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Licences

commerciales.

à un tiers. Les sauvegardes sont des protections particulières accordées à des personnes ennemies ou à des propriétés ennemies, par un belligérant, pour les mettre à l'abri de tout abus de la part de ses propres troupes. Les sauvegardes sont habituellement constituées par une garde de soldats, qui — au cas où on ne les aurait pas rappelés avant que la place à laquelle on les a attachés ne passe sous le contrôle de l'adversaire sont eux-mêmes inviolables et doivent être convenablement traités et renvoyés à leur propre armée. On donne aussi parfois le nom de sauvegarde à la délivrance d'un simple écrit constatant les immunités concédées.1

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§ 214

Il arrive parfois, surtout en cas de guerre navale, qu'un belligérant accorde des

par

Licences de faire le commerce,

qui permettent à leurs bénéficiaires de poursuivre un trafic interdit les lois ordinaires de la guerre ou par la législation de celui qui les concède. Ces licences sont dites générales lorsqu'un État permet le commerce à tous ses sujets, ou à tous les sujets ennemis ou neutres, pour certaines catégories d'articles, ou sur certains marchés. On les appelle spéciales lorsqu'elles ne sont accordées qu'à des individus déterminés, en vue d'un commerce à faire suivant les conditions prescrites par la licence. Les deux catégories de licences affranchissent le commerce qu'elles concernent de toutes les servitudes dont l'affectait l'état de guerre. Les bénéficiaires ont le droit d'ester devant les juridictions du pays qui accorde les licences. Ils peuvent signer des contrats avec les sujets de ce pays dans la mesure nécessaire à l'accomplissement des actes qu'autorise la licence. Les licences générales ne peuvent être accordées que par le gouvernement de l'État. Il en est habituelle

1 Bonfils et Fauchille, Manuel de Droit international public, § 1247.

ment de même pour les licences spéciales; toutefois les officiers qui exercent le commandement en chef, sur terre ou sur mer, peuvent accorder des permissions de faire le commerce ou dans le périmètre sur lequel ils commandent ou avec leurs troupes. De telles licences n'ont cependant pas d'effet en dehors des limites du pouvoir de celui qui les confère. Lorsque le commandant d'une armée d'occupation requiert la population, par voie de proclamation, de lui vendre ce dont il a besoin, il confère implicitement aux personnes requises une licence spéciale de vendre à ses troupes.

Pendant les guerres de la Révolution et du Premier Empire entre la Grande-Bretagne et la France, un très grand nombre de licences furent accordées de part et d'autre. La tentative de Napoléon de ruiner l'Angleterre, en excluant ses objets fabriqués et ses produits coloniaux du marché continental, entraîna une énorme hausse du prix de ces articles dans tous les pays soumis au pouvoir de Napoléon. Des licences furent vendues très cher, et, vers la fin de la guerre, une grande partie des approvisionnements des troupes françaises était d'origine anglaise. La Grande-Bretagne accorda aussi des licences à titre onéreux ou à titre gratuit, et, de part et d'autre, les tribunaux de prises eurent fréquemment à trancher des questions soulevées par leur interprétation ou par les procès auxquels elles donnaient lieu. Étant donnés les changements qui se sont produits, depuis 1815, dans la guerre navale, une grande partie du droit qui se forma alors n'a plus qu'un intérêt historique. Nous passerons donc sur ses détails pour n'en citer que les points qui seraient peut-être encore susceptibles d'application. Toute altération de la vérité est considérée comme annulant une licence; celui qui en a reçu une en nom propre ne peut pas la céder à un tiers, quoiqu'il puisse l'exploiter par mandataire. Mais, si la licence est stipulée négociable, elle peut être transférée comme tout autre titre. De légers écarts en ce qui concerne la quantité ou la qualité

Capitulations.

des objets dont la licence permet le trafic ne feront pas révoquer celle-ci. Il en sera de même d'une légère différence dans la nature du navire employé, mais on révoquerait la licence si le navire n'était pas de la nationalité prescrite. On peut excuser aussi le fait de s'être détourné de l'itinéraire prévu ou d'avoir dépassé le temps permis, à l'arrivée, si ces circonstances dépendent de l'état de la mer ou d'un autre cas de force majeure, mais on ne permettra aucun dépassement de délai au départ.

§ 215

La plupart des grandes guerres ne se prolongent pas longtemps sans donner lieu à une ou plusieurs

Capitulations.

C'est le nom qu'on donne aux conventions relatives à la reddition d'une place forte ou d'une fraction de l'armée de terre ou de mer. Les conditions en sont fixées par la Convention et sont très variables, puisqu'elles vont depuis la simple promesse d'épargner la vie de ceux qui se rendent jusqu'aux 'honneurs de la guerre' pour les vaincus. Par cette dernière expression on entend que les vaincus partiront sans être molestés, drapeaux déployés, tambours battant et les armes à la main. Il est rare que les 'honneurs de la guerre' soient obtenus, et, d'autre part, la simple promesse d'avoir la vie sauve ne confère aux vaincus aucun autre avantage que celui qu'ils tiennent déjà du droit de la guerre moderne. En général les conditions des capitulations restent entre ces deux extrêmes; elles sont plus ou moins généreuses suivant la nature et l'étendue des privations qu'ont eu à subir ceux qui se rendent et la nécessité où sont les vainqueurs de terminer leurs opérations plus ou moins promptement. Parfois aussi, l'admiration inspirée par une défense héroïque fera accorder des conditions plus généreuses que la situation militaire des vaincus ne le leur permettrait. On le vit bien à Appomattox, lorsque les survivants de l'armée

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de Lee se rendirent à l'armée de l'Union, le 8 avril 1865, six jours après la prise de Richmond et l'écroulement de toutes les espérances de la Confédération du Sud. Le général Grant aurait certainement pu imposer aux vaincus des conditions beaucoup plus dures que le simple renvoi à leurs foyers d'ennemis qui avaient, d'après ses propres termes, combattu si longtemps et si vaillamment'.1 Chaque commandant en chef d'une armée, d'une flotte ou d'une place fortifiée, a qualité pour souscrire une capitulation concernant les forces qui dépendent de lui. Mais si ses stipulations s'étendent à une autre partie du champ des hostilités, il faut qu'elles soient ratifiées par l'autorité suprême de l'armée pour devenir exécutoires. De plus, la ratification de l'autorité suprême du pays est elle-même nécessaire lorsqu'un chef militaire, quel que soit son grade, s'est prêté à des conditions qui dépassent ses droits, ou a souscrit des stipulations d'ordre politique. Les stipulations dépassant les pouvoirs de ceux qui les souscrivent portent le nom de Sponsiones et restent sans effet si les gouvernements, de part et d'autre, ne les acceptent pas. A défaut de cette acceptation, la convention étant nulle, tous les actes faits en vertu de leur texte sont révocables, aussi loin qu'on peut remonter. Un exemple typique de Sponsio se trouve dans la capitulation souscrite, en avril 1865, entre le général Sherman et le général Johnston qui commandait la dernière armée des Confédérés à l'est du Mississipi, à condition que les soldats confédérés rompraient de suite leurs rangs et déposeraient leurs armes dans les arsenaux de leurs États respectifs. Cette capitulation stipulait que les gouvernements des États qui se soumettraient aux autorités fédérales seraient reconnus et que la Confédération leur garantirait les droits et franchises politiques des citoyens de l'Union. Ces conditions, qui excédaient la compétence de l'autorité militaire, dépassaient manifestement les pouvoirs du général, quoiqu'il eût quelques bonnes

1 U. S. Grant, Personal Memoirs, vol. ii, p. 489.

Trèves et armistices.

raisons de croire à leur acceptation.1 Le Gouvernement de Washington ne fut pourtant pas de mauvaise foi en refusant de les ratifier.

Il est incontestable que c'est un droit, et l'on pourrait presque dire un devoir, pour le chef des vaincus, de détruire autant qu'il le peut ses approvisionnements, ses armes et ses engins de guerre avant la reddition. Cette destruction peut se poursuivre pendant les négociations, mais doit prendre fin dès que la convention est conclue. On a discuté ce point à propos de la capitulation de Port-Arthur, pendant la guerre russo-japonaise. Le général Stoessel détruisit

ses vaisseaux de guerre, ses drapeaux, et tout ce qu'il put des fortifications, avant de rendre la place. Mais comme aucune de ces destructions n'avait eu lieu après la signature apposée le 2 janvier 1905, à 9 h. 45 du matin, sur la capitulation, il n'y avait pas violation de l'honneur militaire. Les auteurs japonais s'abstiennent de toute accusation de déloyauté: ils considèrent que la reddition s'est faite conformément au droit de la guerre.2 Tout ce qu'on trouve dans le Règlement de La Haye au sujet des capitulations, c'est qu'elles doivent tenir compte des règles de l'honneur militaire' et que une fois fixées, elles doivent être scrupuleusement observées par les deux parties'.3

6

§ 216

Il faut maintenant donner un bref aperçu des règles concernant les

Trèves et armistices.

On appelle ainsi des suspensions temporaires d'hostilités sur
tout ou partie de l'étendue du champ de la guerre. Une
convention tendant à interrompre les opérations de la guerre
dans un périmètre donné, pendant un court espace de temps,

1 W. T. Sherman, Memoirs, vol. ii, ch. xxiii.
2 Takahashi, International Law applied to the
p. 210; Ariga, La Guerre russo-japonaise, p. 324.

Russo-Japanese War, 3 V. l'art. 35.

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