM. Méchin, Casimir Périer. Détails sur l'administration financière de l'armée. Le traité Rothschild. L'accusation contre le ministère est demandée. Réponse de M. Corbière. Explications sur les avances de 34 millions faites à l'Espagne. Les sous-traitants. Leurs droits. La situation du baren Joinville est expliquée. Lettre du duc de Bellune à cet intendant. M. Benjamin Constant intervient. Réponse du ministre de la guerre, M. de Clermont - Tonnerre. Réplique de M. de La Bourdonnaye. Composition douteuse de la commission de liquidation établie à Toulouse. Résumé du rapporteur. Ses explications sur le traité Rothschild. Discussion et vote des articles. Vote de la loi. Discussion et vote à la Chambre des pairs. Jugement à tirer de ces marchés et de ces

comptes de 1823. Décision des tribunaux à intervenir. Présentation du budget de 1826. La dette. La dotation de l'amortissement. Ministère de la justice. Ministère des affaires étrangères. Liquidation de Varsovie. Développement du commerce extérieur. Le général Foy. Les colonies espagnoles révoltées. Ministère des affaires ecclésiastiques. Mar de Frayssinous. Son esprit. Allocation de ce nouveau ministère. Ministère de l'intérieur. La centralisation administrative. Discussion. Réponse du ministre. Essais de décentralisation depuis 1814. Situation en 1825. Sa nécessité. Conseil des bâtiments civils. Amendement de la commission. Rejet. Police secrète. Haras. Courses de Tulle, Limoges et Aurillac. Les ponts et chaussées. Réseau des routes royales Ce qui est terminé. Ce qui reste à faire. Dépense, 167 millions. Le pavé de Paris. Proposition. Réponse de M. de Chabrol, préfet de la Seine. Historique du pavé de Paris. Budget de la ville en 1825, 50 millions. Décision du ministre à l'occasion de l'entretien du pavé de Paris. Ministère de la guerre. Situation de l'armée en 1825. Son coût. L'habillement. Cinquième compagnie des gardes du corps du Roi. Hôpitaux militaires. Amendement de la commission et rejet. Remonte. Le ministère de la guerre, adopté. Ministère de la marine. Traite des nègres. Forêt de Cranoux. Explications. Une croix donnée à un portier du ministère. Ce qui arriva à M. Labbey de Pompierres. Ministère des finances. Dette viagère. Le crédit. Les économies de M. de Villèle. Dette flottante. Réduction consentie d'un million. Modifications proposées dans les tarifs. Les sels. Le fer. Les cotons. Les vius. Rejet. Dégrèvement de la contribution foncière. Question. Le budget de 1826 est voté à la Chambre des députés. Sacre du Roi. Offres faites par le Roi à M. de Villèle. Le budget est porté à la Chambre des pairs. M. de Marbois. Traité avec Saint-Domingue. Son but. Ses résultats. Retour de M. de Mackau. Il ramène les plénipotentiaires chargés de l'emprunt d'Haïti. Clôture de la session. Ses résultats politiques. Mort et funérailles du général Foy. Situation à la fin de 1825.

Cependant, et à côté des deux lois de l'indemnité et de la conversion qui, tout en pacifiant l'ensemble de la nation, avaient si vivement agité les esprits, deux autres lois d'un ordre différent, la loi du sacrilége et celle des communautés religieuses, étaient venues remettre les partis en présence et réveiller peut-être plus encore une dangereuse agitation.

Les principes religieux du roi Charles X étaient assurément sincères, mais ils étaient absolus. Différant, en cela comme en tant d'autres choses, de son prédécesseur, sa conviction religieuse influençait sa politique, sa foi parlait plus haut que sa raison.

Uni par des liens déjà anciens au parti sacerdotal, le Roi n'avait point tardé à en épouser, à en ressentir toutes les ambitions; et dès son avénement, il avait entendu donner à ce parti puissant un gage de ses condescendances. C'est en effet ce qu'il avait annoncé lorsque dans le discours du trône il avait parlé des mesures que réclamaient les intérêts sacrés de la religion; c'était la loi du sacrilége.

Le ministère était d'accord sur ces mesures, et c'est ici principalement qu'on commence à apercevoir en quoi la situation de M. de Villèle auprès du nouveau Roi avait déjà changé, quelle était la distance qui déjà le séparait des tendances secrètes de Charles X combien enfin les conditions de ce que nous avons appelé son second ministère différaient des premières.

Moins près du cœur du Roi, M. de Villèle, sous peine de perdre sa confiance, avait donc dù, comme ses collègues, obéir (c'est le mot) aux exigences du parti sacerdotal, peut-être plus intraitable que l'opposition elle-même. Cette défaillance fut une de ses grandes fautes.

La loi des congrégations religieuses fut présentée la première.

Suivant ce projet, l'autorisation des congrégations religieuses de femmes devait être approuvée par

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l'évêque et le conseil d'État, puis sanctionnée par le Roi. Les membres des congrégations ne pouvaient disposer en leur faveur que du quart de leurs biens. En cas d'extinction de la communauté, les biens à titre gratuit faisaient retour aux donateurs, et les biens à titre onéreux faisaient retour par moitié aux établissements ecclésiastiques et aux hospices du département.

Cette loi, il faut le dire, avait été notablement amendée par la Chambre des pairs, qui avait trouvé avec raison que c'eût été bien élargir le pouvoir ministériel que de lui laisser à lui seul le droit d'autorisation. En conséquence, ce droit avait été d'abord modifié par l'intervention du pouvoir législatif, puis d'autres amendements étaient venus réglementer d'une façon moins absolue les conditions des libéralités des membres de ces congrégations, soit dans le présent, soit dans l'avenir. Enfin une pension alimentaire avait été assurée sur lesdits biens aux membres d'une congrégation dissoute. Ainsi, plus libéralement amendée, cette loi n'avait point donné lieu à des discussions `ardentes; mais il en avait été bien autrement de la loi sur le sacrilége.

L'année précédente, le ministère avait présenté à la Chambre des pairs une loi sur la répression des vols et autres délits dans les églises. Cette loi était devenue nécessaire par le grand nombre de vols commis dans les églises, vols qui n'étaient punis que comme ceux commis dans une habitation particulière; elle avait passé à une majorité considérable; mais le parti sacerdotal, ne la trouvant pas encore suffisante,

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