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des trente têtes de Genève, pour ce qui en appartient aux Lyonnais, demeurent provisoirement suspendus.

6. Les particuliers non domiciliés à Lyon, qui y sont maintenant, seront tenus d'en sortir, et de se retirer dans leurs domiciles respectifs, sous trois jours. Après ce délai, ils seront regardés comme complices des conspirateurs et poursuivis comme tels. Leurs biens seront provisoirement mis en séquestre.

> 7. Les représentans du peuple près l'armée des Alpes sont chargés de remplacer provisoirement les fonctionnaires destitués et de prendre toutes les mesures qu'ils croiront nécessaires pour rétablir l'ordre dans la ville de Lyon et assurer la prompte exécution du présent décret.

8. La Convention nationale invite tous les bons citoyens du département de Rhône et Loire à se réunir à la force armée et à concourir, avec elle et les représentans du peuple, à la défense de la liberté et de l'égalité, et au maintien de l'unité et de l'indivisibilité de la République. ›

Second décret. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de salut public, décrète que tous ceux qui seront convaincus d'avoir arrêté et de retenir à Lyon des convois militaires destinés aux armées de la République, seront punis de mort.

D

Approuve les mesures prises par le département de Saôneet-Loire, qui, dans des vues patriotiques, a arrêté mille fusils, devant passer par la ville de Lyon pour être transportés à Perpignan, et charge le ministre de la guerre de faire parvenir à leur destination, par des voies promptes et sûres, les fusils et autres armes et munitions qui pourraient encore arriver.

Autorise, en outre, le département de Saône-et-Loire, à Jever une force armée suffisante pour se mettre en sûreté contre les rebelles de la ville de Lyon et pour la défense de la République, une et indivisible.

› La Convention nationale nomme pour commissaires dans les

départemens de Saône-et-Loire, de Rhône-et-Loire et de l'Ain, les citoyens Reverchon et Laporte. »

Le 15, la Convention offrit un spectacle inaccoutumé. Neuf habitans d'Orléans avaient été condamnés à mort par le tribunal révolutionnaire pour tentative d'assassinat sur la personne de Léonard Bourdon; nous avons rapporté ce fait à sa date (mars 1793). Les condamnés devaient subir leur sentence dans le jour. A la séance du matin, leurs femmes et leurs enfans vinrent se prosterner à la barre de l'assemblée et implorèrent un sursis avec larmes et sanglots. A la séance du soir, les sœurs de Léonard Bourdon demandèrent à être entendues pour le même motif. La Convention passa à l'ordre du jour par la considération qu'il fallait entourer d'une sauve-garde imposante la vie des commissaires qu'elle envoyait dans les départemens, et qu'en outre le Code pénal ne déléguait pas le droit de faire grâce. On fit remarquer aussi combien l'instruction de ce procès avait été dirigée avec modération et justice; sur treize accusés quatre avaient été absous.

Le 14 devait être un jour de fête. Dans la séance du 4 juillet, la Commune avait porté l'arrêté suivant, que nous transcrivons de la Chronique de Paris, n. CLXXXVII.

Le conseil-général arrête qu'il se rendra, dimanche 14, à la Convention nationale, pour lui remettre le vœu du peuple de Paris sur la Convention, et que les quarante-huit sections seront invitées d'y envoyer des commissaires pour assister à la remise des procès-verbaux qui constatent ce vou. Le conseil désirant remplir cette auguste fonction avec toute la pompe qu'elle mérite; mais considérant en même temps que les législateurs ont confié la constitution aux vertus des citoyens, et que la vertu doit commander aux hommes par conviction, et non par la force des armes, a cru devoir éloigner du cortége tout appareil militaire, et n'employer la force armée que pour ouvrir et fermer la marche de ce cortége qui sera composé ainsi qu'il suit :

› Un détachement de cavalerie. - Tambours. - Un détache

ment d'infanterie. La statue de la liberté, posée sur un brancard drapé aux couleurs nationales, et porté par des hommes robustes, vêtus à la grecque. Chaque section figurera dans la marche selon l'ordre numérique établi par le règlement municipal; elle sera représentée par des députés nommés par l'assemblée générale. En avant du groupe que formera chaque section, sera portée une enseigne marquée du nom et du numéro de la section. A la suite de la vingt-quatrième section, sera porté un gros faisceau de piques réunies à leur sommet par un cercle fond azur, liseré de filets rouges et blancs, bordé de feuilles de chêne, sur lequel sera écrit, VILLE DE PARIS, et d'où partiront quarante-huit rubans tricolores portant chacun le nom d'une section: les vingt-quatre autres suivront dans le même ordre que les premiers. — Un groupe de femmes prises dans toutes les sections; elles seront vêtues de blanc et porteront une ceinture aux couleurs nationales; ce groupe sera précédé d'une bannière avec cette inscription: Citoyennes, donnez des enfans à la patrie, leur bonheur est assuré. L'acte constitutionnel sera porté par une Minerve, symbole de toutes les vertus qui ont présidé à sa rédaction et à son acceptation; cette statue sera placée sur un brancard drapé aux couleurs nationales, et portée par des hommes vêtus suivant le nouveau costume français; ce brancard sera entouré de vieillards tenant des enfans par la main.

› On y distinguera la fille de Lajouski, enfant de la Commune, et le jeune Gilbert, enfant de la République. En avant de ces groupes sera une bannière sur laquelle on lira : Heureux enfans, jouissez de ses bienfaits; nous soupirâmes longtemps après elle!

› Grand corps de musique. - Groupe de peuple manifestant son allégresse par des danses. - Le conseil-général. Au mi— lieu des membres du conseil seront portés, sur un brancard drapé aux couleurs nationales, les procès-verbaux des quarantehuit sections qui constatent leur vou sur la Constitution ; ce brancard sera porté par des citoyens vêtus suivant le costume. proposé par David; il sera précédé par une bannière portant

pour inscription: Procès-verbaux des quarante-huit sections. La marche sera fermée par un détachement de cavalerie. Le cortége se rendra à neuf heures du matin à la maison commune ; il partira à dix heures de la place de Grève, suivra les quais, les rues du Roule, Saint-Nicaise, Saint-Honoré et la place de la Fraternité. ›

Un événement imprévu changea cette fête en scènes de deuil. Le 13, à sept heures du soir, au moment où les sœurs de Léonard Bourdon se présentaient à la Convention pour obtenir la grâce des assassins de leur frère, Marat était poignardé par Charlotte Corday.

Depuis le 31 mai Marat n'avait paru à la Convention qu'un petit nombre de fois. Le 2 juin, il avait fait excepter du décret d'arrestation, d'abord prononcé contre eux, Fonfrède, Ducos, Saint-Martin, Dussaulx et Lanthenas. Le 3, il avait écrit qu'il se suspendait de l'exercice de ses fonctions jusqu'après le jugement des représentans accusés. Le 6, il demanda, par une lettre, que l'assemblée décrétât la mise en liberté des patriotes incarcérés à Marseille, à Lyon et à Grenoble, où, disait-il, la contrerévolution venait d'être opérée. Il reprit ses fonctions le 17. Dans cette séance il parla pour biâmer la manie des amendemens : « Lorsqu'un plan de constitution, dit Marat, a été médité par des hommes éclairés bien intentionnés, je crois qu'on ne peut y toucher sans le gâter; et j'ai toujours comparé ces faiseurs d'amendemens à un spectateur qui, voyant une belle tête, en ôterait un œil pour y placer un doigt. Le lendemain il fit à la tribune les dénonciations suivantes : « Il y a trois mois que je vous ai dénoncé le général Ligonier, infàme suppôt de biribi, que le traître Beurnonville a placé à la tête d'une armée. C'est lui qui est l'auteur de la défaite de nos troupes auprès de Saumur. A la nomination des quatre députés qui demandèrent à aller à la Vendée, parmi lesquels étaient Lecointe-Puyraveau et Duchâtel, je dis que c'était une conspiration. Il est certain qu'ils ont soufflé la révolte dans les départemens. Vous avez décrété d'accusation Duchâtel, il faut lancer le décret d'arrestation con

pu

tre les trois autres. Je vous ai dénoncé Westermann, agent de Dumourier, accusé de bassesses et de pillage, homme infâme qu'il voulait faire émigrer avec lui, et que le comité de salut blic a maintenu à la tête des troupes; Dumourier part de Bruxelles avec trois mille émigrés pour se rendre à la Vendée. Je demande un décret d'arrestation contre Westermann et Ligonier; je demande le rappel de Jard-Panviller et Lecointe-Puyraveau dont les sentimens inciviques sont bien connus; je demande l'arrestation de Coustard et de Carra; ce dernier est convaincu d'avoir favorisé l'évasion de Quétineau. Je demande la destitution de Menou. Robespierre appuya le rapport des commissaires; quant aux mesures qui concernaient les généraux, il en fit renvoyer l'examen au comité de salut public. Ce fut là la dernière fois que Marat parla dans la Convention. Le 12 juin, il écrivit la lettre suivante :

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< Citoyens mes collègues, une maladie inflammatoire, suite des tourmens que je me suis donnés sans relâche, depuis quatre années, pour défendre la cause de la liberté, m'afflige depuis cinq mois et me retient aujourd'hui dans mon lit. Dans l'impossibilité où je suis de me rendre à la Convention, je vous prie de faire donner lecture de l'incluse; elle vous convaincra de la nécessité de mander sans délai Challier à votre barre, non-seulement pour le soustraire à la férocité des aristocrates de Lyon, mais encore pour en tirer des renseignemens sur les causes des troubles de cette ville; j'en fais la demande expresse. Je demande aussi que Lassel, procureur de la commune de Lyon et signataire de l'incluse, y soit pareillement mandé. Je demande encore que vous rendiez, contre le tribunal populaire de Lyon, le même décret que vous avez rendu contre celui de Marseille. Enfin, je demande que la permanence des sections soit supprimée dans toute la République ; cette permanence est le principe et la cause des désastres arrivés depuis peu dans plusieurs grandes villes de l'état; car les riches, les intrigans et les malveillans, courent en foule aux sections, s'en rendent maîtres et y font prendre les arrêtés les plus liberticides; tandis que les journaliers, les ou

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