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les propositions qui sont faites, et que vous passiez à l'ordre du jour, qui est la suppression de la commission des Douze. (On applaudit.)

Une grande partie de l'assemblée demande à aller aux voix.

Vergniaud. Citoyens, on vient de vous dire que tous les bons citoyens devaient se rallier certes, lorsque j'ai proposé aux membres de la Convention de jurer qu'ils mourraient tous à leur poste, mon intention était certainement d'inviter tous les membres à se réunir pour sauver la République. Je suis loin d'accuser la majorité ni la minorité des habitans de Paris; ce jour suffira pour faire voir combien Paris aime la liberté. Il suffit de parcourir les rues, de voir l'ordre qui y règne, les nombreuses patrouilles qui y circulent, pour décréter que Paris a bien mérité de la patrie.

Oui, oui! qux voix! s'écrie-t-on dans toutes les parties de la salle.

Vergniaud. Oui, je demande que vous décrétiez que les sections de Paris ont bien mérité de la patrie, en maintenant la tranquillité dans ce jour de crise, et que vous les invitiez à continuer d'exercer la même surveillance, jusqu'à ce que tous les complots soient déjoués.

Cette proposition est décrétée, au milieu des applaudissemens de l'assemblée entière.

Vergniaud. Nous devons craindre que l'aristocratie, avec son astuce ordinaire, n'ait profité des mouvemens qui se sont manifestés pour désorganiser les armées, qu'elle n'ait fait partir des courriers extraordinaires pour annoncer la dissolution de la Convention. Je demande que vous fassiez une adresse aux armées, pour les prémunir contre les mauvaises nouvelles que les ennemis du bien public auraient pu répandre.

Camboulas. Il y a eu une violation manifeste de la loi; les barrières ont été fermées; on a sonné le tocsin; le canon d'alarme a été tiré. Je demande que le conseil exécutif soit tenu de rechercher ceux qui ont commis ces crimes.

Quelques voix dans les tribunes. Nous, nous tous!

Robespierre jeune. Vous voulez savoir qui a fait sonner le tocsin, je vais vous le dire? ce sont les trahisons de nos généraux, c'est la perfidie qui a livré le camp de Famars, c'est le bombardement de Valenciennes, c'est le désordre qu'on a mis dans l'armée du Nord, ce sont les conspirateurs de l'intérieur, dont plusieurs sont dans le sein de la Convention.

Vergniaud. Je demande qu'on constate cette assertion dans le procès-verbal.

Robespierre jeune. Je dis que ce sont les conspirateurs de l'intérieur, dont quelques-uns sont ici, qui ont fait sonner le tocsin. (Oui, oui! s'écrie-t-on dans une partie de l'assemblée.) C'est la commission des Douze, où il n'y a que des contre-révolutionnaires. Déjà vous en connaissez un; Gardien n'a pu être choisi que par des hommes qui le connaissaient bien. C'est le moment de nous occuper de la conspiration de cette faction, qui ne nous dénonçait des complots imaginaires que pour couvrir ses trames. Vous devez vous souvenir que cette faction a toujours défendu les contre-révolutionnaires; les aristocrates d'Orléans, ceux de Lyon, ceux de Marseille, le juge de paix de la section de l'Unité, ont trouvé parmi eux des défenseurs. (On applaudit dans une grande partie de l'assemblée et dans les tribunes.) Vous venez de décréter que les sections de Paris avaient bien mérité de la patrie pour avoir maintenu la tranquillité dans Paris; si vous adoptiez la proposition de Camboulas, vous seriez en contradiction avec vous-mêmes. Je demande donc la question préalable sur cette proposition.

La discussion est fermée.

La proposition de Camboulas est adoptée.

Une compagnie de canonniers, partant pour la Vendée, est admise à prêter le serment.

Delacroix, d'Eure-et-Loir. Nous déclarons que nous n'avons pas pris part au décret qui ordonne au conseil exécutif de rechercher ceux qui ont fait sonner le tocsin, parce que nous n'avons pas entendu quand vous l'avez mis aux voix.

Thuriot. Je demande le rapport de ce décret, il vous mettrait

en contradiction avec les mesures de sagesse que vous avez renvoyées au comité de salut public.

Une députation de la section des Gardes-Françaises est admise à la barre.

L'orateur. La section des Gardes-Françaises, indignée de l'adresse qui vous a été présentée par un petit nombre d'intrigans, vient la désavouer par notre organe. Nous venons vous dire qu'elle a chassé de son sein le vil intrigant Chazot qui l'avait provoquée. (On applaudit.)

Les pétitionnaires sont admis aux honneurs de la séance.
Des citoyens sont introduits.

L'an d'eux. Législateurs, les hommes du 14 juillet, du 10 août et du 31 mai sont dans votre sein. Délégués du peuple qui n'avez pas trahi sa cause, soyez toujours courageux, vous aurez des soutiens; que la liberté triomphe encore une fois! livrez les intrigans conspirateurs au glaive de la justice. Nous demandons le rapport du décret liberticide arraché par la faction scélérate. Nous demandons que vous décrétiez la levée d'une armée révolutionnaire centrale de sans-culottes, qui auront une paie de 40 sous par jour; nous demandons le décret d'accusation contre les vingt-deux membres dénoncés par les sections de Paris (Les citoyens des tribunes applaudissent.), et par la majorité des départemens, ainsi que contre les membres de la commission des Douze. Les citoyens de Paris s'offrent en otage pour en répondre à tous les départemens. Nous demandons que le prix du pain soit fixé à trois sous la livre dans tous les départemens, et que cette diminution s'opère par des sous additionnels mis sur les riches; nous demandons que dans toutes les places de la République il soit établi des ateliers destinés à fabriquer des armes pour armer les sans-culottes ; nous demandons le licenciement de tous les nobles occupant des grades supérieurs dans les armées; nous demandons que vous envoyiez des commissaires dans la ville de Marseille, et dans les autres villes du Midi où se sont manifestés des mouvemens contre-révolutionnaires. Pour resserrer les liens qui doivent les unir avec tous les citoyens de la République,

nous demandons que vous décrétiez une proclamation pour venger Paris des calomnies qu'on répand contre cette ville, que vous mettiez en état d'arrestation les ministres Lebrun et Clavière; nous vous dénonçons l'administration des postes et celle des assignats; enfin nous demandons l'exécution du décret qui accorde des secours aux femmes et aux enfans des défenseurs de la patrie.

Les pétitionnaires sont admis aux honneurs de la séance. Vergniaud. Je demande l'impression de cette adresse et l'envoi aux départemens.

Cette proposition est décrétée.

Barrère, au nom du comité de salut public, présente un projet de décret, dont le but est de mettre à la réquisition de la Convention la force armée de Paris, et de casser la commission des Douze.

Quelques oppositions se manifestent dans la partie droite contre ce projet de décret. La délibération est interrompue.

Les membres composant l'administration du département de Paris réunis aux autorités constituées de la Commune et aux commissaires des sections, sont admis à la barre.

L'Huillier, procureur-général-syndic, orateur de la députation.

Législateurs, depuis trop long-temps la ville et le département de Paris sont calomniés aux yeux de l'univers; depuis trop longtemps on cherche, par les moyens les plus atrocement coupables, à fomenter le trouble et la division dans la République. Les mêmes hommes qui ont voulu perdre Paris dans l'opinion publique, sont les fauteurs des massacres de la Vendée; ce sont eux qui flattent et soutiennent les espérances de nos ennemis ; ce sont eux qui avilissent les autorités constituées, qui cherchent à égarer le peuple pour acquérir le droit de s'en plaindre; ce sont eux qui vous dénoncent des complots imaginaires pour en créer de réels; ce sont eux qui vous ont demandé le comité des Douze, pour opprimer la liberté du peuple; ce sont eux enfin qui, par une fermentation criminelle, par des adresses controuvées, entretiennent les baines et les divisions dans votre sein, et privent

la patrie du plus grand des bienfaits, d'une bonne constitution qu'elle a achetée par tant de sacrifices.

Législateurs, ces hommes en veulent à la liberté du peuple; ils veuleut l'asservir pour eux-mêmes ou le livrer à un nouveau despote. (On applaudit.) Mais pour y parvenir, ils cherchent à le diviser, et c'est pour atteindre ce comble des forfaits qu'ils tentent d'anéantir Paris. Ils sentent parfaitement qu'en détruisant ce centre de lumières et de correspondance, ils anéantiraient la force et l'harmonie de la République, et qu'ensuite, faute de communication, ils détruiraient facilement un département par l'autre, et vendraient ainsi, au premier tyran, les lambeaux sanglans de leur patrie.

Voilà, législateurs, le motif de tant de calomnies. Voilà la source de tant d'horreurs. (On applaudit.) Eh bien ! le département de Paris vous déclare qu'il en méritera davantage ; car nous venons vous jurer, en son nom, qu'il sera plutôt renversé de fond en comble, que de souscrire à la tyrannie; et si Paris disparaît de la surface du globe, ce ne sera pas pour avoir démérité de la patrie, mais bien pour avoir défendu l'indivisibilité de la République, comme le type essentiel de sa liberté. (Mêmes applaudissemens.) Et alors le voyageur avide recherchera avec soin quelques traces de son existence; il gémira sur sa destruction, en en maudissant les auteurs.

Législateurs, il est temps enfin de terminer cette lutte des patriotes contre les forcenés qui les assiégent continuellement ; la raison du peuple s'irrite de tant de résistance: que ses ennemis tremblent, sa colère majestueuse est près d'éclater! qu'ils tremblent! l'univers frémira de sa vengeance.

Législateurs, nous venons démasquer l'impudeur et confondre l'imposture; nous venons, au nom du département, vous exposer sa profession de foi.

Nous venons vous déclarer que, fidèle aux principes, soumis aux lois, le département de Paris soutiendra les dignes représentans du peuple au prix de tout son sang. (On applaudit.)

Nous vous déclarons, ainsi qu'à l'univers, que nous ne som

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