Osselin. Je demande l'impression de la pétition et l'adoption en masse du projet de Barrère. (Oui, oui, aux voix.) Vergniaud. Président, consultez l'assemblée pour savoir si elle veut délibérer. (Murmures.) Plusieurs voix. Aux voix l'adoption du projet de Barrère ! N........... Président, je proteste contre toute délibération dans l'état où est l'assemblée. Philippeaux. Afin de ne pas laisser matière à calomnier les décrets de l'assemblée, je demande que le président invite les pétitionnaires à se retirer. Doulcet. Non-seulement la Convention ne peut délibérer tant que les pétitionnaires resteront dans la salle, mais si lorsque le président a accordé la parole à un membre, il n'a pas la faculté de se faire entendre: je déclare à la France entière que la Convention nationale n'est pas libre. Levasseur. Afin de ne pas interrompre la délibération, j'invite les députés de la montagne à passer de ce côté ; (du côté droit ) leur place sera bien gardée par les pétitionnaires. Les membres de l'extrémité gauche passent dans la partie droite. Les pétitionnaires occupent les gradins de la gauche. Vergniaud. Conformément au premier article du décret proposé par Barrère, je demande que le commandant de la force armée qui est sur la place, soit mandé à la barre de l'assemblée pour y recevoir ses ordres. L'impression de l'adresse présentée par le département de Paris, est mise aux voix et décrétée. Valazé. Je déclare, au nom des quatre cent mille hommes qui m'ont envoyé, que je proteste contre toute délibération de l'Assemblée. Plusieurs membres. Aux voix le décret de Barrère. Robespierre. Je m'y oppose, j'ai la parole. N.... Nous ne sommes point libres, nous sommes environnés d'individus que nous ne connaissons pas. (On rit.) L'asile des représentans du peuple est violé. (Murmures.) Vergniaud. La Convention nationale ne peut pas délibérer 1 1 dans l'état où elle est. Je demande qu'elle aille se joindre à la force armée qui est sur la place, et se mettre sous sa protec tion. Vergniaud sort; plusieurs membres le suivent. (Applaudissemens des tribunes.) Chabot. Je demande l'appel nominal, afin de connaître les absens. (L'assemblée est très-agitée.) Robespierre. Citoyens, ne perdons pas ce jour en vaines clameurs et en mesures insignifiantes. Ce jour est peut-être le dernier où le patriotisme combattra la tyrannie. Que les fidèles représentans du peuple se réunissent pour assurer son bonheur. Vergniaud rentre dans l'assemblée. (Il s'élève quelques rumeurs.) Robespierre. Je n'occuperai point l'assemblée de la fuite ou du retour de ceux qui ont déserté ses séances. Vergniaud. Je demande la parole. (Murmures.) Robespierre. Je vous ai déjà dit que ce n'était pas par des mesures insignifiantes qu'on sauvait la patrie. Votre comité de salut public vous a fait plusieurs propositions. Il en est une que j'adopte, c'est celle de la suppression de la commission des Douze; mais croyez-vous que cette mesure ait assez d'importance pour contenter les amis inquiets de la patrie? Non, déjà cette commission a été supprimée, et le cours des trahisons n'a pas été interrompu; car le lendemain on a osé faire rapporter ce décret salutaire, et l'oppression a pesé sur la tête des patriotes. Supprimez donc cette commission; mais prenez des mesures vigoureuses contre les membres qui la composent ; et à cet égard, les pétitionnaires qui viennent d'être entendus vous ont indiqué la marche que vous devez suivre. Quant à la force armée qu'on propose de mettre à la disposition de l'assemblée, en rendant justice aux motifs patriotiques qui ont dicté cette mesure au comité de salut public, je dois la combattre. En effet, qu'est-ce que la force armée qu'on veut mettre à la disposition de la Convention? Ce sont des citoyens armés pour défendre leur liberté contre les scélérats qui les tra D Législateurs, s'écrie l'un d'eux avec enthousiasme, la réunion vient de s'opérer. (On applaudit.) Les citoyens du faubourg Saint-Antoine et des sections de la Butte-des-Moulins, de Quatre-Vingt-Douze, et des Gardes-Françaises, que des scélérats voulaient égorger les uns par les autres, ces citoyens viennent de s'embrasser, et dans ce moment leurs cris de joie et leurs larmes d'attendrissement se confondent. - Ces citoyens, vive› ment applaudis, entrent dans la salle et sont embrassés par plusieurs membres. Bazire. Je vais vous prouver que le patriotisme n'est pas incompatible avec la plus impartiale équité. Le citoyen Gardien vient de m'interpeller sur deux inculpations qui lui ont été faites. On l'a accusé d'avoir voulu séduire et corrompre le rapporteur de l'affaire du citoyen...... C'est moi qui suis ce rapporteur, et je déclare qu'il est faux que Gardien ait sollicité dans cette affaire, et qu'il est également faux qu'il soit venu me voir avec un particulier qui devait proposer de l'argent. On a répondu qu'on avait trouvé chez Gardien des papiers contre-révolutionnaires et de l'argent, dont la fabrication lui était imputée. Le comité de sûreté générale a fait mettre les scellés sur les papiers de Gardien, et je déclare, moi, qui les ai visités avec mes collègues, que ses papiers, loin de contenir des projets de contre-révolution, prouvent au contraire son civisme. Nous y avons trouvé aussi pour 9,000 liv. de faux assignats que Gardien avait reçus, comme receveur de district, et qu'il a luimême annulés. Je déclare donc que les faits imputés à Gardien sont faux. Je vais maintenant vous entretenir d'un autre objet : trente à quarante mille hommes environnent en ce moment la Convention nationale; ils viennent de se réunir et de s'embrasser ; je demande que la Convention nationale lève la séance, qu'elle aille fraterniser avec eux, et qu'improvisant une fête civique, elle réalise d'avance la fédération de tous les cœurs. (On applaudit.) Léonard-Bourdon. Je demande que la Convention nationale se réunisse demain autour de l'arbre de la liberté, et qu'elle indique pour le 10 août prochain une fédération générale. Gastelier. Je demande le décret d'accusation contre les ministres Lebrun et Clavière. N.... Ce n'est pas dans un moment d'enthousiasme qu'il con. vient de prononcer sur le sort de deux citoyens. Gastelier. Je me borne à demander que dans trois jours le comité de salut public fasse un rapport sur ces deux fonctionnaires publics. Cette proposition est adoptée. La séance est levée à 9 heures et demie. ] COMMUNE.-Suite de la séance permanente du conseil-général révolutionnaire. - Le 1er juin, à six heures du matin. Les commissaires nommés à cet effet viennent de faire conduire à l'Abbaye la citoyenne Roland. Son mari ne s'est pas trouvé dans son domicile, et n'est pas encore arrêté. Le comité révolutionnaire adopte la proclamation suivante, pour être publiée ce matin dans les quarante-huit sections. Aux citoyens des quarante-huit sections de Paris. < Citoyens, vous étiez sur les bords de l'abîme, entourés d'ennemis puissans au dehors et de conspirateurs audacieux au dedans. C'était fait de la liberté, si vous ne vous fussiez levés. Une conjuration ourdie au sein même de la Convention menaçait les plus fermes patriotes et les magistrats les plus chéris du peuple. Dans ces dangers, les commissaires que vous avez investis de vos pouvoirs et de votre confiance, voulant sauver la patrie, se sont hâtés de prendre les mesures extraordinaires que commandait l'intérêt de la liberté. Ils ont assuré la fidélité de la correspondance publique. Ils ont porté à vos délégués vos justes plaintes, vos réclamations pressantes et demandé la punition des traîtres que la Convention recèle dans son sein. Ils ont ordonné l'arrestation de tous les gens suspects qui se cachent dans les sections de Paris. Cette arrestation s'effectue en ce moment de toutes parts. › Nos commissaires ont en outre concerté le projet de forma23 T. XXVII. tion d'une armée révolutionnaire de vingt mille hommes pour garder et défendre Paris. Cette armée sera entretenue par une contribution forcée sur les riches, et principalement sur ceux reconnus pour leur incivisme. › Déjà nous avons obtenu un premier succès: la Convention a cassé la commission inquisitoriale des Douze, et renvoyé å l'examen d'un comité la conduite coupable de ses membres. Un autre décret confirme l'arrêté de la Commune qui accorde quarante sous par jour aux ouvriers qui seront requis de prendre les armes dans ces jours de crise. Enfin, la Convention a déclaré que les sections ont bien mérité de la patrie. Par ce qu'elle a fait hier, nous attendons ce qu'elle va faire aujourd'hui. Citoyens, restez debout, les dangers de la patrie vous en font une loi impérieuse. > Le conseil-général se réunit à dix heures du matin. On lui soumet la rédaction de l'adresse ci-dessus. Il trouve qu'elle n'a pas assez d'énergie, et en suspend la proclamation jusqu'à ce qu'il ait été pris des mesures ultérieures. Un membre propose de mander le commandant-général, pour qu'il rende compte des mesures qu'il a dû prendre depuis hier. Cette proposition, mise aux voix, est adoptée sans réclamation. Le commandant-général se présente, et annonce que les mesures nécessaires sont prises, et que Paris est parfaitement bien gardé. Le conseil général arrête que le comité révolutionnaire, existant actuellement à la maison commune, sera appelé comité révolutionnaire créé par le peuple du département de Paris. Les communes de Montreuil et de Neuilly envoient des commissaires qui sont admis au conseil. Du 1er juin, à une heure après midi. La commune de Versailles écrit au conseil, et invite celle de Paris à toujours compter sur le sincère attachement des républicains de Versailles. |