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peu élevées, pouvant fournir des feux très-efficaces. Toutes les rues perpendiculaires à cette ligne de défense étaient coupées par des barricades précédées de fossés et armées de canon; ces barricades se répétaient dans chaque rue de deux cents en deux cents mètres.

On découvrait, en outre, en arrière, un vaste réduit formé au moyén de couvents reliés entre eux, et entourant la cathédrale. En présence de renseignements de cette valeur, tous les hommes compétents furent d'avis de ne pas tenter une attaque condamnée à l'insuccès, et devant user ce qui nous restait de munitions, augmenter l'ambulance d'un nombre considérable de blessés, et partant nous exposer à un désastre.

Cependant il nous restait un espoir c'est que l'ennemi vînt nous attaquer. Notre présence devant Puebla, à la suite de notre infortune,— véritable défi jeté à l'armée mexicaine, avait pour but de l'attirer en plaine. Mais, sans doute poursuivi par le souvenir de nos soldats arrivant à force d'audace jusque sur le parapet de Guadalupe, Saragoza hésita à mettre son armée aux prises avec moins de 5,000 Français. Heureux autant que surpris de sa victoire, il craignit de compromettre l'éclat des lauriers mexicains dans une lutte en rase campagne contre ceux qu'il se plaisait à proclamer les premiers soldats du

monde", et au sujet desquels Bériozabal, dans son ordre du jour à ses troupes, disait : « Vous << avez combattu les premiers soldats de l'époque, et vous êtes les premiers qui les ayez << vaincus. »

Après trois jours passés devant Puebla à attendre vainement le général Marquez, le général de Lorencez donna l'ordre de lever le camp.

Le 8 au soir, après une marche effectuée lentement, dans le but d'éviter à nos blessés des secousses douloureuses, la petite division française s'arrête au village d'Amozoc et y établit son camp. Quatre jours à peine viennent de s'écouler depuis le moment où, joyeuse et pleine d'espoir, elle s'élançait sur la route de Puebla; cependant combien cette nuit nous semble éloignée de celle que des songes trompeurs avaient animée d'une si douce clarté! Les riantes visions dorment dans le passé; des souvenirs récents et douloureux ont pris leur place à notre chevet; et, si notre esprit retourne encore vers Puebla et va jusqu'à errer autour de Guadalupe, cette fois, ce n'est plus une pensée de gloire ou de conquête qui le guide là-bas, reposent les camarades morts en défendant l'honneur du drapeau.

Après deux jours consacrés dans Amozoc au repos des malades et à la réorganisation des

moyens de transport, le général Marquez n'ayant pas paru, la retraite continue. Nous séjournons à Tepeaca le 12, à Quetcholac le 13; en arrivant à Palmar, le 14, nous cernons le village et faisons prisonnier un peloton des lanciers de Carbajal. Puis nous abandonnons les terres froides. Sans cesse la pelle ou la pioche à la main pour combler les profondes coupures ou renverser les obstacles qui entravent leur marche, sans cesse sur le quivive, s'arrêtant ici pour surveiller les manoeuvres de l'ennemi, se formant plus loin pour être prêts à le repousser, les Français descendent lentement ces mêmes Cumbres, naguère témoins de leur ascension victorieuse, et dont le silence majestueux n'est aujourd'hui troublé que par le bruit de leurs travailleurs. Orizaba est leur objectif. Cette reine des terres tempérées est à égale distance de Vera Cruz et de Puebla. Par la haute chaîne de montagnes qui l'enceint de toutes parts, par l'importance de sa position, qui, à cheval sur la route de Mexico, barre littéralement la vallée d'Orizaba, cette ville est, depuis le début de la campagne, notre seconde base d'opérations; c'est dire qu'elle est pourvue d'une garnison, d'un hôpital et de magasins. C'est là que doit se terminer, à la gloire du corps de Lorencez, cette lutte que la France soutient avec trois régiments d'infanterie, un bataillon de marins, un bataillon

de chasseurs à pied, trois batteries d'artillerie et un escadron de cavalerie, contre un pays que défendent les obstacles naturels les plus formidables, les maladies les plus cruelles, environ 25,000 hommes de troupes régulières, une nuée de guerrilleros habitués à vivre et à combattre dans les terres chaudes, contre un pays enfin dont l'arme la plus sûre est sa haine pour l'inter

vention.

CHAPITRE XI

Le général Marquez débouche de la montagne sur le plateau

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Le géné

Admi

d'Aculcingo. Combat de la Barranca Seca. ral de Lorencez accourt avec une colonne légère. rable attitude de la garnison de la Vera Cruz et de la marine. Le colonel Hennique reprend au général de La Llave les positions du Chiquihuite. Les communications avec la Vera Cruz sont rétablies. Difficulté d'approvisionner le corps expéditionnaire. Arrivée du général

Lettre

F. Douay, nommé commandant en second au Mexique. Un de nos convois détruit dans les terres chaudes. Saragoza paraît dans la vallée du Rio Blanco. du général Ortega à M. de Saligny. au général de Lorencez. Réponse du commandant du corps expéditionnaire. Orizaba mis en état de défense.

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- Lettre de Saragoza

-

- L'armée mexicaine devant Orizaba.

Cependant Marquez, annoncé depuis longtemps, a fini par se frayer un chemin jusqu'à nous. Après s'être séparé de Zuloaga, général conservateur rallié au gouvernement de Juares, tant d'autres chefs,

comme

depuis notre débarquement au Mexique, Marquez, le seul qui, avec le général Mejia, eût répondu à l'appel du général

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