Maximin renouvelle la er la même année 311. 2 édit', en faveur des chrétiens, leur permit de reprendre l'exercice de leur religion, de rebâtir leurs églises, et leur ordonna en reconnaissance de cette grâce, de prier Dieu pour lui et pour tout l'État. Cet édit fut publié aussitôt dans toutes les villes de l'Asie-Mineure et dans les provinces voisines. Mais Maximin, mécontent de ce que Galère avait fait, retint l'édit secrètement, et ne le publia dans aucune des provinces qui étaient de son ressort. Il se contenta d'ordonner de bouche 3, à ceux qui étaient auprès de lui, de faire cesser la persécution; et eux l'écrivirent aux autres, nommément, Sabin, préfet du prétoire, dont nous avons encore la lettre adressée à tous les gouverneurs des provinces. Ceux-ci communiquèrent ces ordres aux magistrats inférieurs; ainsi les chrétiens, délivrés des prisons et des fers, rendirent à Dieu le culte ordinaire avec liberté. 4 3 3. Cette paix ne fut pas de longue durée. persécution, La même année, Maximin, ayant conclu, avec Licinius, un traité par lequel il restait maître de tous les pays que Galère avait possédés 5, se moqua de l'édit solennel qui accordait aux chrétiens le libre exercice de leur religion. Il usa néanmoins d'artifice pour les persécuter de nouveau, en se faisant demander, par les villes de ses États, qu'il leur fût permis de défendre aux chrétiens de bâtir des lieux d'assemblées et des églises dans l'enceinte de leurs murailles, et même d'y demeurer; ce qu'il accorda à toutes sans distinction. Aussi vit-on paraître de tous côtés des décrets pour chasser les chrétiens; et Maximin confirma ces décrets par des rescrits particuliers. Ainsi le feu de la persécution se ralluma, et ce prince ne l'éteignit que l'année suivante 312, où il donna un édit portant ordre de laisser les chrétiens en liberté, sans les inquiéter, en aucune manière, au sujet de la religion. ayant fait, conjointement avec Licinius, un édit très-favorable aux chrétiens, l'avait envoyé à Maximin: celui-ci, qui voulait paraître allié, n'osa le contredire. Ne voulant pas non plus paraître céder à l'autorité des autres, il fut contraint de faire, comme de lui-même, l'édit dont nous venons de parler, et qu'Eusèbe et Lactance nous ont conservé. Constance, des chrétiens en 304, 5. Plusieurs années avant que Constantin protecteur publiât cet édit, Constance-Chlore, son père, s'était déclaré le protecteur des chrétiens. Tandis que, dans toutes les autres provinces, on leur faisait souffrir toutes sortes de supplices, ils jouissaient dans les États de Constance d'une paix profonde, et exerçaient leur religion dans une entière liberté. On raconte qu'au commencement de la persécution, c'està-dire, vers l'an 304, temps où il n'était encore que césar, il déclara à tous ceux de sa maison et aux magistrats chrétiens, qu'il leur laissait le choix ou de conserver leurs charges, en sacrifiant, ou de les perdre, s'ils refusaient de sacrifier. Lorsqu'ils se furent déclarés, en prenant chacun un parti, il conserva dans leurs emplois ceux qui préférèrent leur religion à leurs dignités, et chassa les autres comme incapables de lui garder la foi, puisqu'ils la violaient à Dieu même. Ainsi il remplit son palais de serviteurs de Dieu, tandis que les autres princes ne pouvaient pas seulement souffrir le nom de chrétiens et qu'ils persécutaient ceux de leur maison avant tous les autres. Le changement que la cession de Dioclétien et de Maximien-Hercule apporta à l'État, ne fit rien perdre à Constance de l'inclination qu'il avait pour les chrétiens, et il leur fut aussi favorable, quand il fut devenu le maître de toutes les provinces d'Occident, qu'il l'était en n'ayant dans son ressort que les Gaules et l'Espagne, en qualité de César. 6. Maxence qui, le 28 octobre de l'an 306, prit à Rome le titre d'empereur, commanda 10, dès l'entrée de son règne, à tous ses sujets de cesser la persécution qu'on faisait aux chrétiens; et on ne voit point qu'il les ait persé cutés dans la suite. Licinius n'eut pas pour dans les Gaules, qui étaient du ressort de Constance; mais ce prince n'y avait aucune part. C'étaient les gouverneurs qui les faisaient mourir. Il n'est pas surprenant qu'ils aient exercé cette tyrannie dans leur province, parce que Constance n'étant encore que césar, n'avait que le second rang d'autorité, et ainsi n'était pas en pouvoir de les en empêcher, quoiqu'il fit pour cela tous ses efforts. 10 Euseb., lib. VIII, Hist., cap. 14. Maxence fait cesser la persécu. tion, en 106 Bonté de Constantin les pour chrétiens de Licinius en 320. Persécution 2 de eux le même égard, et il y a tout lieu de pen- 9 5 1 Lactant., de Mortib. persecutor., n. 29. 2 Bolland., ad diem 13 januarii, p. 769. 8 6 3 Euseb., lib. X, cap. 5; et Lactant., de Mortibus persecutor., num. 48. Sozomen., lib. I Hist., cap. 7. Euseb., lib. I de Vita Constantini, cap. 51. Idem, ibid. et cap. 53; et Socrat., lib. I, cap. 3. 7 Euseb., lib. Il de Vila Constantini, cap. 20, 30, 32, 33 et 34. III. premier état. Il bâtit des églises, défendit les ARTICLE PREMIER. LES ACTES DU MARTYRE DE SAINT APOLLONE, Les Actes du martyre de S. Apollo ne et de S. Philemon sont since 1. Nous avons déjà rapporté les Actes de saint 2. Le moine Apollone, qui, pour sa vertu, Analyse de ces Actes. Act, sinc 487, et Rufin, Patrum,c.19. Martyr, pag. lib. De Vitis Pag. 488. Psalmus LXXIII, 19. en prison, dans la ville d'Antinous, en Égypte, plusieurs païens venaient l'insulter et lui dire des injures; parmi eux, se trouvait un nommé Philémon, joueur de flûte, célèbre et chéri de tout le peuple: il traitait Apollone de scélérat, d'impie et de séducteur, digne de la haine publique. A toutes ces injures Apollone ne répondait autre chose sinon : « Mon fils, Dieu veuille avoir pitié de vous et ne point vous imputer ces discours à péché.» Philémon fut touché de ces paroles et en sentit un effet si merveilleux en son cœur, que, dans le moment même, il se confessa chrétien. Il courut aussitôt au tribunal du juge nommé Anien, dans Métaphraste, et s'écria, en présence de tout le peuple: «Vous êtes injuste de punir les amis de Dieu; les chrétiens ne font et n'enseignent rien de mauvais.» Le juge, qui connaissait Philémon pour un plaisant, crut d'abord que c'était un jeu; mais quand il s'aperçut qu'il parlait sérieusement et qu'il soutenait avec constance ce qu'il avait avancé, il lui dit : « Tu es fou, Philémon, tu as perdu l'esprit tout d'un coup.»-«Je n'ai nullement l'esprit troublé, répondit Philémon; mais vous êtes vous-même un juge injuste et déraisonnable, puisque vous faites périr tant d'hommes justes, sans sujet. Pour moi, je suis chrétien, et les chrétiens sont les meilleurs de tous les hommes. » Le juge essaya de le ramener par la douceur à sa première croyance; mais, le voyant inflexible, il le fit tourmenter en toutes sortes de manières. 3. Comme il apprit que le changement de Philémon était arrivé par les discours que lui avait tenus Apollone, il accusa celui-ci d'être un séducteur et lui fit aussi souffrir de cruels tourments. Apollone dit : « Plût à Dieu que vous, mon juge, et tous les assistants qui m'entendent, puissiez tous suivre l'erreur dont vous m'accusez!» Le juge, l'ayant ouï parler de la sorte, le condamna à être brûlé avec Philémon. Lorsqu'ils furent au milieu du feu, Apollone dit à haute voix: «Seigneur, ne livrez pas aux bêtes ceux qui vous confessent; mais faites voir évidemment votre puissance. >> Alors un nuage plein de rosée les environna et éteignit le feu. Le juge et le peuple étonnés s'écrièrent tout d'une voix: « Le Dieu des chrétiens est grand et unique, c'est le seul immortel!»> 4. La nouvelle de cet événement ayant été 1 Magnus et unus est Deus christianorum, solus immortalis est. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 488. 2 Sub uno sepulcri domicilio collocate sunt, a quibus usque ad præsens tempus virtutes multæ, et signa mi portée à Alexandrie, le préfet en fut extraordinairement irrité. Il choisit les plus cruels de ses officiers, et les envoya à Antinoüs, avec ordre de lui amener liés et enchaînés le juge Anien et ceux dont Dieu s'était servi pour le convertir. Pendant le voyage, Apollone instruisit dans la foi ceux que le préfet avait envoyés, et il les persuada tellement, qu'à leur retour à Alexandrie ils se confessèrent chrétiens et furent inébranlables dans leur foi. Le préfet les fit jeter tous dans la mer et, sans y penser, leur procura ainsi la grâce du baptême. Leurs corps furent trouvés entiers sur le rivage, et on les mit dans un même tombeau, où il se fit 2 un grand nombre de miracles par leur intercession. ARTICLE II. LES ACTES DU MARTYRE DE SAINTE EUPHÉMIE ET DE SAINT SÉRÈNE. Divers Actes de S. Euphé que nous avons par S. Astère d'A masée, sont 1. La main de Métaphraste se fait encore. remarquer dans les Actes que nous avons du martyre de sainte Euphémie. Il faut avouer, néanmoins, qu'il n'est point auteur de tout le merveilleux qui s'y trouve, et que la plupart sincères. des faits qu'il rapporte étaient reçus dans l'Église, longtemps avant lui, comme on le voit par l'hymne qu'Ennode", évêque de Pavie, composa, au commencement du VIe siècle, en l'honneur de la Sainte, et par ce qu'en ont dit Bède, Usuard et Adon, dans leurs Martyrologes. Mais on ne peut disconvenir qu'il n'y ait eu, dès-lors, beaucoup de fausses histoires reçues comme bonnes; et ce qui prouve que celle de sainte Euphémie, rapportée par les auteurs que nous venons de citer, peut être de ce nombre, c'est qu'outre quantité de circonstances fabuleuses qu'elle renferme, il est difficile de l'accorder avec le discours dans lequel saint Astère d'Amasée décrit le martyre. de cette Sainte. Cet évêque pouvait en être d'autant mieux informé, qu'il vivait dans le même siècle que sainte Euphémie, qu'il en avait appris les circonstances sur les lieux mêmes où elle avait souffert, c'est-à-dire à Chalcédoine, et qu'il les avait vues toutes représentées dans un tableau que l'on avait placé près du tombeau de la Sainte, et où le signe que nous avons accoutumé d'adorer et de former sur nous, c'est-à-dire la croix, paraissait au randa omnibus consummantur. Ibid. 3 Surius, ad diem 11 julii. Ennod., Carm. 17.- Porro oranti illi apparet super caput ejus signum illud quod christiani adorare ac appingere solemne habent, putoque appetentis Analyse de ces Actes. Martyr.,pag. 490. [Ive SIÈCLE.] CHAPITRE II. dessus de sa tête, pour marquer apparemment 2. Euphémie avait consacré à Dieu sa vir- Les Actes du martyre de S Sérene sont sinceres. Analyse de ces Actes. Actes sinc. 2 3. Les Actes du martyre de saint Sérène, tels que nous les a donnés Dom Ruinart, sont écrits d'un style fort simple et fort naturel, et ne contiennent rien qui ne soit digne de foi. Martyr, pag. L'interrogatoire paraît original et tiré des registres publics du greffe. C'est une histoire très-courte, mais très-édifiante. Saint Sérène était originaire de Grèce, mais habitait Sirmium, dans la basse Pannonie, où il gagnait 492. passionis symbolum. Ruinart, Acta sinc. Martyr., p. 491, sa vie à cultiver un jardin. La persécution de 3 de la ville de Thmuis, dans la basse Égypte, sur le bord du Nil, et était né de parents nobles et riches. Il acquit de grandes connaissances dans la philosophie et dans toute la littérature du siècle, et exerça plusieurs emplois honorables, dans sa patrie. Il fut marié et eut des enfants. Ses vertus le firent élever à la dignité épiscopale de la ville' même où il était né. Ce fut pendant son épiscopat, et apparemment lorsqu'il était en prison pour la foi, et peu avant sa mort, qu'il écrivit une lettre, à la louange des martyrs qui étaient prisonniers. Saint Jérôme l'appelle 2 un fort beau livre touchant les Martyrs; et Eusèbe, qui nous en a conservé une partie, dit que cette lettre était vraiment digne de la sagesse de son auteur et de l'amour qu'il avait pour Dieu; qu'elle faisait voir aussi sa capacité dans les belles lettres; qu'en un mot, elle était un vif portrait de son âme et de son esprit. Il l'avait adressée à son Église de Thmuis, tant pour lui donner des nouvelles de l'état où il se trouvait, que pour animer les fidèles, par les paroles de l'Écriture et par l'exemple de leurs frères, à demeurer inébranlables dans la foi; c'est pourquoi il y parlait fort en détail des souffrances de ceux-ci. « Qui pourrait faire, dit-il, le dénombrement des exemples de vertus que ces martyrs ont donnés? Car, comme il était permis à tous ceux qui voulaient de les maltraiter, on se servait de tout, pour les frapper, de gros bâtons, de baguettes, de fouets, de lanières et de cordes. On liait à quelquesuns les mains derrière le dos, puis on les attachait au poteau et on les étendait avec des machines; ensuite on leur déchirait, avec des ongles de fer, non-seulement les côtés, comme aux meurtriers, mais le ventre, les jambes et les joues. D'autres étaient pendus par une 1 Hujusmodi fuit Phileas Ecclesiæ Thmuitarum episcopus, vir cunctis in patria honoribus ac muneribus summa cum laude perfunctus et in philosophiæ studüs admodum clarus.... et in Græcorum disciplinis apprime versatus. Euseb, lib. VIII, cap. 9. 2 Elegantissimum librum de Martyrum laude composuit. Hieronym., ubi supr. 3 Hæc sunt vere philosophi, nec minus Dei quam sapientiæ amatoris martyris verba, quæ ante extremam judicis sententiam adhuc in custodia constitutus, ad fratres Ecclesiæ suæ scripsit; partim quo in statu ver· saretur exponens; partim eos adhortans ut pietatem in Christum retinerent. Euseb., lib. VIII, cap. 10. Lettre à Mélèce. -Scipion Maffei a édité le premier, d'après un manuscrit ancien du Chapitre de Vérone, une lettre adressée à Mélèce, évêque schismatique de Lycopole, par Philéas et trois autres évèques, Galland, qui l'a publiée dans sa Bibliothèque, tom. IV, main dans la galerie, et souffraient une douleur excessive par l'extension des jointures. D'autres étaient liés à des colonnes, contre le visage, sans que leurs pieds portassent à terre, afin que le poids de leurs corps tirât leurs liens. Ils demeuraient en cet état non-seulement pendant que le gouverneur leur parlait, mais presque tout le jour. Car, quand il passait à d'autres, il laissait des officiers pour observer les premiers et pour voir s'il n'y en aurait point quelqu'un qui cédât à la force des tourments. I ordonnait de serrer les liens sans miséricorde, et, quand les martyrs seraient près de rendre l'âme, de les détacher et de les traîner par terre. Sa maxime était qu'il fallait compter les chrétiens pour rien et les traiter comme s'ils n'étaient pas des hommes. Après les tourments, on en mettait plusieurs aux entraves, et on les étendait au quatrième trou, en sorte qu'ils étaient obligés à demeurer couchés sur le dos, ne pouvant plus se soutenir. D'autres, jetés sur le pavé, faisaient plus de pitié à voir que dans l'action de la torture, à cause de la multitude des plaies dont ils étaient couverts. Les uns sont morts avec constance, dans les tourments; d'autres, étant mis en prison demimorts, ont fini peu de jours après par les douleurs; les autres, ayant été pansés, sont encore devenus plus courageux par le temps et le séjour de la prison; aussi, quand on leur a donné le choix de demeurer libres, en s'approchant des sacrifices profanes, ou d'être condamnés à mort, ils ont choisi la mort sans hésiter; car il savaient ce qui est marqué dans les divines Écritures: Celui qui sacrifie à des Frod 11 dieux étrangers sera exterminé; et encore: Tu n'auras point d'autres dieux que moi*. » 2. Outre cette lettre, saint Jérôme témoi dit qu'il est facile de s'apercevoir qu'elle est traduite du grec; et la version lui paraît être du temps de saint Hilaire. Les quatre évêques qui ont écrit cette lettre sont nommés dans cet ordre : Hésychius, Pachonius, Théodore et Philéas; les mêmes, au reste, dont parle Eusèbe, Hist. eccl., lib. VIII, cap. 13. Philéas, qui l'écrivit, est nommé le dernier, sans doute par modestie. Elle fut écrite, comme on le dit d'après le contexte, pendant la vie de saint Pierre d'Alexandrie, et lorsque les évêques dont elle porte le nom étaient en prison, c'est-à-dire vers l'an 306. Les évêques s'y élèvent avec force contre les empiètements de Mélèce, au sujet des ordinations que cet évêque faisait dans des diocèses qui ne lui appartenaient pas, contrairement à l'ordre divin et ecclésiastique. « Cette loi, disent-ils, est sage, car il faut scruter avec grand soin la conversation et la vie de ceux qu'on ordonne; il faut ensuite enlever tout sujet de confusion et de trouble. C'est à 20 XX 3. Les Ad |