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de la révolution, le père des soldats, le défenseur de l'opprimé, et je me suis dit plusieurs fois : Si la République n'avait eu que des généraux semblables à Miranda, les despotes n'existeraient plus, nos intérêts les plus sacrés n'auraient jamais été compromis, et la liberté n'eût pas été obligée de se bander les yeux, pour soustraire à ses regards les Capet, les Dumourier et autres scélérats qui, sans pitié, firent égorger un grand nombre de ses meilleurs enfans et ses défenseurs les plus intrépides.

› Mon ame me dicte, et je me fais un devoir de rendre à Miranda l'hommage que ses grands talens méritent. Sur mon honneur et ma conscience, je déclare que le fait n'est pas constant.

› Par les raisons ci-dessus énoncées, les autres jurés ont été du même avis.

› Le tribunal, d'après la déclaration unanime du jury; ensemble les conclusions de l'accusateur public, y faisant droit, déclare que François Miranda est acquitté de l'accusation contre lui intentée, et ordonne qu'il sera sur-le-champ mis en liberté.

Après le prononcé ci-dessus, Miranda a fait un discours improvisé, dont voici la substance :

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Citoyens, souvent la prévention fait commettre de grandes » injustices. J'ai dans ma main un journal qui me dit que le député Thuriot, il y a deux jours, et pendant l'instruction dụ procès, m'a qualifié de traître à la Convention nationale. La > milleure réponse que je puisse lui faire est le jugement solennel que cet auguste tribunal vient de rendre. Puisse cet › exemple frappant couvrir de confusion et de honte ceux qui, › comme lui, m'ont calomnié sans m'entendre, ou par méchan> ceté! Puisse cet exemple, dis-je, ouvrir les yeux au peuple > souverain qui m'entend, pour surveiller la conduite de ceux à › qui il délégue son autorité, et qui, au lieu de l'employer à faire › le bien, ne s'en servent que pour semer la discorde et la désu› nion parmi nous-mêmes! - Puisse enfin cet acte éclatant de sa › justice me rendre l'estime de mes concitoyens, dont la perte > m'eût été plus sensible que la mort même ! »

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L'audience a duré cinq jours. >

PRESSE.

Le Patriote français, no MCCCLXXI, dit: mercredi 15 mai. Ils veulent toujours en finir, et n'en finissent jamais. Maintenant, le grand projet à l'ordre du jour est d'exterminer les hommes d'élat, les girondins, les modérés, les etc., à l'aide des citoyens enrôlés pour marcher contre les rebelles. Misérables! vous croyez que des républicains qui quittent leurs foyers et leurs familles pour faire triompher la liberté se rendront les exécrables instrumens de l'anarchie, du pillage, du meurtre, et, en définitive, de la contre-révolution? Si vous comptez sur eux, vous n'en fini rez pas encore. Ils ont découvert un autre moyen, un grand moyen! ils veulent organiser une armée révolutionnaire de femmes. Ces femmes commencent par s'assembler dans une salle des Jacobins. Lâches, vous avez raison; ces femmes ont plus de courage que vous; mais, malgré leur secours, vous n'en finirez pas encore. Vous n'aurez pas même l'horrible honneur de quelques massacres; vous savez que nous sommes prêts.

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La direction que prend l'esprit public doit surtout rassurer les gens timides sur les projets des agitateurs. Un grand nombre de sections manifestent hautement la résolution d'écraser l'anarchie, et ont commencé par la terrasser dans leur sein. La section de la Butte-des-Moulins a tellement mis à la raison ses anarchistes, que leur plus cruel ennemi, Collin, dont nous avons eu plus d'une fois occasion de parler, a été nommé président à une très-grande majorité. Le prêtre Chasles, qui avait été dans cette section prêcher le sansculottisme, sa belle tabatière d'or à la main, et paré de brillantes breloques, a été reçu de manière à ne plus se présenter. ›

CONVENTION.

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Séance du 16 mai.

Les nouvelles de la Vendée annoncent que les rebelles sont contenus et seront bientôt attaqués.

Tenière dénonce que cette nuit, quarante hommes ont été arrétés et jetés dans un cachot, à l'Abbaye, ainsi qu'un juge de

paix de la section de l'Unité, qui a signé, comme président, l'arrêté de cette section contre Chaumette, procureur de la commune. Ténière se rend garant de la probité et du civisme de ce magistrat. L'affaire est renvoyée ?" comité de législation.

Bouchotte écrit que les charretiers de l'armée sont sujets à abandonner leurs convois quand ils craignent l'approche de l'ennemi, et lui livrent ainsi nos munitions. Il propose de prendre des charretiers dans les commissions de volontaires.

Bourdon annonce que le comité de surveillance vient de faire arrêter quatre aristocrates qui s'étaient faits charretiers de l'artillerie. Ce sont les nommés Brissac, Ségur, Valdi, et le ci-devant comte de Lamberty; ils sont à l'Abbaye. La proposition de Bouchotte est adoptée.

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Le reste de la séance est employé à la discussion de différens projets tendans à établir des règles uniformes dans la taxe révolutionnaire que les départemens commencent à lever, et à empêcher l'abus des sommes qui en proviendront.

Séance du soir.

On procède à la nomination d'un président. Sur 334 voix, Isnard en réunit 202; il est proclamé président. Les secrétaires sont Fauchet, Duprat jeune et Poulain-Grandpré.

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Le procureur de la Commune rend compte de la conférence qui a eu lieu ce matin à l'évêché, en vertu d'un précédent arrêté. Il annonce que le département ne s'y est pas rendu, excepté l'un de ses membres, le citoyen Defourny, et que l'on s'est ajourné à dimanche prochain pour prendre une détermination definitive sur l'emprunt forcé. Il présente ensuite un projet d'arrêté qui a été rédigé dans la réunion civique de ce matin. Le conseil-général l'adopte en ces termes :

1o Les sections sont invitées à nommer chacune trois membres, à l'effet de se trouver à l'assemblée générale indiquée en la salle des electeurs, à l'évèché,

2o Ces trois citoyens seront choisis, l'un par l'assemblée générale de chaque section, et dans son sein; l'autre par le comité révolutionnaire; et le troisième par le comité civil, et pris parmi les membres qui composent lesdits comités.

3° Cette assemblée est convoquée à l'effet de discuter sur les moyens les plus prompts, les plus sûrs et les plus uniformes à prendre pour la levée de l'emprunt forcé, sur le lieu du dépôt des sommes qui en proviendraient, et à l'effet de convenir par qui et comment elles seront administrées et régies; enfin, prendre des mesures pour que cet emprunt ne porte que sur les riches, et des moyens pour ménager le plus possible la classe simplement aisée, qui a fait des sacrifices pour la révolution.

Leclerc, député de Lyon, qui s'est déjà présenté à une précédente séance, pour faire part de la demande formée par son département d'un comité révolutionnaire, se présente de nouveau au conseil, et se plaint de la manière dont l'ont traité les journalistes. Il donne quelques explications sur ce qu'il a déjà dit. Il annonce que, quoique le conseil lui ait adjoint des commissaires, il n'a pas cru, vu la disposition des esprits, devoir se présenter à la Convention.

Il ajoute qu'on a le projet d'égorger les patriotes, se plaint de la faiblesse de quelques Montagnards, et termine en disant qu'il n'y a qu'un seul moyen de sauver la République: qu'il faut que le peuple se fasse justice, parce que la justice habite toujours au milieu du peuple, et qu'il ne se trompe jamais.

Une lettre de la municipalité de Versailles annonce que dans cette ville, les enregistremens volontaires se font toujours avec la plus grande activité; que l'on a peine à suffire aux inscriptions; que déjà la majorité des sectious a fourni son contingent, qu'aucune n'a tiré au sort pour le fournir ; que depuis deux jours on a été témoin des actes d'un dévoùment dont les républicains seuls peuvent donner l'exemple; qu'enfin l'on ne saurait peindre à quelle bauteur est en ce moment l'esprit public à Versailles.

PRESSE.

Le journal de Marat du mardi 16 mai nous fournit deux extraits, dont l'un est seulement curieux, et dont l'autre est un document plein d'intérêt. Le premier est une circulaire écrite par Chambon (1) pendant qu'il remplissait les fonctions de secrétaire de la Convention nationale; il avait fait partie du bureau formé le 18 avril 1793, époque de la présidence de Lasource. Le second est une lettre de Hoche.

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Voici la lettre de Chambon avec les commentaires de Marat. Le sommaire de sa feuille commence ainsi L'ane Chambon, secrétaire de la Convention nationale. Dans le corps du journal, et en tête même de la lettre qu'il va transcrire, Marat s'écrie, à la manière des démonstrateurs de la foire: Messieurs et dames! voici l'âne CHAMBON! Puis vient la lettre dont il s'agit, et qui est rapportée de la sorte:

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Paris, ce 28 avril, etc. Recevez, citoyen, quelques imprimés que vous serez bien aise de connaître. Notre situacion ‣ intéresse trop la République entiaire pour que des adminiștra› teurs patriotes n'y prenne bien le plus vif intérêt. Lisez sur⚫ tout le tableau fidèl de la conspiracion des 10 et 11 mars; notre › situacion n'a pas changée; les orages se sucsaident icy, et si les départemens, à l'exemple de la Gironde, ne se révellient > pas, s'en est fai, nous n'aurons pas de gouvernement. J'aurais › bocoup de chosse à vous dire; mais le temps presse, et je vous quite. Vautre concitoyen, CHAMBON. >

⚫ Observez seulement que les adresse des départemens nous ⚫ arrivent en foulle; mais l'intrigue ne permet pas de les lire à

(1) Il y a eu quatre individus du nom de Chambon qui ont joué un rôle dans la révolution française: Chambon, médecin, maire de Paris après Pétion, et remplacé par Pache; Chambon, capitaine au 8o régiment de hussards, et qui se distinguą dans la guerre de la Vendée, où il fut tué; Chambon, député du Gard à la Convention, qui figurera dans les massacres du midi, lors de la réaction thermidorienne; enfin Chambon, député de la Corrèze à la Convention, pro scrit au 31 mai, et, peu de temps après, égorgé à Luberzal, dans une grange, c'est de lui qu'il s'agit ici. (Note des auteurs.)

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