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à Bordeaux, où il dirige une confrérie très-nombreuse. Un de ces établissemens, formé par cet ecclésiastique dans la ville d'Agen, était devenu, dès l'année dernière, un sujet de dissensions et de trouble.

Il y a plusieurs années que ces missionnaires ant propagé les confréries sur les deux rives de la Loire, et en Bretagne. Il est peu de communes, dans le département d'Ille-et-Vilaine, qui n'en ait au moins une ; on en comptait trois dans la ville de Rennes, vers la fin de 1816. Vers la même époque, le nombre des congréganistes s'élevait à plus de six cents. Ils se sont prononcés, avec beaucoup de force dans les dernières élections, contre l'ordonnance du 5 septembre. Ceux de la Bretagne n'ont montré ni plus de sagesse. ni plus de modération. En ce moment, les missionnaires s'introduisent en Normandie, et font circuler des imprimés.

Il paraît certain que, depuis leur apparition dans certaines provinces, les liens qui, en unissant les familles, contribuent si essensiellement au maintien de l'ordre et au repos public, semblent se relâcher au lieu de prendre une nouvelle force. Quelques-uns d'entre eux ont eu jusqu'ici la dence de s'abstenir de toucher aux matières litiques; d'autres déploient un zèle qui ne con

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naît point de bornes, et dont les effets peuvent devenir très-dangereux.

Sur quelques points de la Bretagne, ils ont porté l'exaltation jusqu'à frapper d'anathème les prêtres constitutionnels, les époux qu'ils ont mariés, les enfans qu'ils ont baptisés, enfin les pécheurs qui ne viennent point à leur tribunal faire une confession générale. A Rennes, M. l'abbé D..... a prêché dans ce sens. Ils ont aussi parlé en chaire des biens mal acquis qu'il· fallait rendre absolument, etc.

Deux traits suffiront pour caractériser la conduite de ces ecclésiastique. A Orléans, le proviseur du lycée, homme d'une rare piété, crut devoir, dans l'intérêt de cet établissement et de la religion, inviter le chef des missionnaires à honorer le collége de sa présence. Il obtint pour toute réponse, qu'ils s'étaient interdit l'entrée des lycées et des lieux de prostitution, dont ils regardaient la conversion comme également impossible.

On devait donner une représentation dans cette ville, au profit des indigens. Les missionnaires ayant menacé de refuser l'absolution à ceux qui se proposaient de contribuer à cette œuvre de charité, les femmes en furent effrayées, la salle de

meura déserte, et les malheureux n'ont point été

secourus.

A Tours, il s'était formé pendant l'interrègne, comme dans plusieurs autres villes de France une association secrète qui s'est reproduite après le retour du roi; les principaux membres de cette société se sont empressés de visiter les missionnaires à leur arrivée : ils ont eu avec eux de fréquentes réunions dont le résultat a été la formation d'une congrégation désignée sous le titre de sacré cœur de Jésus. On y reçoit des hommes et des femmes, et ce qui semble indiquer que cette dernière société est bien la suite de la première, c'est qu'elle est dirigée par les mêmes chefs. Ils entretiennent des correspondances très-étendues, et on peut juger des effets d'un tel établissement.

De semblables associations se sont formées sous les auspices des missionnaires dans quelques au→ tres villes, et particulièrement à Orléans, à Nanà Angers, à Beauvais, à Poitiers. Elles paraissent uniquement consacrées à des œuvres de bienfaisance; cependant on a quelques raisons de croire qu'il s'y mêle quelque but politique.

tes,

Après leur départ de Tours, où les mission naires, au nombre de neuf, parmi lesquels on remarque MM. J....n et F...t prêchaient quatre

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fois par jour, confessaient continuellement et suffisaient à peine à l'empressement du public, une vive douleur s'est manifestée parmi les femmes, et le nom de MM. F...t et J....n était dans toutes les bouches.

Quoiqu'il leur fût interdit de prêcher sur la cérémonie funèbre du 21 janvier, il leur est plus d'une fois arrivé de né tenir aucun compte de cette défense, et l'on a vu à Poitiers M. l'abbé F...t débiter sur ce sujet un sermon plus propre à enflammer les têtes qu'à faire oublier de funestes souvenirs.

Un autre missionnaire nommé E...., s'est signalé à Limoges par son rigorisme et son intolérance. I attirait à ses sermons, qu'il renouvelait trois fois par jour, une grande affluence, et sur-tout beaucoup de femmes; mais il affectait trop d'opposition à l'esprit du siècle pour faire de nombreux prosélytes dans la classe éclairée.

L'ouverture de la mission à Bordeaux avait d'abord excité un enthousiame remarquable qui s'est réfroidi par degrés. Les prédicateurs paraissent avoir gardé plus de mesures dans cette ville que sur plusieurs points de la route qu'ils ont parcourue auparavant. Ils ont cependant trouvé des détracteurs qui ont essayé de les tourner en

ridicule par des chansons. La même chose est arrivée à Rennes.

M. l'abbé de M..... fait en ce moment, à Tou louse, un cours des vérités de la religion chré tienne. Il profite de l'occasion pour déclamer avec violence contre les acquéreurs de biens nationaux. L'année précédente, il s'était permis les mêmes excès.

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A Rennes les missionnaires placent des gendarmes à la porte des églises avec la consigne de ne laisser sortir personne pendant qu'ils prêchent, et quiconque a la curiosité d'aller les entendre est obligé de les écouter jusqu'à ce qu'il leur plaise de finir. On tenterait vainemement jusque-là de leur échapper; quiconque voudrait sortir malgré la consigne, s'exposerait à se faire conduire en prison; plusieurs personnes en ont dait l'expérience. Voici une lettre de là même ville qui fait connaître avec assez de détail la conduite qu'y tiennent ces messieurs.

>> Nous avons ici neuf missionnaires sous la conduite de M. l'abbé Ranzan. Ces révérends pères nous instruisent soir et matin; ils nous parlent par tous les sens: discours, chants, cérémonies extraordinaires, tout est employé pour convertir les pécheurs. La religion y est expliquée d'une manière admirable. Un paradis est préparé pour

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