les enfans morts sans baptême. L'observation des préceptes de la loi naturelle conduit au salut éternel, sans connaître Jésus-Christ, sans même en avoir entendu parler. La grâce est un mot vide de sens, qu'on se garde bien d'expliquer, mais il en résulte que l'homme est tout, dans l'affaire du salut. Joignez à cela force indulgences, chapèlets, via-cruci (via crucis) cœur de Jésus, beaucoup de gestes, grandes exclamations de voix. Vous voyez qu'il serait bien dificile que ville de Rennes résistât à ce que nos prédicateurs appelent place. de grace.

la

» On nous a aussi enseigné que tous les mariages célébrés hors la présence du légitime pasteur étaient nuls, et les enfans qui en provenaient, bâtards. Ces messieurs ne reconnaissent aucun pouvoir dans la puissance temporelle sur cet important contrat, et renvoient comme des rêveurs ceux qui veulent distinguer le sacrement du

contrat.

» Il y aura, de dimanche en huit, une communion générale des hommes; plus il y en aura, de communions, plus la fête sera belle. Aussi on m'a assuré que des pécheurs, de trente à quarante ans de confession, ont reçu, dans un quart-d'heure, le bienfait de l'absolution. En conséquence, rien n'égale l'empressement de ce concours de péni

tens de tout sexe, de tout rang, de tout état et de toute condition. Les prêtres de cette ville, grands admirateurs des missionnaires, se proposent, sur d'aussi grands modèles, d'oublier les maximes que l'on trouve encore dans Collet, sur le délai de l'absolution.

» Rien de plus admirable que la manière d'instruire des missionnaires. On chante beaucoup de cantiques; puis l'on annonce un sujet pour faire passer le temps; l'orateur vous parle de ce qui lui est arrivé à Munich, à Vienne, à Orléans; l'on vous raconte beaucoup d'historiettes, tout cela avec véhémence; et l'on finit par supposer prouvé ce qui n'a pas été mis en question : l'auditoire se retire tout ébahi, étonné de l'éloquence du saint homme.

Mardi dernier, un des missionnaires dit, après la messe, qu'il venait d'avoir une révélation; ce qui fit un effet surprenant sur les cuisinières qui assistaient au saint sacrifice. A la cérémonie de' l'amende honorable, M. de Ranzan sc déclara indigne du sacerdoce, et se dépouilla du surplis avec une grâce digne de Talma. Ce sublime mouvement d'éloquence fut répété au même moment dans les trois autres églises, où l'on jouait le même mélodrame.

» A Saint-Germain, le missionnaire entendant Cens. Europ. Tom. II.

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les hurlemens qui faisaient chorus, au dépouillement du surplis, s'écria: Mes frères, redoublez vos cris, que l'enfer en frémisse. Vous jugez de l'effet que cela fit; aussi on ne s'entendait plus. Le saint sacrement porté, je ne sais où, était un accessoire principal à cette pieuse tragi-comédie.

>> On nous annonce du plus beau pour jeudi; car l'intérêt va toujours croissant. C'est le renouvellement des voeux du baptême : ce sera une séance digne de l'auteur d'Attala, ou plutôt des révérends pères de la Compagnie de Jésus.

>> Si l'on en croit les missionnaires, les cérémonies obtiennent infailliblement le don de la conversion momentanée; car, pour celui de la persévérance, on ne doit pas en parler : un bon peccavi est si aisé à dire !

» Les révérends pères de Sainte-Anne, près Auray, affament tous les colléges des environs; on ne peut être bien élevé, si l'on n'a point été élevé dans la sainte société. Aussi, ils font fortune; l'argent tombe chez eux comme les grâces chez nous; nos missionnaires vendent publiquement, à la porte des églises, des imprimés, tels que des cantiques, des moyens faciles de se sauver, des examens, etc. Tous ces colifichets sont déclarés propriétés des missionnaires; ils en débitent en quantité, et renou vellent à chaque

instant les éditions. Ce que je vous dis est l'exacte vérité; je le tiens des marchands, qui m'ont dit bonnement qu'ils n'étaient que les facteurs de ces messieurs. La semaine dernière, le missionnaire fit jurer fidélité au Roi à tout l'auditoire. Vous voyez qu'ils savent étendre la nécessité du

serment.

» Le séminaire de Vannes est, grâces à Dieu, régénéré; on y a envoyé un lazariste de Poitiers, qui a défendu l'enseignement de l'Ecriture sainte, comme propre à former des hérésies ; il s'est déclaré l'apôtre du Molinisme, même sans aucune mitigation. Il en est de même du Quiétisme.. Cet homme se nomme Lhomond; il a un zèle trèsardent pour vexer les séminaristes qui sont suspects de jansénisme. »

Voici les détails que nous recevons de Bordeaux :

« Les missionnaires font merveille dans notre ville, ils moissonnent abondamment dans la vigne du Seigneur; le renouvellement des vœux de baptême, les amendes honorables et les expiations de toute espèce, sont les fruits qu'ils recueillent dans leurs saintes exhortations. Presque toute notre ville est maintenant convertie. De même que la Santa-Casa de Notre-Dame de Lorette, notre cathédrale est entourée de mar

chands de chapelets, d'agnus et de croix. Hier, dimanche, trois mille communians du sexe másculin ont donné, dans une seule église, des preuves de leur sincère retour dans le sein de la religion de nos pères. Au lieu d'arcs triomphaux et de statues mondaines, nos places publiques voient s'élever du milieu d'elles le signe ineffablë de notre rédemption une croix de quarante pieds de hauteur va décorer celle de Saint-André; nous sommes tous remplis de componction. Une procession solennelle doit avoir lieu vendredi en expiation de nos péchés; nos temples ne désemplissent pas, et si ce n'était le besoin de vivre, nous ne ferions plus que prier. »

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Voilà le peu de faits que nous avons pu recueillir jusqu'ici sur les missions. En voici un de particulier qui, bien qu'étranger aux missionnaires, ne laisse pas que de mériter quelque attention. C'est l'entreprise d'un prêtre qui a porté le zèle pour la religion, jusqu'à tenter une chose que nos lois criminelles punissent de peines infamantes; qui a pour la religion un respect si étendu, qu'il ne reconnaît pas même les droits de la puissance paternelle; qui a voulu, dans l'intérêt de la religion, soustraire à une mère, femme protestante, son enfant mineur, pour en faire un prêtre catholique. Voici le fait tel qu'il