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Où le soleil non trop excessif est;
Parquoy la terre avec honneur s'y vest
De mille fruictz, de mainte fleur et plante:
Bacchus aussi sa bonne vigne y plante,
Par art subtil, sur montaignes pierreuses,
Rendans liqueurs fortes et savoureuses:
Mainte fontaine y murmure et undoye,
Et en tous temps le laurier y verdoye
Près de la vigne, ainsi comme dessus
Le double mont des Muses, Parnassus:
Dont s'esbahyst la mienne fantasie
Que plus d'esprits de noble Poësie
N'en sont yssuz. Au lieu que je declaire
Le fleuve Lot coule son eau peu claire,
Qui maints rochers traverse et environne,
Pour s'aller joindre au droict fil de Garonne.

VIII

Chant de May et de Vertu
(1526)

Voulentiers en ce moys icy
La terre mue et renouvelle.
Maintz amoureux en font ainsi,
Subjectz à faire amour nouvelle
Par legiereté de cervelle,

Ou pour estre ailleurs plus contens;
Ma façon d'aymer n'est pas telle,
Mes amours durent en tout temps.

N'y a si belle dame aussi

De qui la beauté ne chancelle;
Par temps, maladie ou soucy,
Laydeur les tire en sa nasselle;
Mais rien ne peult enlaydir celle
Que servir sans fin je pretens;
Et pource qu'elle est tousjours belle,
Mes amours durent en tout temps.

Celle dont je dy tout cecy,
C'est Vertu, la nymphe eternelle,
Qui au mont d'honneur esclercy
Tous les vrays amoureux appelle:
66 Venez amans, venez (dit elle),
Venez à moi, je vous attens;
Venez (ce dit la jouvencelle),
Mes amours durent en tout temps."

ENVOY

Prince, fais amye immortelle,
Et à la bien aymer entens;
Lors pourras dire sans cautelle:
"Mes amours durent en tout temps."

JOACHIM DU BELLAY

(b. Liré, near Angers, 1525; d. 1560)

LIKE Ronsard his friend, du Bellay was deaf, and he was thus debarred from the worldly success to which, as a member of a distinguished family of prelates and diplomats, he might otherwise have aşpired. His short and uneventful life was that of a lonely scholar, brightened from 1547 by the friendship of his brother poet and saddened by absence from his Angevin home, as when he lived in Rome (1551-54) with his relative Jean, Cardinal du Bellay.

Besides his epoch-making manifesto of 1549, which, however, has been found to be largely the translation of an Italian treatise, du Bellay's work includes Olive (1549), is first collection of poems, addressed to Mlle. de Viole; Les Antiquités de Rome (1558: translated by Spenser), lescribing the grandeur of the city and the meanness of he inhabitants; and Les Regrets (1559), containing more atire of the modern Romans and wistful thoughts of

ome.

His poems reveal without reserve a melancholy mind

C

that muses on the flight of time and the passing of human greatness. He is a master of the sonnet. While he shows the same faults as Ronsard, du Bellay is perhaps a greater artist and might, had he lived longer, have surpassed his friend.

EXTRACTS

IX. That moral beauty is lasting.

X. Soaring towards the ideal.

XI. A delicate evocation of a summer day, inspired by the sixteenth century Latin poem of Navagero (Naugetius).

XII. In Rome the poet of Anjou longs for his native air.

IX

La Vertu dure de tout temps

(Olive, XXII., 1549)

Tout ce qu'ici la nature environne
Plus tost il naist moins longuement il dure:
Le gay printemps s'enrichit de verdure,
Mais
peu fleurit l'honneur de sa couronne.

L'ire du ciel facilement estonne

Les fruicts d'esté qui craignent la froidure;
Contre l'hyver ont l'escorce plus dure
Les fruicts tardifs ornements de l'automne.

De ton printemps les fleurettes seichées
Seront un jour de leur tige arrachées,
Non la vertu, l'esprit et la raison:

A ces doux fruicts, en toy meurs 1 devant l'aage,

Ne fait l'esté, ny l'automne dommage,

Ny la rigueur de la froide saison.

1 mûrs.

X

La Beauté idéale

(Olive, CXIII., 1549)

Si nostre vie est moins qu'une journée
En l'eternel,1 si l'an qui faict le tour
Chasse noz jours sans espoir de retour,
Si perissable est toute chose née,

Que songes-tu, mon ame emprisonnée ?
Pourquoy te plaist l'obscur de nostre jour,
Si, pour voler en un plus cher sejour,
Tu as au dos l'aile bien empennée?

Là est le bien que tout esprit desire,
Là le repos où tout le monde aspire,
Là est l'amour, là le plaisir encore:

Là, ô mon ame, au plus hault ciel guidée,
Tu y pourras recognoistre l'idée 2
De la beauté qu'en ce monde j'adore.

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