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1. Ep. ques discussions sur la séance qui venait d'avoir 1789. lieu, et finit par un arrêté où les communes, persistant dans leurs arrêtés précédents, déclaraient qu'elles demeuraient dans l'état où elles étaient depuis leur constitution, c'est-à-dire, assemblée nationale: c'était à la fois refuser le plan proposé, et, par la persistance, proclamer, de fait, leur indépendance. Dès-lors il fut décidé que toute voie de conciliation était devenue impossible, l'assemblée connaissait sa force; la cour voulut faire l'essai des siennes. Necker était resté le seul qui eût pu encore rapprocher les esprits; son absence de la séance royale, lui avait rattaché les communes ; il avait cru devoir offrir au roi sa démission, et le peuple l'avait ramené, du château à son logement, en triomphe; il devint, dès ce moment, étranger à toutes les mesures qui furent prises; un conseil secret les dirigea, et le conseil du roi ne fut plus qu'une formalité. On fit une armée; on appela le maréchal de Broglie; on forma un état-major de cour; on fit approcher des troupes dans les environs de Paris; on fit trop de démonstrations, si l'on voulait agir; et trop peu, si l'on ne voulait qu'en imposer. Le même esprit continuait à diriger la cour; une confiance aveuglée, une assurance extérieure, et une faiblesse d'exécution, qui montrait assez que le roi laissait aller les préparatifs, et se refusait constamment à en faire usage.

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1789.

Les moyens de défense n'étaient pas négligés. 1." Ep. De nombreux écrits échauffaient, exaltaient les esprits. Paris était devenu le centre des relations avec tout le royaume; une population' immense, de grandes richesses, le foyer des lumières, en faisait la capitale de l'opinion publique; ce qui y était décidé, était recu partout; ce qui s'y faisait, était partout imité: ce rôle s'est soutenu dans tout le cours de la révolution, et les essais d'opposition ont été rares, et funestes à ceux qui ont osé les tenter. Un événement imprevu avait déterminé l'esprit public contre la cour40 upole mos

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Soit que la cour eût le projet de mettre un intervalle forcé aux séances, soit que l'on voulut seulement essayer l'autorité sans la compromettre, les députés, en se rendant à la salle, 20 juin. avaient trouvé les portes occupées par des gardes qui leur en refusèrent le passage; plusieurs le

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forcèrent et se réunirent dans une des chambres de comité d'autres restèrent, en tumulte, aux portes, en protestant hautement contre la violence. La foule se grossit; il y cut plusieurs scenes vives entre des députés qui voulaient entrer dans la salle, et les officiers des gardes, dont la consigne était d'en interdire l'entrée. Des la veille, tine proclamation affichée et publiée par des hérauts d'armes, avait averti que les préparatifs nécessaires à la séance que le roi

1. Ep. devait tenir, exigeajent que les séances fussent 1789 interrompues; mais cette proclamation, vue comme insuffisante par les uns, ignorée par d'autres, n'empêcha pas de prendre un parti, dont l'éclat parut une généreuse résistance à l'autorité arbitraire,, et fut vraiment telle pour un grand nombre de députés à qui on, exagé rait, ou qui s'exagéraient eux-mêmes les dangers.

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Des mesures violentes, des entreprises contre, la vie ou la liberté des députés, pouvaient【 être conseillées, par l'emportement de quelques hommes sans principes et sans vues politiques i mais le parti le plus courtisan, le plus opposé, aux libertés publiques, ne songea, jamais qu'à diriger, dominer, conduire l'assemblée, et s'en; servir; la détruire eût été casser leur instrui ment ces hommes n'ayaient,,, ne pouvaient, même se faire l'idée d'une force sans armes, d'une résistance d'opinion, capable de faire tête, à des armées, de soutenir tout contre elle, ft de les disperser. Aussitôt que la clôture, de, la, salle fut connue, le premier avis ouvert préyalut; le petit nombre des députés, qui s'étaient réunis dans un des bureaux, se rendit au Jeu de Paume, la parole passa bientôt, et tous les dé-, putés des communes s'y trouvèrent rassemblés, Un premier avis avait été de tenir la séance en plein air,, devant les fenêtres de l'appartement: du roi, et de l'inviter de s'y réuniring cal L'enthousiasme

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L'enthousiasme se propage et s'augmente par 1. Ep. le rapprochement; l'exaltation de l'assemblée 1799. du Jeu de Paume était au comble. Le peuple, réuni aux portes, conjurait les députés de ne pas l'abandonner. Des soldats quittèrent leur troupe et leur poste pour venir garder l'assemblée; un député malade s'y fit porter : l'ordre dans lequel elle délibérait, ou plutôt dans lequel elle vota, tenait de l'urgence du moment. Tous les visages étaient radieux, tout les cœurs étaient dans la joie; les députés debout se pressaient en foule autour d'une table qui servait de tribune, et d'où fut prononcé la formule du serment, de ne se point séparer, et de se réunir partout où l'assemblée serait indiquée, jusqu'à l'achèvement de la constitution du royaume. Chaque député prononça le serment, et le signa; un seul refusa, et ne fut ni recherché, ni inculpé; le mouvement fut si rapide et si uniforme, qu'il ne laissa aucun trait particulier à remarquer. Le vœu était général, l'expression commune à tous; ce qui était voulu et fait, l'était en même temps et par tous à la fois; l'idée de danger, loin de ralentir, ajoutait à la détermination; on eût regretté l'illusion des périls, même exagérés ; on aimait à les prévoir pour les braver. Jamais l'élan du patriotisme le plus pur et le plus dévoué, ne fut aussi général que dans cette journée célèbre ; l'influence fut Tome I.

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1." Ep. très-grande, sur les événements suivants; on y 1789. vit une réunion d'hommes prononcés, et des volontés invariables; on ne craignit plus de se rallier à eux, ni d'être abandonné par un corps que rien n'avait pu ébranler ni étonner, et que la crainte ni la séduction, n'avaient pu atteindre. Les provinces s'attachèrent à des représentants qui n'avaient pas démenti leur confiance; et si, à cette époque, l'assemblée eût voulu appelerà elle une force armée, il est hors de doute que les provinces n'eussent marché à ses ordres. La pensée en vint à ceux qui, par caractère, par systême ou par intérêt, ne voulaient garder aucun ménagement; des hommes plus froids et qui ne voulaient que le bien public, arrêtè

rent ce mouvement.

Le lendemain de la séance du Jeu de Paume, l'assemblée des communes se rendit à l'église de Saint-Louis, où cent quarante-neuf membres du clergé s'étaient réunis à elle. Cette démarche était déja résolue, et c'était même pour l'empêcher que l'on avait essayé la veille de suspendre les séances.

La majorité du clergé se rendit à l'assemblée nationale, et y prit séance fixe; plusieurs évêques 24 juin, s'y joignirent; la majorité, constatée par l'appel, se trouva de cent cinquante et un présents, contre cent quarante-quatre absents: cette démarche était par conséquent légale; une plus

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