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graduellement au point de comprendre et d'embrasser une religion comme celle que tous les peuples éclairés professent aujourd'hui, c'est qu'il en est un dans l'histoire qui, par des circonstances heureuses et sa propre énergie, s'est affranchi du pouvoir sacerdotal.

Que chacun donc fasse ses réserves, après avoir bien pesé les faits. L'indication des exceptions possibles, qui pourtant ne furent jamais que bornées et partielles, était tout ce qu'exigeait de nous l'impartialité.

Des développements plus étendus auraient interrompu le fil de nos recherches. Nous serons forcés fréquemment, dans le cours de cet ouvrage, de nous en remettre aux lumières de ceux qui nous lisent. Notre tâche est déja suffisamment vaste et difficile, et voulant la remplir sans franchir les limites que nous nous sommes tracées, nous n'avons ni assez de temps ni assez d'espace pour nous livrer aux discussions et aux controverses de détail.

CONSIDÉRÉE

DANS SA SOURCE,

SES FORMES ET SES DÉVELOPPEMENTS.

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LIVRE V.

DU PEU DE POUVOIR DU SACERDOCE CHEZ LES PEUPLES

qui n'ont adorÉ NI LES ASTRES NI LES ÉLÉMENTS.

Magnus ab integro sæclorum nascitur ordo...
Jam nova progenies cœlo demittitur alto.
VIRG. Eclog. IV.

CHAPITRE PREMIER.

Que le peu de pouvoir des prétres, chez les nations étrangères à l'astrolâtrie, est démontré par l'histoire des premiers temps de la Grèce.

CHEZ les nations qui n'ont adoré ni les astres ni les éléments, le sacerdoce n'a possédé

qu'une autorité très-limitée et un ascendant accidentel. Les Grecs en sont la preuve.

Tandis que la sûreté de l'Égypte dépendait en entier de l'exactitude de calculs fondés sur l'astronomie, la position géographique des Grecs leur rendait peu nécessaire l'étude de cette science. Elle ne fut long-temps pour eux qu'un objet de simple curiosité. Le petit nombre d'étoiles dont Homère ou Hésiode font mention, indique des observations encore peu suivies, et des notions plutôt traditionnelles ou importées qu'obtenues par un travail méthodique et spontané. Les progrès des Grecs en astronomie remontent tout au plus jusqu'à la quarantième olympiade, ou à l'origine de la première école ionienne (1), et leurs fables astronomiques ne se trouvent clairement exposées que dans leurs poètes lyriques. Aussi, quoi qu'en dise Platon, qui du reste ne

(1) Plutarque rapporte l'honneur des premières découvertes à Thalès et à Pythagore (de Placit. phil. II, 13. DIOG. LAERCE, Vit. Thal.); DIODORE (I, 62), à Ænopide de Chios; Pline (Hist. Nat. II, 8) et Hygin (P. A. II, 13), à Anaximandre et à Cléostrate.

fait qu'émettre un doute (1), its ne professèrent jamais le culte des astres (2). En consé

(1)« Autant que je puis en juger, les premiers habi<< tants de la Grèce servaient les mêmes dieux que plu<«< sieurs barbares reconnaissent encore aujourd'hui : le soleil, la terre, les astres, le ciel. >> In Cratyl.

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(2) Un passage d'Aristophane confirme pleinement l'opinion que nous émettons ici. «Le Soleil et la Lune,»> dit Trigée à Mercure (Paix, acte 2, scène 3), « divinités des a plus perverses, ont depuis long-temps conspiré contre « nous, et formé le dessein de livrer la Grèce aux Bar« bares. Qui peut,» répond Mercure, « les porter à ce << crime? C'est que nous offrons,» réplique Trigée, « des << sacrifices à Jupiter et aux autres dieux, au liea que les Barbares adressent leurs hommages au Soleil et à la Lune, et c'est pourquoi ces deux astres voudraient que « nous fussions perdus sans ressource, pour que l'empire passåt aux Perses et aux Mèdes. » Les historiens d'Alexandre remarquent que ce prince, après avoir passé l'Euphrate, offrit des sacrifices au Soleil et à la Lune (ARRIEN, III, 7); ce qui indique qu'ils considéraient ces sacrifices comme des hommages rendus par ce conquérant aux dieux du pays, c'est-à-dire à d'autres divinités que celles des Grecs. Le savant Creutzer reconnaît comme nous la différence qu'il faut établir entre les Grecs et les autres peuples de l'antiquité. « Les <«< nations mêmes, dit-il, qui rendaient un culte aux « astres, furent conduites de bonne heure à l'idolâtrie. Que devait-ce donc être chez celles dont la religion

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