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mes animés que de l'instinct de fusion dans le grand tout, qué nous ne connaissons de division de départemens que celle que nécessite l'administration; que la République est une et indivisible; que nous exécrons toute espèce de fédéralisme; que nous ne voulons qu'une constitution pleinement populaire, dont l'égalité sera la base.

Nous déclarons que nous sommes enorgueillis de ce que Paris, qui n'est rien par lui-même, est cependant l'extrait de tous les départemens, dont l'éclat consiste à être le miroir de l'opinion et le point de réunion des hommes libres.

Nous déclarons qu'après avoir combattu et terrassé le despotisme dans l'immortelle journée du 10 août, nous combattrons jusqu'au dernier soupir tous les tyrans qui voudraient tenter de le rétablir de quelque espèce qu'ils puissent être.

Voilà notre profession de foi.

Maintenant, législateurs, nous vous demandons justice d'une insulte atroce faite à la nation; que dis-je, d'une insulte! d'un forfait commis contre la majesté du peuple. Nous vous parlons du sacrilege politique proféré par Isnard dans le temple sacré des lois. (Applaudissemens.)

Isnard a tout à la fois provoqué la guerre civile et l'anéantissement de cette grande cité.

Il a tout à la fois flétri la ville de Paris, en supposant qu'elle put jamais se rendre digne d'un sort aussi affreux; il a flétri les départemens en leur prêtant l'atrocité de son ame. (Murmures de quelques membres; vifs applaudissemens dans la partie opposée), et en pensant que, fidèle à sa voix impure, toutes les colonnes de la République viendraient l'anéantir.

Il est des hommes, non moins cruels, contre lesquels nous vous demandons le décret d'accusation.

On distingue particulièrement parmi les ennemis de la patrie, les membres du comité des Douze, les Brissot, les Guadet, les Vergniaud, les Gensonné, les Buzot, les Barbaroux, les Roland, les Lebrun, les Clavière, et tous les fauteurs du royalisme, pro

scrits par l'opinion, et dont un grand nombre vous ont été dénoncés par la commune de Paris.

Législateurs, le projet de détruire Paris serait-il bien formé? Voudrait-on à la fois engloutir tant de richesses amassées par la plus laborieuse industrie, et détruire les arts et les sciences, pour conduire plus tôt nos concitoyens à l'anarchie et à l'esclavage? Non, vous respecterez, vous défendrez vous-mêmes le dépôt sacré des connaissances humaines ; vous vous souviendrez que Paris a bien mérité de la patrie; vous vous souviendrez qu'il fut le berceau et qu'il est encore l'école de la liberté ; qu'il est le point central de la République; qu'il peut toujours fournir cent mille combattans pour défendre la patrie; qu'il en a la volonté; vous vous souviendrez qu'il a fait les plus grands sacrifices à la révolution; qu'il n'en regrette aucun; qu'il fera, sans murmurer, tous ceux qu'exigeront les circonstances; et enfin, qu'il est mû de l'amour le plus sincère et le plus fraternel avec les autres départemens. (On applaudit.)

Vous nous vengerez donc d'Isnard et de Roland, et de tous ces hommes impies contre lesquels l'opinion publique s'élève d'une manière éclatante.

Législateurs, donnez ce grand exemple, rendez-vous aux vœux d'une nation généreuse qui vous honore de son estime; vous ramènerez le calme, vous éteindrez le feu de la guerre civile; et par l'union sainte de tous les citoyens, nous triompherons bientôt de cette horde de tyrans qui nous assiégent. Alors la Constitution marchera d'un pas rapide; vous ferez le bonheur d'un peuple magnanime et généreux, qui, dans les accès fréquens de sa loyauté, confondant le bienfaiteur et le bienfait, portera vos noms chéris jusqu'à l'immortalité. (Applaudissemens vifs et prolongés.)

La députation, suivie d'une foule de citoyens, entre dans la salle au milieu des applaudissemens de l'assemblée et des tribunes. Ces citoyens se confondent fraternellement avec les membres de la partie gauche.

Osselin. Je demande l'impression de la pétition et l'adoption en masse du projet de Barrère. (Oui, oui, aux voix.)

Vergniaud. Président, consultez l'assemblée pour savoir si elle veut délibérer. (Murmures.)

Plusieurs voix. Aux voix l'adoption du projet de Barrère !

N..... Président, je proteste contre toute délibération dans l'état où est l'assemblée.

Philippeaux. Afin de ne pas laisser matière à calomnier les décrets de l'assemblée, je demande que le président invite les pétitionnaires à se retirer.

Doulcet. Non-seulement la Convention ne peut délibérer tant que les pétitionnaires resteront dans la salle, mais si lorsque le président a accordé la parole à un membre, il n'a pas la faculté de se faire entendre: je déclare à la France entière que la Convention nationale n'est pas libre.

Levasseur. Afin de ne pas interrompre la délibération, j'invite les députés de la montagne à passer de ce côté ; (du côté droit ) leur place sera bien gardée par les pétitionnaires.

Les membres de l'extrémité gauche passent dans la partie droite. Les pétitionnaires occupent les gradins de la gauche.

Vergniaud. Conformément au premier article du décret proposé par Barrère, je demande que le commandant de la force armée qui est sur la place, soit mandé à la barre de l'assemblée pour y recevoir ses ordres.

L'impression de l'adresse présentée par le département de Paris, est mise aux voix et décrétée.

Valaze. Je déclare, au nom des quatre cent mille hommes qui m'ont envoyé, que je proteste contre toute délibération de l'Assemblée.

Plusieurs membres. Aux voix le décret de Barrère.

Robespierre. Je m'y oppose, j'ai la parole.

N.... Nous ne sommes point libres, nous sommes environnés d'individus que nous ne connaissons pas. (On rit.) L'asile des représentans du peuple est violé. (Murmures.)

Vergniaud. La Convention nationale ne peut pas délibérer

dans l'état où elle est. Je demande qu'elle aille se joindre à la force armée qui est sur la place, et se mettre sous sa protec

tion.

Vergniaud sort; plusieurs membres le suivent. (Applaudissemens des tribunes.)

Chabot. Je demande l'appel nominal, afin de connaître les absens. (L'assemblée est très-agitée.)

Robespierre. Citoyens, ne perdons pas ce jour en vaines clameurs et en mesures insignifiantes. Ce jour est peut-être le dernier où le patriotisme combattra la tyrannie. Que les fidèles représentans du peuple se réunissent pour assurer son bonheur. Vergniaud rentre dans l'assemblée. (Il s'élève quelques rumeurs.)

Robespierre. Je n'occuperai point l'assemblée de la fuite ou du retour de ceux qui ont déserté ses séances.

Vergniaud. Je demande la parole. (Murmures.)

Robespierre. Je vous ai déjà dit que ce n'était pas par des mesures insignifiantes qu'on sauvait la patrie. Votre comité de salut public vous a fait plusieurs propositions. Il en est une que j'adopte, c'est celle de la suppression de la commission des Douze; mais croyez-vous que cette mesure ait assez d'importance pour contenter les amis inquiets de la patrie? Non, déjà cette commission a été supprimée, et le cours des trahisons n'a pas été interrompu; car le lendemain on a osé faire rapporter ce décret salutaire, et l'oppression a pesé sur la tête des patriotes. Supprimez donc cette commission; mais prenez des mesures vigoureuses contre les membres qui la composent ; et à cet égard, les pétitionnaires qui viennent d'être entendus vous ont indiqué la marche que vous devez suivre.

Quant à la force armée qu'on propose de mettre à la disposition de l'assemblée, en rendant justice aux motifs patriotiques qui ont dicté cette mesure au comité de salut public, je dois la combattre. En effet, qu'est-ce que la force armée qu'on veut mettre à la disposition de la Convention? Ce sont des citoyens armés pour défendre leur liberté contre les scélérats qui les tra

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Législateurs, s'écrie l'un d'eux avec enthousiasme, la réunion vient de s'opérer. (On applaudit.) Les citoyens du faubourg Saint-Antoine et des sections de la Butte-des-Moulins, de Quatre-Vingt-Douze, et des Gardes-Françaises, que des scélérats voulaient égorger les uns par les autres, ces citoyens viennent de s'embrasser, et dans ce moment leurs cris de joie et leurs larmes d'attendrissement se confondent. Ces citoyens, vive> ment applaudis, entrent dans la salle et sont embrassés par plusieurs membres.

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Bazire. Je vais vous prouver que le patriotisme n'est pas incompatible avec la plus impartiale équité. Le citoyen Gardien vient de m'interpeller sur deux inculpations qui lui ont été faites. On l'a accusé d'avoir voulu séduire et corrompre le rapporteur de l'affaire du citoyen...... C'est moi qui suis ce rapporteur, et je déclare qu'il est faux que Gardien ait sollicité dans cette affaire, et qu'il est également faux qu'il soit venu me voir avec un particulier qui devait proposer de l'argent.

On a répondu qu'on avait trouvé chez Gardien des papiers contre-révolutionnaires et de l'argent, dont la fabrication lui était imputée.

Le comité de sûreté générale a fait mettre les scellés sur les papiers de Gardien, et je déclare, moi, qui les ai visités avec mes collègues, que ses papiers, loin de contenir des projets de contre-révolution, prouvent au contraire son civisme. Nous y avons trouvé aussi pour 9,000 liv. de faux assignats que Gardien avait reçus, comme receveur de district, et qu'il a luimême annulés.

Je déclare donc que les faits imputés à Gardien sont faux.

Je vais maintenant vous entretenir d'un autre objet : trente à quarante mille hommes environnent en ce moment la Convention nationale; ils viennent de se réunir et de s'embrasser ; je demande que la Convention nationale lève la séance, qu'elle aille fraterniser avec eux, et qu'improvisant une fête civique, elle réalise d'avance la fédération de tous les cœurs. (On applaudit.)

Léonard-Bourdon. Je demande que la Convention nationale se

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