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tyre sout sincères.

de son mar- gne qu'on avait encore les réponses que Philéas fit au juge qui voulait l'obliger à sacrifier. Peut-être voulait-il marquer les Actes de son martyre, dont nous n'avons plus que la dernière partie; elle consiste presque entièrement dans des interrogatoires et des réponses fort courtes; mais elles sont écrites avec tant de simplicité, qu'il n'y a aucun lieu de douter qu'elles ne soient originales. Le Père Combefis nous a donné en grec et en latin d'autres Actes du martyre de saint Philéas, mais ils n'ont rien de la beauté des premiers. Le style en est dur, embarrassé et presque inintelligible; les réponses moins précises, et les faits contraires à ce qu'Eusèbe, saint Jérôme et Rufin nous racontent de ce Saint.

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3. On ignore la manière dont saint Philéas fut pris. Ayant été conduit sur un échafaud, qui était apparemment un lieu élevé où l'on faisait monter les criminels pour être interrogés, Culcien, alors gouverneur d'Égypte, le pressa de sacrifier du moins au seul Dieu qu'il reconnaissait. Philéas répondit : « Je ne sacrifie point, parce qu'il ne désire pas de tels sacrifices. » Il cita sur cela un passage des Écritures divines et sacrées, comme il1 les appelle, à la fin duquel il est parlé de farine; sur quoi l'un des avocats présents au jugement dit : «Il est bien question de farine; il s'agit de votre vie. » Culcien, reprenant la parole, dit :

peine, en effet, si chaque évêque peut gouverner son diocèse et trouver, par beaucoup de recherches, des ministres avec lesquels il ait vécu et qui aient été élevés sous sa main. Quant à lui, négligeant ces considérations et l'honneur du grand Évêque et de notre père Pierre, dont nous dépendons tous, par l'espérance que nous avons en Jésus-Christ, sans tenir compte de nos chaînes et de nos opprobres journaliers et de nos angoisses, il a osé tout renverser. Il ne saurait en alléguer aucune excuse. Alléguerait-il, en effet, les besoins des diocèses et l'absence des pasteurs? Vaine excuse, car il y en a beaucoup qui font les visites et qui en sont capables; et, s'ils commettaient quelque négligence, l'affaire devait être portée par quelqu'un du peuple, et nous l'aurions traitée selon la justice. Si les évêques voisins étaient dans l'ignorance de l'ordre ecclésiastique, pour lui, qui le connaissait, il aurait dû nons informer par lettre; c'était la marche à suivre: il ne pouvait pas non plus alléguer notre mort, puisqu'il savait qu'un grand nombre de fidèles se rendaient auprès de nous. Notre mort même futelle certaine, il devait attendre le jugement du supérieur (majoris patris) et sa permission pour cette affaire. Rien ne l'a arrêté, pas même cette parole de saint Paul adressée à Timothée: Ne vous hâtez pas d'imposer les mains, et ne prenez aucune part aux péchés des autres.» I Tim. v, 22. En finissant, ils avertissent Mélèce de s'en tenir au terme de cette règle sûre et salutaire.

L'auteur, qui nous a transmis cette lettre, ajoute

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« Quels sont donc les sacrifices agréables à votre Dieu ?» Philéas répondit : « Dieu se plaît à la pureté de cœur, à une foi sincère, à des paroles véritables. » Culciendit : «Paul n'a-t-il pas sacrifié?» Philéas répon dit: «Non, sans doute:»-«Et Moïse, » ajouta Culcien? « Cela était permis aux Juifs, répliqua Philéas, mais seulement dans Jérusalem. Ils péchent 3 maintenant, en célébrant ailleurs leurs solennités.» Culcien dit : « Laisse ces paroles inutiles et sacrifie. » Philéas refusa, ne voulant point souiller son âme. « Perdons-nous l'âme, » dit Culcien? Philéas répondit : « L'âme et le corps. » Culcien dit : « Ce même corps, cette chair ressuscitera-t-elle ?» « Oui,»> dit Philéas. Culcien lui fit plusieurs questions sur l'apôtre saint Paul, et lui ordonna ensuite de sacrifier. « Je n'en ferai rien, » dit Philéas. Comme il refusa, en disant que sa conscience ne le lui permettait pas, Culcien dit : « Pourquoi ne fais-tu pas conscience d'abandonner ta femme et tes enfants? >> << Parce que, dit Philéas, je dois à Dieu un plus grand amour.» « A quel Dieu, » dit Culcien ? Philéas étendit les mains au ciel et dit : « Au Dieu qui a fait le ciel et la terre, la mer et tout ce qu'ils contiennent.» Culcien ajouta : « Jésus-Christ était-il Dieu ? >> « Oui,» répondit Philéas. Culcien dit : «Comment es-tu persuadé qu'il était Dieu ? » Philéas répondit : «Il a fait voir

dans le manuscrit ce qui suit : «Mélèce, après avoir reçu et lu cette lettre, n'y fit point de réponse, ne se rendit ni à la prison, ni auprès du bienheureux Pierre; mais il entra à Alexandrie aussitôt que ces évêques, les prêtres et les diacres eurent souffert le martyre, près de la prison. Il y avait dans la ville un certain Isidore, de mœurs violentes, qui avait le désir d'être savant, et Arius, portant l'apparence de la piété, et ayant, lui aussi, le désir de la science. Quand ils eurent appris le désir de Mélèce et ses desseins d'usurper la place du bienheureux Pierre, ils lui firent connaître la retraite des prêtres que celui-ci avait chargés de visiter la paroisse d'Alexandrie. Mélèce leur recommanda de saisir l'occasion favorable, et les ordonna séparément, l'un dans la prison, l'autre aux mines. C'est alors que Pierre écrivit au peuple d'Alexandrie cette lettre où respire une grande patience.>> M Migne, dans le tome VIII et X de la Patrologie grecque, a reproduit les deux lettres de Philéas, d'après Galland. 1 Sacræ enim et divinæ Scripturæ dicunt : Ut quid mihi multitudinem sacrificiorum vestrorum, etc. Exod. XXII. 20. Acta sincera Martyr., p. 494.

2 Philéas croyait apparemment que le juge lui demandait si saint Paul n'avait pas sacrifié aux idoles. 3 Nunc autem peccant Judæi in locis aliis solemnia sua celebrantes. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 494. ↳ Culcianus dixit: Caro hæc resurget? Phileas respondit: Ita. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 494. 5 Culcianus dixit: Deus erat Christus? Phileas respondit: Ita. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 495,

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Pag. 396

Confession de saint Philorome.

des aveugles et ouïr des sourds, il a purifié des lépreux, ressuscité des morts, rendu la parole à des muets, guéri grand nombre de maladies et fait plusieurs autres miracles. » Culcien dit : « Un crucifié est-il1 Dieu? » Philéas répondit: « Il a été crucifié pour notre salut: il savait qu'il le devait être et qu'il devait souffrir des affronts, et il s'est livré à toutes ces souffrances pour nous. Car tout cela avait été prédit de lui par les saintes Écritures, dont les Juifs croient avoir l'intelligence, et ne l'ont pas. Si quelqu'un doute de la vérité de ce que je dis, qu'il vienne, et je la lui ferai voir. >>

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4. Culcien essaya de le gagner par douceur, et lui représenta qu'il ne lui convenait pas de mourir sans sujet. « Ce ne sera pas sans sujet, dit Philéas, mais pour Dieu et pour la vérité.» Culcien, changeant de discours, lui demanda si Paul était Dieu: « Non, dit Philéas, il était un homme semblable à nous; mais le Saint-Esprit était en lui, et, par la vertu du Saint-Esprit, il faisait des miracles. » Culcien témoigna qu'il était disposé à lui pardonner, s'il se soumettait à sacrifier, parce qu'ayant de grands biens, il pouvait nourrir presque toute la province. Ces paroles du gouverneur montrent quelles étaient les aumônes des chrétiens riches! Philéas dit : «Je ne sacrifie point, et en cela je regarde mes intérêts, et je me fais grâce à moi-même.» Les avocats dirent au gouverneur : «Il a déjà sacrifié dans le Phrontistère, » (c'était un lieu destiné aux lettres et aux exercices de l'esprit). Philéas dit: «Il n'en est rien. » Culcien dit : « Ta pauvre femme te regarde.» Philéas répondit: «Jésus-Christ mon Sauveur est le Sauveur de tous nos esprits; il m'a appelé à l'héritage de sa gloire, il peut aussi l'y appeler.» Les avocats firent entendre au juge que Philéas demandait un délai : le juge l'accorda; mais Philéas ayant répondu que son parti était pris de souffrir pour JésusChrist, ces avocats se jetèrent à ses pieds, avec tous les officiers, le curateur et tous ses parents. Philéas ne se laissa pas ébranler par toutes ces supplications, protestant qu'il devait tenir pour ses parents les saints martyrs et les apôtres.

5. Philorome, qui exerçait la charge d'intendant et de receveur général des deniers impériaux, dans Alexandrie, et qui, en cette qua

1 Culcianus dixit: Est Deus crucifixus ? Phileas respondit: Propter nostram salutem crucifixus est...... Sacræ Scripturæ hæc de eo prædixerant quas Judai риtant se tenere, sed non tenent. Ibid.

2 Quis ergo erat Paulus? Phileas respondit: Homo similis nobis, sed Spiritus divinus erat in co, et in Spi

lité, rendait tous les jours la justice, entouré de gardes, suivant l'usage des magistrats romains, se trouvait présent. Voyant la fermeté de Philéas, il s'écria : « Pourquoi faites-vous de vains efforts contre la constance de cet homme? pourquoi voulez-vous le rendre infidèle à Dieu? ne voyez-vous pas que ses yeux sont fermés à vos larmes, et que ses oreilles sont sourdes à vos paroles, et qu'il est tout occupé de la gloire céleste? » Ces paroles tournèrent la colère de tous les assistants contre Philorome, et ils demandèrent qu'il fût condamné, comme Philéas, par le même jugement. Le juge y consentit, et les condamna l'un et l'autre à avoir la tête tranchée. Comme on les conduisait au lieu de l'exécution, le frère de Philéas, qui était un des avocats, s'écria que Philéas demandait à appeler. Culcien le fit donc revenir et lui demanda à qui il avait appelé. Philéas répondit: « Je n'ai point appelé, Dieu m'en garde: ne faites point d'attention à ce que vous dit ce malheureux; pour moi, je rends de grandes actions de grâces aux empereurs et à vous, d'être devenu cohéritier de Jésus-Christ.>> Quand ils furent arrivés au lieu du supplice, Philéas étendit les mains vers l'Orient, et dit à haute voix: « Mes chers enfants, vous tous qui cherchez Dieu, veillez sur vos cœurs; car l'ennemi, comme un lion rugissant, cherche à vous dévorer: nous n'avons pas encore souffert; nous commençons à souffrir et à être disciples de Jésus-Christ. Attachez-vous à ses préceptes. Invoquons celui qui est sans tache, incompréhensible, assis sur les chérubins, auteur de tout, le commencement et la fin, à lui soit la gloire dans les siècles des siècles: Amen. » Après cette prière, les exécuteurs lui coupèrent la tête. Ils en firent autant à Philorome. C'est ainsi qu'ils séparèrent de leurs corps ces âmes qui avaient servi Dieu avec une ardeur infatigable 3, par la grâce de Notre Seigneur Jésus-Christ, qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit, dans les siècles des siècles.

ARTICLE IV.

LES ACTES DE SAINT QUIRIN, ÉVÊQUE DE SISCIE

ET MARTYR.

1. La ville de Siscie, aujourd'hui Sisseg, dans la haute Pannonie, c'est-à-dire, dans la

ritu virtutes, et signa, et prodigia faciebat. Ib'd.

3 Hæc cum dixisset, carnifices jussa judicis exequentes, infatigabiles amborum spiritus ferro cœsis cervicibus effugarunt, præstante Domino Nostro Jesu Christo, qui cum Patre et Spiritu Sancto vivit et regnat Deus, in sæcula sæculorum. Amen.

Les Acte: de saint Quirin sont sin ceres.

Analyse de

ces Actes.

Martyr. pag. 497,498.

Croatie impériale, est appelée par Fortunat1 une ville illustre; et elle était si considérable, dès le temps du concile de Sardique, qu'elle donnait le nom à tout le pays. C'est ce qui paraît par saint Athanase, qui nomme la Siscie entre les provinces dont ce concile était composé. Cette ville avait, en 309, pour évêque saint Quirin, que Prudence appelle3 un homme d'un insigne mérite. Le principal officier de la ville se nommait Maxime. Comme il n'avait pas le droit de condamner à mort, il fut obligé d'envoyer le saint évêque à Amance, qui avait ce droit, en qualité de gourverneur de la province, et qui le condamna à être jeté dans l'eau, avec une meule attachée au cou. Amance est nommé Galère par Prudence, et il avait apparemment les deux noms ensemble. Nous avons les Actes de la procédure, qui peuvent passer pour originaux, si l'on en excepte cependant l'histoire de la translation du Saint, qu'on y a ajoutée après coup. Eusèbe décrit en peu de mots le martyre de saint Quirin, dans sa Chronique sur l'an 310. Prudence en parle plus au long, et d'une manière assez conforme aux Actes.

2. On y lit que, l'Église étant agitée par la Ala sine. persécution, par suite des édits de Dioclétien, de Maximien et de Galère, le juge Maxime ordonna de prendre Quirin, évêque de Siscie, comme nous l'avons dit Quirin, en ayant eu avis, sortit de la ville; mais il fut pris et amené au juge, qui lui demanda où il fuyait. « Je ne fuyais pas, répondit-il, mais j'exécutais l'ordre atth. x 25. de mon maître; car il est écrit: Si on vous persécute en une ville, fuyez en une autre. » Maxime dit : « Qui a ordonné cela? » Quirin répondit*: «Jésus-Christ, qui est le vrai Dieu.»-«Ne saistu pas, lui dit Maxime, que les ordres des empereurs peuvent te trouver partout, et que celui que tu nommes le vrai Dieu ne peut te secourir quand tu seras pris, comme tu vois maintenant.» Quirin répondit : «Le Dieu que nous adorons est toujours avec nous et peut nous secourir, quelque part que nous soyons. Il est ici qui me fortifie et qui vous répond par ma

1 Fortunat., lib. VIII, cap. 4.

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2 Athanas., Apolog. cont. Arian., tom. I, p. 123. 3 Insignem meriti virum. Prudent,, lib. de Coronis, hymno 7.

Quirinus episcopus respondit : Christus, qui verus est Deus. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 498. Il confessa encore la divinité de Jésus-Christ devant Amance: Nec vestris legibus acquiesco, quía Christi Dei mei legitima quæ fidelibus prædicavi, custodio. Ibid., p. 500.

5 Semper nobiscum est, et ubicumque fuerimus, Dominus quem colimus subvenire potest. Ibid., p. 498.

bouche. >> Maxime, lui montrant les ordres des empereurs, le pressa d'y obéir et lui offrit, pour l'y engager, de le faire sacrificateur de Jupiter. Sur le refus que Quirin en fit, Maxime ordonna qu'on le mit en prison et qu'on le chargeât de chaînes. Quirin rendit grâces à Dieu et le pria de faire connaître à tous ceux qui étaient avec lui en prison, qu'il est le scul vrai Dieu et qu'il n'y a point d'autre Dieu que lui. Vers minuit, il parut dans la prison une grande lumière le geòlier, nommé Marcel, l'ayant vue, vint se jeter aux pieds du Saint et lui dit avec larmes : « Priez le Seigneur pour moi, car je crois qu'il n'y a point d'autre Dieu que celui que vous adorez. » Le saint évêque, après l'avoir exhorté à persévérer, le marqua au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, ce qui signifie qu'il le fit au moins catéchumène. Ceci se passa dans la ville de Siscie.

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3. Trois jours après, Quirin fut mené chargé de chaînes par toutes les villes qui étaient sur le Danube. A Scarab, aujourd'hui OEdimbourg, des femmes chrétiennes vinrent lui présenter à boire et à manger, et il arriva que, comme il voulut bénir le pain et le vin qu'on lui offrait, les chaînes tombèrent de ses mains et de ses pieds. Après qu'il eut mangé, on le conduisit à Sabarie, par ordre d'Amance, gouverneur de la Pannomies. Il se le fit présenter en plein théâtre, et lui demanda si tout ce qui était porté dans l'interrogatoire qu'il avait subi devant Maxime, était vrai? Quirin répondit: « J'ai confessé le vrai Dieu à Siscie; je n'ai jamais adoré que lui, je le porte dans mon cœur, et nul homme sur la terre ne pourra me séparer de lui. Il est le seul et véritable Dieu.» Amance, ayant employé en vain divers moyens pour tenter sa constance, le condamna à être jeté dans l'eau, avec une meule attachée au cou. Mais, au lieu d'aller au fonds, il resta longtemps sur l'eau, au grand étonnement du peuple assemblé en foule sur les bords du fleuve. Le Saint exhortait les fidèles à demeurer fermes dans la foi et à ne craindre ni les tourments, ni la mort. Enfin, craignant de

Consignavit eum in nomine Domini Nostri Jesu Christi. Ibid., p. 499.

7 Lieu de la naissance de saint Martin, évêque de Tours. (L'éditeur.)

8 Prudence le fait gouverneur de l'Illyrie, où la Pannonie est comprise.

9 Apud Sisciam verum Deum confessus sum. Ipsum semper colui, ipsum corde teneo: nec me ab eodem, qui unus Deus et verus est, homo poterit separare. Ruinart, Acta sincera Martyr., p. 499.

Pag. 499.

Histoire de

la vie de S. xandrie. Il

Pierre d'Ale

est fait évê. que, en 300.

Il dépose Mélèce et excommunie

Son martyre, en 311.

perdre la couronne du martyre, il obtint 1 de
Dieu, après beaucoup de prières, de couler à
fond et de mourir. Son corps fut trouvé un
peu au-dessous de l'endroit où il avait été
noyé, et on y bâtit depuis un lieu de prières.
Ilmourut le quatrième de juin de l'an 3102.

ARTICLE V.

SAINT PIERRE, PATRIARCHE D'ALEXANDRIE ET
MARTYR, [SAINT CYR ET SAINT JEAN, MARTYRS.]

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1. Saint Pierre, qu'Eusèbe appelle 3 un excellent maître de la piété chrétienne et un évêque tout-à-fait admirable, soit pour ses vertus, soit pour la profonde connaissance qu'il avait des saintes Écritures, succéda à Théonas dans le siége d'Alexandrie, l'an 300 de Jésus-Christ. Il gouverna cette Église pendant douze ans, trois ans avant la persécution et neuf ans depuis, augmentant les exercices de sa piété et les rigueurs de son abstinence, à mesure qu'il voyait croître les maux de l'Église. Il étendit ses soins sur les autres Églises, que la persécution mettait dans le trouble, particulièrement sur celles de l'Égypte, de la Thébaïde et de la Libye, sur lesquelles il avait autorité, en qualité d'évêque d'Alexandrie.

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2. Ce fut de son temps qu'arriva le schisme de Mélèce, évêque de Lycople, en Thébaïde. ses partisans. Saint Pierre l'avait déposé dans un concile, où on l'avait convaincu de plusieurs crimes, et entre autres d'avoir sacrifié aux idoles. Mélèce, sans avoir recours à un autre concile, prétendit que Pierre lui avait fait injustice et se sépara de sa communion. Arius, membre du clergé d'Alexandrie, suivit le parti de Mélèce; mais, l'ayant quitté ensuite, il fut ordonné diacre par saint Pierre, qui lui croyait de la vertu et du zèle pour la religion. Quelque temps après, Pierre, voyant les progrès

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1 Vix orans ut mergeretur obtinuit. Ruin., Acta sincera Martyr., p. 500. Hoc jam quod superest, cedo quo nihil est pretiosius, pro te, Christe Deus, mori. Prudentius, hymno 7, lib. de Coronis.

2 Les reliques de ce saint martyr ont été transportées de la Pannonie à Rome, et de Rome en Allemagne, dans le célèbre monastère de Fulde. (L'éditeur.)

3 Ex iis qui Alexandriæ nobili martyrio perfuncti sunt, primus omnium nominandus est Petrus, Alexandrinæ Ecclesiæ episcopus, christianæ religionis doctor eximius. Euseb., lib. VIII, cap. 13.

Per idem tempus Petrus quoque qui Alexandrinæ Ecclesia summa cum laude præfuit, vere præcipuum ad divinum episcoporum decus, cum ob totius vitæ sanctimoniam, tum ob studium ac peritiam sacrarum Scripturarum; nullum ob crimen comprehensus, præter om

du schisme de Mélèce, excommunia ceux qui en prenaient le parti. Arius y trouva à redire : l'Église, où il ne rentra que sous Achillas, ce qui obligea son évêque 10 de le chasser de successeur de saint Pierre dans la chaire d'Alexandrie. Ce saint évêque consomma son épiscopat et sa vie par le martyre ", qu'il souffrit le vingt-cinquième de novembre de l'an 311, le neuvième de la persécution. Maximin, qui venait de la renouveler dans Alexandrie, le fit arrêter sans aucun sujet et lorsqu'on s'y attendait le moins, et ordonna aussitôt de le décapiter.

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Les Actes de son mar

posés.

3. Nous avons deux sortes d'Actes de son martyre: les uns, de la traduction d'Anastase tyre sont suple Bibliothécaire, ont été donnés par Surius 13; les autres, qui sont de Métaphraste, se troubefis. Mais ni les uns ni les autres n'ont auvent parmi les Actes choisis du Père "Comcune autorité. On lit dans ceux de Surius que saint Pierre excommunia Arius, à cause de son hérésie, par laquelle il faisait le Fils de Dieu qu'Arius ne tomba dans cette hérésie et ne inférieur au Père. Toutefois, il est certain 15 commença à la prêcher que sous l'épiscopat Pierre, dans le siége d'Alexandrie, qu'après la de saint Alexandre, qui ne succéda à saint mort d'Achillas. Il y a une faute à peu près semblable dans les Actes du Père Combefis. Il y est dit que 16 saint Pierre accusa Arius d'avoir séparé le Fils de la gloire et de la consubstantialité du Père. Selon ces Actes 17, et c'est une autre preuve de leur supposition, Dioclétien envoya cinq tribuns à Alexandrie, pour emmener le Saint à Nicomédie; et il fut mis à mort par ordre de ce prince. Eusèbe dit en 18 termes exprès que ce fut Maximin qui fit arrêter et décapiter saint Pierre, non à Nicomédie, mais à Alexandrie. Ces Actes disent 19 aussi qu'Arius était prêtre lorsqu'il fut excommunié par saint Pierre; en quoi ils

nium expectationem, subito et absque ulla probabili
causa, utpote Maximino jubente, capite truncatur. Idem,
lib. IX, cap. 6.

5 Euseb., lib VII, cap. 32.-6 Ibidem.-7 Ibidem.
8 Theodoret., lib. I, cap. 8.
10 Ibidem.

9 Sozomen., lib. I, cap. 15.-
11 Euseb., lib. IX, cap. 6.
12 Idem., lib, IX, cap. 9.

13 Surius, ad diem 27 novembris.

14 Combefis, Eustach. et Petri. Act., p. 180 et seq.
15 Baron., ad ann. 310, num. 4; Tillemont, p. 775,
tom. V Hist. eccles.

16 Acta Combefis, p. 195.

17 Ibid., p. 189.

18 Euseb., lib. IX, cap. 9, ut supra.

19 Acta Combefis, p. 193,

La vision qu'on lui at

tribue tou

chant Arius,

sont contraires à Sozomène 1, qui marque nettement qu'il n'était alors que diacre, et qu'il fut fait prêtre par Achillas, après la mort de saint Pierre. Ils font évêque d'Alexandrie un certain Milius, qui ne l'a jamais été. Ils mettent Héraclas après Denys et Maxime, ses successeurs. Ils font mention de l'église de saint Théonas, comme étant déjà bâtie dès le temps de saint Pierre, quoiqu'elle ne l'ait été que depuis, sous saint Alexandre.

4. C'est dans les Actes donnés par le Père Combefis, que se trouve la vision célèbre est supposée dans laquelle on dit que Jésus-Christ fit défense à saint Pierre d'Alexandrie de recevoir jamais Arius dans l'Église. Cette histoire porte en substance qu'Arius, ayant été excommunié par ce saint évêque, obtint d'Achillas et d'Alexandre, prêtres de cette Église, qu'ils iraient intercéder pour lui auprès de ce Saint, sur le point de répandre son sang pour Jésus-Christ. Ils y allèrent en effet; et saint Pierre, après leur avoir témoigné, et en général à tous les assistants, l'horreur qu'il avait d'Arius, à cause de son impiété envers JésusChrist, tira à part Achillas et Alexandre, et leur dit : « Oui, c'est Jésus-Christ qui, m'ayant fait voir en esprit, durant cette nuit, sa robe déchirée de haut en bas, m'a dit que c'était Arius qui l'avait mis en cet état; que je me gardasse bien de me laisser fléchir aux prières qu'on me ferait, le lendemain, en faveur de son ennemi; et que je vous ordonnasse, comme je le fais de sa part, par l'autorité qu'il m'en a donnée, de ne recevoir jamais dans l'Église ce traître, que j'en ai mis dehors et qui ne tâche d'y rentrer que pour la ruiner.» Achillas et Alexandre communiquèrent aux plus considérables du clergé les derniers ordres de leur évêque, et Arius, en ayant eu connaissance, ne se donna alors aucun mouvement pour rentrer; mais il ne laissa pas

1 Sozomen, lib. I, cap. 15.

2 Acta Combefis, p. 193 et seq.

3 Theodoret., lib. I, cap. 1; Sozomen., lib. I. cap. 15. Le cardinal Maï a publié, dans le tome III du Spicilége romain, les Actes authentiques de saint Pierre, traduits par Anastase le Bibliothécaire. Ils sont plus étendus que ceux publiés par Surius et Combefis, et ils sont aussi écrits avec plus d'exactitude. Baronius, dans ses notes sur le Martyrologe romain, avait porté ce jugement sur ces Actes, qu'il avait vus manuscrits au Vatican. Le cardinal Maï les juge seuls authentiques. On y voit disparaître la plupart des erreurs que Dom Ceillier reproche aux autres Actes. Saint Pierre souffre le martyre sous Maximin. Arius n'est pas excommunié pour son hérésie, mais bien parce qu'il

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d'espérer en l'affection qu'Achillas et Alexandre lui avaient témoignée. Les Actes disent que ses espérances furent vaines et sans effet; nouvelle preuve de leur supposition, puisqu'il est certain, par le témoignage de Théodoret et de Sozomène, qu'Arius fut en grand crédit sous le pontificat de l'un et de l'autre. Achillas l'éleva à la prêtrise et lui donna la charge d'une des principales églises d'Alexandrie; et Alexandre lui confia le soin d'expliquer au peuple les divines Écritures. Le témoignage de ces deux historiens prouve en même temps la fausseté de la vision qu'on suppose être arrivée à saint Pierre d'Alexandrie la veille de son martyre. Comment, en effet, pourra-t-on se persuader qu'Achillas et Alexandre, deux hommes également irréprochables dans leurs mœurs et dans leur doctrine, qui succédèrent l'un après l'autre à saint Pierre dans le siége épiscopal d'Alexandrie, eussent mis en honneur et dans les emplois les plus considérables Arius, après une recommandation si expresse de leur saint prédécesseur, et des ordres formels de la part de Jésus-Christ, de lui refuser l'entrée même de l'église? Il faut bien que cette vision ait été inconnue à saint Athanase et même à saint Alexandre, puisqu'ils ne l'ont jamais alléguée contre cet hérésiarque, et qu'on ne voit pas que les autres défenseurs de la consubstantialité s'en soient servi pour le combattre et le couvrir de honte *.

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avait adhéré an schisme de Mélèce. La vision qu'eut saint Pierre s'y trouve rapportée. La raison par laquelle Dom Ceillier cherche à la combattre n'est point péremptoire. Arius témoigna son repentir, et il fut réconcilié avec l'Église. On voit dans ces Actes que le peuple recueillit le sang du martyr dans des linges, transporta son corps en triomphe dans l'église de la vierge Marie, que le Saint avait bâtie luimême dans un faubourg, plaça ce corps sur le trône épiscopal, au milieu des flambeaux et des parfums, jusqu'à ce qu'il fût déposé dans le tombeau. Des miracles s'opéraient encore au temps où furent écrits les Actes que nous citons. (L'éditeur.)

5 Quoniam autem quartum Paschæ persecutionem jam apprehendit, etc., Tom. I Concil., p. 955.

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