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Confédéra

tions.

§ 40

Les États partiellement souverains de la seconde classe appellent maintenant notre attention. Nous les avons déjà nommés Confédérations, afin de les distinguer des groupes plus étroitement unis auxquels nous avons donné le nom d'Unions fédérales. Les termes ne sont pas très heureux, mais ce sont les meilleurs. Les États composés sont généralement divisés en ces deux espèces. La première, appelée en allemand Bundesstaat, comprend les unions dans lesquelles l'autorité centrale seule peut traiter avec les Puissances étrangères et décider les affaires extérieures, les différents membres gardant seulement la direction de leurs affaires intérieures. Dans la seconde, appelée Staatenbund, sont compris tous les groupes où les États qui ont convenu de s'unir se sont réservé le pouvoir de traiter directement de certaines matières, toutes les autres affaires extérieures étant réservées par le pacte fédéral à l'autorité centrale.1 Les meilleurs exemples, actuellement existants, de la première espèce sont les États-Unis d'Amérique et la Suisse. Il n'y a présentement aucun bon exemple de la seconde; la Confédération germanique, qui durà de 1815 à 1866, en est le grand type historique. Chaque membre avait le droit d'entrer en relations avec les États étrangers, à la condition de ne rien faire contre la sécurité d'un autre membre, ou de la Confédération même. L'autorité centrale était assumée par une Diète qui siégeait à Francfort. Composée des ministres des divers États, elle avait le pouvoir de conclure des traités, d'envoyer et de recevoir des ambassadeurs, de déclarer la guerre aux Puissances étrangères dans le cas où le territoire de la Confédération serait menacé par elles. D'autre part, les États séparés s'envoyaient des représentants entre eux

1 Heffter, Das europäische Völkerrecht, §§ 20, 21.

ainsi que près des États étrangers.1 Tous les pouvoirs de la souveraineté sur les territoires compris dans la Confédération étaient ainsi partagés entre la Diète et le Gouvernement particulier de ce territoire.

Au point de vue du droit international, le Bundesstaat ne diffère pas de l'État souverain ordinaire. Il ne forme qu'un État dans ses rapports avec les Puissances étrangères. Il peut renfermer à l'intérieur plusieurs États; mais, comme ils n'ont aucun droit d'envoyer ou de recevoir des missions diplomatiques, ni de faire la paix ou la guerre, les Puissances étrangères1 n'ont pas plus affaire à eux qu'aux divisions administratives d'un État ordinaire. Le cas du Staatenbund est différent. C'est un groupe d'États distincts, dont chacun retient quelques-uns des droits de la souveraineté extérieure, tout en étant privé des autres. Par conséquent, les États qui le composent doivent être placés par le droit international parmi les communautés partiellement souveraines que nous considérons comme formant la seconde classe de ses sujets. Ils sont plus que les divisions administratives d'un grand tout. Ils sont moins que les États souverains. Mais ils ont une personnalité internationale réelle, quoique limitée ; et ce qui est vrai, à cet égard, d'eux-mêmes l'est aussi du gouvernement central.

Il est parfois extrêmement malaisé de ramener un État donné à l'un ou à l'autre des types ci-dessus décrits. La Confédération suisse, par exemple, était à l'origine une union d'un genre moins étroit. Depuis la dernière revision de sa constitution, en 1874, on peut la considérer comme une union fédérale ou Bundesstaat. Mais, dans certaines périodes de son histoire, on a de la peine à la rapporter à l'un ou à l'autre genre avec exactitude. Actuellement, l'Empire allemand, qui fut constitué en 1871 à la suite de sa guerre victorieuse contre la France, mérite, presque à tous égards, le même nom. L'autorité 1 Wheaton, International Law, §§ 47–51.

Communautés belligérantes civilisées qui ne sont

centrale fait la guerre et la paix, envoie et reçoit les ambassadeurs, négocie les traités politiques et commerciaux. Mais les gouvernements des États qui forment l'Empire ont le droit d'accréditer des représentants diplomatiques auprès des Puissances étrangères et d'en recevoir d'elles pour traiter les questions non réservées au gouvernement impérial. Les diplomates de cet ordre ne sont vraisemblablement pas accablés de besogne; car il est difficile de découvrir dans la Constitution de l'Empire une affaire importante laissée à leur négociation. Mais, puisque le droit à un commerce diplomatique distinct avec les Puissances étrangères appartient aux États membres, nous ne pouvons pas dire que l'Empire est un vrai Bundesstaat, quelque insignifiant que l'écart en puisse être. En même temps, il est également impossible de l'appeler Staatenbund, en considérant le fait que l'autorité centrale traite seule, en fait, les affaires extérieures de l'union. L'histoire montre que les États composés du second type d'union sont politiquement dans une condition d'équilibre instable. Aucun des vrais exemples de ce type n'a vécu jusqu'à nos jours. Les membres, ou se sont séparés pour former de nouvelles combinaisons, comme ceux du Bund germanique, ou bien ont fortifié le pacte fédéral jusqu'au point où leur union est devenue un Bundesstaat, comme ceux de la Confédération suisse. La tendance actuelle de l'Allemagne semble prendre cette seconde direction.

§ 41

Nous devons examiner maintenant la condition des communautés belligérantes civilisées qui ne sont pas des Etats en droit international. Nous les avons comptées parmi pas des États. ses sujets, il nous reste à justifier cette classification 1. Ces communautés n'ont pas été reconnues comme États souverains; mais leurs gouvernements possèdent les attributs essentiels de la souveraineté, et désirent être admis dans la 1 V. § 34.

famille des nations. Pourquoi, dès lors, sont-elles exclues. de la condition de membres parfaits? Parce que le fait de leur souveraineté peut être un phénomène sans durée. Elles luttent par les armes pour se séparer de l'État dont elles font partie et se créer une existence nationale propre et distincte; pendant que de grands efforts sont encore faits pour leur sujétion, le gouvernement qu'elles ont établi peut à tout moment être renversé : elles peuvent retomber dans leur première condition de parties composantes d'un grand tout politique. C'est pourquoi elles ne sont pas reconnues comme États indépendants tant que la lutte continue avec quelque apparence de vigueur de la part de la mère patrie. Mais cependant elles lèvent des armées, équipent des navires quand la lutte est sur mer, poursuivent la guerre d'une façon régulière et conforme à la civilisation; les États qui se trouvent en contact avec elles au cours de leurs opérations doivent décider s'il convient de les regarder comme légales ou illégales. Dans une telle hypothèse, la décision ne saurait faire doute. La guerre existe de fait, et les États intéressés ne peuvent pas ne pas le voir. C'est ce qu'ils font en accordant à la communauté politique naissante ce qu'on appelle la reconnaissance du titre de belligérant. L'effet d'un tel acte est de doter la communauté de tous les droits

et devoirs d'un État indépendant en tout ce qui concerne la guerre, sans rien de plus. Ses soldats sont des belligérants légaux, non des brigands; ses navires de guerre des croiseurs légitimes, non des pirates; les subsides prélevés par la communauté sur le territoire envahi, des réquisitions, non des vols; les captures par elle faites sur mer en conformité du droit maritime sont de bonnes prises, et ses blocus ont droit au respect des neutres. Mais, d'autre part, son gouvernement ne peut négocier des traités, ni accréditer des agents diplomatiques. Les rapports qu'elle entretient avec les autres Puissances ne peuvent être ni réguliers ni officiels. Elle n'a aucun droit, aucune immunité, aucun titre, à part ceux qui se rattachent immédiatement

Cas douteux d'individus et de cor

à cette guerre. Aussi n'est-elle sujet du droit international que d'une manière limitée et imparfaite. Sa participation au droit des gens est, aussi loin qu'elle s'exerce, très réelle, quoiqu'elle n'embrasse qu'une portion de l'activité de l'État et ne s'étende pas aux relations normales d'un commerce pacifique. Si la communauté belligérante vient à repousser avec succès les tentatives de la mère patrie pour la réduire, tôt ou tard les États existants reconnaîtront son indépendance: elle se trouvera alors sur le même pied qu'eux, c'est-à-dire sujet du droit international en toutes choses. Nous verrons plus loin, dans ce chapitre, les conditions de la reconnaissance d'indépendance, et, traitant de la guerre, nous discuterons à quelles conditions la reconnaissance de la qualité de belligérant peut être donnée sans qu'il y ait véritablement offense à la mère patrie.1

§ 42

Après avoir passé en revue la liste des sujets certains du droit international, nous devons parler des cas douteux, soit porations. d'individus, soit de corporations. Il existe, à leur égard, de grandes divergences d'opinion. D'une part, on soutient qu'en vertu de la nature même des choses le droit international est un droit entre les États et les États seuls.2 Répondrons-nous qu'il permet aux gouvernements lésés de punir les pirates étrangers ou les neutres qui violent un blocus, ou qu'il donne la sécurité aux sujets d'un pays qui en visitent un autre pour motifs légitimes? On répliquera que ces pouvoirs et ces droits ne sont pas conférés directement par le droit international, mais pris et donnés conformément à lui. Les lois internes des États civilisés accordent divers droits aux étrangers qui viennent dans le territoire qu'elles gouvernent. Mais c'est parce que

3

1 V. §§ 46, 141.

2 Oppenheim, International Law, vol. i, pp. 18, 19; Hall, International Law, 50 éd., p. 17.

3 Westlake, Chapters on the Principles of International Law, pp. 1, 2.

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