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collé sur son corps. Justin, étonné de sa constance, le renvoya en prison, de même que le diacre Hermès, à qui il ne fit souffrir pour lors aucun tourment, tous les officiers du gouverneur lui ayant été favorables, à cause de la charge de décurion qu'il avait exercée et qui lui avait donné occasion de leur faire plaisir.

5. Trois jours après ils furent tous deux présentés de nouveau au gouverneur, qui, après les avoir inutilement pressés d'obéir aux ordres de l'empereur, les condamna à être brûlés vifs. Le prêtre Sévère, qui était resté seul en prison, ayant appris qu'ils allaient au martyre, pria Dieu, avec de profonds gémissements, de ne le pas juger indigne d'y participer il fut exaucé, et souffrit dès le lendemain. Quand Philippe fut arrivé au lieu du supplice, les bourreaux, suivant la coutume, le couvrirent de terre jusqu'aux genoux, et, lui ayant lié les mains derrière le dos, les attachèrent à un poteau. Ils firent la même chose à Hermès; et comme il se soutenait d'un bâton en descendant dans la fosse, parce que ses pieds tremblaient, il dit en riant: « Ah! démon, tu ne peux même me souffrir ici! » Aussitôt on lui couvrit les pieds de terre; mais, avant qu'on mit le feu au bûcher, il appela un chrétien qu'il aperçut dans la foule, nommé Véloge, et lui dit : « Je vous conjure, au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de dire de ma part à mon fils Philippe qu'il rende tous les dépôts que j'ai reçus, de peur qu'il ne m'en reste quelque scrupule : les lois mêmes de ce monde l'ordonnent. Dites-lui encore qu'il est jeune, et qu'il doit gagner sa vie de son travail, comme il m'a vu faire, et qu'il doit conserver comme moi la paix avec tout le monde. » Les bourreaux mirent ensuite le feu aux fagots dont on avait environné les martyrs, qui rendirent grâces à Dieu, tant qu'ils purent parler; et la dernière parole qu'on entendit distinctement, ce fut Amen. Leurs corps furent trouvés entiers, Philippe ayant les mains étendues comme dans la prière, et Hermès ayant le teint frais, les oreilles seulement un peu livides. Le gouverneur les fit jeter dans l'Ebre, fleuve de Thrace qui, après avoir arrosé les murs d'Andrinople, se jette dans l'Archipel. Mais des chrétiens de la ville les pêchèrent encore tout entiers et les cachèrent, à douze

quæ dorsum tegebat, per partes rupta discesserat. Ibid., p. 416.

1 Mabillon, tom. III Analector., p. 423.

2 Augustin., in psalm. cxx, p. 1382.

3 Idem, in psalm. cxxxvi, p. 1526, 1528, 1553,

milles d'Andrinople, en un lieu nommé Ogétistyron.

ARTICLE XIII.

LES ACTES DE SAINTE CRISPINE, MARTYRE EN AFRIQUE, ET DE SAINTE EULALIE, VIERGE.

1. C'est encore à dom Mabillon que nous sommes redevables des Actes du martyre de sainte Crispine1. Il les a tirés des deux manuscrits de Saint-Thierry de Reims,et personne ne doute qu'ils ne soient très-authentiques et du nombre des meilleures pièces. Il serait seulement à souhaiter qu'ils fussent entiers. Mais ils ne contiennent que le dernier interrogatoire de sainte Crispine, et il n'y est rien dit ni de ce qui se passa dans le premier, ni de la manière dont elle fut prise, ni de quelle condition elle était. Selon saint Augustin, elle était née d'une famille illustre 2; elle était fort riche, engagée dans le mariage 3, et avait plusieurs enfants; quoique d'une complexion fort délicate, elle se trouva pleine de force, parce que le Seigneur la protégeait; elle préféra la félicité du ciel à celle de la terre; et, méprisant les pleurs de ses enfants, elle se réjouit d'être prise et de pouvoir confesser Jésus-Christ sur l'échafaud, à la vue de tout le monde. Les Actes de son martyre disent qu'elle le souffrit sous le consulat de Dioclétien et de Maximien, le cinquième de décembre, sans spécifier l'année; mais il y apparence que ce fut en 304, puisqu'Anulin, qui condamna la Sainte, était proconsul d'Afrique en cette année, et que ce ne fut qu'en 304 qu'on commença à condamner les laïques à mort.

2. Crispine était originaire de Thagare ou Tagarate, dans la Proconsulaire, et ce fut apparemment en cette ville qu'elle fut arrêtée pour la foi, qu'elle avait professée dès son enfance; car elle avait eu le bonheur de n'adorer jamais d'autre Dieu que Jésus-Christ". De Thagare elle fut amenée à Thébeste, devant Anulin, alors proconsul d'Afrique, qui lui proposa de sacrifier aux dieux, selon qu'il était ordonné par l'édit des empereurs. Elle répondit : « Je n'ai jamais sacrifié et je ne sacrifie qu'à un seul Dieu et à son Fils JésusChrist Notre-Seigneur, qui est né et qui a souf

7

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Analyse des Actes de

en 304.

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Act. sinc. Martyr., p.

fert pour nous. » Anulin la menaça de la rigueur des lois, si elle ne se soumettait au culte des dieux et aux édits des princes; mais elle répondit qu'elle n'adorait et ne connaissait qu'un seul Dieu, et qu'elle observait la loi de Jésus-Christ son Seigneur. Comme Anulin la pressait de sacrifier et de témoigner sa piété envers les dieux, elle dit1: « Où il y a de la contrainte, il n'y a point de piété. » Il la menaça de nouveau de la traiter selon la sévérité des lois : à quoi elle répondit que ce qu'on lui faisait appréhender n'était rien; mais que si elle méprisait le Dieu du ciel, elle ferait un sacrilége et que ce Dieu la perdrait au dernier jour; que, s'il fallait être sacrilége à l'égard de Dieu ou des empereurs, elle ne choisirait pas de l'être à l'égard de Dieu, qui a fait la terre et les hommes mêmes; que les dieux du paganisme n'étaient que des pierres et des ouvrages de la main des hommes. Anulin commanda qu'on lui rasât la tête et qu'en cet état on la donnât en spectacle au peuple. Crispine dit: «Si les dieux ont à se plaindre, qu'ils le disent eux-mêmes, et je les croirai! »>>

3. Anulin la menaça de lui faire perdre la tête et de la traiter de même qu'on avait traité ses compagnes, Maxime, Donatile et Seconde. Elle répondit: «Mon Dieu, qui est et qui a toujours été, m'a fait naître sur la terre; il m'a accordé le salut par l'eau du baptême, et il est maintenant avec moi pour m'empêcher de faire le sacrilége que vous m'ordonnez. >> Le proconsul, fatigué de ses réponses, fit relire le procès-verbal de ce qui avait été dit 2, et ensuite lut la sentence par laquelle il la condamnait à avoir la tête tranchée. Crispine rendit grâces à Jésus-Christ de ce qu'il la délivrait ainsi des mains du proconsul, et consomma son martyre.

4. Il faut rapporter au même temps le martyre de sainte Eulalie, dont Prudence nous a lie, martyre conservé l'histoire, dans son hymne troisième du livre des Couronnes. Elle était de Mérida, capitale de Lusitanie, et d'une famille noble. Dès les premières années de sa vie, elle témoigna son amour pour la virginité, et fit admirer en elle, dès l'âge de douze ans, toutes

452. Ex Prudentio, Hymn 3, lib. de Coro

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et Domino Nostro Jesu Christo Filio ejus, qui natus est, et passus. Ibid.

1 Nulla devotio est, quæ opprimi cogit invitos. Ibid., p. 450.

2 Acta ex codice que dicta sunt relegantur. On ne trouve point que cela ait été observé dans les autres procédures contre les chrétiens.

3 Voilà, assurément, des traits qui devraient, d'après

les vertus de la vieillesse. L'édit de la persécution de Dioclétien, qui répandait la terreur par toute la terre, lui fit horreur; mais, en même temps, elle se sentit brûler du désir de se signaler dans cette guerre, et voulait aller elle-même chercher l'ennemi. Sa mère s'opposa à ce zèle, et la tint cachée loin de la ville, dans une maison de campagne. Mais Eulalie, ayant trouvé moyen de s'échapper à la faveur de la nuit, vint à la ville à pied, sans suivre aucune route, et se présenta, le matin, au tribunal du gouverneur, en criant : « Vous cherchez les chrétiens, me voici, je méprise les idoles, parce qu'elles ne sont rien; Maximien n'est rien lui-même, parce qu'il les adore.» Le gouverneur, mis en colère par un discours si peu attendu, ordonna qu'on lui fit souffrir toutes sortes de supplices; mais, avant d'en venir à l'exécution, il essaya de la gagner par ses flatteries et par ses menaces. Eulalie ne lui répondit que par un frémissement secret; elle lui cracha au visage, renversa les idoles, et foula aux pieds la farine qu'on leur offrait . Aussitôt deux bourreaux la saisirent et lui déchirèrent les côtés jusqu'aux os. Elle comptait les coups et disait que c'était une écriture qui gravait en elle la victoire de Jésus-Christ. Elle ne jetait ni larmes, ni gémissements, et paraissait gaie et insensible à la douleur. Le gouverneur eut recours au feu, espérant en retirer plus de secours il lui fit appliquer les flambeaux ardents. Le feu prit à ses cheveux épars, dont elle se couvrait le sein par modestie, et la flamme étant montée à sa tête, elle ouvrit la bouche pour la recevoir, et en fut étouffée. En même temps une colombe, plus blanche que la neige, parut sortir de sa bouche et s'élever au ciel, représentant son âme pure. Les bourreaux mêmes virent ce prodige, qui, les ayant saisis d'étonnement, les mit en fuite. Un des soldats de la garde du gouverneur le vit aussi, et abandonna son poste d'effroi. Cependant il tomba sur la place une grande abondance de neige, qui couvrit le corps de la Sainte, comme pour l'ensevelir. Ses reliques furent, dans la suite, transportées dans la ville

la critique du XVIIIe siècle, faire passer ces Actes pour supposés, et pourtant ils sont authentiques. (L'éditeur.)

Scriberis ecce mihi, Domine : quam juvat hos apices legere, qui tua, Christe, trophæa notant nomen et ipsa sacrum loquitur purpura sanguinis eliciti. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 453,

Pag 453.

Les Actes de sainte Agnès ne sont pas sincères.

Peres en ont

re

de Mérida et déposées aux pieds de l'autel, sous le dôme d'un magnifique édifice de marbre, où les pèlerins allaient les révérer.

5. L'Espagne honore une autre sainte Eulalie, qu'on dit avoir souffert le martyre à Barcelone, capitale de la Catalogne; mais les Actes qu'on en produit, ne sont pas authentiques, et ils sont même si semblables à ceux de sainte Eulalie de Mérida, qui se trouvent manuscrits en plusieurs endroits, et qui ont été connus d'Usuard, d'Adon et de Vincent de Beauvais, que, si les Saintes sont différentes, il faut au moins reconnaître qu'on a confondu leurs actions et qu'on attribue à chacune d'elles beaucoup de choses qui n'appartiennent qu'à l'une des deux.

ARTICLE XIV.

LES ACTES DU MARTYRE DE SAINTE AGNÈS, VIERGE;
DE SAINT VITAL ET DE SAINT AGRICOLE.

1. Nous connaissons peu de vierges martyres si célèbres dans les écrits des Pères, que sainte Les Agnès. Saint Jérôme 3, saint Ambroise, Prufait l'histoi- dence, saint Augustin, saint Maxime de Turin et beaucoup d'autres en ont fait l'éloge et ont pris sujet de relever ses mérites, de ce qu'elle avait vaincu la faiblesse de son âge", aussi bien que la cruauté du tyran, et qu'elle avait consacré le titre de sa chasteté par la couronne du martyre. Mais aucun n'a marqué le temps auquel elle a vécu, ni celui de sa mort. Il paraît seulement, par saint Augustin, qu'elle souffrit le même jour que saint Fructueux, c'est-à-dire, le 21 de janvier, et sa fête se faisait ce jour-là dès le IVe siècle, selon l'ancien calendrier de Boucher ". Bollandus

1 Hic, ubi marmore perspicuo atria luminat alma nitor, et peregrinus et indigena reliquias cineresque sacros servat humus veneranda sinu.......... Sic venerari hæc ossa libet, ossibus altari et impositum: illa Dei sita sub pedibus prospicit hæc, populosque suos carmine propitiata fovet. Ibid., p. 454.

2 Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 451.; Tillemont, tom. V Hist. Eccles., p. 322 et 712.

3 Hieronymus, Epist. ad Demetriadem Virginem.; Ambrosius, lib. I de Virginitate, cap. 2; Prudentius, hymno 14, lib. de Coronis; Augustinus, serm. 354 et 273; Maximus Taurinensis, tom. V Bibliot. Patrum; S. Martinus apud Sulpitium Severum, Dialogo 2. ↳ Beata martyr Agnes, quæ et ætatem vicit et tyran num, et titulum castitatis martyrio consecravit. Hieronymus, Epist. ad Demetriad.

Augustinus, serm. 274.

6 Bucherius, p. 267.

7 Bolland., ad diem 21 januarii, p. 352.

8 Les Actes publiés par Surius, sont certainement anciens. Plusieurs passages se lisent dans saint Adhelme,

met son martyre sous l'empire de Valérien et de Gallien; il s'appuie sur certains manuscrits des Actes de cette Sainte qui n'ont aucune autorité et qui renferment même des contradictions; car ils disent qu'alors Aspase, qui la fit condamner, était vicaire de Rome : cependant les vicaires n'ont commencé que sous l'empire de Dioclétien. Il vaut mieux dire qu'elle souffrit dans la persécution de ce dernier, vers l'an 304 ou 305, selon l'opinion commune. Ses Actes, qui n'ont aucune autorité, parce qu'ils se trouvent contraires, en beaucoup d'endroits, à ce que les anciens Pères nous racontent du martyre de la Sainte, sont attribués à un Ambroise, qu'on ne doute pas être différent du saint évêque de Milan 8.

Analyse de

ont dit. Act. sinc. Martyr.,

2. Elle n'avait encore que douze ou treize ans, lorsqu'elle donna généreusement sa vie ce qu'ils en pour Jésus-Christ. En vain le juge employa les caresses et les menaces pour l'obliger de pag. 458, 460 · renoncer à la foi, elle les méprisa également et fit voir qu'elle était prête à endurer plutôt toutes sortes de supplices, que de manquer à la foi qu'elle avait donnée à Jésus-Christ. On la chargea de chaînes de fer et on la traîna, par force, aux autels des démons; mais Agnès, étendant ses mains vers Jésus-Christ, éleva le trophée de la croix, parmi ces brasiers sacriléges. Le juge crut qu'elle serait plus sensible à la perte de sa chasteté qu'à tous les supplices; il lui dit que, si elle n'adorait Minerve et ne lui demandait pardon, il la ferait conduire dans un lieu de prostitution, pour y servir aux plaisirs d'une jeunesse impudente. Agnès répondit que Jésus-Christ n'abandonnait pas ainsi ses épouses 10, et qu'il ne permettrait pas qu'on attentât à leur pudeur. Le

auteur du XVIIe siècle. La plus grande partie de ces Actes est conforme à ce que saint Damase, Prudence, Maxime de Turin et saint Ambroise nous rapportent de sainte Agnès. Ces Actes peuvent donc être corrompus, mais il n'est pas démontré qu'ils soient faux (Voyez Honoré de Sainte-Marie, t. I, Diss. 3, p. 294). Étienne Assémani a trouvé des Actes de sainte Agnès, en Chaldaïque, et il les a publiés; Alban Butler ne les regarde pas comme authentiques, mais Assémani en a démontré l'authenticité; et de fait, ils ne contiennent rien que de très-édifiant. On sait combien le culte d'Agnès a été célèbre dans le monde entier; son tombeau était en grande vénération, dès le IVe siècle. Constance, fille de Constantin, fit élever une église sur la grotte d'Agnès. Elle y fut enterrée, ainsi que ses deux sœurs, Constance et Hélène (Voyez Esquisse de Rome chrétienne, par M. Gerbet). (L'éditeur.)

9 Hæc duodecim annorum martyrium fecisse traditur. Ambrosius, lib. I de Virginitate, cap. 2.

10 Haud, inquit Agnes, immemor est ita Christus suorum, perdat ut aureum nobis pudorem, nos quoque de

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juge donna ordre qu'elle fût menée au lieu infâme. Tout le peuple qui était présent, lorsqu'on la conduisait, détournait la vue du lieu où on l'avait exposée, excepté pourtant un jeune homme qui la regardait d'une manière peu chaste. Mais, dans le temps qu'il ne pensait qu'à satisfaire sa passion, un éclat de feu vint comme un coup de foudre frapper les yeux de ce jeune impudent, et le renversa par terre aveuglé et à demi-mort. Ses compagnons l'emportèrent en pleurant, tandis que la Sainte chantait des hymnes à Dieu le Père et à Jésus-Christ 1. On dit qu'elle pria Dieu pour ce malheureux et lui rendit la santé avec la vue.

3. Au récit de cet événement, le juge, embrasé de fureur de se voir vaincu, condamna Agnès à perdre la tête, comme désobéissant aux ordres des empereurs. Elle fut transportée de joie à la vue de l'exécuteur qui venait à elle, tenant en main l'épée nue; elle alla au lieu de l'exécution avec plus de plaisir et de promptitude qu'une autre n'irait au lit nuptial. Elle parut seule, les yeux secs, pendant que tout le monde la pleurait, et demeura intrépide, bien que l'exécuteur tremblât et pâlit de frayeur. Enfin, après avoir fait sa prière, elle baissa la tête, tant pour adorer Jésus-Christ que pour recevoir plus aisément le coup de la mort de la main du bourreau. Son corps fut enterré à la vue des murs de Rome, comme pour les défendre, dit Prudence 3, et les couvrir d'insultes, et servir de protection non-seulement aux Romains, mais aussi à tous les étrangers qu'une piété sincère conduit en cette ville pour y rendre leurs

vœux.

4. A Bologne, en Italie, Agricole fut pris SS. Vital et avec Vital, son esclave et son disciple. Les persécuteurs employèrent tous les tourments. qu'ils purent imaginer pour obliger Vital de renoncer à Jésus-Christ; mais tous leurs efforts furent vains, et il continua à le confesser hautement. Enfin, n'ayant aucun endroit dans son corps qui ne fût couvert de plaies, il pria Jésus-Christ en ces termes : «Mon

serat. Præsto est pudicis ; nec patitur sacræ integritatis munera pollui. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 458. 1 Ibat triumphans virgo, Deum Patrem, Christumque sacro carmine concinens. Ibid., p. 459.

2 Sic fata Christum vertice cernuo supplex adorat, vulnus ut imminens cervice subiret prona paratius. Ibid. 3 Agnæ sepulcrum est Romulea in domo, fortis puellæ, martyris inclytæ. Conspectu in ipso condita turrium servat salutem virgo Quiritium: necnon et ipsos protegit advenas, puro ac fideli pectore supplices. Ibid., p. 458. * Orationem fudit ad Dominum, dicens : Domine Jesu

Sauveur et mon Dieu, recevez mon âme, et donnez-moi la couronne que votre saint ange m'a montrée.» Après avoir proféré ces quelques paroles, il rendit l'esprit et reçut, avant son maître, la palme du martyre. L'affection que l'on avait pour Agricole, qui, par sa douceur, s'était fait aimer de tout le monde, fut cause que l'on différa de quelques jours son martyre, dans l'espérance que le supplice du serviteur pourrait épouvanter le maître et lui faire changer de sentiment. Mais, par la grâce de Dieu, le contraire arriva, et l'exemple de Vital, au lieu d'abattre Agricole, l'affermit encore davantage. On le crucifia et on le perça avec de grands clous, en telle quantité, que le nombre de ses plaies surpassait celui de ses membres. Ils furent enterrés tous deux, Agricole avec les clous et la croix sur laquelle il avait été attaché, en une terre qui appartenait aux Juifs, et au milieu de leurs tombeaux; c'est de là que saint Ambroise les retira dans la suite, et prit pour lui du bois de la croix et du sang de saint Agricole ". C'est tout ce que nous savons du martyre de ces deux Saints, dont les Actes ne sont pas venus jusqu'à nous. Il paraît qu'ils existaient encore du temps de saint Ambroise, et que c'est de là qu'il a tiré ce qu'il a dit de ces deux martyrs, dans son trafté qui a pour titre : Exhortation à la Virginité. On croit qu'ils souffrirent, en 304, dans le temps que le vieux Maximin faisait exécuter, par toute l'Italie, les édits de Dioclétien et de Galère, contre les chrétiens.

ARTICLE XV.

LES ACTES DE SAINT JULIEN, MARTYR A BRIOUDE EN AUVERGNE, ET DE SAINT FERRÉOL, MARTYR A VIENNE.

1. On voit, par saint Grégoire de Tours", qu'on lisait publiquement, dans l'église de Brioude, les Actes du martyre de saint Julien. Ceux que nous avons aujourd'hui ne sont pas originaux; ils semblent même n'être qu'un

Christe, Salvator meus et Deus meus, jube suscipi spiritum meum, quia jam desidero ut accipiam coronam quam angelus tuus sanctus mihi ostendit. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 466; ex Ambrosio, lib. de Exhortatione Virginitatis, cap. 1 et 2.

5 Detuli ergo vobis munera, quæ meis legi manibus, id est crucis trophæa, cujus gratiam in operibus agnoscitis. Certe et ipsi dæmones confitentur.... Colligimus sanguinem triumphalem et crucis lignum. Ambrosius, lib. I de Exhortatione Virginitatis, cap. 2.

6 Procedente vero lectore, qui beatæ passionis recen

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Gregor. Tu

ron,lib 12. De

Gloria Marty C. 1. Et Sido narins, lib.

rum, p. 478,

nius Apolli7, Epist. I.

1

abrégé de l'histoire de ce Saint, fait dans le dessein d'empêcher que ses principales actions ne s'effaçassent de la mémoire des hommes 2. Au reste, ce qu'on y dit du martyre de saint Julien s'accorde assez bien avec ce que nous en lisons dans saint Grégoire de Tours, qui a employé tout son second livre de la Gloire des Martyrs à raconter les miracles opérés par les mérites de ce Saint. Il était né à Vienne, en Dauphiné, d'une famille considérable; ses mœurs répondaient à sa foi, et son âme était embrasée d'une charité trèsardente. Il faisait sa demeure chez saint Ferréol, également chrétien comme lui. La persécution s'étant allumée dans la ville de Vienne, il quitta ses parents et ses richesses, se retira en Auvergne et s'y tint caché près de la ville de Brioude sur l'Allier, en un lieu appelé Vinicelle, chez une veuve. Les persécuteurs l'y trouvèrent, et comme il ne voulait point mettre en danger son hôtesse, qui ne songeait qu'à le bien cacher, il s'adressa à eux, leur déclara qui il était, et leur manifesta le désir ardent qu'il avait de mourir pour JésusChrist. Les bourreaux lui coupèrent la tête et la portèrent à Vienne au persécuteur, pour servir d'exemple aux chrétiens de cette ville. Saint Julien souffrit le martyre vers l'an 304. 2. Les Actes de saint Ferréol, martyrisé sont sinceres vers le même temps, ne sont pas non plus originaux tout-à-fait originaux; le style en est trop poli, pour n'avoir pas été travaillé à loisir. Mais le fond de l'histoire n'a rien que de beau et d'édifiant, et l'on y remarque tous les caractères de vérité. On les trouve dans Surius, et après lui dom Ruinart les a donnés sur divers manuscrits.

Les Actes de S. Ferréol

mais non pas

Analyse de ces Actes. Act. sinc. Martyr, p. 462

3. Saint Ferréol demeurait à Vienne, ainsi que nous l'avons dit, et était revêtu de la dignité de tribun ou de colonel, lorsque Crispin, alors gouverneur d'une partie des Gaules, le fit amener devant son tribunal pour cause de religion, et lui dit que, puisqu'il était officier des empereurs et recevait d'eux des appointements, il devait donner aux autres l'exemple

seret historiam, ut revolvit librum et in principio lectionis sancti Juliani protulit nomen, etc. Gregor. Turonens., lib. II de Glor. Martyr., cap. 16.

1 Sed dum copiosum egregii certaminis opus sermo succinctus aggreditur, pauca ut dixi perstringenti deprecor veniam condonari.... Nihil differt quibus monimentis fortia triumphatorum facta pandantur vel venerabilium rerum ordo memoriæ mandetur: dummodo constet, ut sicut prædicandum cœlestis athletæ conflictum sub divini remuneratoris obtutu perpetuis litteris superna depingit historia: ita posteritati imitationis causa ad sequendam christianæ religionis fidem, sermo fidelis

d'obéissance et de soumission à leurs lois. Ferréol répondit qu'étant chrétien, il ne lui était pas permis de sacrifier aux dieux; qu'il avait obéi aux empereurs tant qu'ils ne lui avaient rien commandé qui fût contre sa religion; qu'il ne demandait ni l'honneur, ni le Pag. 463. profit de sa charge; qu'il serait content si on lui laissait la vie et la liberté de sa religion, et qu'il aimait mieux mourir, que de cesser de vivre en chrétien. Crispin employa, pour le gagner, les caresses et les menaces, et jugeant, par ses réponses, qu'il n'abandonnerait pas la foi en Jésus-Christ, le fit fouetter cruellement, puis mener en prison, chargé de chaînes, jusqu'à un nouvel interrogatoire.

4. Il y demeura deux jours, lié de telle façon, qu'il ne pouvait se tenir droit, mais seulement assis ou couché avec beaucoup d'incommodité. Le troisième jour, ses chaînes se brisèrent d'elles-mêmes. Alors, se souvenant de la règle de l'Évangile, qui veut qu'on fuie la persécution, il s'approcha doucement de la porte de la prison, dans la crainte d'éveiller les gardes qui s'étaient endormis, et, l'ayant trouvée ouverte, il sortit de la ville par la porte de Lyon. Il passa ensuite le Rhône à la nage, et arriva jusqu'à la rivière de Gers, qui tombe dans le Rhône, à deux lieues au-dessus de Vienne. Là, il fut arrêté de nouveau par les persécuteurs et amené, les mains liées derrière le dos, jusqu'à un certain endroit proche du Rhône, où, par un mouvement soudain de leur cruauté, ils lui tranchèrent la tête. Les fidèles de Vienne l'enterrèrent au même lieu3, et le considérèrent depuis comme la garde de leur ville et de toutes celles qui ont eu recours à sa protection.

ARTICLE XVI.

LES ACTES DU MARTYRE DE SAINT CYR ET DE SAINTE JULITTE, SA MÈRE.

Pag. 464

L'histoi du marty desaint (

1. Les Actes du martyre de ces Saints sont mis, dans le décret du pape Gélase, au rang n'est pas o des apocryphes et condamnés comme ayant

eumdem conflictum percurrat. Act. S. Juliani, apud Gregor. Turon., ad calcem Oper., p. 1266.

* On croit ces Actes du Ve siècle, dit Baillet, et du temps de saint Sidoine Apollinaire, qui parle aussi du Saint dans une de ses lettres du 7o livre. (L'éditeur.)| 3 Quem fidelis religiosorum civium devotio ad præsidium civitatis non longe a Rhodano, cum summa veneratione tumulavit. Cujus beneficia per civitates, sicut expetuntur votis, ita beneficiis frequentibus approbantur præstante Domino, etc. Acta sincera Martyr., p. 364.

Passio Cyrici et Julittæ apocrypha. Decret. Gelas., tom. IV Concil., p. 1265.

ginalė.

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