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contre le détenteur de l'héritage à ce titre que doit être donnée l'action hypothécaire.

Enfin, lorsque l'héritage hypothéqué appartient à une femme mariée, l'action doit être donnée contre le mari et la femme.

425. Au reste, l'action hypothécaire ne peut être intentée par le créancier hypothécaire qu'autant que la dette est exigible, et qu'en conséquence le terme ou la condi

tion est échue.

En effet, le tiers détenteur n'est tenu que d'acquitter la dette exigible ou de délaisser, aux termes de l'article 2168, et faute par lui de remplir l'une de ces deux obligations, chaque créancier n'a le droit de faire vendre sur lui l'immeuble hypothéqué que trente jours après commandement fait au débiteur originaire, et sommation faite au tiers détenteur de payer la dette exigible ou de délaisser l'héritage, aux termes de l'art. 2169. Il faut donc que la dette soit exigible, ou, ce qui revient au même, que le terme et la condition soient échus. Cette sommation n'est pas nécessaire si la vente n'est faite que sous condition. S'il y a plusieurs acquéreurs solidaires d'un immeuble, une sommation suffit. Il suffit aussi d'une sommation pour le cohéritier dans le lot duquel est tombé l'immeuble. Si le mari a vendu un immeuble de la communauté, il suffit d'une sommation au mari seul.

426. La conclusion de l'action bypothécaire ne devrait point être alternative, puisque son véritable but est le délaissement de l'immeuble hypothéqué; le droit qu'a le tiers détenteur d'éviter ce délaissement n'est en effet que facultatif; il est in facultate solutionis. Aussi Loyseau, le praticien Faber et autres tiennent-ils que jamais le libelle ne doit être alternatif, à moins que l'obligation ne soit alternative: Quod si alterum sit in obligatione, alterum in facultate.

Cependant, ajoute Loyseau, « d'autant que l'expression

« de cette alternation ne pouvait nuire, ou l'a non-seu«<lement tolérée, mais aussi accoutumée.......... Ensuite « on a, par succession de temps, renversé les deux parties « de cette alternative, et on a conclu à ce que le déten<<teur fût condamné hypothécairement à payer la dette, «< ou à tout le moins à délaisser l'héritage par hypothèque, « mettant, comme l'on dit, la charrue devant les bœufs... préposant ce qui est en la simple faculté à ce qui est « nûment en l'obligation. »

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Celte forme de conclusion adoptée par la pratique française a été maintenue par l'article 2168 du Code, ainsi conçu « Le tiers détenteur est tenu, dans le même «< cas, ou de payer tous les intérêts et capitaux exigibles, « à quelque somme qu'ils puissent monter, ou de délais<< ser l'immeuble hypothéqué sans aucune réserve, » « Et « faute par le tiers détenteur, ajoute l'article 2169, de « satisfaire pleinement à l'une de ces obligations, chaque a créancier hypothécaire a droit de faire vendre sur lui << l'immeuble hypothéqué, trente jours après commande« ment fait au débiteur originaire, et sommation faite «<au tiers détenteur de payer la dette exigible, ou de « délaisser l'héritage. »

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Quoi qu'il en soit, le but immédiat de l'action hypothecaire est d'obliger le tiers détenteur à délaisser l'héritage hypothéqué; mais il peut, avant le délaissement comme après le délaissement, et jusqu'à l'adjudication, payer dette et les frais, et se conserver ainsi l'héritage hypothéqué. Mais comme l'acquittement de l'hypothèque ne se peut diviser, le délaissement pourra toujours être demandé et exigé, tant qu'il restera une parcelle de la dette et des intérêts et frais à payer.

427. Ce délaissement peut être fait par les tiers détenteurs qui ne sont point personnellement obligés à la dette, et qui en outre out la capacité d'aliéner (2172).

Ceux qui sont personnellement obligés à la dette ne

peuvent point être admis à délaisser l'héritage hypothequé, parce qu'il n'a point été question par la constitution de l'hypothèque, de satisfaire le créancier, mais de mettre sa créance à l'abri de tout danger. L'obligation du débiteur conserve donc toute sa force indépendamment de l'hypothèque qu'il a consentie, hypothèque destinée à consolider et à assurer la créance, et non à l'éteindre. Ce sont les termes précis de la loi romaine in datione pignoris non hoc agitur ut eo contentus sit creditor, sed potiùs ut in tuto sit creditum, §. ult. instit. quibus modis re contrah. obligat. et l. 4 §. si ex conventione ff. de re judicatâ.

Lorsque le tiers détenteur s'est obligé euvers le débiteur, mais hors la présence du créancier, à payer la dette, il n'est pas moins débiteur personnel que s'il se fût engagé envers le créancier lui-même, et ne peut délaisser ; à fortiori s'il a directement contracté avec le créancier ins

crit.

Il faut en outre que le tiers détenteur ait la capacité d'aliéner, pour pouvoir délaisser par hypothèque, par la raison que l'effet immédiat du délaissement est de livrer l'immeuble à l'expropriation forcée; d'où il résulte que le mineur et le mineur émancipé ne pourront délaisser par hypothèque qu'en vertu d'une délibération du conseil de famille, homologuée par le tribunal civil, conformément aux articles 457, 458, 484. Les mêmes formalités devront être observées pour l'interdit (509). Le faible d'esprit et le prodigue auxquels il aura été donné un conseil judiciaire, ne pourront délaisser l'immeuble acquis qu'avec l'assistance de leur conseil (499); la femme mariée qu'avec l'autorisation de son mari (217). Les envoyés en possession provisoire des biens d'un absent, n'ayant pas la capacité d'aliéner, ne pourront point délaisser par hypothèque (128). Le mari pourra délaisser un conquê t de la communauté (1421, 2208).

Le tiers détenteur peut être admis à délaisser, même

après qu'il a reconnu l'obligation ou subi condamnation en cette qualité seulement (2173), c'est-à-dire comme tiers détenteur seulement.

428. Quant à la forme du délaissement, il doit se faire au greffe du tribunal de la situation des biens, et il en est donné acte par ce tribunal (art. 2174).

429. Quand il est question de dettes ordinaires, le détenteur peut, pour éviter ce délaissement, offrir de payer les capitaux et intérêts exigibles; mais quid juris quand l'héritage est hypothéqué à une rente ?

Il n'est pas douteux que des immeubles peuvent être hypothéqués pour sûreté d'une rente purement foncière comme pour une rente constituée. Le tiers détenteur, pour éviter, dans l'un ou l'autre cas, le délaissement de l'héritage hypothéqué, doit non-seulement offrir de payer tous les arrérages qui sont dus, et les frais qui peuvent être dus au créancier pour ladite rente; mais il doit encore offrir au créancier de passer un titre nouvel par-devant notaires, par lequel il s'oblige de continuer la rente tant qu'il sera détenteur de l'héritage hypothéqué. Le tiers détenteur d'un héritage hypothéqué à une rente, dit Pothier, ne devant, pour éviter le délais, s'obliger à la rente que tant qu'il est détenteur, si par l'erreur du notaire (comme il arrive assez souvent), il était dit purement et simplement qu'il s'oblige à la rente, il serait néanmoins présumé s'y être obligé seulement pour le temps qu'il serait détenteur. Il y a plus, ajoute Pothier, quand même le titre nouvel porterait formellement qu'il s'est obligé à la continuation de la rente, pour toujours et tant qu'elle aurait cours, on présumerait encore favorablement que ces termes se seraient glissés par erreur et par style de notaire, parce qu'on croit difficilement qu'un homme ait voulu s'obliger à plus qu'il ne doit, à moins qu'il ne parût quelque cause pour laquelle il aurait augmenté son obligation, et se serait ainsi obligé à payer la rente indéfini

ment et tant qu'elle aurait cours, putà, s'il avait reçu quelque chose pour cela, qu'on lui eût remis des arrérages. C'est le sentiment de Loyseau, liv. 4, chap. 4, 110s 15 et 16.

La clause si mieux n'aime payer ou passer titre nouvel doit être toujours insérée dans les sentences qui condamnent le détenteur à délaisser, ou au moins être sousentendue.

429 bis. C'est ici le lieu de développer les différentes espèces de délaissemens, et d'expliquer la distinction des charges et rentes à l'égard desquelles ont lieu le déguerpissement et le délaissement par hypothèque, afin de faire ressortir davantage la nature du délaissement par hypothèque, les conditions à remplir pour l'éviter, et les conséquences qui en dérivent.

Loyseau, dans l'énergique simplicité de son langage, dit qu'on a trouvé remède à presque toutes sortes d'actions et de poursuites par quelque manière de délaissement, et il en distingue de cinq espèces : la cession de biens, la renonciation à l'hérédité ou communauté, le désistement s'il s'agit d'un héritage contentieux, le délaissement par hypothèque et le déguerpissement; chacune desquelles a son caractère distinctif.

La cession se fait de tous les biens sans réserve et n'abolit pas l'obligation, mais ne fait que modérer et diminuer l'exaction.

La renonciation se fait des biens qui n'ont encore été acceptés ni appréhendés.

Le désistement se fait de la chose qui appartient à autrui.

Le délaissement par hypothèque n'est qu'un abandon de la possession de sa propre chose dont on demeure maître jusqu'à l'adjudication, et après l'adjudication on retire le surplus du prix.

Par le déguerpissement on quitte et on abandonne en

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