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Un membre demande que les membres de la Convention, dénoncés à l'opinion publique, soient mis en arrestation.

Le procureur de la Commune s'élève avec indignation contre cette proposition représentée pour la troisième fois. Il dit que, si quelqu'un ose encore la renouveler, il le dénoncera à ce même peuple, qui applaudit sans savoir qu'il applaudit à sa ruine.

Un membre propose d'afficher à la porte de la salle l'improbation formelle de toute proposition tendant à violer la représentation nationale. L'on observe que cette improbation est dans les cœurs, que les citoyens et les autorités constituées de Paris sont trop pénétrés de leurs devoirs pour avoir besoin d'en être avertis.

Le conseil passe à l'ordre du jour ainsi motivé.

Des membres du directoire du département viennent se réunir au conseil pour délibérer avec lui sur les mesures de salut public.

Un membre de la commission révolutionnaire fait son rapport sur les mesures qu'elle a prises. Il divise ces mesures en deux espèces; les mesures cachées, et les mesures qui peuvent être rendues publiques. Il entre dans le détail de ces dernières, parmi lesquelles se trouve la mesure d'arrestation de toutes les personnes qui ont donné lieu aux mouvemens contre-révolutionnaires qui ont existé depuis quelque temps.

Quatre nouveaux commissaires sont adjoints au comité révolutionnaire.

L'on annonce que la Convention nationale vient de décréter que les comités des sections resteraient en permanence, et communiqueraient avec son comité de salut public; que le comité des Douze cesserait ses fonctions, et que les scellés seraient apposés sur les papiers de chacun des membres de ce comité. (On applaudit.)

Un membre annonce que l'ex-ministre Roland et son épouse ont été mis en état d'arrestation, mais que la section de Beaurepaire les a pris sous sa sauvegarde.

T. XXVII.

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Le conseil nomme six commissaires pour se rendre à la section de Beaurepaire, et l'engager à livrer Roland au pouvoir de la loi.

Une députation des citoyens pompiers annonce qu'ils ont doublé la garde de tous leurs postes.

Il sera fait mention civique au procès-verbal du zèle et du patriotisme de ces citoyens.

La section des Gardes-Françaises communique un arrêté par lequel elle désavoue la pétition anti-civique que des intrigans de cette section ont présentée à la Convention nationale. - Mention civique.

La section de Molière et La Fontaine, vient jurer de nouveau union et fraternité au conseil-général. Le député de cette section reçoit le baiser fraternel, et est admis à la prestation du

serment.

Les commissaires nommés pour se transporter à la section de Beaurepaire, relativement à l'arrestation de Roland et son épouse, rendent compte de leur mission, et disent que l'on s'y est mal pris pour faire cette arrestation avec succès. Ils ont placé six factionnaires à la porte, afin que les détenus que la section de Beaurepaire a mis sous sa sauvegarde, ne puissent point s'évader.

Le conseil autorise ses commissaires à arrêter Roland et son épouse, et à mettre les scellés sur leurs papiers; arrête en outre que les commissaires de la section de la Cité, qui avaient été chargés de cette arrestation, seront invités à se rendre dans son sein pour rendre compte des motifs du retard qu'ils ont mis à l'exécuter.

Les commissaires chargés de se transporter à l'administration des postes pour y faire l'examen des lettres qui paraîtraient suspectes, observent qu'ils ont quinze ou dix-huit mille lettres à exáminer, et qu'il leur est impossible d'y suffire.

Le conseil adjoint six commissaires à ceux déjà nommés.

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Il est trois heures moins un quart du matin. Le conseil interrompt sa séance.

N.-B. Le serment révolutionnaire, dont nous avons eu plusieurs

fois occasion de parler dans le cours de cette séance, est conçu

en cés térmes :

‹ Je jure d'être fidèle à la République une et indivisible, de maintenir de tout mon pouvoir et de toutes mes forces la sainte liberté, la sainte égalité, la sûreté des personnes et le respect des propriétés, ou de mourir à mon poste en défendant ces droits sacrés de l'homme; je jure de plus de vivre avec mes frères dans l'union républicaine; enfin, je jure de remplir avec fidélité et courage les missions particulières dont je pourrais être chargé..

CONVENTION. Séance du 31 mai. - Présidence de Mallarmé.

[Il est six heures du matin.-On entend le tocsin et la générale. Une centaine de membres rassemblés dans la salle ouvrent la séance.

Plusieurs membres annoncent que des citoyeus se disposent à tirer le canon d'alarme, et qu'un grand mouvement paraît se préparer dans Paris. Un membre déclare qu'il a connaissance qu'une section s'est dite en insurrection.

L'assemblée décrète que le conseil exécutif, l'administration du département et le maire, se rendront à l'instant à la séance, pour rendre compte de la situation de Paris.

Ce décret est à peine rendu, que des députations des autorités constituées se présentent à la barre. Le conseil exécutif obtient le premier la parole.

Le ministre de l'intérieur. Je ne puis dissimuler à la Convention qu'il existe une grande agitation dans Paris; que tous les citoyens ont été arrachés au repos par le tocsin, au milieu de la nuit. Une assemblée composée de commissaires des sections, d'électeurs du 10 août, etc., s'est tenue cette nuit à l'Évêché, et paraît avoir donné l'impulsion à ce mouvement. La cause de ces troubles est la réintégration de votre commission extraordinaire des Douze; on l'accuse d'avoir calomnié Paris, d'avoir fait încarcérer arbitrairement des magistrats, d'avoir formé le projet d'opprimer les patriotes. Les barrières ont été momentanément fermées.

Tous les citoyens sont en ce moment sous les armes dans leurs sections respectives, et sous les ordres de leurs chefs ordinaires. Les patrouilles sont très-nombreuses, et se font en bon ordre. Une députation de la municipalité de Paris est admise à la barre.

Le maire. J'ai donné ordre ce matin au commandant provisoire de rassembler le plus de réserves possible, de doubler les gardes de poste aux établissemens publics, tels que la Trésorerie, etc., ainsi que le poste du Pont-Neuf, afin d'empêcher qu'on ne tirât le canon d'alarme.

J'ai rendu compte au comité de salut public de la situation de Paris; de retour au conseil-général ; j'y ai trouvé les commissaires de la majorité des sections de Paris, qui nous ont déclaré être chargés de suspendre la municipalité. Le conseil ayant vérifié les pouvoirs des commissaires, et les ayant trouvés en règle, a quitté la séance. Un instant après, les commissaires nous ayant fait venir, nous ont déclaré, qu'attendu que nous n'avions pas perdu la confiance de nos concitoyens, ils nous réintégraient provisoirement dans nos fonctions. Nous avons accepté avec reconnaissance; c'est en cet instant que m'est parvenu le décret de la Convention qui m'ordonne de rendre compte de l'état de Paris. Je viens recevoir ses ordres.

La députation est admise aux honneurs de la séance.

Le président. Je reçois une lettre du commandant de la force armée de la section du Pont-Neuf, par laquelle on m'annonce que Henriot, commandant provisoire de la garde nationale de Paris, ayant donné l'ordre de tirer le canon d'alarme, la garde de poste au Pont-Neuf s'y étant refusée, il en avait référé au département, lequel avait passé à l'ordre du jour, motivé sur la loi qui défend de tirer le canon d'alarme sans un décret de la Convention; en conséquence, il attend les ordres de la Convention, qu'il prie de l'admettre à sa barre.

Valazé. Je demande que cet Henriot, qui a eu l'impertinente audace... (Il s'éleve dans les tribunes de longs et violens murmures.)

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Matthieu. Il s'agit de savoir si la liberté existe encore en France. Non, à l'instant où la délibération est influencée par le despotisme le plus insolent; non, la représentation n'existe plus. C'est dans cet instant du moins que tous les amis de la patrie doivent se prononcer d'une manière décidée. J'ai su me prononcer dans des circonstances critiques; je ne crains rien, non, je ne crains rien. Je demande que le président, pénétré de sa dignité, persuadé qu'il a l'honneur de présider la première assemblée humaine, qu'il tient peut-être dans sa main les destinées du monde, fasse respecter la Convention.

Cambon. Je crois que toute la France est pénétrée de cette vérité, qu'il faut que la Convention soit respectée. Mais nous sommes dans une circonstance critique : il y a deux partis; l'un attaqué, calomnié sans cesse dans les journaux, à la tribune; l'autre, qui a préparé ses moyens de défense, qui est sur la défensive. Il faut dire la vérité, au milieu de toutes ces passions, une étincelle peut allumer un grand incendie. Peut-être les malveillans désirent-ils que la Convention soit attaquée, parce qu'ils espèrent qu'il y aurait une réaction. Disons ce que nous savons, mais disons-le tranquillement.

Valazé. C'est parce que les circonstances sont extraordinaires, c'est parce que l'on cherche à les envelopper de ténèbres inconcevables, que j'ai demandé la parole. Depuis la levée de la séance, le tocsin sonne, la générale bat. On ne sait d'après quel ordre. Vous cherchez l'origine du désordre, il faut donc vous résoudre à trouver un coupable. Henriot, commandant général provisoire, a envoyé au commandant du poste du Pont-Neuf, l'ordre de tirer le canon d'alarme. C'est une prévarication manifeste, contre laquelle la peine de mort est portée. (Les tribunes murmurent. ) Si le tumulte continue, je déclare que je ne perdrai pas mon caractère. Je suis ici représentant de vingt-cinq millions d'hommes. Je demande que le commandant général provisoire soit mandé à la barre et mis en état d'arrestation. Je demande que la commission des Douze, tant calomniée, et dont l'utilité est bien évidente, puisqu'elle a été créée pour rechercher des complots

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