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ment épris de la charmante Carmencita, et du reste encouragé par elle et sa famille, le jeune officier s'était laissé doucement entraîner dans le sentier fleuri qui devait aboutir à une union légale.

Les démarches de rigueur avaient été faites, l'autorisation ministérielle demandée, et la recherche du jeune Français avait eu pour conséquence immédiate d'éloigner les novios qui forment habituellement le cortège de toute jeune Mexicaine c'est le cadre obligé du joli tableau.

Or, il advint que les autorisations de France ayant été accordées, l'officier demanda à fixer le jour de la cérémonie dans le plus bref délai possible. La famille y consentit avec empressement; mais quel ne fut pas l'étonnement du fiancé en apprenant par la mère qu'elle était bien aise de hâter le mariage de Carmencita, afin de le célébrer le même jour que celui de sa sœur!

Comme le lieutenant n'avait vu aucun prétendant assiéger sérieusement le cœur de sa future belle-sœur, la gracieuse Conception, Concita de son petit nom, il demanda des explications, et il apprit qu'un certain don Luis était le promis en question, et que ce don Luis était tout simplement... son ordonnance, cavalier au demeurant très-bien planté et d'agréable figure. Seulement, comme le disait la mère, le mariage était urgent

pour Concita, car le cavalier avait été, paraît-il, beaucoup plus entreprenant que son officier.

En présence de cette situation, le lieutenant demanda et obtint immédiatement d'être envoyé en détachement à Cordova.

Quant à don Luis, libéré du service peu de temps après, il fut autorisé à se fixer au Mexique, y épousa Concita et s'y fit des rentes.

Les maisons au Mexique ont beaucoup de rapports, quant à leur disposition intérieure, avec les maisons mauresques. Presque toutes possèdent une cour intérieure avec galerie sur laquelle ouvrent toutes les pièces. Cette cour porte le nom de patio. Chez les gens riches le patio se transforme en jardin ou huerta. Dans les grandes villes, comme Puebla et Mexico, les maisons ont un étage, dont la disposition est la répétition exacte du rez-dechaussée. Elles occupent une assez grande superficie; les fenêtres du rez-de-chaussée sont larges, hautes, munies de grilles en fer ou en bois, et font saillie extérieurement.

Point de vitres dans les terres chaudes; rien que de grands et solides volets en bois au milieu desquels s'ouvre un petit volet servant à éclairer l'appartement pendant les chaleurs de la journée, chaleurs qui obligent à tenir les grands volets clos.

Une allée cochère, saguan, fermée aux deux extrémités par une grille, conduit au patio.

Rien de plus simple que l'ameublement d'une maison mexicaine, dont le brazero traditionnel et le plateau de cuivre chargé de papier et de tabac à fumer forment, dans ce pays où tout le monde a la cigarette aux lèvres, des objets de première nécessité. Cette simplicité se retrouve dans la nourriture, dont la médiocrité fait un singulier contraste avec la richesse du service de table. On en pourrait trouver la raison dans la sobriété du Mexicain, qui mange et boit

peu.

Le Mexicain boit rarement pendant ses repas, presque toujours avant ou après.

Il remplace volontiers le pain par la tortilla, crêpe de farine de maïs très-mince, très-sèche, assez fade, et dont on relève le goût par une couche de chile, piment doux, qui est le condiment obligé de la cuisine du pays.

Toutes les Mexicaines savent confectionner la tortilla, à condition d'avoir un outillage spécial, c'est-à-dire un metale, bloc de granit porté par quatre pieds courts de 25 à 30 centimètres de haut, légèrement concave et incliné, un rouleau de granit, une alla, vase plein d'eau bouillante dans laquelle on fait mollir le maïs, une calebasse destinée à recevoir

la pâte, et le comal ou plateau de terre rouge placé sur un petit fourneau en terre, à feu trèsdoux.

Agenouillée sur une natte, la femme prend dans la alla une poignée de maïs qu'elle place sur le metale, et qu'elle écrase avec le rouleau. Aussitôt le maïs réduit en pâte, elle pétrit cette pâte entre ses mains et en fait des galettes, larges comme le fond d'une assiette, épaisses comme une feuille de papier, qu'elle jette dans le comal; en quelques secondes la crèpe est cuite.

Ce n'est pas autrement que les tortillas se fabriquent sur les places publiques. Les marchandes, assises sur leurs talons, drapées dans leurs rebozos, attendent patiemment que la pratique vienne vider leur chiquichuite, corbeille qui contient les tortillas enduites de chile, pendant que, près d'elles, les marchands d'aqua fresca et de heladas installent sur un tréteau, ombragé par une vaste ombrelle, leur marchandise fleurs, fruits, boissons de toutes sortes mélangées à de la neige du pic d'Orizaba.

Le fond de l'alimentation mexicaine se compose du pulchero ou pot-au-feu de veau, de boeuf, de mouton, de porc frais, de volaille. On mange peu de gibier et peu de poisson. Le fricoles, petit haricot rouge, accompagne toujours les ragoûts; c'est le légume national, comme la tortilla et le

MARCHANDE DE TORTILLAS

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