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pêcher la publication de tout ouvrage qu'elle ne voudrait pas laisser paraître. Elle pouvait empêcher qu'on ne trouvât d'imprimeurs; car ils étaient tous dans sa dépendance; elle pouvait empêcher d'imprimer en refusant le récépissé de déclaration; elle pouvait empêcher de publier en refusant le récépissé de dépôt ; elle pouvait faire saisir l'ouvrage, soit avant la publication, soit avant ou pendant l'impression; et après l'avoir saisi, rien ne l'obligeait d'en poursuivre l'auteur ou l'imprimeur; enfin, s'il lui plaisait de poursuivre, elle trouvait dans des lois de circonstance des moyens presque assurés de faire considérer l'ouvrage comme criminel, et de le faire supprimer judiciairement : tel était l'état de la législation sur la liberté de la presse, quand a été présentée aux chambres la loi relative aux écrits saisis. Voyons quelles sont les dispositions de cette loi.

Elle veut que, lorsque le gouvernement fait saisir un ouvrage, « l'ordre de saisie et le procès>> verbal soient, sous peine de nullité, notifiés, » dans les vingt quatre heures, à la partie sai>> sie.

» Celle-ci peut

alors former son opposition à la

» saisie, et en ce cas,

le procureur du roi doit

>> faire toute diligence pour que, dans la huitaine,

» à dater du jour de l'opposition, il soit statue » sur la saisie.

» Et si, ce délai de huitaine expiré, la saisie » n'est pas maintenue par le tribunal, elle de» meure de plein droit périmée et sans effet; et » tous dépositaires de l'ouvrage sont tenus de le » remettre au propriétaire.

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Telle est la loi. On voit qu'elle n'a rien changé à la législation existante sur la liberté de la presse. Seulement, elle a ouvert un recours contre une partie des abus auxquels cette législation peut donner lieu. Elle n'a pas affranchi les imprimeurs. de la dépendance où ils se trouvent ; elle ne les a pas dispensés de la formalité de la déclaration. et du dépôt; elle n'a pas déterminé le délai dans lequel l'administration serait tenue de leur donner le récépissé de leurs déclarations et de leurs dépôts; elle n'a pas dit quel recours ils auraient contre elle, si elle refusait de les leur délivrer; elle ne lui a pas enlevé le droit de saisir les ouvrages avant qu'ils soient publiés, même avant qu'ils soient imprimés; elle a ser lement offert aux auteurs et imprimeurs des livres saisis, un moyen de revendiquer en justice leur propriété, un moyen d'obtenir main levée de la saisie lorsqu'ils trouveraient qu'elle a été faite sans motifs valables. Ce moyen suffit-il à son objet ? La loi,

dans l'état où elle a laissé les choses, met-elle les auteurs et imprimeurs véritablement à même de retirer des mains de l'administration tout écrit injustement saisi? Telle est la question qu'elle présente à examiner. Nous allons nous servir, pour y répondre, des débats auxquels la loi a donné lieu à la chambre des pairs; elle n'a pas été discutée à la chambre des députés.

M. Abrial, rapporteur de la commission que la chambre des pairs avait chargé d'examiner le projet de loi, s'est appliqué, dans son rapport, à montrer comment on pourrait la faire exécuter.

« On a dit d'abord, a-t-il observé, que la loi ne déterminait pas le tribunal devant lequel on devait se pourvoir pour faire juger l'opposition.

» Il est vrai que la loi ne s'explique pas à cet égard; mais était-il nécessaire qu'elle le fit? Par cela même que la loi ne la loi ne spécifie rien sur le tribunal qui doit connaître de la saisie, elle s'en réfère aux règles générales qui fixent la compétence des tribunaux.

» Cette compétence elle-même varie suivant la nature et la gravité des cas. Tantôt un simple tribunal de police correctionnelle est suffisant, tantôt il faut passer par la filière de l'instruction

criminelle. Vous allez voir, Messieurs, tout à l'heure, l'application de ces principes.

» La saisie qui est prononcée dans l'article 15 de la loi du 21 octobre 1814, est motivée ou par de simples contraventions à la police réglementaire de la presse, ou par la dénonciation aux tribunaux, de l'ouvrage, à raison de son contenu..

» Les simples contraventions à la police réglementaire de la presse, sont du ressort de la police correctionnelle. C'est à l'observation de ces réglemens que se rapportent les deux premiers paragraphes de l'art. 15 de la loi du 21 octobre 1814: Il y a lieu à saisie et à sequestre d'un ouvrage, » 1°. si l'imprimeur ne représente pas les récé

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pissés de la déclaration et du dépôt ordonné » en l'art. 14; 2°. si chaque exemplaire ne porte le vrai nom et la vraie demeure de l'imprimeur.

» pas

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>> Non-seulement la loi du 21 octobre 1814 autorise la saisie d'un ouvrage en pareilles circonstances, mais elle prononce encore des peines correctionnelles contre les coupables; elle les condamne à des amendes qui, suivant les cas, vont depuis 1000 jusqu'à 6000 francs.

» Enfin, l'art. 21 ne laisse

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pas d'équivoque Il dit : « Le ministère public poursuivra d'office

» les contrevenans pardevant les tribunaux de

» police correctionnelle, sur la dénonciation du » directeur général de la librairie, et la remise » d'une copie des procès-verbaux. »

» Le tribunal qui doit connaître de la saisie en matière de contravention aux réglemens de la presse, est donc bien déterminé. C'est le tribunal de police correctionnelle. Il statue alors sur cette matière, non-seulement par la nature des faits qui sont véritablement correctionnels, mais encore par l'attribution spéciale que lui donne l'art. 21 de la loi du 21 octobre 1814, comme il fait en matière forestière.

» Mais lorsque la saisie a lieu à raison de délits ou crimes commis dans un ouvrage, délits ou crimes qui auraient entraîné la dénonciation de l'ouvrage aux tribunaux, c'est une autre marche à suivre.

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Lorsqu'il s'agit de délits ou crimes, et en général de matières graves, l'instruction est déférée à un juge qu'on appelle juge d'instruction. Celui-ci recueille tous les renseignemens sur le délit, interroge le prévenu et rend compte de l'affaire à la chambre du conseil.

» Cette chambre du conseil est composée de trois juges au moins, y compris le juge d'instructous pris du tribunal de première instance. » Lors donc qu'un ouvrage est inculpé de

tion,

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